Infiniment présent! (A nul autre pareil 3/4)

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Vivre dans la présence de Dieu, voilà un des aspects de la foi chrétienne. Quels sont ces moments où vous sentez Dieu présent ? Lorsque vous priez, dans le calme de votre chambre ? Quand vous chantez votre amour pour Dieu ? Ou bien, l’observation de la nature ; ou bien, la réponse de Dieu à nos prières : une solution qui se présente, une réponse favorable, une « coïncidence », une ouverture chez l’autre, un changement en soi…

Mais on ne peut pas parler de ces moments où on sent la présence de Dieu sans évoquer ces moments où Dieu semble absent. Lorsqu’on est dans une « routine » spirituelle qui ne nous fait plus vibrer… Ou en terrain profane, dans les moments ternes du quotidien par exemple : quand vous faites vos courses, dans les embouteillages, dans vos tâches ménagères ou vos réunions de travail… Dans un autre registre, lorsque quelque chose de mauvais nous apparaît brusquement comme séduisant et intéressant (c’est ce qu’on appelle la tentation), on se sent bien seul face à cette petite voix (intérieure ou extérieure) dont le murmure se fait persistant. Il y a pire : lors d’une épreuve terrible, la sensation que Dieu est absent, loin, indisponible.

Ces impressions de présence et d’absence font partie de la vie chrétienne et de la relation avec Dieu. Elles font écho au reste de notre vie : à part notre corps, quasiment tout ce que nous connaissons dans notre vie alterne entre présence & absence –nos proches, nos possessions, ce que nous voyons, même le soleil et la lune passent de la présence à l’absence. Qu’en est-il de Dieu ?

Pour continuer cette série de l’été sur les qualités uniques de Dieu, je vous invite à lire un passage dans le livre du prophète Jérémie, quelques siècles avant la naissance de Jésus. C’est Dieu qui parle.

Lecture biblique : Jr 23.23-24 (NBS)

23 Ne suis-je Dieu que de près ? — déclaration du SEIGNEUR.

 Ne suis-je pas aussi Dieu de loin ?

24 Quelqu’un peut-il se cacher dans une cachette sans que je le voie ?

— déclaration du SEIGNEUR.

Est-ce que je ne remplis pas le ciel et la terre ?

— déclaration du SEIGNEUR.

Texte et contexte

Quelques mots de contexte : Jérémie transmet les paroles de Dieu, ici, à des faux prophètes. A cette époque, injustice et scandales jonchent la vie politique, sociale, économique, et même spirituelle du peuple d’Israël. Depuis longtemps, Dieu les avertit des conséquences à de telles horreurs, et les invite à abandonner leurs pratiques pour revenir à ce qui est bon. Mais les responsables du peuple s’enferment dans le déni : « mais non, tout ira bien, après tout nous sommes le peuple élu !… »

Et ce qui met particulièrement Dieu en colère, c’est de voir des personnes qui s’autoproclament prophètes (c’est-à-dire porte-paroles de Dieu) et qui proclament de fausses promesses d’assurance alors que Dieu, lui, souhaite la repentance de son peuple ! Ce sont des menteurs ! Alors, Jérémie s’exprime, porteur lui des vraies paroles de Dieu : vous voyez les expressions « déclaration du Seigneur » par trois fois, qui visent à authentifier les prophéties de Jérémie. Il ne dit pas ce qu’il veut, mais il transmet le message que Dieu lui confie.

Ici, il dénonce l’idée que les prophètes pensent pouvoir dire ce qu’ils veulent en s’éloignant, comme on pourrait dire [mime : baisser la voix] un secret en baissant la voix ou [s’écarter/ se détourner, main sur la bouche] en s’écartant des autres. Comme si Dieu ne les entendait pas. Comme si Dieu était limité, enfermé dans un lieu dont on pourrait s’éloigner. Comme si on pouvait se cacher de lui.

Mais rien n’échappe à Dieu. Il voit tout, il entend tout, il sait tout – parce qu’il est partout. Il remplit le monde. Lui, le créateur du ciel et de la terre, lui le Dieu infini et infiniment grand, il remplit le monde de sa présence. Rien ne peut lui échapper. Il est omniprésent, c’est-à-dire qu’il est présent partout, en tout lieu, en tout temps. Et c’est cette qualité propre à Dieu que je vous invite à creuser.

L’omniprésence de Dieu

Dieu n’a aucune limite. Notamment au niveau spatial ou temporel. On a du mal à l’imaginer, parce que ça n’a rien à voir avec ce que nous connaissons, mais Dieu existait avant la création du monde, avant la création du temps et de l’espace – ce qui veut dire qu’il ne se situe pas dans l’espace ou dans le temps. La création avec son cadre spatio-temporel est en quelque sorte devant lui, ou sous lui – distincte de lui.

Pourtant, je le rappelais la semaine dernière, Dieu n’est pas absent de la création : sans en faire vraiment partie, il la remplit toute entière comme un courant d’air qui traverse la maison ou l’eau qui gonfle l’éponge. Parce qu’il remplit le monde, notre monde existe. Si Dieu se retirait, tout serait mort. Dieu anime notre monde par son souffle, par son esprit – il soutient ce qui vit, permettant au soleil de briller, aux plantes de grandir, aux animaux de respirer. Sans lui, rien ne pourrait exister. En ce sens, il est présent partout, que nous en soyons conscients ou pas.

Cependant, Dieu est présent à différents degrés à différents endroits. Même si rien ne lui échappe, même s’il est partout, il n’adopte pas toujours la même posture. Dieu n’a pas de corps, alors le parallèle que je vais faire est un peu bancal : quand vous êtes quelque part, vous pouvez être dans un coin de la pièce en retrait/ en observateur, ou assis avec les autres, ou en discussion privée avec quelqu’un, ou encore debout à faire une présentation devant tout le monde. A chaque fois, vous êtes présent, mais différemment.

La Bible évoque différents lieux que Dieu remplit, avec différentes postures : l’univers, le ciel (résidence divine, comme en vis-à-vis de la terre où vivent les humains), son trône où rayonne sa gloire (c’est-à-dire qu’il est vraiment visible à cet endroit, le lieu d’où il exerce son autorité). Mais aussi Jésus-Christ, que le Temple de Jérusalem préfigurait partiellement : lieu/ personne où Dieu se montre et se laisse rencontrer – en Christ particulièrement, Dieu se révèle tel qu’il est : juste et bon, honnête et salvateur, sage et accueillant. Et puis il y a notre cœur : le cœur, c’est notre être intérieur, notre volonté dans la Bible, cette partie de nous qui nous dirige [aujourd’hui on dirait plus facilement la tête]. Lorsque nous croyons que Jésus Christ a comblé la distance qui nous séparait de Dieu en assumant nos fautes et nos hontes, nous devenons à notre tour le temple de Dieu, c’est-à-dire que par son Esprit, il habite notre cœur, il remplit notre âme – il insuffle en nous amour et pureté, et nous fait grandir à son image.

Avant de voir l’impact que l’omniprésence de Dieu peut avoir sur notre vie de foi, une dernière remarque : quelle que soit sa posture, Dieu est toujours pleinement présent, avec toutes ses qualités et tout son caractère, toute sa justice et toute sa bonté, toute sa sainteté et toute sa fidélité. Mais comme nous, selon sa posture et selon les moments, il montre un aspect de son caractère plutôt qu’un autre.

Notre vie dans la présence infinie de Dieu.

Donc nous sommes constamment dans la présence de Dieu.

1e conséquence, qui n’est pas forcément celle à laquelle nous pensons en premier mais que les paroles de Jérémie mettent en valeur : nous ne pouvons pas commettre le mal en cachette. Vous connaissez l’expression : « pas vu, pas pris » ou « ni vu, ni connu ». Brûler un feu rouge, chaparder un paquet de bonbons, ou encore colporter une rumeur dans le dos de quelqu’un (sans parler de mensonge, fraude ou infidélité) : tant que personne ne l’a remarqué, on peut avoir l’impression de ne pas vraiment être en tort, comme si notre faute n’existait pas tant qu’il n’y a pas de témoin.

C’est là le hic : Dieu est toujours présent. Témoin invisible de tous nos actes, de toutes nos paroles, de toutes nos pensées, même. Du coup, croire en un Dieu omniprésent devrait nous inviter à rechercher toujours plus une vie cohérente. A être pareil devant témoin ou dans le secret de notre chambre – après tout, le plus important des témoins est aussi dans le secret de notre chambre… A parler de la même façon de quelqu’un, devant lui ou en son absence. A travailler avec le même zèle et la même qualité, que le chef soit présent ou qu’on soit en autonomie (Paul dira aux salariés de son époque : Quoi que vous fassiez, travaillez-y de toute votre âme, comme pour le Seigneur, et non pour des humains, Colossiens 3.23). A regarder homme ou femme de la même façon, que notre conjoint soit là ou pas. Une vie cohérente et intègre, parce que nous sommes toujours sous le regard de Dieu.

Croire que DIue est toujours présent nous motive à vivre une vie cohérente, mais c’est aussi un puissant encouragement. Dieu nous soutient. Même dans nos coups de mou, nos moments de solitude, nos doutes, nos peurs, nos épreuves, nos tentations : il est là ! Rien ne lui échappe, et il est près (de nous). David dira : même dans la vallée de l’ombre de la mort, je ne crains rien, car tu es avec moi (Psaume 23.4). Dieu est là, c’est le fondement de notre paix.

Lorsque nous avons l’impression que Dieu est absent, bien souvent c’est nous qui sommes aveugles à sa présence : préoccupés, submergés par nos craintes, distraits par mille sollicitations… Dans son sermon sur la montagne, Jésus nous adresse une parole d’encouragement : Cherchez et vous trouverez. Celui qui cherche trouve (Matthieu 7.7-8). Celui qui cherche la présence de Dieu la trouve, car il est déjà là.

C’est la délicatesse de Dieu qui parfois reste dans le coin de la pièce tant qu’on ne l’a pas invité à s’asseoir avec nous. Cette invitation de notre part, je crois que c’est la prière dans ce qu’elle a de plus essentiel. Dieu sait déjà, Dieu connaît, Dieu voit, mais on peut facilement vivre comme s’il n’était pas là. Prier, c’est se rendre attentif à sa présence. C’est lui confier ce qui nous occupe, ou l’inviter à parler. C’est parfois sans paroles, comme on marche en s’appuyant sur le bras d’un plus fort ou en tenant la main d’un être aimé. C’est peut-être un court recentrage : dans la voiture, la file d’attente, en réunion ou en repas de famille – Dieu est présent, là, maintenant, avec moi, avec nous.

La paix que nous recevons en prenant conscience que Dieu est toujours présent à nos côtés, cette paix s’élargit quand nous prenons en compte le fait que Dieu est aussi toujours présent aux côtés des autres : nos parents qui sont parfois loin, au pays, nos enfants qui volent de leurs propres ailes, parfois loin aussi, nos bien aimés dans leurs occupations… Au lieu de nous affairer sans cesse et de nous inquiéter comme si tout dépendait de nous, nous pouvons nous appuyer sur cette assurance : Dieu est présent. Avec nous, avec nos proches parfois loin, dans tout l’univers.

Conclusion

Puisque Dieu est présent, puisqu’il se rend particulièrement présent à nous dans notre cœur grâce au Christ, prenons le temps de nous recentrer régulièrement sur la réalité de sa présence dans notre vie. Au moment de l’épreuve, de la tentation ou du souci : concentrons-nous sur cette vérité. Il est là. Dans la lassitude ou l’excitation, il est là. Profitons de sa présence pour nous tourner vers lui, autant que nous pouvons – et nous trouverons en lui inspiration, soutien et réconfort.

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