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Jonas – épisode 3

 

https://soundcloud.com/eel-toulouse/jonas-episode-3

Résumé des épisodes précédents : Au VIIIe siècle avant J-C, alors que la redoutable Assyrie terrifie toute la région, le Seigneur envoie son prophète Jonas annoncer la destruction de Ninive, la capitale assyrienne. Contre toute attente, Jonas refuse d’obéir à Dieu et prend un bateau pour Tarsis, à l’exact opposé de Ninive. Mais le Seigneur déclenche une tempête qui ne pourra être apaisée qu’en jetant le prophète à la mer. Dieu envoie alors un grand poisson dans le ventre duquel Jonas passe 3 jours et 3 nuits. Un temps qu’il met à profit un retour à Dieu, dans la prière. Alors, Dieu donne l’ordre au poisson de recracher Jonas sur la terre ferme…

Lecture biblique : Jonas 3

1 Une deuxième fois, le SEIGNEUR dit à Jonas : 2 « Debout ! Va à Ninive, la grande ville. Annonce-lui le message que je te donne. » 3 Alors Jonas se lève. Il part, mais cette fois, il va à Ninive, comme le SEIGNEUR l’a demandé.  Ninive est une ville extraordinairement grande. Il faut trois jours pour la traverser. 4 Jonas entre dans la ville, il marche pendant un jour entier. Il annonce aux gens : « Dans quarante jours, Ninive sera détruite ! » 5 Aussitôt, les gens de Ninive croient à la parole de Dieu. Ils décident de ne rien manger. Tous mettent des habits de deuil, les riches comme les pauvres. 6 Le roi de Ninive apprend la nouvelle. Il se lève de son siège. Il enlève son habit royal, il met un habit de deuil, et s’assoit sur de la cendre. 7 Puis le roi et ses ministres donnent cet ordre : « Criez dans la ville ces paroles : “Il est interdit aux habitants et aux bêtes, bœufs, moutons et chèvres, de manger et de boire ! 8 Tout le monde doit mettre des habits de deuil, les gens et les bêtes ! Chacun doit crier vers Dieu de toutes ses forces. Chacun doit abandonner sa mauvaise conduite et arrêter les actions violentes qu’il fait ! 9 Qui sait ? Dieu changera peut-être d’avis. Il abandonnera sa colère contre nous, et nous ne mourrons pas.” »
10 Dieu voit leurs efforts pour abandonner leur mauvaise conduite. Il change d’avis. Il regrette le mal qu’il voulait leur faire, et il ne le fait pas.

Les rebondissements continuent dans notre mini-série de l’été ! Et ce troisième épisode des aventures de Jonas est celui des repentances.
– Celle des habitants de Ninive, bien sûr. Radicale et spectaculaire.
– Mais aussi celle de Jonas. Ou du moins, c’est un test pour voir si sa repentance dans le ventre du poisson a vraiment porté ses fruits.
– Et enfin la plus étonnante des repentances, celle de Dieu !

Jonas : un repenti

Au début de ce troisième épisode, on reprend le déroulement de l’histoire, presque comme si rien ne s’était passé sur la mer. La tempête, le gros poisson… on n’en parle plus ! Le Seigneur redonne à Jonas le même ordre de mission, mot pour mot. Notez juste la mention supplémentaire que Dieu s’adresse « une deuxième fois » à Jonas… C’est bien une seconde chance que le Seigneur lui donne.

Voilà incontestablement un signe de la grâce et de la patience de Dieu. Sa grâce permet au prophète de repartir à zéro. C’est toujours la promesse que Dieu lie à la repentance. Le vrai pardon restaure la relation et exclut la rancune. Il n’y a pas de « je pardonne mais… » dans le pardon de Dieu… comme trop souvent dans les nôtres ! Et parce que Dieu est patient, il continue avec Jonas, malgré la mauvaise volonté manifestée jusqu’alors de sa part. Dieu ne se lasse pas de nous appeler à le suivre et le servir, malgré nos défaillances et nos infidélités… Il ne se lasse pas de pardonner, preuve de son amour pour nous.

Bref, pour la seconde fois, Dieu appelle Jonas à se lever et à aller à Ninive. Et cette fois le prophète obéit… Ceci dit, avait-il vraiment le choix ? A moins de vouloir faire un nouveau séjour dans le ventre d’un poisson ou Dieu sait où encore !

Jonas finit donc par aller à Ninive et y délivrer le message de la part de Dieu. On n’a pas vraiment l’impression qu’il y mette tout son coeur… Il fait le minimum syndical : « Dans 40 jours Ninive sera détruite… » C’est tout ! Mais après tout, ça semble bien être le message que Dieu lui a demandé de proclamer. Mais il ne fait rien de plus…

Ninive : une repentance soudaine

Le moins qu’on puisse dire, c’est que l’effet de la prédication de Jonas est radical ! Rapidement, un élan de repentance monte jusqu’au roi de Ninive qui proclame un édit invitant tout le peuple à la repentance : que tout le monde, y compris les animaux, portent le deuil, que tous crient à Dieu et changent de comportement !

Pourtant la parole proclamée par Jonas ne semblait pas laisser d’espoir : Ninive sera détruite. Point. Pas de condition, pas d’appel à la repentance… Rien. Et on peut compter sur Jonas pour ne pas l’avoir suggéré ! Ce n’est certainement pas sa persuasion ou son éloquence qui a poussé les habitants de Ninive à la repentance… Mais ne sous-estimons pas la puissance de la parole de Dieu. Au temps de Jonas comme aujourd’hui. Car la parole de Dieu a touché les coeurs et les habitants de Ninive se disent : « Qui sait ? Dieu changera peut-être d’avis… »

Il y a quelque chose de presque excessif dans la repentance de Ninive, entraînant jusqu’aux animaux dans le mouvement. D’ailleurs, leur attitude ne correspond pas à celle des païens, qui auraient apporté des offrandes, des sacrifices, pour calmer la colère des dieux (comme l’ont fait les marins au milieu de la tempête, dans le premier épisode). Non, ils font ce que le Seigneur demande sans cesse à son peuple : non pas des sacrifices mais la repentance.

Et c’est là qu’on comprend le ton polémique de cet épisode… Ce que Ninive a compris ici, les Israélites sont incapables de le comprendre. N’oublions pas que le livre est écrit non pas pour des païens mais pour le peuple d’Israël. Au temps de l’Exil, c’est une repentance comme celle des habitants de Ninive que Dieu aurait attendue de la part son peuple. C’est pour cela qu’il a envoyé des prophètes… mais le peuple ne les a pas écouté !

Le message que Dieu adresse à son peuple est clair : « Ninive s’est repentie et n’a pas été détruite. Si vous vous étiez repentis, vous n’auriez pas été exilés… » D’ailleurs, il n’y a pas que dans le livre de Jonas où les non-croyants donnent l’exemple à la place des croyants… C’est, malheureusement, encore bien le cas aujourd’hui ! En cela le livre de Jonas garde une criante actualité et nous interpelle : quelle est l’authenticité de nos conversions ? Nos repentances changent-elles vraiment nos comportements ?

Le Seigneur : une repentance surprise

A la repentance de Ninive, Dieu répond aussi par une « repentance ». Il change d’avis, il regrette le mal qu’il voulait faire aux habitants de Ninive. Finalement, contrairement à ce que Jonas a annoncé de la part de Dieu, au bout des 40 jours, Ninive ne sera pas détruite ! C’est la repentance surprise !

Voilà qui souligne encore plus le scandale du refus de repentance des croyants. Dieu lui-même est capable de repentance. Ça n’a pas exactement le même sens que pour les hommes, bien-sûr. C’est une façon humaine de parler. Dieu change d’avis, non pas qu’il se soit trompé mais parce qu’il change d’attitude envers ceux qui se repentent.

La « repentance » de Dieu nous apprend que le but d’une prophétie de jugement, c’est d’abord de conduire à la repentance ! Le prophète Jérémie le dit clairement :

« Tantôt je parle, à propos d’une nation ou d’un royaume, de déraciner, de démolir et de faire disparaître ; mais si cette nation contre laquelle j’ai parlé revient du mal qu’elle a fait, je renonce au mal que je pensais lui faire.
Et tantôt je parle, à propos d’une nation ou d’un royaume, de bâtir et de planter ;
mais si cette nation fait ce qui me déplaît, sans m’écouter, je renonce au bien que j’avais parlé de lui faire. » (Jérémie 18.7-10)

En réalité, ce que Dieu cherche toujours, c’est de restaurer la relation perdue avec les hommes. C’est pour cela qu’il a créé les humains à son image… Et la restauration de cette relation passe par la repentance, par un changement radical de pensée et de manière d’agir.

L’histoire de Jonas soulignait jusqu’ici la souveraineté de Dieu. Dieu fait ce qu’il veut. Mais cette souveraineté ne signifie pas distance ou insensibilité. Le Dieu souverain n’est pas inflexible. Parce que ce n’est pas un Dieu distant et détaché mais un Dieu qui s’investit dans la relation. Il ne met pas à exécution ses menaces si la relation est rétablie. Il n’accomplit pas ses promesses si la relation est brisée. C’est là que se trouve l’enjeu de la repentance et du pardon : dans la relation restaurée.

Conclusion

La leçon principale de ce troisième épisode de l’histoire de Jonas concerne la repentance. Se repentir, ce n’est pas seulement regretter… C’est accepter de changer, comme les habitants de Ninive implorant le pardon à Dieu, comme Dieu lui-même qui ne met pas ses menaces à exécution. Mais pas comme Jonas, le prophète rebelle et inflexible !

Changer d’avis, changer de projet, changer de comportement, changer de pensée… voilà ce qui est nécessaire si on veut restaurer une relation brisée. Et c’est vrai autant dans notre relation à Dieu que dans nos relations les uns avec les autres.

Sommes-nous prêts à changer ? Et à accepter que les autres peuvent changer ? Le pardon et la réconciliation sont à ce prix !

Jonas – épisode 2

https://soundcloud.com/eel-toulouse/jonas-episode-2

Résumé du premier épisode : Au VIIIe siècle avant J-C, alors que la redoutable Assyrie terrifie toute la région, la parole du Seigneur est adressée à Jonas, prophète en Israël. Dieu lui donne la mission d’aller annoncer la destruction de la ville à Ninive, la capitale assyrienne. Mais Jonas, prophète rebelle, refuse d’obéir à Dieu et prend un bateau pour Tarsis, aux antipodes de Ninive. Mais on n’échappe pas si facilement au Dieu souverain qui déclenche une tempête terrible, forçant Jonas à raconter son histoire aux marins. Le prophète propose alors qu’on le jette à la mer pour calmer la tempête… Et ça fonctionne ! C’est donc dans cette position très inconfortable, pour ne pas dire désespérée, que nous allons retrouver Jonas pour le deuxième épisode.

Jonas 2

1 Le SEIGNEUR envoie un grand poisson pour avaler Jonas. Jonas reste dans le ventre du poisson trois jours et trois nuits. 2 Dans le ventre du poisson, il prie le SEIGNEUR son Dieu. 3 Il dit :

« Je suis très malheureux.
Alors je crie vers toi, SEIGNEUR, et tu me réponds.
De la profondeur de la mort, j’appelle au secours et tu entends ma voix.
4 Tu m’as jeté dans un trou profond au cœur de la mer, et l’eau m’entoure.
Toutes tes vagues et toute ton eau tombent sur moi.
5 Et moi, je dis :
“Tu m’as chassé loin de tes yeux.
Pourtant, je veux revoir ton temple saint.”
6 L’eau m’arrive jusqu’au cou.
La mer m’entoure.
Des herbes s’enroulent autour de ma tête.
7 Je suis descendu jusqu’au pied des montagnes.
Je suis dans le monde des morts,
et les portes sont fermées à clé derrière moi, pour toujours.
Mais toi, SEIGNEUR mon Dieu, tu me fais remonter vivant de ce trou.
8 SEIGNEUR mon Dieu, je vais bientôt mourir.
Alors je me souviens de toi, SEIGNEUR, et ma prière monte près de toi dans ton temple saint.
9 Ceux qui adorent les faux dieux n’ont aucune chance d’être sauvés.
10 Mais moi, je chanterai ta louange, je t’offrirai des sacrifices.
Je tiendrai les promesses que je t’ai faites.
Oui, c’est toi qui sauves, SEIGNEUR ! »

11 Alors le SEIGNEUR donne cet ordre au poisson : « Rejette Jonas sur la terre ! » Et aussitôt le poisson obéit.
La partie narrative de cet épisode est très courte. Elle se limite à deux versets au début et un verset à la fin du chapitre : Dieu fait intervenir un gros poisson qui avale Jonas et le recrache trois jours plus tard sur la terre ferme. C’est tout. Le plus gros du chapitre est constitué d’une longue prière de Jonas, composée essentiellement de citations de Psaumes, un vrai cantique des profondeurs. Non seulement parce qu’il est prononcé dans le ventre du poisson mais aussi parce qu’il reflète les profondeurs de l’âme du prophète dans cette expérience.

L’intervention de Dieu

Arrêtons-nous d’abord sur l’intervention de Dieu. Indirecte mais efficace. Dieu n’agit pas directement, par exemple en transportant Jonas hors de la mer, mais il fait appel à un poisson.

Dieu continue d’apparaître comme le maître de la Création. Il déchaîne la mer et la calme quand il veut. Il donne des ordres aux animaux et ils obéissent. Remarquez que dans la création, les éléments naturels et les animaux obéissent à Dieu. Il n’y a guère que l’homme pour lui désobéir et lui donner du fil à retordre ! Mais le Seigneur l’a voulu ainsi. Il a créé les humains libres et responsables, non comme des bêtes à qui il donne des ordres mais comme des partenaires d’alliance, des êtres responsables…

Tout cela n’empêche pas le Seigneur de poursuivre son projet et son projet passe, en l’occurrence, par Jonas ! Mais pourquoi a-t-il choisi de le sauver avec un poisson ? Savez-vous comment l’on écrivait le nom de la ville de Ninive dans l’Antiquité ? On utilisait un idéogramme qui représentait un poisson à l’intérieur d’un vase ! Coïncidence ? Je ne crois pas…

En faisant avaler Jonas par un poisson, présent dans l’idéogramme de Ninive, le Seigneur ramène encore le prophète à sa mission première : aller jusqu’à la capitale assyrienne. C’est comme s’il lui disait : « Non seulement je te délivre de la tempête, mais en plus je te rappelle ta mission : je t’envoie dans la gueule du poisson, à Ninive ! »

Au cas où Jonas en douterait encore, il n’échappera pas à Dieu et à la mission qu’il veut lui confier. Lorsque nous faisons la sourde oreille à son appel, le Seigneur sait utiliser tous les moyens pour nous le faire comprendre.

Les rôles du poisson

Arrêtons-nous maintenant sur le nouveau personnage de cet épisode : le poisson. Il joue un rôle clé dans l’histoire de Jonas. Il est bien-sûr l’instrument par lequel Dieu accomplit son dessein à l’égard du prophète. Mais il joue également un rôle symbolique, au moins à deux niveaux.

Le poisson – abîme

L’histoire nous dit que Jonas passe 3 Jours et 3 nuits dans le ventre du poisson. Il semble que dans l’Antiquité, c’est le temps qu’il fallait pour atteindre le séjour des morts. En tout cas, après 3 jours dans le ventre d’un poisson, normalement Jonas devrait être mort ! Et c’est bien ce qu’il exprime dans son cantique des profondeurs (v.7) :

Je suis descendu jusqu’au pied des montagnes.
Je suis dans le monde des morts,
et les portes sont fermées à clé derrière moi, pour toujours.

Du coup, si le fait d’être dans le ventre du poisson est assimilé à une mort pour Jonas, le fait d’être recraché par le poisson apparaît comme un retour à la vie, une résurrection (v.7) :

Mais toi, SEIGNEUR mon Dieu,
tu me fais remonter vivant de ce trou.

Le moment où Jonas est recraché sur la terre ferme est une nouvelle naissance : Dieu offre une nouvelle chance à Jonas, un nouveau commencement possible.

C’est bien-sûr dans cet épisode qu’il faut voir prioritairement le « signe de Jonas » dont parle Jésus à son propre sujet : « Oui, Jonas a passé trois jours et trois nuits dans le ventre du grand poisson. De la même façon, le Fils de l’homme passera trois jours et trois nuits dans la terre. » (Matthieu 12.40)

Mais c’est aussi une merveilleuse illustration de la grâce de Dieu, toujours prête à nous donner une nouvelle chance, à nous permettre un nouveau départ. Quel que soit l’abîme dans lequel nous avons pu sombrer, Dieu veut nous en faire sortir et nous faire renaître à une vie nouvelle.

Le poisson – temple

Si le poisson de Jonas est un abîme, plus surprenant, il joue aussi le rôle d’un temple. Il devient un lieu de prière où Jonas s’adresse à Dieu, comme dans le temple. D’ailleurs sa prière contient des références explicites au sanctuaire.

Au moment de prier, c’est comme si le prophète n’était plus dans le ventre d’un poisson. D’ailleurs, il parle de son expérience au passé : « je suis descendu… tu m’as fait remonter… ». Il s’engage aussi à offrir des sacrifices et s’acquitter de ses voeux, actes cultuels liés au temple.

La grande leçon de cet épisode, dans la prière de Jonas, c’est qu’il n’y a pas de lieu où Dieu soit absent… Tout est temple du Seigneur. Ou tout peut le devenir par la foi. Même le ventre d’un poisson. Où que nous nous trouvions, quelle que soit la vie que nous menons, si nous prions, le lieu où nous nous trouvons devient un temple, le lieu de la présence de Dieu !

Et Dieu entend notre prière. Il a entendu celle de Jonas. Prière de repentance, appel au secours, la prière du prophète est surtout un psaume de reconnaissance. Les supplications sont contrebalancées par les réponses de Dieu déjà reçues et la reconnaissance. L’évocation du péril qu’il subit se termine toujours dans l’assurance de revoir le temple. Les verbes sont au passé (ça ne ressort pas clairement dans la version « Parole de Vie »), comme si la prière était prononcée après la délivrance.

Le but de cette prière (comme de toute prière d’ailleurs) n’est pas de faire infléchir la volonté de Dieu : en envoyant le poisson, Dieu avait déjà décidé de sauver Jonas de la mort. La prière, pour Jonas comme pour nous, est l’occasion d’un retour à Dieu (une repentance…), ou d’exprimer notre reconnaissance et notre dépendance du Seigneur.

Conclusion

Finalement, que retenir de ce deuxième épisode ?

D’abord une nouvelle leçon sur la souveraineté de Dieu. Si Jonas pouvait jusqu’alors se sentir traqué par la souveraineté de Dieu, incapable de fuir loin du Seigneur, il peut maintenant voir cette même souveraineté sous un autre regard. N’est-ce pas aussi le Dieu souverain qui l’a délivré de la tempête par le gros poisson ? Tout est une question de perspective, et dépend de notre vision et de notre relation à Dieu.

Ensuite une leçon importante pour nous tous, pour notre prière, particulièrement si nous passons par des temps d’obscurité et d’épreuve : il n’y a pas de lieu, aussi obscure soit-il, qui ne puisse devenir le temple de Dieu, le lieu de sa présence. Ne l’oublions jamais !

Jonas – épisode 1

 

https://soundcloud.com/eel-toulouse/jonas-episode-1

Pour ce dimanche et les trois à venir, je vous propose un petit feuilleton de l’été. Avec une histoire pleine de rebondissements, un héros surprenant, de l’action, de l’humour et si c’était un film, des effets spéciaux spectaculaires ! C’est l’histoire d’un prophète anti-héros du nom de Jonas.

L’histoire se déroule au VIIIe siècle avant J-C, dans le Royaume d’Israël, le Royaume du nord, sous le règne de Jéroboam II, un roi qui déplaisait aux yeux du Seigneur mais qui avait pourtant plusieurs victoires militaires à son actif, grâce notamment aux conseils d’un prophète patriote, Jonas, fils d’Amittaï, de Gath-Hépher.

Mais en ce temps-là une super puissance terrorise toute la région : l’Assyrie, dont la capitale est Ninive. Sa volonté d’expansion ne semble avoir aucune limite et sa puissance militaire aucune rivale…

Lecture biblique : Jonas 1

1 Un jour, le SEIGNEUR adresse cet ordre à Jonas, le fils d’Amittaï : 2 « Debout, va à Ninive, la grande ville. Tu menaceras ses habitants en disant : “Le SEIGNEUR en a assez de voir vos actions mauvaises.” »

3 Jonas se met en route, mais pour fuir à Tarsis, loin du SEIGNEUR. Il arrive à Jaffa. Là, il trouve un bateau qui part pour Tarsis. Il paie son voyage. Puis il monte dans le bateau, pour aller avec les marins à Tarsis, loin du SEIGNEUR.

4 Mais le SEIGNEUR lance sur la mer un vent violent, et la tempête est si forte que le bateau risque de se casser. 5 Les marins ont peur, chacun crie vers son dieu. Ils jettent à la mer tous les objets qui sont dans le bateau pour le rendre plus léger. Pendant ce temps, Jonas est descendu au fond du bateau, il s’est couché et dort profondément. 6 Le capitaine du bateau s’approche de lui et lui dit : « Quoi ? Tu dors ! Lève-toi, crie vers ton dieu ! Il pensera peut-être à nous, et nous ne mourrons pas. » 7 Puis, les marins se disent entre eux : « Pour connaître le responsable du malheur qui nous arrive, tirons au sort. » Ils tirent au sort, et le sort tombe sur Jonas. 8 Alors les marins lui disent : « Notre malheur vient de toi. Dis-nous : qu’est-ce que tu fais ici ? D’où viens-tu ? De quel pays et de quel peuple es-tu ? » 9 Jonas répond : « Je suis hébreu, et c’est le SEIGNEUR que j’adore, le Dieu qui est au ciel, celui qui a fait la mer et la terre. » 10 Puis il leur raconte son histoire. Les marins ont très peur. Ils disent à Jonas : « Qu’est-ce que tu as fait là ! » En effet, maintenant, ils savent que Jonas fuit loin du SEIGNEUR. Ils lui demandent : 11 « Qu’est-ce que nous allons faire de toi pour que la mer se calme autour de nous ? » En effet, les vagues montent de plus en plus. 12 Jonas répond aux marins : « Prenez-moi et jetez-moi à la mer. Ainsi la mer deviendra calme autour de vous. Oui, je le sais, cette violente tempête vous attaque à cause de moi. » 13 Les marins rament pour rejoindre la côte, mais ils n’y arrivent pas. Les vagues montent de plus en plus contre eux. 14 Ils prient le SEIGNEUR et disent : « Ah ! SEIGNEUR, ne nous fais pas mourir à cause de cet homme ! Ne nous rends pas non plus responsables de la mort d’un innocent. En effet, c’est toi, SEIGNEUR, qui as fait ce que tu as voulu. »

15 Puis, ils prennent Jonas et ils le jettent à la mer. Alors la colère de la mer se calme. 16 Ensuite, les hommes sont remplis d’un grand respect envers le SEIGNEUR. Ils lui offrent un sacrifice et ils lui font des promesses avec serment.

Prophète rebelle

Notre histoire commence comme n’importe quelle histoire de prophète dans la Bible : Dieu adresse sa parole à son prophète et lui donne un ordre de mission. Mais bien vite, tout bascule. Normalement le prophète se lève, obéissant, même s’il parlemente un peu parfois, et il accomplit la mission que lui confie le Seigneur. Jonas, lui, se lève, certes… mais pour s’enfuir ! Le Seigneur lui demande d’aller à l’est, Jonas cherche un bateau pour aller à l’ouest, le plus loin possible…

On ne donne aucune explication à la fuite de Jonas. Lui-même ne dit rien du tout, il n’essaye même pas de négocier avec le Seigneur, comme d’autres l’ont fait parfois. On en saura plus dans la suite du récit… mais il est déjà clair que Jonas ne veut pas aller à Ninive, capitale de l’Assyrie, cet empire païen dominant et redoutable.

Jonas connaît le Seigneur, c’est quand même bien un prophète. Il ne s’imagine pas une seconde pouvoir échapper à Dieu ! Il sait parfaitement que ce n’est pas en fuyant de l’autre côté de la grande Mer qu’il échappera au Dieu Créateur du ciel et de la terre !

Sa fuite est donc un acte de rébellion ouverte. Une façon de montrer au Seigneur qu’il ne veut pas lui obéir. C’est comme s’il lui disait : « allez, trouve quelqu’un d’autre ! Il y a bien d’autres prophètes… »

Sans aller jusqu’à la rébellion, n’avons-nous jamais dit au Seigneur : « trouve quelqu’un d’autre ! » ? Parce qu’on se sent incapable, parce qu’on n’en a pas envie, parce qu’on pense que d’autres le feront bien mieux que nous, parce qu’on a d’autres projets… « Trouve quelqu’un d’autre ! »

Mais si le Seigneur nous demande quelque chose, ce n’est pas parce qu’on est meilleur que les autres ou parfaitement équipé pour le faire. C’est parce qu’Il veut le faire en nous et par nous. C’est sa grâce qui appelle…

Prophète traqué

Mais le Seigneur ne lâche pas Jonas. On ne se rebelle pas contre le Dieu souverain si facilement que cela… Et le Seigneur sort l’artillerie lourde : il déclenche une terrible tempête. Les marins eux-mêmes paniquent et n’ont d’autre issue que d’invoquer leurs dieux pour qu’ils soient délivrés.

La rébellion de Jonas ne le met pas seulement en danger, lui, mais aussi ceux qu’il accompagne. Nos choix de vie, nos décisions ont souvent des répercussions sur ceux qui nous entourent… Mais Jonas, lui, dort. Il fuit jusque dans le sommeil… ce qui suscite la colère des marins ! « Toi aussi invoque ton dieu ! »

Cette tempête n’est pas normale, les marins le sentent. Elle a une cause surnaturelle. Quelqu’un attire le malheur sur le bateau. Alors ils tirent au sort… et le sort tombe sur Jonas ! Comme par hasard…

Traqué jusqu’au bout, Jonas n’échappera pas à la souveraineté de Dieu !

N’y a-t-il pas là encore une leçon ? Pour celui qui ne veut pas obéir au Seigneur, sa souveraineté est pesante, envahissante et ressemble à de l’acharnement. Mais pour celui qui veut obéir au Seigneur, sa souveraineté est bienfaisante et apaisante. Elle est l’assurance que c’est lui qui tient les rennes !

Prophète malgré lui

Mais revenons à notre tempête… Le sort est tombé sur Jonas et c’est le tournant de l’histoire. Le prophète ne peut plus fuir, il ne peut plus nier l’évidence. Et il propose une solution : puisque tout est de sa faute, qu’il soit jeté à la mer, en pleine tempête !

S’agit-il d’un élan suicidaire de Jonas, la mort étant la seule issue pour échapper à l’appel du Seigneur ? Ou est-ce là un vrai sursaut de conscience du prophète : il faut qu’il se sacrifie pour sauver l’équipage… et si le Seigneur veut vraiment l’envoyer à Ninive, il le délivrera !

Toujours est-il que cela fonctionne. Aussitôt jeté à la mer, la mer se calme. Et ici s’arrête la fuite de Jonas.

Et quand on y regarde de plus près, on peut percevoir toute l’ironie de l’histoire : c’est malgré lui que Jonas va être prophète.

A son insu, Jonas est l’instrument d’une « conversion » des marins païens. Regardez le changement chez eux : avant que Jonas révèle son identité, les marins implorent Jonas de prier son dieu, après ils implorent eux-mêmes le Seigneur ; avant, au coeur de la tempête, ils implorent leurs dieux, après, lorsque la tempête est apaisée, ils offrent des sacrifices au Seigneur…

Voilà une véritable « conversion » dont le prophète Jonas a été l’instrument… mais à son insu. Et sans trop vous spoiler la suite de l’histoire, ce n’est pas la dernière fois que cela arrivera pour Jonas…

Plus fort encore, l’expérience de Jonas a peut-être elle-même une portée prophétique plus grande. N’est-ce pas ici, dans la tempête, que commence le « signe de Jonas » dont parlera Jésus à propos de lui-même ? D’une certaine manière, Jonas « donnant sa vie » pour sauver tout l’équipage peut évoquer le sacrifice de Jésus, donnant sa vie pour sauver l’humanité.

Conclusion

La leçon de ce premier chapitre de l’histoire de Jonas est claire : Dieu est souverain et nul ne peut s’opposer à sa volonté. Pas même un prophète !

La question n’est donc pas de savoir si on peut ou non échapper à Dieu et sa volonté souveraine, mais comment sa volonté souveraine s’accomplira dans notre vie.
Est-ce que ce sera contre notre gré, à notre corps défendant ? Dans ce cas nous allons au devant de dangereuses tempêtes et nous nous compliquerons la vie…
Ou alors est-ce que ce sera dans l’obéissance et la confiance en Dieu ? Et là nous trouverons la paix.

Nous ne sommes pas tous des Jonas, appelés à nous lever pour proclamer le message de Dieu. Mais nous sommes tous les destinataires de l’appel de Dieu, sous différentes formes, pour différentes missions. Nous recevons tous son appel à le suivre, à le servir.

Quelle est donc notre réponse, aujourd’hui, à l’appel de Dieu ?

Allez !

 

https://soundcloud.com/eel-toulouse/allez

NB : Au cours du culte nous avons accueilli un couple de missionnaires en Argentine qui nous ont parlé de leur travail.

On a raison de rappeler qu’il n’y a pas besoin d’aller à des milliers de kilomètres pour être missionnaire. Aujourd’hui plus qu’hier sans doute, la mission commence à notre porte, et elle commence même parfois à l’intérieur de nos maisons !

Selon une enquête récente, en France, 29 % des personnes interrogées se disent athées convaincus et 34 % affirment n’appartenir à aucune religion. Et parmi ceux qui se reconnaissent dans une religion, combien sont pratiquants ? Une minorité ! Et cela dans toutes les religions. Un quart des catholiques se dit pratiquant mais seulement 5 % assistent à la messe chaque dimanche. Parmi les protestants, il n’y a que 24 % de pratiquants réguliers…

Bref, l’évangélisation et la mission sont plus que jamais d’actualité en France !

Mais alors, de façon un peu provocatrice, on pourrait poser la question : pourquoi accueillir un couple de missionnaires pour nous parler de leur travail en Argentine ? L’Argentine, c’est loin… Et il y a déjà bien assez de boulot et de besoins ici !

Pour répondre à cette question, je vous propose de lire les dernières paroles que Jésus a dites à ses disciples, dans l’Evangile selon Matthieu.

Matthieu 28.16-20
16 Les onze disciples partent pour la Galilée. Ils arrivent sur la montagne où Jésus leur a dit d’aller. 17 En voyant Jésus, ils l’adorent mais certains hésitent à croire. 18 Jésus s’approche et leur dit : « J’ai reçu tout pouvoir au ciel et sur la terre. 19 Allez, faites des gens de toutes les nations mes disciples. Baptisez-les au nom du Père, du Fils et de l’Esprit Saint. 20 Apprenez-leur à obéir à tous les commandements que je vous ai donnés. Et moi, je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde. »
Les dernières paroles de Jésus à ses disciples ont forcément une importance particulière. Ce sont les ultimes instructions qu’il leur donne, juste avant de les quitter. Et de fait, on y trouve par exemple les paroles d’institution du baptême chrétien, prononcées rituellement depuis 2000 ans par les chrétiens du monde entier !

Mais les paroles de Jésus ici sont avant tout un appel :
1° Il y a un envoi en mission : « allez ».
2° Cette mission est universelle : « faites des gens de toutes les nations mes disciples ».
3° L’appel est assorti d’une promesse : « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. »

Une mission : « Allez ! »

Rien qu’avec ce premier verbe, on a une réponse à ma question du début. Pourquoi accueillir un couple de missionnaires pour nous parler de leur travail en Argentine ? Parce que justement ils ont, un jour, répondu à cet « allez » du Christ. Ils ont perçu un appel de Dieu et y ont répondu.

Et cela, d’une façon ou d’une autre, nous interpelle. Parce que l’appel à « aller » n’est pas adressé seulement aux premiers disciples de Jésus. Il est adressée à l’Eglise, à tous les disciples de tous les temps. Il est donc pour nous aujourd’hui encore.

Nous ne sommes pas tous appelés à aller en Argentine. Nous ne sommes pas tous appelés à quitter notre job, notre maison, notre pays… Mais nous sommes tous appelés à vivre en disciples du Christ, et le disciple est appelé à son tour à faire des disciples.

C’est notre mission première, ici comme ailleurs, dans quelque pays qu’on se trouve : faire des disciples du Christ. Attention : pas des disciples de son Eglise ou de sa mission. Des disciples du Christ. Notre mission, en Argentine comme en France, n’est pas de convertir à une religion, de recruter pour une Eglise ou une mission, ou de susciter l’adhésion à une doctrine. Notre mission, c’est d’être témoin de Jésus-Christ, en paroles et en actes, et d’inviter à une rencontre par la foi avec lui.

Notez enfin que l’appel du Christ est aussi intéressant à entendre pour une Eglise. Il nous dit aussi : « Allez ! » Pas seulement « rassemblez-vous », pas seulement « accueillez » mais « allez ! » Où devons-nous aller en tant qu’Eglise ? Où le Seigneur nous appelle-t-il ?

Une mission universelle : « Faites des gens de toutes les nations mes disciples… »

Jésus ne se contente pas de dire « allez ! » à ses disciples, il poursuit. Et la suite de la phrase donne un autre élément de réponse à notre question. Pourquoi accueillir un couple de missionnaires pour nous parler de leur travail en Argentine ? Parce que la mission confiée par Jésus-Christ à son Eglise est universelle. Et la mission est universelle parce que l’Evangile est universel.

Je pense à une vision de l’Apocalypse qui, je trouve, entre en résonance directe avec ces paroles de Jésus. Au chapitre 7, Jean décrit la vision d’une foule innombrable, vêtue de blanc et chantant les louanges de Dieu. Et il dit que cette foule, « ce sont des gens de tous les pays, de toutes les tribus, de tous les peuples et de toutes les langues. » (Ap 7.9)

L’Evangile n’est pas lié à une culture mais trouve à s’incarner dans toutes les cultures. Aujourd’hui plus que jamais on a besoin de l’entendre parce que notre société est plus que jamais multiculturelle. Et les Eglises devraient être, de part leur vocation, à la pointe du multiculturel et du transculturel !

L’appel universel de Jésus devrait aussi nous encourager à développer une conscience globale, une ouverture sur le monde, une préoccupation universelle. L’Eglise de Jésus-Christ est universelle. Ce qui concerne les chrétiens à l’autre bout du monde me concerne parce que je fais partie du même corps. D’ailleurs, comment pourrait-on dire que l’Evangile est universel et ne s’intéresser qu’à sa propre Eglise et son propre pays ?

Une promesse : « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. »

Cette promesse de Jésus, qui termine ses dernières paroles à ses disciples, est essentielle à l’accomplissement de la mission qu’il leur confie. C’est la présence de Jésus avec nous, tous les jours, qui peut nous permettre de répondre à son appel. Pourquoi accueillir un couple de missionnaires pour nous parler de leur travail en Argentine ? Parce que leur témoignage nous aide à prendre conscience que c’est le même Seigneur qui est à l’oeuvre ici comme là-bas. Notre unité et notre force, elles sont en Christ.

Et ce rappel est essentiel. Parce que si le Christ n’est pas avec nous, nous n’accomplirons pas sa mission !

Car Jésus nous dit : « allez ! ». Mais il dit aussi « je suis avec vous tous les jours. » Il nous accompagne par son Esprit là où il nous envoie. Et heureusement, parce que c’est lui qui agit ! C’est lui qui change les cœurs, c’est lui qui convainc.

Par ailleurs, Jésus nous demande de faire des disciples… Mais il dit aussi « je suis avec vous tous les jours. » En réalité, on ne peut pas faire des disciples de Jésus-Christ sans qu’il soit là, avec nous. Sans la présence du Christ avec nous, on risque de faire des disciples de notre Eglise, de notre religion voire de nous-mêmes… mais pas des disciples de Jésus-Christ.

Conclusion

Finalement donc, on fait bien d’accueillir un couple de missionnaires pour nous parler de leur travail en Argentine !

C’est l’occasion pour chacun de nous interroger sur notre appel, de prendre mieux en compte la dimension universelle de l’Evangile et de se réapproprier la promesse du Seigneur d’être, tous les jours, avec ceux qu’il envoie.

Car c’est vrai : Jésus-Christ est avec nous tous les jours, jusqu’à la fin du monde. Et il nous envoie, au loin comme au près, annoncer cette bonne nouvelle !

Vivre le changement (6) Bousculer nos repères

 

https://soundcloud.com/eel-toulouse/vivre-le-changement-6

Pour moi, cette image illustre la croissance spirituelle à laquelle nous sommes appelés. Ce poisson saute dans un autre bocal. C’est juste un bocal un peu plus grand mais pour élargir son espace vital, il doit accepter de quitter son petit bocal, confortable et sécurisant. Et plus tard il devra à nouveau en sortir pour un bocal un peu plus grand. Le bocal symbolise notre zone de confort. Si nous voulons grandir, progresser, il faut parfois élargir notre zone de confort et accepter de « changer de bocal ».

Nous avons tous une zone de confort. Des repères, des habitudes, des pratiques dans lesquelles nous nous sentons bien, en sécurité, et qui nous permettent de vivre avec un minimum de stress. C’est vrai dans tous les aspects de notre vie : personnel, professionnel, familial et bien-sûr aussi spirituel. Et quant à l’aspect spirituel, c’est vrai pour les chrétiens comme pour les Eglises ! Les Eglises aussi ont leur zone de confort spirituel.

Mais quand notre zone de confort est complètement hermétique, qu’elle se transforme en bunker infranchissable, elle devient notre prison. Elle nous empêche d’évoluer, de progresser, de grandir spirituellement. Elle nous enferme dans un statu quo.

Quand donc notre zone de confort devient-elle un danger pour nous ? A quel moment nos habitudes et nos repères mettent-ils en péril notre croissance spirituelle ?

Je vous propose de lire un texte de l’épître de Paul aux Ephésiens pour nous aider dans notre réflexion :

Ephésiens 4.11-16
11 Voici les « dons » que le Christ a faits : les uns ont reçu le don d’être apôtres, ou bien d’être prophètes, ou bien d’annoncer la Bonne Nouvelle. D’autres ont reçu le don de conduire le peuple de Dieu, ou encore d’enseigner. 12 Par ces dons, le Christ a voulu former ceux qui appartiennent à Dieu. Ainsi, ils peuvent accomplir leur service de chrétiens pour construire le corps du Christ. 13 Alors tous ensemble, nous aurons peu à peu une même foi et une même connaissance du Fils de Dieu. Finalement, nous serons des chrétiens adultes et nous atteindrons la taille parfaite du Christ. 14 Nous ne serons plus des bébés. Nous ne ressemblerons plus à un petit bateau poussé dans tous les sens par les vagues de la mer. Nous ne serons plus emportés de tous les côtés par le vent des idées fausses. Les gens ne nous tromperont plus avec leurs mensonges habiles. 15 Mais en disant la vérité avec amour, nous grandirons en tout vers celui qui est la tête, le Christ. 16 C’est par lui que toutes les parties du corps tiennent ensemble et sont unies. Beaucoup d’articulations servent à unir le corps, et quand chaque partie du corps fait son travail, le corps grandit et se construit lui-même dans l’amour.

1. Nous avons besoin de repères pour une foi stable

On a besoin de repères. Certains rituels, certaines habitudes, sont positifs ! Lire votre Bible le matin, prier le soir avant de vous coucher ou aller au culte le dimanche, ce sont de bonnes habitudes. Elles nous aident à avoir une certaine discipline dans notre vie spirituelle et c’est très bien !

On a besoin de repères stables dans notre vie chrétienne, pour avoir une foi et une piété stables, équilibrées. On s’en rend compte dans ce que dit l’apôtre Paul. L’objectif, c’est d’être des chrétiens adultes et non des enfants spirituels, ballottés à tout vent de doctrine, poussés dans un sens puis tiré dans un autre en fonction des prédicateurs en vogue sur youtube ou des Eglises à la mode.

Il y a une référence unique, le Christ, et un cadre approprié pour nous accompagner dans cette croissance, l’Eglise (le corps, avec tous ses membres et ses articulations). Il ne s’agit donc pas de toujours tout remettre en cause dans notre foi et notre vie chrétienne, de changer d’Eglise chaque année, de changer de convictions théologiques comme on change de chemise !

C’est important d’avoir réfléchi sa foi et forgé ses convictions. C’est important d’avoir une certaine discipline dans notre vie de piété. C’est important de s’attacher à une Eglise locale et d’y trouver sa place, un engagement qui nous corresponde. Et quand tous ces éléments se mettent en place, une certaine zone de confort s’installe dans notre vie chrétienne. Et c’est très bien.

C’est très bien… si on ne s’endort pas ! Si cette zone de confort ne se transforme pas en un petit nid douillet ou en bastion imprenable. Le danger d’une zone de confort, c’est quand elle devient hermétique, qu’on refuse d’envisager qu’elle puisse évoluer. Avoir une foi stable, c’est bien. C’est même essentiel. Mais il faut veiller à ce que cette stabilité ne soit pas une immobilité, une routine qui a perdu sa sève, son élan, son enthousiasme. Car alors on risque le dessèchement spirituel, celui d’une vie chrétienne « en pilote automatique ».

Et on l’a dit, tout cela est vrai aussi pour une Eglise ! D’autant qu’on perçoit souvent l’Eglise, avec raison d’ailleurs, comme un lieu de ressourcement. On y recherche donc un certain confort, et c’est légitime jusqu’à un certain point. Mais y a-t-il vraiment un ressourcement bienfaisant dans la routine ? Il y a des Eglises qui fonctionnent aussi « en pilote automatique » : ça roule, ça tourne, on a des activités, un bâtiment, un pasteur… mais on ne se remet pas en question, on garde telle ou telle réunion ou telle ou telle façon de faire parce que ça s’est toujours fait comme ça…

Et puis on craint le changement. On veut bien accueillir tout le monde… mais en espérant qu’ils ne soient pas trop différents de nous quand même. On veut bien rencontrer ses frères et sœurs… mais sans faire trop d’effort pour aller à la rencontre de celui ou celle qu’on ne connaît pas vraiment, on préfère rester dans le cercle de ses habitués. On veut bien innover dans la forme, dans les réunions proposées… mais pas trop quand même, pour respecter ce qui s’est toujours fait

2. Nous avons besoin de bousculer nos repères pour grandir

Revenons à ce que dit l’apôtre Paul : pour lui, la perspective, c’est la croissance. Il s’agit de ne pas rester des bébés mais de devenir adultes, de croître vers le Christ. Et cet impératif concerne à la fois l’Eglise dans son ensemble et chaque croyant qui en fait partie.

Or, on le sait, quand on grandit, on change ses repères. Notre vie, nos habitudes, nos convictions évoluent. Et la croissance n’est pas confortable. Le passage de l’enfance à l’adolescence, puis de l’adolescence à l’âge adulte, ne sont pas des périodes confortables. Les différentes étapes de la vie sont autant de périodes inconfortables, avec leur lot de remises en question, parfois déstabilisantes.

Nécessairement, si nous voulons grandir spirituellement, il nous faut accepter de sortir de notre zone de confort, d’être parfois déstabilisé dans nos repères. Regardez les béatitudes : c’est tout sauf confortable ! « Heureux les pauvres en esprit, heureux ceux qui pleurent, heureux ceux qui ont soif et faim de justice, heureux les persécutés pour la justice… »

Du coup, c’est parfois le Seigneur qui utilise la manière forte pour nous faire sortir de notre zone de confort. C’est ce qui est arrivé à Pierre, dans « notre » récit de sa rencontre avec Corneille (Actes 10-11).

Pierre a été bousculé dans son « confort », celui des traditions auxquelles il était attaché. On pourrait même se dire que ces traditions étaient légitimes puisqu’elles remontaient à la loi de Moïse ! Elles étaient rassurantes, elles le mettaient à l’écart des païens pour préserver la pureté. Or, la vision que Dieu lui a envoyée l’a déstabilisé : une grande toile descendue du ciel dans laquelle se trouve mélangés tous les animaux, purs et impurs selon la loi de Moïse, avec cet appel qui retentit : « Pierre, lève-toi ! Tue et mange ! ». Mais non, répondait Pierre, Seigneur, je ne peux pas. Jamais je n’ai mangé de viande impure. Jamais je n’en mangerai ! Et Dieu insiste : “Ce que Dieu a rendu pur, ne dis pas que c’est interdit !”

Ce n’était pas confortable pour Pierre. Et il a dû se faire violence pour répondre à l’appel de Dieu et aller chez Corneille, manger avec lui, un païen. Et c’est en sortant de sa zone de confort qu’il a vu l’action de Dieu, il a vu l’Esprit saint descendre sur Corneille et sa famille. Ce n’était pas confortable ensuite non plus pour Pierre parce qu’il a dû justifier son attitude devant les autres chrétiens, d’origine juive, qui l’accusaient : « Tu es entré chez des gens qui ne sont pas circoncis et tu as mangé avec eux ! » C’était tellement peu confortable que plus tard, Pierre fera marche arrière dans une certaine circonstance. C’est Paul qui en parle dans son épître aux Galates et il s’est fermement opposé à lui :
« En effet, avant l’arrivée de certaines personnes proches de Jacques, Céphas mangeait avec les frères qui ne sont pas d’origine juive. Mais quand les autres sont arrivés, il s’est éloigné, il n’est plus allé avec les non-Juifs, il avait peur des chrétiens qui défendaient les coutumes juives. » (Galates 2.12)

Mais on n’est pas obligé d’attendre que le Seigneur nous secoue pour bousculer nos repères. On peut aussi cultiver un esprit d’ouverture et de curiosité. Se laisser surprendre par l’autre, et par le Seigneur. Demander à Dieu de nous donner l’humilité, la lucidité et le courage d’avoir un regard en vérité sur nous-mêmes.

Conclusion

Il est légitime d’avoir, dans notre vie et dans notre Eglise, une zone de confort. Nous avons besoin de repères stables pour avoir une foi stable. Mais nous devons veiller à ne pas nous y laisser enfermer.

Parce que le confort, le bien-être, aussi agréables soient-ils, ne sont pas les objectifs à poursuivre en tant que croyant. Notre objectif, Paul le souligne, c’est la croissance ! Pour que nous devenions des chrétiens adultes, et pour que l’Eglise grandisse harmonieusement en tant que corps du Christ.

Et toute croissance implique nécessairement des changements, des évolutions, et c’est parfois déstabilisant, en tout cas pas toujours confortable… Mais c’est bien ce à quoi nous sommes appelés ! Alors sommes-nous prêt à « changer de bocal » pour élargir notre zone de confort ?