Quelle maison pour le Seigneur ?

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Lecture biblique : 2 Samuel 7.1-16

David est roi d’Israël. Son autorité est désormais reconnue… mais ça n’a pas été simple pour en arriver là. D’une manière générale, l’établissement de la royauté en Israël a été assez chaotique.

Après la période des juges, où « chacun faisait ce qui lui semblait bon », le peuple a voulu un roi. Le Seigneur, lui, n’était pas très chaud. C’est lui qui devait être leur roi. Mais la théocratie, c’est une utopie ici-bas. Le cœur de l’homme étant ce qu’il est, ça ne peut pas fonctionner. Alors Israël aura un roi… Mais la première expérience n’est pas vraiment concluante : Saül sera finalement destitué par Dieu. David lui succédera, d’abord en secret, puis sa royauté s’affermira.

Au moment de notre texte, David est à l’apogée de son règne… et il est pris de scrupules ! En effet, il s’est bâti un palais, une belle maison, et Dieu, lui, n’a rien d’autre qu’une tente.

Il s’en ouvre au prophète Nathan, son conseiller. « Tu vois, moi, j’habite une maison en bois de cèdre. Mais le coffre sacré a seulement une tente de toile comme maison. ». Le prophète comprend le sous-entendu. Et il estime que les intentions du roi sont louables. Il l’encourage. Dieu ne peut qu’être d’accord : « Tu as sûrement une idée à ce sujet. Fais ce que tu penses, le SEIGNEUR est avec toi. »

Mais le Seigneur ne l’entend pas de cette oreille. Il se révèle alors à Nathan : il ne veut pas que David lui construise une maison. Il faut le lui dire et le stopper dans ses intentions… Mais pourquoi ?

Dieu n’a pas besoin de maison

Dieu n’a jamais demandé à ce qu’on lui construise un temple ! Il se contente bien d’une tente. Ça lui va bien d’être un Dieu nomade, accompagnant son peuple dans son voyage. Comme lors de la sortie d’Egypte, dans la traversée du désert, ou dans la conquête du pays promis.

D’ailleurs, dans l’épisode du désert, la tente est moins une maison qu’un lieu de rencontre. Dieu guidait son peuple par une nuée le jour et une colonne de feu la nuit. C’est lui qui décidait quand s’arrêter et quand repartir. Et quand le peuple s’arrêtait, on installait la tente en dehors du camp. Il manifestait alors sa présence en mettant la nuée à l’entrée de la tente. C’était le lieu privilégier pour Dieu pour rencontrer Moïse mais aussi pour le peuple d’aller consulter le Seigneur :

« Quand les Israélites installent leur camp, Moïse prend la tente sacrée et il la dresse en dehors du camp, assez loin. On l’appelle « la tente de la rencontre ». Tous ceux qui veulent consulter le SEIGNEUR sortent du camp et ils vont vers cette tente. » (Exode 33.7)

Le Seigneur est plus du genre à planter sa tente où il veut et quand il veut pour rencontrer son peuple qu’à se laisser enfermer entre les quatre murs d’une maison ! Dieu est, fondamentalement, nomade : toujours en mouvement. Il ne se laisse jamais enfermer ou limiter par quoi que ce soit : un temple, une église, un dogme ou une religion…

Et ce Dieu nomade finira par s’incarner en devenant homme. Toujours en mouvement… D’ailleurs, dans le prologue de son évangile, Jean le dit bien :

« La Parole s’est faite chair, et elle a fait sa demeure (littéralement : elle a planté sa tente) parmi nous » (Jean 1.14)

L’incarnation, le Fils de Dieu devenu homme que nous célébrons à Noël, c’est le Dieu nomade qui a planté sa tente parmi nous, pour venir à notre rencontre. Et parce que Dieu est toujours en mouvement, après sa résurrection, le Fils est remonté auprès du Père. Et le Saint-Esprit a été envoyé, pour planter sa tente chez le croyant, pour faire de notre corps le temple de Dieu. Aujourd’hui, nous sommes les temples du Dieu nomade qui chemine avec nous.

C’est Dieu qui va construire une maison à David

La deuxième raison pour laquelle le Seigneur ne veut pas que David lui construise un temple, c’est que c’est lui, le Seigneur, qui va construire une maison à David. Dieu renverse la perspective : « ce n’est pas toi qui va me construire une maison, c’est moi qui vais t’en construire une ». Évidemment ici, on joue sur les mots. La maison dont parle le Seigneur pour David n’a rien à voir avec le palais qu’il s’est fait bâtir, c’est une dynastie. Et Dieu promet qu’elle sera établie pour toujours.

On a vu, à juste titre, une dimension messianique à cette promesse. Elle est, certes, encore voilée. Mais elle se précisera petit à petit, notamment dans le discours des prophètes où le titre « fils de David » finira par devenir un titre messianique, appliqué à Jésus dans le Nouveau Testament. Car en effet, cette dynastie établie pour toujours, ce règne sans fin ne peut que pointer vers Celui qui est venu pour établir le Royaume de Dieu, le Fils de Dieu, Jésus, le Christ.

Il faut tout de même dire qu’un temple sera bien construit finalement pour le Seigneur. Mais selon les conditions fixées par Dieu lui-même : non par David mais par Salomon, son fils, premier représentant de cette dynastie promise.

Et le jour de l’inauguration du temple, il sera bien dit clairement que cette « maison » de Dieu ne peut en aucun cas le contenir. Salomon lui-même le dira dans sa prière :

« Est-ce que Dieu peut vraiment habiter sur la terre ? Le ciel est immense, mais il ne peut pas te contenir, toi, mon Dieu. Et ce temple que j’ai construit est beaucoup trop petit pour toi. » (1 Rois 8.27)

J’aime cette idée de construire un temple, une maison pour Dieu, tout en sachant qu’il sera beaucoup trop petit. Il faut nous en souvenir ! Tous les temples que nous construisons pour Dieu sont trop petits. Nos églises sont trop petites, nos vies sont trop petites, nos théologies sont trop petites. Penser le contraire, c’est succomber à la dérive sectaire, ou l’orgueil spirituel.

Quelle conclusion en tirer ? Dieu accueille ce que nous construisons pour lui. Et comme il a rempli le temple de Salomon de sa gloire, il habite les temples que nous lui offrons. Il habite nos églises et nos vies. Mais ce qui compte avant tout, c’est ce qu’il construit pour nous. C’est son projet pour nos vies et nos églises. C’est son Royaume appelé à croître dans notre cœur, dans nos églises, dans le monde.

Conclusion

Finalement, le projet de David de construire un temple pour le Seigneur a abouti, mais pas comme il le pensait. Les projets de Dieu étaient différents. La construction du temple a juste été différée, et réalisée par Salomon. Mais le grand projet de Dieu a été révélé à David. Celui d’une autre maison, une dynastie, ferment d’un autre royaume, le Royaume de Dieu inauguré par le Messie.

Nous pouvons faire des projets, mais c’est le projet de Dieu qui s’accomplit. Un projet qui n’est pas toujours conforme à ce que nous imaginons. Mais un projet dont la portée dépasse ce que nous pouvons penser. Il ne peut en être autrement de notre Dieu nomade, toujours en mouvement et toujours prêt à planter sa tente pour que nous puissions le rencontrer.

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