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Jonas – épisode 3

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https://soundcloud.com/eel-toulouse/jonas-episode-3

Résumé des épisodes précédents : Au VIIIe siècle avant J-C, alors que la redoutable Assyrie terrifie toute la région, le Seigneur envoie son prophète Jonas annoncer la destruction de Ninive, la capitale assyrienne. Contre toute attente, Jonas refuse d’obéir à Dieu et prend un bateau pour Tarsis, à l’exact opposé de Ninive. Mais le Seigneur déclenche une tempête qui ne pourra être apaisée qu’en jetant le prophète à la mer. Dieu envoie alors un grand poisson dans le ventre duquel Jonas passe 3 jours et 3 nuits. Un temps qu’il met à profit un retour à Dieu, dans la prière. Alors, Dieu donne l’ordre au poisson de recracher Jonas sur la terre ferme…

Lecture biblique : Jonas 3

1 Une deuxième fois, le SEIGNEUR dit à Jonas : 2 « Debout ! Va à Ninive, la grande ville. Annonce-lui le message que je te donne. » 3 Alors Jonas se lève. Il part, mais cette fois, il va à Ninive, comme le SEIGNEUR l’a demandé.  Ninive est une ville extraordinairement grande. Il faut trois jours pour la traverser. 4 Jonas entre dans la ville, il marche pendant un jour entier. Il annonce aux gens : « Dans quarante jours, Ninive sera détruite ! » 5 Aussitôt, les gens de Ninive croient à la parole de Dieu. Ils décident de ne rien manger. Tous mettent des habits de deuil, les riches comme les pauvres. 6 Le roi de Ninive apprend la nouvelle. Il se lève de son siège. Il enlève son habit royal, il met un habit de deuil, et s’assoit sur de la cendre. 7 Puis le roi et ses ministres donnent cet ordre : « Criez dans la ville ces paroles : “Il est interdit aux habitants et aux bêtes, bœufs, moutons et chèvres, de manger et de boire ! 8 Tout le monde doit mettre des habits de deuil, les gens et les bêtes ! Chacun doit crier vers Dieu de toutes ses forces. Chacun doit abandonner sa mauvaise conduite et arrêter les actions violentes qu’il fait ! 9 Qui sait ? Dieu changera peut-être d’avis. Il abandonnera sa colère contre nous, et nous ne mourrons pas.” »
10 Dieu voit leurs efforts pour abandonner leur mauvaise conduite. Il change d’avis. Il regrette le mal qu’il voulait leur faire, et il ne le fait pas.

Les rebondissements continuent dans notre mini-série de l’été ! Et ce troisième épisode des aventures de Jonas est celui des repentances.
– Celle des habitants de Ninive, bien sûr. Radicale et spectaculaire.
– Mais aussi celle de Jonas. Ou du moins, c’est un test pour voir si sa repentance dans le ventre du poisson a vraiment porté ses fruits.
– Et enfin la plus étonnante des repentances, celle de Dieu !

Jonas : un repenti

Au début de ce troisième épisode, on reprend le déroulement de l’histoire, presque comme si rien ne s’était passé sur la mer. La tempête, le gros poisson… on n’en parle plus ! Le Seigneur redonne à Jonas le même ordre de mission, mot pour mot. Notez juste la mention supplémentaire que Dieu s’adresse « une deuxième fois » à Jonas… C’est bien une seconde chance que le Seigneur lui donne.

Voilà incontestablement un signe de la grâce et de la patience de Dieu. Sa grâce permet au prophète de repartir à zéro. C’est toujours la promesse que Dieu lie à la repentance. Le vrai pardon restaure la relation et exclut la rancune. Il n’y a pas de « je pardonne mais… » dans le pardon de Dieu… comme trop souvent dans les nôtres ! Et parce que Dieu est patient, il continue avec Jonas, malgré la mauvaise volonté manifestée jusqu’alors de sa part. Dieu ne se lasse pas de nous appeler à le suivre et le servir, malgré nos défaillances et nos infidélités… Il ne se lasse pas de pardonner, preuve de son amour pour nous.

Bref, pour la seconde fois, Dieu appelle Jonas à se lever et à aller à Ninive. Et cette fois le prophète obéit… Ceci dit, avait-il vraiment le choix ? A moins de vouloir faire un nouveau séjour dans le ventre d’un poisson ou Dieu sait où encore !

Jonas finit donc par aller à Ninive et y délivrer le message de la part de Dieu. On n’a pas vraiment l’impression qu’il y mette tout son coeur… Il fait le minimum syndical : « Dans 40 jours Ninive sera détruite… » C’est tout ! Mais après tout, ça semble bien être le message que Dieu lui a demandé de proclamer. Mais il ne fait rien de plus…

Ninive : une repentance soudaine

Le moins qu’on puisse dire, c’est que l’effet de la prédication de Jonas est radical ! Rapidement, un élan de repentance monte jusqu’au roi de Ninive qui proclame un édit invitant tout le peuple à la repentance : que tout le monde, y compris les animaux, portent le deuil, que tous crient à Dieu et changent de comportement !

Pourtant la parole proclamée par Jonas ne semblait pas laisser d’espoir : Ninive sera détruite. Point. Pas de condition, pas d’appel à la repentance… Rien. Et on peut compter sur Jonas pour ne pas l’avoir suggéré ! Ce n’est certainement pas sa persuasion ou son éloquence qui a poussé les habitants de Ninive à la repentance… Mais ne sous-estimons pas la puissance de la parole de Dieu. Au temps de Jonas comme aujourd’hui. Car la parole de Dieu a touché les coeurs et les habitants de Ninive se disent : « Qui sait ? Dieu changera peut-être d’avis… »

Il y a quelque chose de presque excessif dans la repentance de Ninive, entraînant jusqu’aux animaux dans le mouvement. D’ailleurs, leur attitude ne correspond pas à celle des païens, qui auraient apporté des offrandes, des sacrifices, pour calmer la colère des dieux (comme l’ont fait les marins au milieu de la tempête, dans le premier épisode). Non, ils font ce que le Seigneur demande sans cesse à son peuple : non pas des sacrifices mais la repentance.

Et c’est là qu’on comprend le ton polémique de cet épisode… Ce que Ninive a compris ici, les Israélites sont incapables de le comprendre. N’oublions pas que le livre est écrit non pas pour des païens mais pour le peuple d’Israël. Au temps de l’Exil, c’est une repentance comme celle des habitants de Ninive que Dieu aurait attendue de la part son peuple. C’est pour cela qu’il a envoyé des prophètes… mais le peuple ne les a pas écouté !

Le message que Dieu adresse à son peuple est clair : « Ninive s’est repentie et n’a pas été détruite. Si vous vous étiez repentis, vous n’auriez pas été exilés… » D’ailleurs, il n’y a pas que dans le livre de Jonas où les non-croyants donnent l’exemple à la place des croyants… C’est, malheureusement, encore bien le cas aujourd’hui ! En cela le livre de Jonas garde une criante actualité et nous interpelle : quelle est l’authenticité de nos conversions ? Nos repentances changent-elles vraiment nos comportements ?

Le Seigneur : une repentance surprise

A la repentance de Ninive, Dieu répond aussi par une « repentance ». Il change d’avis, il regrette le mal qu’il voulait faire aux habitants de Ninive. Finalement, contrairement à ce que Jonas a annoncé de la part de Dieu, au bout des 40 jours, Ninive ne sera pas détruite ! C’est la repentance surprise !

Voilà qui souligne encore plus le scandale du refus de repentance des croyants. Dieu lui-même est capable de repentance. Ça n’a pas exactement le même sens que pour les hommes, bien-sûr. C’est une façon humaine de parler. Dieu change d’avis, non pas qu’il se soit trompé mais parce qu’il change d’attitude envers ceux qui se repentent.

La « repentance » de Dieu nous apprend que le but d’une prophétie de jugement, c’est d’abord de conduire à la repentance ! Le prophète Jérémie le dit clairement :

« Tantôt je parle, à propos d’une nation ou d’un royaume, de déraciner, de démolir et de faire disparaître ; mais si cette nation contre laquelle j’ai parlé revient du mal qu’elle a fait, je renonce au mal que je pensais lui faire.
Et tantôt je parle, à propos d’une nation ou d’un royaume, de bâtir et de planter ;
mais si cette nation fait ce qui me déplaît, sans m’écouter, je renonce au bien que j’avais parlé de lui faire. » (Jérémie 18.7-10)

En réalité, ce que Dieu cherche toujours, c’est de restaurer la relation perdue avec les hommes. C’est pour cela qu’il a créé les humains à son image… Et la restauration de cette relation passe par la repentance, par un changement radical de pensée et de manière d’agir.

L’histoire de Jonas soulignait jusqu’ici la souveraineté de Dieu. Dieu fait ce qu’il veut. Mais cette souveraineté ne signifie pas distance ou insensibilité. Le Dieu souverain n’est pas inflexible. Parce que ce n’est pas un Dieu distant et détaché mais un Dieu qui s’investit dans la relation. Il ne met pas à exécution ses menaces si la relation est rétablie. Il n’accomplit pas ses promesses si la relation est brisée. C’est là que se trouve l’enjeu de la repentance et du pardon : dans la relation restaurée.

Conclusion

La leçon principale de ce troisième épisode de l’histoire de Jonas concerne la repentance. Se repentir, ce n’est pas seulement regretter… C’est accepter de changer, comme les habitants de Ninive implorant le pardon à Dieu, comme Dieu lui-même qui ne met pas ses menaces à exécution. Mais pas comme Jonas, le prophète rebelle et inflexible !

Changer d’avis, changer de projet, changer de comportement, changer de pensée… voilà ce qui est nécessaire si on veut restaurer une relation brisée. Et c’est vrai autant dans notre relation à Dieu que dans nos relations les uns avec les autres.

Sommes-nous prêts à changer ? Et à accepter que les autres peuvent changer ? Le pardon et la réconciliation sont à ce prix !

Jonas – épisode 2

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https://soundcloud.com/eel-toulouse/jonas-episode-2

Résumé du premier épisode : Au VIIIe siècle avant J-C, alors que la redoutable Assyrie terrifie toute la région, la parole du Seigneur est adressée à Jonas, prophète en Israël. Dieu lui donne la mission d’aller annoncer la destruction de la ville à Ninive, la capitale assyrienne. Mais Jonas, prophète rebelle, refuse d’obéir à Dieu et prend un bateau pour Tarsis, aux antipodes de Ninive. Mais on n’échappe pas si facilement au Dieu souverain qui déclenche une tempête terrible, forçant Jonas à raconter son histoire aux marins. Le prophète propose alors qu’on le jette à la mer pour calmer la tempête… Et ça fonctionne ! C’est donc dans cette position très inconfortable, pour ne pas dire désespérée, que nous allons retrouver Jonas pour le deuxième épisode.

Jonas 2

1 Le SEIGNEUR envoie un grand poisson pour avaler Jonas. Jonas reste dans le ventre du poisson trois jours et trois nuits. 2 Dans le ventre du poisson, il prie le SEIGNEUR son Dieu. 3 Il dit :

« Je suis très malheureux.
Alors je crie vers toi, SEIGNEUR, et tu me réponds.
De la profondeur de la mort, j’appelle au secours et tu entends ma voix.
4 Tu m’as jeté dans un trou profond au cœur de la mer, et l’eau m’entoure.
Toutes tes vagues et toute ton eau tombent sur moi.
5 Et moi, je dis :
“Tu m’as chassé loin de tes yeux.
Pourtant, je veux revoir ton temple saint.”
6 L’eau m’arrive jusqu’au cou.
La mer m’entoure.
Des herbes s’enroulent autour de ma tête.
7 Je suis descendu jusqu’au pied des montagnes.
Je suis dans le monde des morts,
et les portes sont fermées à clé derrière moi, pour toujours.
Mais toi, SEIGNEUR mon Dieu, tu me fais remonter vivant de ce trou.
8 SEIGNEUR mon Dieu, je vais bientôt mourir.
Alors je me souviens de toi, SEIGNEUR, et ma prière monte près de toi dans ton temple saint.
9 Ceux qui adorent les faux dieux n’ont aucune chance d’être sauvés.
10 Mais moi, je chanterai ta louange, je t’offrirai des sacrifices.
Je tiendrai les promesses que je t’ai faites.
Oui, c’est toi qui sauves, SEIGNEUR ! »

11 Alors le SEIGNEUR donne cet ordre au poisson : « Rejette Jonas sur la terre ! » Et aussitôt le poisson obéit.
La partie narrative de cet épisode est très courte. Elle se limite à deux versets au début et un verset à la fin du chapitre : Dieu fait intervenir un gros poisson qui avale Jonas et le recrache trois jours plus tard sur la terre ferme. C’est tout. Le plus gros du chapitre est constitué d’une longue prière de Jonas, composée essentiellement de citations de Psaumes, un vrai cantique des profondeurs. Non seulement parce qu’il est prononcé dans le ventre du poisson mais aussi parce qu’il reflète les profondeurs de l’âme du prophète dans cette expérience.

L’intervention de Dieu

Arrêtons-nous d’abord sur l’intervention de Dieu. Indirecte mais efficace. Dieu n’agit pas directement, par exemple en transportant Jonas hors de la mer, mais il fait appel à un poisson.

Dieu continue d’apparaître comme le maître de la Création. Il déchaîne la mer et la calme quand il veut. Il donne des ordres aux animaux et ils obéissent. Remarquez que dans la création, les éléments naturels et les animaux obéissent à Dieu. Il n’y a guère que l’homme pour lui désobéir et lui donner du fil à retordre ! Mais le Seigneur l’a voulu ainsi. Il a créé les humains libres et responsables, non comme des bêtes à qui il donne des ordres mais comme des partenaires d’alliance, des êtres responsables…

Tout cela n’empêche pas le Seigneur de poursuivre son projet et son projet passe, en l’occurrence, par Jonas ! Mais pourquoi a-t-il choisi de le sauver avec un poisson ? Savez-vous comment l’on écrivait le nom de la ville de Ninive dans l’Antiquité ? On utilisait un idéogramme qui représentait un poisson à l’intérieur d’un vase ! Coïncidence ? Je ne crois pas…

En faisant avaler Jonas par un poisson, présent dans l’idéogramme de Ninive, le Seigneur ramène encore le prophète à sa mission première : aller jusqu’à la capitale assyrienne. C’est comme s’il lui disait : « Non seulement je te délivre de la tempête, mais en plus je te rappelle ta mission : je t’envoie dans la gueule du poisson, à Ninive ! »

Au cas où Jonas en douterait encore, il n’échappera pas à Dieu et à la mission qu’il veut lui confier. Lorsque nous faisons la sourde oreille à son appel, le Seigneur sait utiliser tous les moyens pour nous le faire comprendre.

Les rôles du poisson

Arrêtons-nous maintenant sur le nouveau personnage de cet épisode : le poisson. Il joue un rôle clé dans l’histoire de Jonas. Il est bien-sûr l’instrument par lequel Dieu accomplit son dessein à l’égard du prophète. Mais il joue également un rôle symbolique, au moins à deux niveaux.

Le poisson – abîme

L’histoire nous dit que Jonas passe 3 Jours et 3 nuits dans le ventre du poisson. Il semble que dans l’Antiquité, c’est le temps qu’il fallait pour atteindre le séjour des morts. En tout cas, après 3 jours dans le ventre d’un poisson, normalement Jonas devrait être mort ! Et c’est bien ce qu’il exprime dans son cantique des profondeurs (v.7) :

Je suis descendu jusqu’au pied des montagnes.
Je suis dans le monde des morts,
et les portes sont fermées à clé derrière moi, pour toujours.

Du coup, si le fait d’être dans le ventre du poisson est assimilé à une mort pour Jonas, le fait d’être recraché par le poisson apparaît comme un retour à la vie, une résurrection (v.7) :

Mais toi, SEIGNEUR mon Dieu,
tu me fais remonter vivant de ce trou.

Le moment où Jonas est recraché sur la terre ferme est une nouvelle naissance : Dieu offre une nouvelle chance à Jonas, un nouveau commencement possible.

C’est bien-sûr dans cet épisode qu’il faut voir prioritairement le « signe de Jonas » dont parle Jésus à son propre sujet : « Oui, Jonas a passé trois jours et trois nuits dans le ventre du grand poisson. De la même façon, le Fils de l’homme passera trois jours et trois nuits dans la terre. » (Matthieu 12.40)

Mais c’est aussi une merveilleuse illustration de la grâce de Dieu, toujours prête à nous donner une nouvelle chance, à nous permettre un nouveau départ. Quel que soit l’abîme dans lequel nous avons pu sombrer, Dieu veut nous en faire sortir et nous faire renaître à une vie nouvelle.

Le poisson – temple

Si le poisson de Jonas est un abîme, plus surprenant, il joue aussi le rôle d’un temple. Il devient un lieu de prière où Jonas s’adresse à Dieu, comme dans le temple. D’ailleurs sa prière contient des références explicites au sanctuaire.

Au moment de prier, c’est comme si le prophète n’était plus dans le ventre d’un poisson. D’ailleurs, il parle de son expérience au passé : « je suis descendu… tu m’as fait remonter… ». Il s’engage aussi à offrir des sacrifices et s’acquitter de ses voeux, actes cultuels liés au temple.

La grande leçon de cet épisode, dans la prière de Jonas, c’est qu’il n’y a pas de lieu où Dieu soit absent… Tout est temple du Seigneur. Ou tout peut le devenir par la foi. Même le ventre d’un poisson. Où que nous nous trouvions, quelle que soit la vie que nous menons, si nous prions, le lieu où nous nous trouvons devient un temple, le lieu de la présence de Dieu !

Et Dieu entend notre prière. Il a entendu celle de Jonas. Prière de repentance, appel au secours, la prière du prophète est surtout un psaume de reconnaissance. Les supplications sont contrebalancées par les réponses de Dieu déjà reçues et la reconnaissance. L’évocation du péril qu’il subit se termine toujours dans l’assurance de revoir le temple. Les verbes sont au passé (ça ne ressort pas clairement dans la version « Parole de Vie »), comme si la prière était prononcée après la délivrance.

Le but de cette prière (comme de toute prière d’ailleurs) n’est pas de faire infléchir la volonté de Dieu : en envoyant le poisson, Dieu avait déjà décidé de sauver Jonas de la mort. La prière, pour Jonas comme pour nous, est l’occasion d’un retour à Dieu (une repentance…), ou d’exprimer notre reconnaissance et notre dépendance du Seigneur.

Conclusion

Finalement, que retenir de ce deuxième épisode ?

D’abord une nouvelle leçon sur la souveraineté de Dieu. Si Jonas pouvait jusqu’alors se sentir traqué par la souveraineté de Dieu, incapable de fuir loin du Seigneur, il peut maintenant voir cette même souveraineté sous un autre regard. N’est-ce pas aussi le Dieu souverain qui l’a délivré de la tempête par le gros poisson ? Tout est une question de perspective, et dépend de notre vision et de notre relation à Dieu.

Ensuite une leçon importante pour nous tous, pour notre prière, particulièrement si nous passons par des temps d’obscurité et d’épreuve : il n’y a pas de lieu, aussi obscure soit-il, qui ne puisse devenir le temple de Dieu, le lieu de sa présence. Ne l’oublions jamais !

Jonas – épisode 1

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https://soundcloud.com/eel-toulouse/jonas-episode-1

Pour ce dimanche et les trois à venir, je vous propose un petit feuilleton de l’été. Avec une histoire pleine de rebondissements, un héros surprenant, de l’action, de l’humour et si c’était un film, des effets spéciaux spectaculaires ! C’est l’histoire d’un prophète anti-héros du nom de Jonas.

L’histoire se déroule au VIIIe siècle avant J-C, dans le Royaume d’Israël, le Royaume du nord, sous le règne de Jéroboam II, un roi qui déplaisait aux yeux du Seigneur mais qui avait pourtant plusieurs victoires militaires à son actif, grâce notamment aux conseils d’un prophète patriote, Jonas, fils d’Amittaï, de Gath-Hépher.

Mais en ce temps-là une super puissance terrorise toute la région : l’Assyrie, dont la capitale est Ninive. Sa volonté d’expansion ne semble avoir aucune limite et sa puissance militaire aucune rivale…

Lecture biblique : Jonas 1

1 Un jour, le SEIGNEUR adresse cet ordre à Jonas, le fils d’Amittaï : 2 « Debout, va à Ninive, la grande ville. Tu menaceras ses habitants en disant : “Le SEIGNEUR en a assez de voir vos actions mauvaises.” »

3 Jonas se met en route, mais pour fuir à Tarsis, loin du SEIGNEUR. Il arrive à Jaffa. Là, il trouve un bateau qui part pour Tarsis. Il paie son voyage. Puis il monte dans le bateau, pour aller avec les marins à Tarsis, loin du SEIGNEUR.

4 Mais le SEIGNEUR lance sur la mer un vent violent, et la tempête est si forte que le bateau risque de se casser. 5 Les marins ont peur, chacun crie vers son dieu. Ils jettent à la mer tous les objets qui sont dans le bateau pour le rendre plus léger. Pendant ce temps, Jonas est descendu au fond du bateau, il s’est couché et dort profondément. 6 Le capitaine du bateau s’approche de lui et lui dit : « Quoi ? Tu dors ! Lève-toi, crie vers ton dieu ! Il pensera peut-être à nous, et nous ne mourrons pas. » 7 Puis, les marins se disent entre eux : « Pour connaître le responsable du malheur qui nous arrive, tirons au sort. » Ils tirent au sort, et le sort tombe sur Jonas. 8 Alors les marins lui disent : « Notre malheur vient de toi. Dis-nous : qu’est-ce que tu fais ici ? D’où viens-tu ? De quel pays et de quel peuple es-tu ? » 9 Jonas répond : « Je suis hébreu, et c’est le SEIGNEUR que j’adore, le Dieu qui est au ciel, celui qui a fait la mer et la terre. » 10 Puis il leur raconte son histoire. Les marins ont très peur. Ils disent à Jonas : « Qu’est-ce que tu as fait là ! » En effet, maintenant, ils savent que Jonas fuit loin du SEIGNEUR. Ils lui demandent : 11 « Qu’est-ce que nous allons faire de toi pour que la mer se calme autour de nous ? » En effet, les vagues montent de plus en plus. 12 Jonas répond aux marins : « Prenez-moi et jetez-moi à la mer. Ainsi la mer deviendra calme autour de vous. Oui, je le sais, cette violente tempête vous attaque à cause de moi. » 13 Les marins rament pour rejoindre la côte, mais ils n’y arrivent pas. Les vagues montent de plus en plus contre eux. 14 Ils prient le SEIGNEUR et disent : « Ah ! SEIGNEUR, ne nous fais pas mourir à cause de cet homme ! Ne nous rends pas non plus responsables de la mort d’un innocent. En effet, c’est toi, SEIGNEUR, qui as fait ce que tu as voulu. »

15 Puis, ils prennent Jonas et ils le jettent à la mer. Alors la colère de la mer se calme. 16 Ensuite, les hommes sont remplis d’un grand respect envers le SEIGNEUR. Ils lui offrent un sacrifice et ils lui font des promesses avec serment.

Prophète rebelle

Notre histoire commence comme n’importe quelle histoire de prophète dans la Bible : Dieu adresse sa parole à son prophète et lui donne un ordre de mission. Mais bien vite, tout bascule. Normalement le prophète se lève, obéissant, même s’il parlemente un peu parfois, et il accomplit la mission que lui confie le Seigneur. Jonas, lui, se lève, certes… mais pour s’enfuir ! Le Seigneur lui demande d’aller à l’est, Jonas cherche un bateau pour aller à l’ouest, le plus loin possible…

On ne donne aucune explication à la fuite de Jonas. Lui-même ne dit rien du tout, il n’essaye même pas de négocier avec le Seigneur, comme d’autres l’ont fait parfois. On en saura plus dans la suite du récit… mais il est déjà clair que Jonas ne veut pas aller à Ninive, capitale de l’Assyrie, cet empire païen dominant et redoutable.

Jonas connaît le Seigneur, c’est quand même bien un prophète. Il ne s’imagine pas une seconde pouvoir échapper à Dieu ! Il sait parfaitement que ce n’est pas en fuyant de l’autre côté de la grande Mer qu’il échappera au Dieu Créateur du ciel et de la terre !

Sa fuite est donc un acte de rébellion ouverte. Une façon de montrer au Seigneur qu’il ne veut pas lui obéir. C’est comme s’il lui disait : « allez, trouve quelqu’un d’autre ! Il y a bien d’autres prophètes… »

Sans aller jusqu’à la rébellion, n’avons-nous jamais dit au Seigneur : « trouve quelqu’un d’autre ! » ? Parce qu’on se sent incapable, parce qu’on n’en a pas envie, parce qu’on pense que d’autres le feront bien mieux que nous, parce qu’on a d’autres projets… « Trouve quelqu’un d’autre ! »

Mais si le Seigneur nous demande quelque chose, ce n’est pas parce qu’on est meilleur que les autres ou parfaitement équipé pour le faire. C’est parce qu’Il veut le faire en nous et par nous. C’est sa grâce qui appelle…

Prophète traqué

Mais le Seigneur ne lâche pas Jonas. On ne se rebelle pas contre le Dieu souverain si facilement que cela… Et le Seigneur sort l’artillerie lourde : il déclenche une terrible tempête. Les marins eux-mêmes paniquent et n’ont d’autre issue que d’invoquer leurs dieux pour qu’ils soient délivrés.

La rébellion de Jonas ne le met pas seulement en danger, lui, mais aussi ceux qu’il accompagne. Nos choix de vie, nos décisions ont souvent des répercussions sur ceux qui nous entourent… Mais Jonas, lui, dort. Il fuit jusque dans le sommeil… ce qui suscite la colère des marins ! « Toi aussi invoque ton dieu ! »

Cette tempête n’est pas normale, les marins le sentent. Elle a une cause surnaturelle. Quelqu’un attire le malheur sur le bateau. Alors ils tirent au sort… et le sort tombe sur Jonas ! Comme par hasard…

Traqué jusqu’au bout, Jonas n’échappera pas à la souveraineté de Dieu !

N’y a-t-il pas là encore une leçon ? Pour celui qui ne veut pas obéir au Seigneur, sa souveraineté est pesante, envahissante et ressemble à de l’acharnement. Mais pour celui qui veut obéir au Seigneur, sa souveraineté est bienfaisante et apaisante. Elle est l’assurance que c’est lui qui tient les rennes !

Prophète malgré lui

Mais revenons à notre tempête… Le sort est tombé sur Jonas et c’est le tournant de l’histoire. Le prophète ne peut plus fuir, il ne peut plus nier l’évidence. Et il propose une solution : puisque tout est de sa faute, qu’il soit jeté à la mer, en pleine tempête !

S’agit-il d’un élan suicidaire de Jonas, la mort étant la seule issue pour échapper à l’appel du Seigneur ? Ou est-ce là un vrai sursaut de conscience du prophète : il faut qu’il se sacrifie pour sauver l’équipage… et si le Seigneur veut vraiment l’envoyer à Ninive, il le délivrera !

Toujours est-il que cela fonctionne. Aussitôt jeté à la mer, la mer se calme. Et ici s’arrête la fuite de Jonas.

Et quand on y regarde de plus près, on peut percevoir toute l’ironie de l’histoire : c’est malgré lui que Jonas va être prophète.

A son insu, Jonas est l’instrument d’une « conversion » des marins païens. Regardez le changement chez eux : avant que Jonas révèle son identité, les marins implorent Jonas de prier son dieu, après ils implorent eux-mêmes le Seigneur ; avant, au coeur de la tempête, ils implorent leurs dieux, après, lorsque la tempête est apaisée, ils offrent des sacrifices au Seigneur…

Voilà une véritable « conversion » dont le prophète Jonas a été l’instrument… mais à son insu. Et sans trop vous spoiler la suite de l’histoire, ce n’est pas la dernière fois que cela arrivera pour Jonas…

Plus fort encore, l’expérience de Jonas a peut-être elle-même une portée prophétique plus grande. N’est-ce pas ici, dans la tempête, que commence le « signe de Jonas » dont parlera Jésus à propos de lui-même ? D’une certaine manière, Jonas « donnant sa vie » pour sauver tout l’équipage peut évoquer le sacrifice de Jésus, donnant sa vie pour sauver l’humanité.

Conclusion

La leçon de ce premier chapitre de l’histoire de Jonas est claire : Dieu est souverain et nul ne peut s’opposer à sa volonté. Pas même un prophète !

La question n’est donc pas de savoir si on peut ou non échapper à Dieu et sa volonté souveraine, mais comment sa volonté souveraine s’accomplira dans notre vie.
Est-ce que ce sera contre notre gré, à notre corps défendant ? Dans ce cas nous allons au devant de dangereuses tempêtes et nous nous compliquerons la vie…
Ou alors est-ce que ce sera dans l’obéissance et la confiance en Dieu ? Et là nous trouverons la paix.

Nous ne sommes pas tous des Jonas, appelés à nous lever pour proclamer le message de Dieu. Mais nous sommes tous les destinataires de l’appel de Dieu, sous différentes formes, pour différentes missions. Nous recevons tous son appel à le suivre, à le servir.

Quelle est donc notre réponse, aujourd’hui, à l’appel de Dieu ?

Vivre le changement (8) Croire au Dieu de l’incroyable

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https://soundcloud.com/eel-toulouse/croire-au-dieu-de-lincroyable

Certains d’entre nous ont peur du futur – au niveau mondial, mais aussi pour notre propre vie : préoccupations pour le travail, pour nos enfants, la santé, nos parents qui vieillissent, peur de solitude/ souffrance/ inconnu… ou peut-être est-ce le sentiment d’être dans l’impasse, coincé dans une difficulté… questionnement sombre ! mais nous tous, nous nous posons cette question : qu’est-ce que l’avenir nous réserve ?

Nous ne sommes pas les premiers à nous demander cela. Ecoutons une parole du prophète Esaie pour le peuple d’Israël, aux alentours de 700 et quelques avant J.C. – une période relativement agréable, mais avec de profonds dysfonctionnements que Dieu dénonce : Dieu avertit que peuple court à sa perte. Le puissant (et cruel) empereur de Babylonie décimera pays, détruira le temple, déportera les puissants. (c’est arrivé, quelques décennies plus tard). futur sombre. Et voilà quelle parole Esaïe écrit, bien avant que la situation difficile de l’exil soit vécue : c’est comme si une énorme tempête arrivait, et qu’Esaïe pointait du doigt, au loin, derrière nuages noirs, un coin de ciel bleu.

Lecture biblique: Esaïe 43.14-21

14 Voici ce que dit le SEIGNEUR, votre libérateur, le Dieu saint d’Israël :

« Pour vous, j’envoie quelqu’un à Babylone.Je vais faire tomber les portes qui protègent la ville. Alors, chez les Babyloniens, les cris de joie deviendront des chants de deuil. 15 Je suis le SEIGNEUR, votre Dieu saint, le Créateur d’Israël, votre Roi. »

16 Autrefois, le SEIGNEUR a ouvert un chemin dans la mer, une route à travers l’eau puissante. 17 Il a fait sortir des chars et des chevaux, l’armée avec sa puissance militaire.

Ils sont tombés pour ne plus se relever. Ils se sont éteints, ils ont brûlé comme la mèche d’une lampe.

18 Maintenant, le SEIGNEUR dit : « Ne pensez plus à ce qui est déjà arrivé, oubliez le passé. 19 En effet, je vais faire quelque chose de nouveau, qui grandit déjà. Est-ce que vous ne le voyez pas ? Oui, je vais ouvrir un chemin dans le désert, je vais faire couler des fleuves dans ce lieu sec. 20 Les animaux sauvages, les chacals et les autruches me rendront honneur car j’ai fait couler de l’eau dans le désert, des fleuves dans ce lieu sec. Oui, je veux donner à boire au peuple que j’ai choisi. 21 Ce peuple que j’ai formé pour moi chantera ma louange. »

 

D’avance, Esaïe l’annonce : l’exil que le peuple va souffrir ne sera pas la fin. Après les avoir laissé porter leur responsabilité et les conséquences de leur comportement, Dieu va libérer son peuple :

  • 1e parole : Dieu va mettre un terme à la puissance de l’empire babylonien (quelques décennies après leur départ en exil – c’est le moment où l’empire des Mèdes & des Perses prend le pas sur les Babyloniens), [mettre vv.14-15 en bleu]
  • 2e parole : Dieu va intervenir. (v.16 en rouge) Il fait référence au passé d’Israël, quelques siècles plus tôt : quand le peuple d’Israël alors esclave est sorti d’Egypte, guidé par Moise, traversant la mer à pied, laissant derrière une armée égyptienne submergée par les eaux, l’Exode. [diapo v.18ss] Dieu annonce qu’il va faire encore mieux : ne pensez plus au passé, je vais faire du nouveau. Comme il a ouvert des chemins improbables pour libérer Israël de l’esclavage en Egypte, Dieu ouvrira des chemins improbables pour libérer son peuple de l’exil en Babylonie. Et comme Dieu, à l’époque, a donné à boire à son peuple, alors qu’il errait dans le désert pendant 40 ans (entre l’Egypte et la terre promise), Dieu promet de prendre soin de son peuple.

Voilà les promesses que Dieu fait à son peuple par l’intermédiaire d’Esaïe – promesses dont on sait qu’elles se sont réalisées, puisque 70 ans après le départ en exil, Israël revient sur sa terre, grâce au décret du roi Cyrus qui a vaincu Babylone. Des promesses qui nous rejoignent aujourd’hui, parce qu’elles nous rappellent ce que Dieu est capable de faire, même dans les pires déserts ou les pires impasses.

  • Croire à l’incroyable

« Oubliez le passé, je vais faire du nouveau. » Oubliez le passé – petit paradoxe : Dieu vient juste de faire référence à un événement fondateur du passé, l’exode / la sortie d’Egypte ! Donc oublier le passé, ce n’est pas devenir amnésique ! Mais c’est laisser Dieu déborder le cadre de nos expériences passées et de nos souvenirs.

Souvent quand on se projette dans le futur, on s’appuie sur ce qu’on connaît, ce qu’on a vu et expérimenté, et on essaie de transposer le même principe ou la même dynamique dans l’avenir. Mais Dieu ne se laisse pas limiter par nos expériences ou nos souvenirs… Il fait du nouveau. Il fait du complètement nouveau! Même si nous avons vu des oasis dans le désert, lui, il fait jaillir des fleuves.

Alors c’est incroyable, impensable, parce c’est nouveau, inédit, inconnu. Les actes de Dieu débordent les statistiques, les calculs, les probabilités. A quoi ça ressemble ? Je peux donner quelques exemples (du passé…) : des portes qui s’ouvrent pour un projet alors que tout était bouché, quelqu’un qui sort de l’addiction alors que toute sa vie était centrée dessus, deux personnes qui étaient fâchées à mort et qui se réconcilient, ou encore une guérison physique improbable… A chaque fois, il y a ce sentiment de surprise, d’émerveillement, de voir l’impossible se réaliser. Croire à l’incroyable, c’est s’ouvrir à cette possibilité que Dieu intervienne dans notre vie, sans être limité par notre contexte.

Les projets, les rêves, de Dieu sont plus grands que ce que nous pouvons imaginer – autant dans notre vie personnelle que dans notre expérience d’église. Le passé nous enseigne, nous encourage, nous rappelle ce que Dieu a pu faire – mais pour l’avenir, Dieu ne nous fait pas tourner en rond, il ouvre des perspectives nouvelles, plus larges. Les rêves de Dieu sont plus grands que nos souvenirs.

  • Croire au Dieu de l’incroyable

Croire à l’incroyable, à l’impensable, ça fait peur. Ca paraît naïf, illusoire, comme quelqu’un qui vit dans les nuages. Peut-être parce que ce n’est pas à l’incroyable qu’il faut croire, comme on croirait aux licornes ou aux petits hommes verts, mais au Dieu de l’incroyable. C’est lui la clef de notre foi ! Dans le texte, Dieu annonce qu’il va faire du nouveau, il donne quelques indices (qu’on comprend mieux après les faits), mais surtout il rappelle qui il est : il est le Libérateur, le Créateur, le Maître (celui qui domine tout), il est celui à qui nous appartenons et qui nous aime comme ses enfants.

Et nous ne pouvons pas connaître Dieu, ce Dieu de l’incroyable, mieux qu’à travers Jésus, qui le manifeste parfaitement. Jésus, expert en incroyable : incroyable sagesse, incroyables miracles, incroyables guérisons, incroyables rencontres débordant tous les codes sociaux, incroyables mort et résurrection. La vie de Jésus ne dit pas juste ce que Dieu a fait à travers lui, mais elle montre qui Dieu est : dans la tempête, il n’est pas submergé comme nous, mais il marche sur l’eau car il l’a créée. Dans la pénurie alimentaire, il donne à chacun selon ses besoins car il est celui qui nourrit. Dans l’impasse ultime, la mort, Jésus trace un chemin de vie par sa résurrection.

C’est Dieu révélé en Jésus, la clef de notre foi, la base de notre confiance, l’horizon de notre espérance : nous pouvons croire que des chemins vont s’ouvrir dans l’impasse parce que nous connaissons Dieu, créateur, maître, libérateur, parce que nous connaissons Jésus qui a vaincu la mort elle-même – qu’est-ce qui pourrait encore lui résister ? Nous avançons vers l’inconnu, sans savoir ce que Dieu prépare – mais nous pouvons lui faire confiance. Dieu se décrit souvent comme un berger avec son troupeau : le troupeau ne sait pas où il va ! Mais il fait confiance au berger, les brebis se concentrent sur la voix de celui qu’elles connaissent, et elles le suivent, peu importe l’endroit.

  • Un nouveau regard sur nos déserts

Croire à l’incroyable, s’ouvrir à la possibilité de l’intervention de Dieu au-delà de ce que nous pouvons imaginer. Du coup, cet appel à la foi est aussi une invitation à regarder autrement nos déserts, ces situations qui nous paraissent bloquées, stériles, perdues, décourageantes (« c’est comme ça », « ça ne changera pas », « on n’y peut rien »). Dieu nous invite à les regarder non comme des lieux arides, des lieux de mort dont on ne peut rien attendre, des lieux de découragement, mais comme des endroits que Dieu peut transformer en vallées luxuriantes.

Regardons à Dieu, révélé en Jésus : sa puissance déborde nos limites. Pour Dieu, aucun arbre n’est si sec qu’il ne puisse y faire pousser feuilles, fleurs & fruits. Aucune faute n’est si grande qu’il ne puisse la pardonner – il est lui-même mort pour cela. Aucun esclavage n’est si fort que Dieu ne puisse nous en libérer, et aucun caractère si dur que Dieu ne puisse nous aider à devenir bienfaisants. Depuis quelques dimanches nous prêchons avec Vincent sur le changement – et cette parole d’Esaïe nous rappelle qu’il n’y a rien au monde que Dieu ne puisse changer.

J’ajoute une précision : croire que Dieu peut transformer nos déserts en vallées, croire que Dieu peut faire l’incroyable, ce n’est pas croire que Dieu va réaliser mes rêves les plus fous ! Si vous êtes au chômage, vous n’allez pas forcément trouver du travail le lendemain du jour où vous avez prié. Si vous êtes malade, vous n’allez pas forcément être guéri. Mais Dieu peut faire couler une source dans nos déserts, pas forcément selon le chemin que nous aurions tracé, mais avec une fécondité plus grande que ce que nous imaginons : une disponibilité pour les autres, une persévérance encourageante, une paix profonde, une occasion de témoigner.

Si vous avez l’impression d’être dans une impasse – ou quand vous aurez l’impression d’être dans l’impasse ! – est-ce qu’il serait envisageable de prier ainsi : « ô Dieu, je suis dans un désert. Je me sens seul/ J’ai peur/ je me sens vide ou inutile/ ou bien j’en fais tellement que je me retrouve à sec – toi le Dieu de l’abondance et de la joie, quels fleuves veux-tu faire couler dans ma vie ? Aide-moi à te faire confiance. »

Et si vous êtes dans une oasis, n’est-il pas aussi envisageable de prier ainsi : « ô Dieu, quels fleuves veux-tu faire couler dans ma vie ? A quoi m’appelles-tu aujourd’hui ? Aide-moi à te faire confiance. »

Conclusion

Osons croire en Dieu, un Dieu incroyable et surprenant, qui fait du nouveau et nous entraîne sur des chemins improbables. Osons croire en lui, osons le suivre – chacun avec les défis de notre vie personnelle : demandons-lui où il veut nous emmener ; ensemble dans notre vie communautaire : demandons-lui où il veut nous emmener. Osons lui faire confiance, car Il est le libérateur, le créateur, celui qui œuvre pour la vie et la joie. C’est bien l’objectif que Dieu se donne dans ce texte d’Esaïe : mon peuple chantera sa joie et sa reconnaissance. Le but de Dieu, c’est de nous montrer sa présence et son amour, de se réjouir avec nous et nous avec lui, dans la reconnaissance. Alors osons croire ! Osons le suivre!

Vivre le changement (7) S’adapter à ce que Dieu fait aujourd’hui

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https://soundcloud.com/eel-toulouse/sadapter-a-ce-que-dieu-fait

Lecture biblique: Matthieu 9.14-17

14 Les disciples de Jean-Baptiste s’approchèrent alors de Jésus et lui demandèrent : « Pourquoi nous et les Pharisiens jeûnons-nous souvent, tandis que tes disciples ne le font pas ? » 

15 Et Jésus leur répondit :

« Pensez-vous que les invités d’un mariage peuvent être tristes pendant que le marié est avec eux ? Bien sûr que non ! Mais le temps viendra où le marié leur sera enlevé ; alors ils jeûneront.

16 « Personne ne répare un vieux vêtement avec une pièce d’étoffe neuve ; car cette pièce arracherait une partie du vêtement et la déchirure s’agrandirait encore.

17 On ne verse pas non plus du vin nouveau dans de vieilles outres ; sinon les outres éclatent, le vin se répand et les outres sont perdues. On verse au contraire le vin nouveau dans des outres neuves et ainsi le tout se conserve bien. »

Autour de Jésus, beaucoup se posent cette question : pourquoi Jésus, qui passe son temps à parler de Dieu en public et en privé, n’a-t-il pas une spiritualité exemplaire ? Je m’explique : le jeûne dans la religion juive, c’est obligatoire une fois par an pour accompagner le sacrifice du grand Pardon. On jeûne aussi en cas de coup dur : deuil, période de besoin criant, repentance aussi après une faute commise. Et puis vient l’habitude de jeûner chaque semaine, pour rechercher une proximité avec Dieu. Les Pharisiens, les scribes, les disciples de Jean, tous les bons Juifs le font ! Pourquoi pas Jésus?

Alors Jésus répond : le jeûne, c’est très bien, mais ce n’est pas adapté à ce qui se vit à l’instant T. Le jeûne est associé à une recherche, à une tristesse, à un manque : mais Jésus est là ! Que manque-t-il ?? Jésus est là, l’Envoyé de Dieu, le Messie, celui qui sauve et qui guérit. Pourquoi se lamenter ? Il y aura un temps pour les lamentations – Jésus pense à sa mort sur la croix – mais aujourd’hui, il faut célébrer la présence de Dieu parmi les hommes. Il faut s’adapter à ce que Dieu fait aujourd’hui. Si c’est le temps de chanter, chantons ! Si c’est le temps de pleurer, pleurons…

Et Jésus saisit cette occasion d’aller plus loin en donnant deux exemples, comme deux paraboles, que je vais expliciter un peu si comme moi vous n’êtes pas des as de la couture ou de la vinification antique !

  • on ne peut pas rapiécer un vieux vêtement avec du tissu neuf : au lavage, le tissu neuf va rétrécir, et déchirer à nouveau, voire davantage, le vieux vêtement.
  • on ne peut pas mettre à vieillir, à fermenter, le vin nouveau dans des outres qui ont déjà servi. En effet, le cuir neuf des outres neuves va pouvoir se détendre au gré de la fermentation du vin. Mais une outre au cuir déjà détendu ne pourra pas se détendre davantage : en fermentant, le vin nouveau la déchirerait, et on perdrait tout, les outres & surtout, le vin !

Dans notre perspective « Vivre le changement », ce texte vient nous rappeler qu’il nous faut suivre ce que Dieu est en train de faire, s’adapter à son action d’aujourd’hui (et non d’hier).

1) Le changement radical amorcé par Jésus

A l’époque de notre texte, dans leur « aujourd’hui », Dieu a envoyé son Fils, et c’est un changement radical. Jésus vient apporter la Bonne Nouvelle de l’amour hors cadres de Dieu – les malades sont guéris, les impurs invités, les étrangers accueillis… Sans commettre le mal, Jésus montre souvent que l’amour extraordinaire de Dieu bouscule les anciennes règles : en venant incarner Dieu parmi les hommes, il ouvre un autre temps dans notre histoire.

Jésus va montrer par exemple que nos actions, nos bonnes intentions, nos valeurs, ne suffisent pas pour nous rendre dignes de l’amour de Dieu – il y a toute notre face sombre… Mais Jésus, par amour, va porter notre culpabilité, la compenser, l’expier, et il nous offre le pardon de Dieu : il n’y a qu’à recevoir ! Pas besoin de paraître bien, pas besoin d’en faire plus que les autres, pas besoin de s’appuyer sur des pratiques rituelles : par la foi, pardon et salut nous sont offerts.

L’Eglise des premiers temps va en tirer des conséquences très concrètes : puisque Jésus, dans sa mort, compense parfaitement notre injustice, il n’y a plus besoin de faire de sacrifices d’animaux – il est le sacrifice unique. L’apôtre Pierre va comprendre ainsi qu’on n’entre pas dans le peuple de Dieu par des règles extérieures, par des rituels ou une lignée particulière, mais qu’on est enfant de Dieu seulement sur la base de notre foi en Jésus. Plus besoin de circoncision, de règles alimentaires, ou de rituels : par sa mort et sa résurrection, Jésus nous rend pleinement dignes de vivre avec Dieu. La preuve, il envoie son Esprit à tous ceux qui croient, même aux non-Juifs, comme Corneille.

Ainsi, tout ce qui perd son sens avec la venue de Jésus est mis de côté, mais les premiers chrétiens gardent les pratiques juives comme le chant, la méditation de la Parole de Dieu, la prière ou l’entraide, car elles restent pertinentes pour connaître Dieu, lui parler, et mettre en pratique sa volonté.

2) S’adapter : « qu’est-ce qui est approprié ? »

Qu’est-ce qui est approprié à ce que Dieu fait aujourd’hui ?

L’action tonitruante de Dieu il y a 2000 ans, c’est l’envoi bouleversant de son Fils pour nous sauver, c’est le pardon de Dieu à tous ceux qui croient, peu importe qui ils sont.

Mais Dieu continue d’agir aujourd’hui : pas en envoyant un nouveau Jésus ou en changeant la façon dont il nous pardonne, mais en appelant jour après jour de nouvelles personnes, en leur offrant sa vie et sa liberté, sa joie et ses dons… C’est moins radical à observer qu’au temps de Jésus, de Pierre et Corneille, mais Dieu continue de transformer des vies, et de faire grandir son peuple. Alors forcément, puisque l’action de Dieu change la donne, cette question revient siècle après siècle : est-ce que notre façon de faire, héritée d’hier, est adaptée au peuple que Dieu se compose aujourd’hui ? (est-ce que ma voiture est adaptée à l’arrivée d’un deuxième enfant ?)

Cette image du vin et des outres nous rappelle avec force qu’il faut se poser la question : le vin nouveau est là – est-ce que nous avons les bonnes outres ? Est-ce que notre façon de vivre est adaptée à ce que Dieu fait aujourd’hui en nous et autour de nous ? Nos activités, nos groupes, nos habitudes, sont appropriés pour notre église aujourd’hui ?

Cette question fait peur… Et c’est normal ! Elle fait craindre qu’on jette tout, qu’on renie le passé et qu’on s’embarque dans je ne sais quelle mode. Et c’est douloureux, car telle activité correspond à la façon dont untel s’est tourné vers Jésus, tel chant évoque pour l’autre l’enfance et la découverte de Dieu avec la famille, etc. La crainte du changement n’est pas forcément rétrograde, mais vient parfois de l’attachement aux bonnes choses héritées du passé, ou de la peur de traverser de trop grands dangers.

Mais Jésus ne dit pas de tout jeter, d’abandonner les outres à tout prix pour avoir le dernier contenant à la mode ! Non, simplement il nous invite à nous demander régulièrement pourquoi nous agissons de telle ou telle manière. Pourquoi jeûnez-vous, dit-il aux disciples de Jean ? Et nous, pourquoi utilisons-nous telle forme, dans notre vie personnelle ou communautaire ? Si c’est par habitude ou conformisme, est-ce que c’est encore conforme, approprié, à ce que Dieu est en train de réaliser aujourd’hui ? Attention, ça peut rester pertinent ! Lire la Bible aujourd’hui reste le meilleur moyen de connaître Dieu et sa volonté, par exemple : c’est irremplaçable ! Mais… on peut changer de traduction, on peut lire un passage sur son téléphone dans le métro pour inspirer notre journée… Qu’est-ce qui est approprié ? Face à ce que Dieu fait aujourd’hui, est-ce que notre façon d’y répondre a du sens ?

3) Un appel au discernement : quelles sont nos priorités ?

En fait, derrière cette image du vin et des outres, il y a un appel à discerner les priorités. On peut parfois se laisser happer par la comparaison des outres : il y a celles au cuir patiné par le temps, peut-être cousues par une grand-mère qui nous aimait tendrement… Et les autres : rêches, rigides, comme ces chaussures toutes neuves dans laquelle on a vite des ampoules.

Mais au-delà des outres, qu’est-ce qui compte vraiment ? (…) le vin ! Le vin nouveau, fraîchement récolté et mis à fermenter pour faire une cuvée délicieuse, dans quelque temps. La priorité, l’objectif, c’est le vin, et non les outres ! Le vin nouveau, c’est le fruit de ce que Dieu fait aujourd’hui, de ses récoltes précieuses… Ce sont les chrétiens présents depuis quelques décennies, depuis quelques années, depuis quelques jours… Le vin nouveau, ce ne sont pas que les jeunes, c’est la réalité (inédite) que nous formons aujourd’hui, avec notre diversité. Pouvons-nous vraiment nous permettre de prendre le risque de laisser perdre ce vin parce que nous préférerions les vieilles outres distendues, adaptées au vin d’hier, à la réalité des générations passées ? Dieu fait bouillonner (fermenter ?) son Esprit en nous et autour de nous parce qu’il a en vue une récolte qu’il juge précieuse… N’avons-nous pas, nous qui formons l’église (et je ne parle pas que des pasteurs et du conseil : tous nous sommes l’Eglise, tous nous participons à la façonner) la responsabilité de chercher ce qui va aider chacun ici à fermenter librement, qu’il soit dans l’église depuis 2 mois ou depuis 35 ans ? A grandir dans la foi, à mieux suivre Dieu, à découvrir ses dons, à les mettre en pratique… Même si ça sort de nos habitudes ?

Conclusion

Pour conclure, je voudrais vous demander d’imaginer quelques instants la cave de Dieu… fermez les yeux si vous en avez besoin. A droite, il y a les vieilles bouteilles : millésimes 214, 812, 1517 (quand même, la réforme c’est une bonne cuvée !), 1849 (la naissance de notre union aussi 😉 ). A gauche, des bouteilles plus récentes : 1964, 1981, 1991, 2001 (allez regarder sur la frise du panneau Vitalité pour comprendre). Et la cuvée 2018 ? Elle est en cours de mise en bouteille… Quelle forme va-t-choisir ? Quelle méthode ? Qu’est-ce qui est approprié à cette récolte de Dieu ? De quoi avons-nous besoin pour que l’église fermente de façon optimale ?

Osons nous demander régulièrement : qu’est-ce que Dieu fait aujourd’hui ? Dans ma vie ? Dans notre église ? et du coup : comment puis-je y répondre de façon appropriée ? Comment pouvons-nous participer à l’œuvre de Dieu aujourd’hui, suivre sa piste, parcourir son chemin ? ne nous reposons pas sur les acquis, mais toujours, demandons l’inspiration de l’Esprit de Dieu pour nous aider à vivre avec Dieu.