Par le baptême, le croyant signifie son entrée officielle dans le peuple de Dieu, dans le royaume de Dieu. Ces mots évoquent pour nous des réalités diverses, voire nous plongent dans la confusion. C’est normal ! Même les proches de Jésus avaient du mal à comprendre, alors qu’ils avaient passé près de 3 ans avec lui. Mais les clarifications de Jésus ne vont pas aller dans le sens qu’ils imaginaient.
Lecture biblique: Actes 1.3-9
Dans ses derniers moments sur terre, Jésus se focalise sur le Royaume de Dieu – c’est-à-dire, là où Dieu est roi, là où il règne en souverain maître. Manifestement c’est un peu nébuleux, et les disciples ne savent pas trop quoi faire de ce que Jésus leur annonce. Il parle de la venue de l’Esprit de Dieu sur les croyants, ce qui est arrivé peu après cette discussion, un jour de fête juive, la Pentecôte, ce que nous fêterons dimanche prochain. Ce don accomplit une promesse ancienne : dans les jours où Dieu se manifesterait, il enverrait son Esprit sur les croyants, comme une connexion intime et personnelle avec lui. Il habiterait non plus dans un temple de pierre, mais dans le cœur de ceux qui lui feraient confiance. Cette promesse s’accompagnait d’une autre : Dieu restaurerait son royaume. Pour le peuple d’Israël, qui a perdu son pays, son temple, son roi, la restauration du royaume c’est le rêve ultime. Imaginez un homme accidenté qui a perdu l’usage de ses jambes, la possibilité de se déplacer seul et de travailler : qu’imaginer de mieux que la guérison de ses jambes ?
Mais Jésus montre que Dieu a autre chose en tête, des projets plus grands que ce rêve-là.
1) Un règne d’abondance
Jésus parle d’un royaume dans lequel on n’entre pas par un rite extérieur, comme un baptême d’eau, mais par une connexion intérieure avec Dieu – ce qu’il appelle le baptême de l’Esprit. Ca ne disqualifie pas le baptême d’eau ! Mais ce n’est plus le critère principal pour dire qui appartient à la famille de Dieu. Le baptême d’eau va servir de signe visible pour dire aux autres que nous avons déjà plongé dans une relation vivante avec Dieu, une relation spirituelle, profonde, intérieure – invisible mais rendue visible par la plongée dans l’eau. Derrière le signe extérieur, il y a une adhésion intérieure.
Le don de l’Esprit, c’est l’inauguration d’un règne d’abondance. Oui, jusque là, on cherchait Dieu, on l’appelait à l’aide, on l’attendait. Mais maintenant, Dieu se rend présent en nous. Non seulement il nous donne le pardon et une nouvelle chance en Jésus, mais en plus il vient habiter notre vie. Ce que Jésus promet aux croyants, c’est que nous n’aurons plus à chercher Dieu dans l’incertitude de le trouver – parce que Dieu qui est venu à nous en Jésus, vient en nous par l’Esprit. Ca ne veut pas dire qu’il réponde à toutes nos questions comme on le voudrait, mais sa présence nous imbibe jusqu’au plus profond de notre être. On passe du partiel/ de l’extérieur/ de la quête, à l’abondance et à la paix.
Je prends une image : imaginez que vous sortiez avec une jeune femme qui habite dans un autre pays. Vous vous aimez, mais s’appeler n’est pas toujours facile avec les horaires décalés, et pour vous voir c’est pire. Mais un jour, vous vous mariez et vous commencez à habiter ensemble : quelle différence ! Elle est là ! Tous les matins ! Vous prenez votre café ensemble, vous échangez sur les détails de la vie, vous partagez le quotidien. Tout n’est pas simple : il faut quand même s’apprivoiser, faire des efforts, veiller à la communication… Mais c’est le jour et la nuit par rapport à avant.
Quand Dieu vient habiter notre vie par l’Esprit, c’est un peu comme ça : il y a des temps de dialogue, et de silence, mais il est là, à portée de main, vous en avez l’assurance. Dieu est là pour vous, il partage votre quotidien, il vous montre son amour dans des petites et des grandes attentions, à chaque instant.
2) Une vocation de témoins
Jésus promet aux disciples la présence de l’Esprit de Dieu, la présence de Dieu lui-même au cœur de leur vie. Mais Dieu ne vient pas seulement nous rejoindre, il donne un sens, un but, une orientation à notre existence : être témoins de Jésus là où nous allons.
Témoins. Les disciples ont demandé quand le royaume d’Israël sera restauré. Mais Jésus, lui, écarte la question : connaître les détails de l’avenir n’est pas notre responsabilité. Mais, même si nous ne savons pas de quoi l’avenir sera fait, nous avons un présent à vivre, dans lequel résonne une vocation : soyez mes témoins.
Les disciples vont être des témoins uniques, puisqu’ils sont témoins oculaires de Jésus ressuscité. Mais nous, qui n’avons pas connu Jésus physiquement, nous sommes aussi témoins de ce que Dieu nous montre par son Esprit, à travers Jésus.
Etre témoin, qu’est-ce que c’est ? Il y a de l’authenticité : je montre ce que je vis, je laisse ma relation intérieure avec Dieu renouveler mon quotidien, mes actes, mes paroles, mes pensées, mes désirs, mes valeurs. C’est exprimer la vérité de notre expérience avec Dieu. Mais Jésus va plus loin : il nous invite à proclamer, à partager, à inviter ceux qui nous entourent à découvrir le Dieu qui nous fait vivre.
Jésus parle d’un peuple qui grandit sans cesse : quelques dizaines à son époque, 1 bon milliard aujourd’hui. Pourquoi ? Par peur du prosélytisme, on pourrait tiquer… Peut-être même qu’il y a ici des personnes qui viennent pour la première fois, et qui se disent : « non, on va me faire signer quelque chose à la fin ?… »
Pas du tout ! Jésus ne nous demande pas d’imposer aux autres ce que nous croyons ! Qu’aurions-nous à y gagner ? Nous sommes heureux de partager ce culte avec vous, mais nous n’avons rien à vendre, il n’y a pas de piège, pas de condition cachée. Si nous partageons notre foi, ce n’est pas par intérêt, mais par joie, parce que Jésus nous fait vivre une expérience incroyable avec Dieu.
Quasiment tous, nous avons une passion : la pêche, la cuisine, les voitures, l’astronomie, le foot, la musique, la lecture, le scrapbooking, les animaux… Et vous le savez, quand on branche quelqu’un sur sa passion, on ne peut plus l’arrêter. Même le moins bavard… Tout simplement parce que sa passion le rend heureux.
Etre témoins, c’est être passionnés par Jésus : comme l’a dit Anna tout à l’heure, Jésus s’est donné pour nous par amour. Pour nous donner une vie vraiment libre, libre du regard des autres, libre de la culpabilité, libre de la peur, libre de nos défauts mêmes – une vie où tout est possible parce que Dieu y habite. Alors si on parle de Jésus, c’est tout simplement pour partager ce qui nous fait vibrer avec d’autres, la paix, la joie, l’espérance. Du cercle fondamental de notre intérieur, la vie avec Dieu va rayonner.
3) Ouvrir les frontières
Vous l’avez compris, le Royaume dont parle Jésus n’est pas un royaume politique, avec des frontières, et un chef humain ! C’est d’abord un royaume intérieur, dans le sens où Dieu vient régner, habiter, en nous. Ce n’est pas un cadre tout fait dans lequel je dois entrer, mais une relation vivante avec Dieu, qui m’implique de la tête aux pieds. Et toutes les personnes qui reconnaissent Dieu comme leur Dieu, qui reconnaissent Jésus comme leur Sauveur, ces personnes forment ensemble le royaume visible de Dieu. Nous sommes ce matin un petit morceau de ce royaume !
Ce royaume n’a pas de frontière : Jésus dit bien aux disciples (qui n’ont pas compris tout de suite) que le royaume de Dieu va déborder les frontières d’Israël. La lumière que Dieu donne, on ne peut pas l’empêcher de rayonner.
Pour un Juif qui se définit comme membre du peuple élu, par la distance avec les autres, c’est presque impensable. Mais dans l’Eglise, Jésus nous demande de changer de mode de fonctionnement. Nous avons cette histoire où l’apôtre Pierre témoigne de Jésus à un étranger, Corneille, et découvre que dans la famille de Dieu il n’y a pas de frontières. NI extérieures, ni intérieures. L’apôtre Paul aura la même prise de conscience : tous, Juifs et non-Juifs, maîtres et esclaves, hommes et femmes, tous ont le même statut aux yeux de Dieu en Christ. Tous sont habités par l’Esprit. Donc ! tous ont la même valeur dans l’Eglise. Que ce soit des membres historiques de la communauté ou des petits nouveaux, des personnes bien vues socialement ou atypiques : le seul critère, c’est Jésus.
Alors c’est très beau, mais ce n’est pas très confortable… avec la différence arrivent les malentendus, les cultures qui s’entrechoquent, la nécessité de s’adapter, de tester de nouvelles choses, de trouver de nouvelles manières de vivre, mais c’est là, dans l’échange et l’exploration de nouveaux horizons, c’est là que Dieu se manifeste. Imaginez si les disciples étaient restés à Jérusalem : nous n’aurions pas connu Jésus. Nous aurions raté ce qui nous fait vivre. Heureusement que les disciples ont pris des risques, heureusement qu’ils se sont pris la tête avec les petits nouveaux, les étrangers, les païens…
Conclusion
Juste avant de partir au ciel, Jésus laisse à ses disciples des paroles qu’ils ne décoderont que plus tard : la promesse d’une vie abondante avec Dieu, et la responsabilité de partager cette abondance avec ceux que nous rencontrons. Jésus ne dit pas que ça se fera dans le confort et la tranquillité – si vous lisez la suite, vous comprendrez mieux : il y a des persécutions, des procès… Mais c’est là notre identité de chrétiens, une identité donnée par Dieu lui-même : l’Esprit qui nous relie à Dieu, qui nous connecte à Jésus, cet Esprit nous donne une vie nouvelle, à expérimenter et à partager sans restrictions.