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Tant qu’il y a Jésus, il y a de l’espoir!

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Regarder le culte ici.

L’espoir fait vivre ! Souvent, on le dit avec une certaine ironie, en sous-entendant qu’il faut être réaliste. Mais on le voit, à titre personnel et en société, lorsqu’il n’y a plus d’espoir, plus de perspective, on ne sait plus comment avancer…

Dans l’Evangile, Jésus rencontre souvent des personnes désespérées, et je vous invite à lire l’histoire d’un homme possédé. Je vais la lire en plusieurs fois, car il y a beaucoup de rebondissements.

Lecture biblique : Marc 5.1-20

  • Un cas désespéré

1 [Jésus et ses disciples] arrivèrent de l’autre côté du lac de Galilée, dans le pays des Géraséniens. 

2 Jésus descendit de la barque et, aussitôt, un homme sortit du milieu des tombeaux et vint à sa rencontre.

Cet homme était possédé par un esprit impur 3 et il vivait parmi les tombeaux. Personne ne parvenait plus à le tenir attaché, même avec une chaîne ; 4 souvent, en effet, on l’avait attaché avec des fers aux pieds et des chaînes, mais il avait rompu les chaînes et brisé les fers. Personne n’avait la force de le maîtriser. 5 Sans cesse, la nuit comme le jour, il errait parmi les tombeaux et sur les montagnes, en poussant des cris et en se blessant avec des pierres. 

Jésus quitte le territoire juif et s’aventure en zone grise, dans la région de la Décapole, avec 10 villes grecques, où les coutumes juives rencontrent des pratiques païennes.

Alors que Jésus n’a encore rien fait, un homme se précipite. On nous le décrit comme un cas, un cas désespéré ! Depuis longtemps, il est violent, agressif, au point que sa communauté n’a pas réussi à le gérer et l’a exclu. Depuis, il est complètement dominé par ses pulsions destructrices, au point de se blesser lui-même. Il est impur : il vit parmi les tombeaux. Pour un Juif, toucher un cadavre, c’est se rendre impur devant Dieu pour un temps (Dieu est le Dieu des vivants !!) – alors vivre au milieu des tombeaux ? C’est comme vivre dans les poubelles !

Cet homme est possédé par un esprit impur, démoniaque. Alors là, nous aussi on entre en zone grise, surtout les Occidentaux qui ont du mal avec l’invisible ! A la vue des symptômes, nous pourrions proposer un autre diagnostic, p. ex. psychiatrique. Mais je crois qu’il faut résister à la tentation de réduire le texte biblique au tout médical, tout scientifique, tout maîtrisable. D’une part, la Bible affirme la réalité de forces invisibles, surnaturelles, plus fortes que nous – des bonnes et des maléfiques. Si nous croyons en Dieu, il est difficile de rejeter par principe l’existence d’esprits invisibles qui interagissent avec nous, même si nous ne les reconnaissons pas forcément au quotidien. D’autre part, pour en revenir à la possession, troubles spirituel et psychiatrique ne s’excluent pas forcément – au contraire même, d’après les spécialistes de la délivrance, les cas de possession prennent souvent racine dans des vies brisées de l’intérieur par le traumatisme, l’abus, l’addiction…

Cela dit, cet homme me renvoie à tous ceux que nous étiquetons « cas désespéré », quelle que soit la cause. Des cas qu’on n’arrive plus à accompagner, et qui nous laissent démunis : quelqu’un enfermé dans l’addiction, p. ex., ou pris dans l’engrenage crime-prison-difficile réinsertion, ou affecté par un trouble psy qu’on n’arrive pas à traiter, ou sous l’emprise d’un réseau radicalisé/mafieux… On n’a pas besoin d’être possédé pour toucher le fond !

Et c’est là, sur ce terrain dévasté, où la destruction rugit et le mal se déchaîne, sur ce terrain tellement opposé à ce que Dieu est, c’est là que Jésus met pied à terre.

  • La victoire sur les démons

6 [L’homme] vit Jésus de loin ; alors il accourut, se prosterna devant lui, 7 et cria d’une voix forte : « Que me veux-tu, Jésus, Fils du Dieu très-haut ? Je t’en conjure, au nom de Dieu, ne me tourmente pas ! » 8 Jésus lui disait en effet : « Esprit impur, sors de cet homme ! » 

9 Jésus l’interrogea : « Quel est ton nom ? »

Il répondit : « Mon nom est “Légion”, car nous sommes nombreux. » 10 Et il le suppliait avec insistance de ne pas les envoyer hors du pays.

11 Il y avait là un grand troupeau de porcs qui cherchait sa nourriture près de la montagne. 12 Les esprits impurs supplièrent Jésus : « Envoie-nous dans ces porcs, et nous entrerons en eux ! » 13 Jésus le leur permit. Alors ils sortirent du possédé et entrèrent dans les porcs. Le troupeau d’environ 2 000 porcs se précipita du haut de la falaise dans le lac et s’y noya. 

Sans attendre une démarche de foi de cet homme, Jésus entreprend de le délivrer, au grand dam de l’esprit démoniaque. Et celui-ci se lance dans une négociation avec Jésus. Il reconnaît Jésus, c’est d’ailleurs un indice de son origine : les démons sont toujours ceux qui reconnaissent Jésus, ce qui ne veut pas dire qu’ils se soumettent !

Alors le démon se prosterne devant Jésus, en fausse soumission ; il prend bien soin de nommer Jésus (à cette époque, il y avait cette croyance que quand on connaît le nom de quelqu’un, on peut le maîtriser) ; et même, il le supplie « au nom de Dieu » !!! C’en serait presque risible, si l’homme derrière n’était dans une telle détresse.

Jésus rétorque en demandant le nom du démon, ce dont il ne s’embarrasse pas généralement : par rapport à ce qui se pratiquait à l’époque (comme aujourd’hui) dans les milieux ésotériques, sorcellerie, magie etc., Jésus n’a pas de rituel. Même pour guérir, d’ailleurs ! Pas de formules, de gestes, d’effets spéciaux… Là où les techniques humaines sont en échec, Jésus parle et la chose arrive. C’était la même chose, juste avant, dans l’Évangile de Marc, quand Jésus calme la tempête en disant : « Silence », et juste après, lorsque Jésus ressuscite la fille de Jaïrus, qui était morte, simplement avec ces mots : « Jeune fille, lève-toi ». L’autorité divine, si efficace, est d’une grande sobriété.

Si Jésus renvoie la balle au démon, c’est pour montrer qu’il ne rentre pas dans son jeu, et au passage, nous devinons l’ampleur du dommage chez le possédé : une légion romaine comptait 6000 soldats… Le possédé est complètement tiraillé de l’intérieur !

Finalement, le démon demande une issue de secours : on considérait à l’époque que le pire pour les esprits était de ne pas avoir de réceptacle. Le mieux, c’est un humain, mais en second choix, des animaux iront bien. Et Jésus exauce cette demande ! Pourquoi ? Je ne sais pas. En tout cas, cela va se révéler fatal pour les démons, puisqu’ils s’auto-détruisent en se noyant. Ils ne peuvent aller que vers la mort. Cela nous montre aussi, visuellement, la gravité de ce que vivait cet homme.

Certains pourraient se scandaliser qu’on sacrifie des animaux, ou le revenu d’un éleveur qui n’y est pour rien, mais d’une part, pour le lecteur juif, le porc est à part – c’est un animal impur (comme le rat pour nous !). Par l’action de Jésus, symboliquement, tout ce qui est impur disparaît (esprits et animaux).

D’autre part, cela montre aussi l’importance que Jésus accorde à la délivrance de cet homme possédé : la vie et la liberté n’ont pas de prix ! Plus tard, sur la Croix, c’est sa propre vie que Jésus offre, pour débarrasser notre existence de toute chaîne, de toute impureté, de toute emprise… Jésus ne prend pas à la légère le coût de ses actions, mais à ses yeux, rien, rien, ne vaut plus que la vie et la liberté d’un homme.

  • Le rejet des témoins

14 Ceux qui gardaient les porcs s’enfuirent et portèrent la nouvelle dans la ville et dans la campagne. Les gens vinrent donc voir ce qui s’était passé. 

15 Ils arrivent auprès de Jésus et voient l’homme qui avait été possédé par une légion d’esprits impurs : il était assis, habillé et il avait toute sa raison. Et ils prirent peur. 16 Ceux qui avaient tout vu leur racontèrent ce qui était arrivé à l’homme possédé et aux porcs. 17 Alors ils se mirent à supplier Jésus de quitter leur territoire. 

Jésus a résolu une situation que personne ne pouvait gérer ! Les concitoyens en sont plus qu’impressionnés, ils sont terrifiés, et ils demandent à Jésus de partir. Pour eux, le coût du changement est trop grand : mieux vaut garder son petit équilibre, quitte à devoir supporter un démoniaque, que d’accueillir la vie au risque de perdre un troupeau, ou de modifier l’écosystème ! A la fin, on se demande qui, du démoniaque ou de son entourage bien-pensant, est le plus sous emprise, le plus morbide, le plus sec !!!

Etrangement, lorsque Jésus fait surgir la vie, cela ne réjouit pas tout le monde… Certains trouvent des bénéfices au malheur des autres, et ce texte empêche toute naïveté : la lumière qui surgit dans les ténèbres ne suscite pas que de la joie… mais aussi de la résistance.

Sans même parler de malveillance, la simple inertie peut créer des résistances, et aussi chez les chrétiens, pourtant acquis à la cause ! Car toute nouveauté, aussi lumineuse qu’elle soit, met en péril nos équilibres, nos habitudes, notre écosystème… tout avancement coûte et déstabilise : mais si c’est pour la délivrance, même d’un seul, cela n’en vaut-il pas la peine ? Nous résistons au changement quand nous restons focalisés sur ce que nous perdons, mais si nous regardons à ce qui est gagné, quelle joie ! quelle motivation ! C’est cette attitude-là qui a permis au Christ d’entrer dans la mort, les yeux fixés sur sa résurrection, sur notre résurrection avec lui, sur la joie éternelle qu’il allait vivre avec nous.

  • L’invitation à aller

18 Au moment où Jésus montait dans la barque, celui qui avait été possédé le supplia de pouvoir rester avec lui. 19 Jésus ne le lui permit pas, mais il lui dit : « Retourne chez toi, dans ta famille, et raconte-leur tout ce que le Seigneur a fait dans sa bonté pour toi. » 20 L’homme s’en alla donc et se mit à proclamer dans la région de la Décapole tout ce que Jésus avait fait pour lui ; et tout le monde était très étonné.

Dernier rebondissement : l’ex-démoniaque veut suivre Jésus, mais… Jésus le renvoie ! C’est d’autant plus étonnant que Jésus a accédé à la requête des démons, à celle des habitants qui lui demandent de partir, mais le seul qui a une intention louable, Jésus le renvoie ?!

Bien sûr, Jésus voit plus loin : l’homme, rentré chez lui, sera un témoignage fort de la puissance et de l’amour du Christ, et il portera plus de fruits en étant disciple « à distance » et témoin.

Première réflexion : l’exaucement ou le non-exaucement des prières n’est pas un gage de qualité de nos demandes… Souvent on se lamente quand on n’est pas exaucé : quand Dieu ne répond pas, et si c’était pour quelque chose de plus grand et de plus fécond ?

Deuxième réflexion : libérés par le Christ, nous n’avons qu’une envie, rester près de lui, dans un environnement saint, lumineux et pur. Mais Jésus nous renvoie, il nous disperse ici et là pour que la petite flamme que nous avons reçue puisse se multiplier… Vous me direz : et les disciples qui ont le privilège de suivre Jésus dans la barque ? Eux aussi ont dû se disperser, après la résurrection : « allez, et faites de toutes les nations mes disciples… ». Un disciple de Jésus, c’est quelqu’un qui sort, qui se mélange, et qui partage ce qu’il a reçu. Ce n’est pas confortable, on peut se heurter à des réactions agressives, des malentendus, des valeurs qui changent, et d’ailleurs souvent les chrétiens finissent par perdre de vue leur réseau d’avant (2 ans en moyenne). Ce n’est pas confortable, mais… c’est ce que Jésus a fait lui-même : il est venu dans le monde, dans les ténèbres, jusque dans la mort, pour partager sa vie et sa lumière. Et il nous demande de faire pareil, jusqu’à ce que sa lumière soit partout.

Conclusion

Finalement, on pourrait dire que, tant qu’il y a Jésus, il y a de l’espoir ! Personne, ni vous ni votre voisin, ni celui que vous croisez dans la rue, ni celle qui vous désespère, ni le criminel ou le terroriste : personne n’est tombé si bas que Jésus ne puisse le relever. Sans être naïfs sur les influences (démoniaques ou pas), le témoignage du démoniaque nous rappelle que derrière un cas désespéré, il y a toujours une personne, une personne que Dieu a créée et qu’il aime, une personne qu’il veut libérer et restaurer. Plus grand que le plus grand désespoir, voilà l’amour de Dieu, la puissance de Dieu qui domine sur le mal, quelle qu’en soit la forme. Alors que Dieu renouvelle notre regard et notre attitude, pour que nous soyons toujours pleins d’espoir, ouverts à la possibilité de son action !

La fidélité, même pour les infidèles

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Jusqu’où va la fidélité ?

Dans nos relations humaines – d’amour ou autre ! nous ne sommes pas fidèles seulement envers notre conjoint, mais aussi envers notre famille, nos amis, ceux envers qui nous nous sommes engagés… – la fidélité est un des fondements de la confiance : je fais confiance à l’autre parce qu’il est fiable, fidèle, qu’il honore sa parole, ses engagements, son soutien. Si la confiance est rompue, p. ex. si votre conjoint a regardé ailleurs, qu’un collègue a manœuvré dans votre dos, qu’un ami a colporté des rumeurs sur vous, qu’un employeur ou un client n’a pas honoré sa dette devant votre travail, la trahison peut être très douloureuse, et la relation est sérieusement entamée : vous serez sur vos gardes et vous aurez du mal à vous impliquer.

Notre fidélité dans une relation est bien souvent conditionnée, notamment à la fidélité de l’autre : tant qu’il honore ses engagements, j’honore les miens (en tout cas j’essaye). Et on est tenté de se dire qu’avec Dieu c’est pareil : certes, il est infiniment plus patient que nous, mais quand même, il y a bien des limites !

En cette veille de Saint Valentin, j’ai choisi un passage de l’Ancien Testament qui nous parle d’amour et de fidélité, qui nous parle de la relation entre Dieu et son peuple comme si c’était un couple marié. Je récapitule le contexte : à l’époque d’Abraham puis de Moïse, YHWH, Dieu, se révèle personnellement au peuple d’Israel, il le comble de bénédictions, il le libère de l’esclavage et des difficultés, le re-comble de bénédictions, le protège… Tout cela par amour : il aime son peuple, avec la tendresse d’un père, mais aussi avec la passion d’un amoureux. Malheureusement, comme dans nombre de relations, la confiance a été trahie. Ici, le peuple et ses responsables se laissent influencer par les peuples alentour, qui ont leur propre religion, espérant que le dieu d’à côté pourrait lui aussi leur faire du bien ! Dans le contexte d’Israel, sur les territoires secs à l’Est de la Méditerranée, la bénédiction c’est surtout la pluie, pour faire pousser les récoltes et nourrir les hommes comme les bêtes. Et justement, à côté, il y a ce Dieu « Baal » (ça veut dire « maître » mais là c’est presque un prénom), spécialiste de la pluie et de la fertilité. Israel se lance alors dans des rites divers, construit des temples, engage des prêtres, etc. pour obtenir les faveurs de ce dieu ! Elle n’hésite pas à plonger dans des comportements très louches, cautionnant p. ex. la prostitution sacrée ou le sacrifice d’enfants (rien que ça !). En voyant cela, Dieu Yhwh ne peut pas rester indifférent : c’est une trahison, un adultère. Du coup, il prend du recul, il coupe les vivres – notamment les vivres d’eau, puisqu’il est le créateur : il ne pleut plus, Israël se retrouve dans la sécheresse. On est au bord de la rupture… Voyons ensemble comment Dieu envisage la suite.

Lecture biblique : Osée 2.16-25

16 Eh bien, [dit Dieu] c’est moi qui vais la séduire,
je la conduirai au désert
et je regagnerai sa confiance.

17 Et de là-bas, je lui rendrai ses vignobles
et je ferai de la vallée de Akor [vallée où a lieu la première condamnation pour détournement de fonds, vallée de la corruption]
une porte d’espérance,
et là elle répondra comme au temps de sa jeunesse,
au jour où elle monta du pays d’Egypte.

18 Et il adviendra en ce jour-là
– oracle du SEIGNEUR –
que tu m’appelleras « mon mari »,
et tu ne m’appelleras plus « mon baal, mon maître ».               //

19 J’ôterai de sa bouche les noms des Baals,
et on ne mentionnera même plus leur nom.

20 Je conclurai en ce jour-là une alliance,
avec les bêtes des champs, les oiseaux du ciel, les reptiles du sol ;
l’arc, l’épée et la guerre,
je les briserai, il n’y en aura plus dans le pays,
et je permettrai aux habitants de dormir en sécurité.                //

21 [Israel] Je te fiancerai à moi pour toujours,
je te fiancerai à moi
par la justice et le droit, l’amour et la tendresse.

22 Je te fiancerai à moi par la fidélité
et tu connaîtras le SEIGNEUR.

23 Et il adviendra en ce jour-là que je répondrai
– oracle du SEIGNEUR –,
je répondrai à l’attente des cieux
et eux répondront à l’attente de la terre.

24 Et la terre, elle, répondra
par le blé, le vin nouveau, l’huile fraîche,
et eux répondront à l’attente d’Izréel [une ville d’Israël].                    //

25 Je l’ensemencerai pour moi dans le pays,
et j’aimerai Lo-Rouhama [« la mal-aimée »],
et je dirai à Lo-Ammi [« pas mon peuple »] : « Tu es mon peuple »,
et lui, il dira : « Mon Dieu ».

L’initiative de Dieu  

Devant l’infidélité de « sa femme », Israël, Dieu réagit en deux temps. D’abord il marque le coup : c’est grave, ce qui s’est passé, la trahison ne peut pas être prise à la légère. Il y a une pause dans la relation, un stop. Dieu enlève à Israël tous les avantages qu’elle avait auprès de lui. Mais Dieu ne s’arrête pas là : il veut faire de ce « désert » une opportunité, la chance d’un nouveau départ, l’occasion de se retrouver, tels qu’ils sont, face à face, comme au début, en mettant de côté tout ce qui perturbé la relation.

« Je la séduirai à nouveau » : qui d’entre nous, face à la trahison et à l’infidélité, se dirait cela ? n’est-ce pas au traître de venir implorer notre pardon ? Et pourtant là, c’est Dieu qui se met en quatre, qui s’abaisse, pour reconquérir celle qui l’a trahi. Dieu ne reste pas passif devant la difficulté, mais il se bat pour son couple. Même si lui est innocent, il ne se campe pas sur sa blessure ou ses droits, mais il donne tout pour reconquérir sa bien-aimée.

Parce que Dieu a un rêve, le rêve d’une vie heureuse à deux : un peuple en sécurité, dans la paix, sans guerres ni conflits, un peuple dans l’abondance (les champs de blé, les vignes,…), un peuple juste et bon. Plus que ça, son rêve, c’est l’intimité, l’authenticité, la complicité : que le peuple le connaisse, lui, pour qui il est, presque à visage découvert, sans masque ni faux-semblant, que le peuple réponde avec amour à sa tendresse passionnée… Et pour ce rêve, Dieu renouvelle ses vœux, il réaffirme sa promesse : par trois fois « je te fiancerai à moi… » (v.21). Dans le but qu’Israël réponde : « oui, je le veux ! tu es mon dieu, mon mari » (v.25).

Je trouve toujours très touchant le désir de renouveler ses vœux de mariage après des décennies ensemble… mais ici, Dieu renouvelle ses vœux avec une épouse infidèle qui n’a pas tenu sa promesse ! Ca paraît presque insensé, on aurait envie de dire à Dieu : « mais enfin, sois lucide ! elle te trompe depuis des années… passe à autre chose ! » Et c’est vrai que si Dieu comptait sur son épouse infidèle, il y aurait peu d’espoir…

Mais il s’appuie sur sa propre fidélité. Les fiançailles sont ici équivalentes au mariage, à l’échange public des promesses, à l’échange de la dot. Et Dieu fournit la dot, il donne lui-même ce qui manque à sa femme, pour que ça marche : justice et droit, amour et tendresse, fidélité. Même plus, il efface le souvenir de ses anciens amants, il classe le dossier, on n’en parle plus… Il fait tout ce qui est en son pouvoir pour repartir du bon pied.

Quand cela arrive-t-il ? « En ce jour », dit Dieu. Quand les prophètes reçoivent de Dieu des indications sur l’avenir, ils voient que c’est devant eux, mais ils ne voient pas forcément la distance ou les étapes intermédiaires : c’est un point à l’horizon, un cap. Ce « jour », le « jour de l’Eternel », désigne à la fois

  • la façon dont Dieu va prendre soin d’Israel après l’exil, en la ramenant au pays (au 5e avant JC) ;
  • mais aussi le jour où Dieu purifiera de l’intérieur le cœur de son peuple en ôtant ses infidélités : sur la Croix, quand Jésus assume les infidélités de l’humanité pour nous en libérer, pour nous donner l’Esprit de Dieu qui vit en nous (quelle plus grande intimité ?), et nous faire entrer dans son peuple élargi : l’Eglise, épouse du Christ ;
  • mais aussi le jour où les infidélités, les conflits et les famines, seront complètement balayés de la surface de la terre, un jour de paix et d’harmonie pour notre monde, à tous les niveaux de la société, jusque dans la nature – et ce jour-là, nous l’attendons encore…

Une relation amoureuse peut être détruite de bien des façons. Mais quand je demande aux couples qui se préparent au mariage ce qui serait le pire pour eux, l’infidélité est toujours dans le top 3. La Bible parle de notre péché comme d’une infidélité (que nous trompions Dieu, que nous regardions simplement ailleurs, ou que nous soyons indifférents à sa voix, distants). C’est un adultère, une trahison blessante, mordante, humiliante, qui remet tout en question. Tout, sauf la fidélité de Dieu, qui honore sa promesse envers nous, qui est prêt à se donner lui-même en dot pour gagner notre amour. Il l’a montré en Christ.

Je n’ai pas fini ma prédication, mais avant de voir comment la fidélité de Dieu peut nous inspirer dans nos relations, je vous invite à chanter pour nous réapproprier la promesse de Dieu, l’assurance de sa fidélité, en particulier là où nous ne le méritons pas.

L’ancre de ma foi.

La fidélité de Dieu, une inspiration pour nos relations

Comment la fidélité de Dieu, scellée en Christ, habitant en nous par l’Esprit, peut-elle nous inspirer dans nos relations ? Comment pouvons-nous faire nôtre cette fidélité qui le caractérise et qu’il veut partager avec nous ? Certes, nous sommes infiniment plus limités que Dieu. Cela dit, nous sommes aussi rarement 100% innocents ! Explorons la façon dont la fidélité de Dieu peut nous inspirer, surtout quand l’autre nous déçoit.

Evidemment, en parlant de fidélité, on pense vite au couple, au mariage (couple engagé, lié par une promesse).  Spontanément, la fidélité évoque l’exclusivité de l’intimité physique, ne pas avoir d’amants, ne pas convoiter la femme qui passe à côté ou qui apparaît sur l’écran. Mais on le voit dans ce texte, et on l’expérimente, la fidélité c’est tellement plus ! ce n’est pas un couple qui reste ensemble pour rester ensemble, c’est un couple qui se soutient, dans le temps, une relation de confiance qui s’approfondit et qui permet d’être soi-même devant l’autre.

Un mot clef : la persévérance. Être fidèle, c’est être persévérant dans notre engagement, notre soutien, notre affection. Et la persévérance se muscle dans ces moments où l’autre nous déçoit, nous est infidèle, commet des erreurs ou des fautes. C’est facile, de persévérer quand il n’y a pas de souci ! Mais c’est quand on persévère face à la difficulté qu’on expérimente quelque chose de la fidélité divine.

Et il faut bien avouer que la persévérance, la fidélité, ne sont pas des qualités principales de notre temps ! Quasiment un mariage sur deux se finit en divorce, sans parler des couples qui se séparent sans passer par mariage et divorce. On accepte que les relations flottent au gré des ressentis, pour composer, recomposer, re-recomposer des familles au lien de plus en plus distendu.

Comprenez-moi bien : je suis bien consciente qu’il y a des cas où le mariage est non seulement détruit mais aussi destructeur. Vous avez peut-être subi un divorce, ou l’avez choisi parce que c’était un moindre mal – et je ne condamne absolument pas ! Cela dit, on ne peut pas dire que la majorité des ruptures autour de nous sont des cas de force majeure… La persévérance dans les relations n’est pas monnaie courante.

Et j’élargis : il n’y a pas que le couple dans la vie ! Qu’en est-il de nos relations en famille ? de nos amitiés ? de nos relations d’église ? que faisons-nous quand l’autre nous déçoit ? quand il s’éloigne ? est-ce que nous suivons le même mouvement d’écartement, ou est-ce que nous remontons, à contre-courant, pour rechercher l’autre et raviver la relation ? Nous sommes souvent prompts à nous saisir de ce qui s’est mal passé. L’attitude consommatrice nous pousse à rendre la relation si elle ne nous satisfait pas à 100% (et quel être humain, parfaitement imparfait, pourrait me satisfaire à 100% ?). Les relations virtuelles, basées sur les affinités, en rajoutent sûrement une couche.

Mais Dieu nous donne le modèle d’une persévérance qui regarde à l’affection d’origine, à ce qui a été construit, à la promesse, et qui donne une nouvelle chance (en disant les choses ! mais en recherchant la réconciliation). Par exemple, en recontactant un ami éloigné, un cousin avec qui on est fâché, en parlant avec notre collègue au lieu de l’éviter… Il s’agit de redonner une chance, sans s’enfermer dans l’amertume du passé ou nos droits et notre fierté, car les obstacles intérieurs sont aussi importants que les fléaux sociaux. Et là aussi, la fidélité de Dieu est essentielle, c’est notre force : si nous sommes trop fiers, que notre honneur paraît bafoué, regardons au Dieu, roi des cieux, qui s’est abaissé pour nous rejoindre. Si c’est la douleur qui nous empêche de revenir, regardons au Dieu compatissant et juste, qui prendra soin de nous.

Conclusion

La pandémie l’a montré : nous souffrons de solitude. Et ça ne risque pas de changer si nos relations changent tout le temps. Si au moindre désagrément, on se déracine, les relations restent toujours superficielles, et alors, même entouré, on reste seul derrière notre masque. Cultiver la persévérance, cultiver la fidélité, c’est surmonter des obstacles pour se donner la chance de relations profondes, intimes, authentiques.

Certes, nous ne sommes pas Dieu… Nous sommes bien plus petits que Dieu, mais ce qui fait la différence dans notre vie, ce qui impressionne/ motive/ inspire, ce supplément d’âme ou ce sel, c’est bien quand quelque chose d’extra-ordinaire vient transfigurer la banalité ordinaire. Même si les autres manquent de fidélité, même si nous manquons de fidélité, même si /surtout ! si c’est douloureux et difficile, regardons à Dieu, comptons sur sa fidélité, laissons l’exemple du Christ nous inspirer, et que son Esprit nous aide à porter des fruits de fidélité.

Solae (5) A Dieu seul la gloire

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Jean-Sébastien Bach est considéré comme l’un des plus grands, et même peut-être le plus grand compositeur de l’histoire de la musique. Savez-vous comment il signait la plupart de ses partitions ? Il ne mettait pas seulement son nom, il ajoutait trois lettres, qui n’étaient pas ses initiales : SDG, pour Soli Deo Gloria. A Dieu seul la gloire. Et il ne le faisait pas seulement pour les partitions d’oeuvres sacrées.

Toute l’oeuvre de ce génie de la musique, profondément croyant, était dédiée à Dieu. Le désir de Jean-Sébastien Bach était que toute sa musique rende gloire à Dieu. Il cherchait à vivre, en bon Protestant, cette cinquième affirmation théologique fondamentale de la Réforme avec laquelle nous terminons notre série de prédications : Soli Deo Gloria. A Dieu seul la gloire !

C’est d’abord, bien-sûr, une expression biblique, qu’on retrouve à plusieurs reprises, sous différentes formes. On l’entend proclamée dans le ciel, dans les extraordinaires visions du trône et de l’Agneau aux chapitres 4 et 5 de l’Apocalypse :

Apocalypse 4.11
« Seigneur, notre Dieu, tu es digne de recevoir la gloire, l’honneur et la puissance.
Car c’est toi qui as créé toutes choses,
tu as voulu qu’elles soient et elles ont été créées. »

Apocalypse 5.13
Et j’entendis toutes les créatures dans les cieux, sur terre, sous terre et sur la mer – les créatures de l’univers entier – qui chantaient :
« À celui qui siège sur le trône et à l’agneau
soient la louange, l’honneur, la gloire et la puissance pour toujours ! »

On la retrouve aussi à plusieurs reprises ailleurs dans le Nouveau Testament, comme par exemple dans les deux derniers versets de l’épître de Jude :

Jude 1.24-25
24 À celui qui peut vous garder de toute chute et vous faire paraître sans défaut et pleins de joie en sa glorieuse présence, 25 au Dieu unique, notre sauveur par Jésus Christ notre Seigneur, sont la gloire, la grandeur, la puissance et l’autorité, depuis toujours, maintenant et pour toujours ! Amen.

C’est aussi une formule qu’on a abondamment reprise dans l’hymnologie chrétienne, c’est ce qu’on appelle des doxologies. Elles font partie de nos cantiques ou on les utilise dans nos formules liturgiques au cours d’un culte.

Le risque, justement, c’est peut-être qu’on en reste à une simple formule…

 

A Dieu soit la gloire

Pour aller au-delà de la formule, il est pertinent de garder à l’esprit, ou peut-être de reprendre conscience de ce que signifie l’expression « A Dieu seul la gloire ». Que dit-on quand on chante, quand on prie ou quand on proclame : « à Dieu soit la gloire » ?

Nous disons qu’il est le seul qui puisse recevoir la gloire. Il est le seul digne d’être adoré parce qu’il est unique et qu’il n’y en a pas d’autre comme lui. C’est ce que la Bible affirme quand elle dit que Dieu est saint : il est unique et incomparable.

Dieu est seul digne d’être adoré parce qu’il est à l’origine de toutes choses, à l’origine de l’univers entier qu’il a créé, à l’origine de notre salut qu’il a pleinement accompli en Jésus-Christ. C’est la grâce seule (un cadeau immérité de Dieu), par la foi seule (nous ne pouvons ni ne devons rien y ajouter), grâce au Christ seul (il a tout accompli !), et c’est l’Écriture seule qui nous le dit… voilà pourquoi la gloire lui revient, à lui seul !

Dans la vision du trône d’Apocalypse 4, il y a un geste que font les 24 anciens qui est très significatif : ils jettent leurs couronnes devant le trône et rendent gloire à Dieu. Ce geste signifie simplement que devant Dieu, plus aucune couronne ne tient. Tous nos motifs de fierté, toutes nos petites ou grandes gloires personnelles s’effacent devant la gloire infinie de Dieu.

La gloire, en hébreux, c’est kavod. Un mot dont la racine signifie le poids (c’est-à-dire l’importance). Or, face à Dieu, personne ne fait le poids ! Il est le seul, l’unique, qui puisse être adoré.

Finalement, c’est bien ce que disait déjà le début du Décalogue :

Exode 20.2-3
Je suis le Seigneur ton Dieu, c’est moi qui t’ai fait sortir d’Égypte où tu étais esclave.
Tu n’adoreras pas d’autres dieux que moi.

 

Tout faire pour la gloire de Dieu

A Dieu seul la gloire ! Personne ne fait le poids face à lui. On pourrait s’arrêter là… mais je vous propose d’aller un peu plus loin et de nous demander quelles peuvent être les conséquences pratiques de cette affirmation fondamentale. Et pour cela, je vous propose de lire un passage tiré de la première épître de Paul aux Corinthiens.

1 Corinthiens 10.23-33
23 « Tout est permis », dites-vous. Oui, cependant tout n’est pas utile. « Tout est permis », cependant tout n’est pas constructif. 24 Que personne ne cherche son propre intérêt, mais plutôt celui des autres.
25 Vous êtes libres de manger tout ce qui se vend au marché de la viande sans avoir à poser des questions par motif de conscience ; 26 car, comme il est écrit, « c’est au Seigneur qu’appartient la terre avec tout ce qu’elle contient ».
27 Si une personne non-croyante vous invite à un repas et que vous acceptez d’y aller, mangez de tout ce qu’on vous servira, sans poser de question par motif de conscience. 28 Mais si quelqu’un vous dit : « Cette viande provient d’un sacrifice offert aux idoles », alors n’en mangez pas, à cause de celui qui a fait cette remarque et par motif de conscience – 29 je parle ici non pas de votre conscience, mais de celle de l’autre.
« Mais pourquoi, demandera-t-on, ma liberté serait-elle limitée par la conscience de quelqu’un d’autre ? 30 Si je remercie Dieu pour ce que je mange, pourquoi me critiquerait-on au sujet de cette nourriture pour laquelle j’ai dit merci ? »
31 Ainsi, que vous mangiez, que vous buviez, ou que vous fassiez quoi que ce soit, faites tout pour la gloire de Dieu. 32 Ne soyez un obstacle pour personne, ni pour les Juifs, ni pour ceux qui ne le sont pas, ni pour l’Église de Dieu. 33 Comportez-vous comme moi : je m’efforce de plaire à tous en toutes choses ; je ne cherche pas mon propre bien, mais le bien d’une multitude de gens, afin qu’ils soient sauvés.

C’est bien-sûr la formule du verset 31 qui m’intéresse en particulier : « que vous mangiez, que vous buviez, ou que vous fassiez quoi que ce soit, faites tout pour la gloire de Dieu. »

La formule est très générale : « Quoi que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu » Mais ce qui est intéressant, c’est qu’elle est citée par Paul alors qu’il évoque une question très concrète, voire terre à terre. Il répond à la question qui lui est posée : peut-on ou non manger de la viande issue d’un animal offert en sacrifice à des divinités païennes ?

C’est une problématique qui peut nous sembler étrange aujourd’hui mais c’était une vraie question pour des chrétiens du Ier siècle, d’origine païenne et vivant dans un contexte païen. Et la réponse de Paul est très intéressante parce qu’elle est nuancée. Il ne répond pas par oui ou par non. Il dit : ça dépend ! Et ça ne dépend pas de vous, ni de la viande ou de la façon dont elle a été apprêtée. Ça dépend des autres, de leur conscience. Ça dépend de l’effet qu’aura sur l’autre le fait de consommer ou de ne pas consommer telle ou telle viande, dans telle ou telle circonstance.

Face à cette question comme face à toute autre question, la boussole qui doit orienter ma décision, c’est la gloire de Dieu. Quoi que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu !

Il ne s’agit pas ici de faire une liste des choses qui glorifient de Dieu et de celles qui ne le glorifient pas, comme si on pouvait tout classer dans l’une de ces deux catégories. Il s’agit de se poser toujours la question, et d’y répondre en fonction des circonstances. Non pas de manière absolue, ou légaliste, mais de manière nuancée.

Dieu n’est pas glorifié si mon attitude ou mes paroles font du mal à mon prochain ou provoquent sa chute. Parce que Dieu aime tous les êtres humains, chacune et chacun en particulier, et veut qu’ils soient sauvés. Il ne veut pas qu’ils soient blessés, humiliés, dévalorisés…

Notre vocation d’êtres humains créés à l’image de Dieu, c’est de glorifier Dieu. De refléter par notre vie la gloire de Dieu. Et c’est encore plus vrai si nous sommes croyants, et si nous affirmons que Jésus-Christ dont nous sommes les disciples est lui-même l’image parfaite de Dieu.

« Quoi que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu ! »

Cette exhortation de l’apôtre Paul est aussi un appel à voir dans tous les domaines de notre vie, des occasions de glorifier Dieu. Quoi que nous fassions, dans quelque domaine que ce soit, il est possible de glorifier Dieu ! Il ne s’agit pas ici de donner la gloire à Dieu comme s’il en manquait, il s’agit de lui rendre gloire, reconnaissant que tout vient de lui.

Il ne s’agit donc pas ici de passer sa vie à chanter des cantiques ! Comme si c’était la seule façon de glorifier Dieu…

Il s’agit de glorifier Dieu par notre vie, dans notre quotidien. Vous pouvez glorifier Dieu par votre travail professionnel, par votre engagement associatif, dans vos relations avec vos proches, vos voisins, vos amis. Vous pouvez glorifier Dieu en faisant tout cela bien, avec amour, avec patience, avec bienveillance, et on pourrait citer ici toute la liste du fruit de l’Esprit de Galates 5.22.

Vous pouvez bien sûr aussi glorifier Dieu en témoignant de votre foi et de votre espérance. Mais à quoi sert-il de témoigner de sa foi autour de soi si, par le reste de notre vie, nous ne glorifions pas le Dieu d’amour et de paix ?

 

Conclusion

A Dieu seul la gloire ! Il est le seul, l’unique, l’incomparable. Rien ni personne ne fait le poids face à lui. Rien n’est sacré ou absolu sinon Dieu. Pas même ma religion, mon Église, ma théologie ou ma vision de Dieu.

A Dieu seul la gloire ! Ça ne veut pas dire que tout ce que je suis ou ce que je fais n’a aucune valeur. Ça veut dire que c’est le regard de Dieu, son regard de grâce et d’amour, qui donne du sens à ma vie, qui donne du poids, de l’importance à ce que je suis et ce que je fais.

A Dieu seul la gloire, aujourd’hui, dans ma vie, et pour l’éternité, dans l’univers entier !

5 Solae (4) En Christ seul

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Nous continuons ce matin notre série sur les fondamentaux de la Réforme protestante au XVIe siècle, dont nous sommes héritiers, avec cette affirmation : le salut vient du Christ seul, un salut offert par grâce que nous recevons simplement par la foi. Pour creuser cette affirmation, je vous invite à lire un passage de la première lettre de l’apôtre Paul à Timothée. Paul est en train de recommander à Timothée et à l’église de prier, de prier largement, pour tous, et son argument massue, c’est l’œuvre du Christ pour nous.

Lecture biblique : 1 Tim 2.1-7

1 Avant tout, je recommande ceci : il faut faire des demandes à Dieu, le prier, le supplier et le remercier pour tous les êtres humains. 2 Il faut prier pour ceux qui nous gouvernent et pour toutes les autorités. Alors nous pourrons mener une vie calme et tranquille en étant fidèles à Dieu et en nous conduisant bien. 3 Voilà ce qui est beau et ce qui plaît à Dieu notre Sauveur, 4 qui veut que tous soient sauvés et arrivent à connaître la vérité. 

5 En effet, il y a un seul Dieu. Il y a aussi un seul intermédiaire [médiateur] entre Dieu et les êtres humains : c’est un être humain, le Christ Jésus, 6 qui a donné sa vie en rançon pour libérer tous les humains. C’est là le témoignage que le Christ a donné au moment fixé par Dieu.

7 Et c’est à cause de ce témoignage que Dieu a fait de moi un messager et un apôtre (je dis la vérité, je ne mens pas). Il m’a chargé d’enseigner aux non-Juifs la foi et la vérité.

Pour résumer : Paul nous invite à prier pour l’humanité, à la fois nos contemporains et ceux qui nous gouvernent, afin que la Bonne Nouvelle du salut en Christ puisse se propager facilement au plus grand nombre, car Dieu veut que l’humanité soit sauvée – le Christ en est la preuve. Concentrons-nous donc sur le Christ, clef de notre salut.

Jésus-Christ, le médiateur

Jésus est présenté ici comme un médiateur, un intermédiaire, entre Dieu et nous. Au départ, c’est un terme juridique (comme un médiateur entre deux parties qui s’affrontent), commerciale, ou diplomatique : le médiateur, c’est quelqu’un qui aide à établir ou rétablir la relation. Plus largement, on peut penser au grand frère qui va parler aux parents de notre part, à l’oncle qui rassemble toute la famille pour régler une affaire, ou tout simplement à l’ami qui recommande un professionnel en disant : « Dis-lui bien que tu viens de ma part ! ». Ce médiateur facilite la transaction, la relation, et pour que ça marche, il faut qu’il ait la faveur, la confiance, des deux parties.

Jésus-Christ, médiateur entre Dieu et nous. Cela signifie que la relation entre Dieu et nous a été rompue, puisque nous avons besoin d’un intermédiaire pour rétablir le contact. Car l’humanité créée, aimée de Dieu, rendue vivante par Dieu, appelée à gouverner avec justice dans le monde – l’humanité s’est détournée de Dieu tout en profitant de ses dons (nous vivons encore !). Mais en nous détournant du Dieu de justice et de vérité, nous nous sommes détournés du même coup de la justice et de la vérité… entrant dans les engrenages du mal qui abîme tout, depuis notre pensée la plus intime jusqu’au système politique ou économique le plus impersonnel. Nous avons donc besoin à la fois d’être libérés du mal, et d’être reconnectés avec Dieu.

L’image de la rançon dit bien cette double réalité : on paye une rançon pour libérer des otages, et pour qu’ils retrouvent leur vraie vie, avec leurs proches. Et cette libération a un prix ! Mais à la différence des otages généralement passifs, nous sommes artisans de notre propre esclavage, à la fois victimes et coupables du mal qui nous gangrène : le montant de notre rançon, c’est notre dette devant Dieu. Et cette dette, nous ne pouvons pas la payer car jamais nous n’aurons assez ! Jamais nous ne couvrirons le passé… mais Jésus qui a mené une vie parfaitement juste et sainte devant Dieu, parfaitement obéissant et aimant, Jésus a donné toute la valeur de sa vie pour nous délivrer des conséquences du mal.

Imaginez un jeu de société, un jeu de plateau : un seul joueur a réussi à faire le maximum de points, 100%, et sa victoire c’est un joker infini, qui permet de sortir de toutes les cases « prison ». Quand vous êtes en prison, victime d’un guet-apens ou de vos propres mauvais coups, ce joueur décide d’utiliser son joker – pour vous, pour votre voisin… c’est infini ! Vous êtes libres d’avancer, grâce à son joker.

Jésus peut payer nos dettes parce qu’il est solidaire de notre humanité : il est comme nous ! Et une fois qu’il nous a rendus libres, il peut nous amener devant Dieu, comme un médiateur, parce qu’il est aussi intimement lié à Dieu, il est Dieu le Fils : il est le pont parfait et suffisant, Dieu devenu homme pour sauver l’humanité.

Cela est arrivé une fois, une fois pour toutes : en Jésus, Dieu s’est attaché à nous et nous a attachés à lui, jusque dans son ADN, pour l’éternité. Le pont entre Dieu et nous ne peut plus se refermer : il est imprimé dans l’identité-même de Dieu…

Nous sommes sauvés par le Christ seul : il est notre libérateur et notre médiateur, il est la porte et il est la clef, il est le pont éternel entre Dieu et nous.

Cette affirmation est au cœur de toutes les autres affirmations de la Réforme : nous sommes sauvés par le Christ seul, qui s’offre par grâce, et que nous ne pouvons que recevoir avec confiance, tels des otages délivrés et ramenés à la maison. C’est l’Ecriture, la Bible, qui nous l’affirme, afin que nous reconnaissions Dieu dans toute sa magnificence et que nous lui rendions gloire.

Pas d’autre médiateur

Martin Luther, à l’heure de la Réforme, a écrit : « Il me faut écouter l’Evangile, qui me raconte non pas ce que je dois faire, mais ce que Jésus-Christ, le fils de Dieu, a fait pour moi » (Commentaire aux Galates, 2.4-5).

Les chrétiens, pourtant émerveillés de l’œuvre de Dieu en Christ, ont toujours bataillé pour vraiment saisir cette bonne nouvelle, depuis les chrétiens de Galatie dont Eglantine parlait la semaine dernière, jusqu’à nous, en passant par toutes les époques. A l’époque de la Réforme, c’était des participations financières coûteuses, des pèlerinages laborieux, des rituels culpabilisants, qui venaient ajouter au salut du Christ. Luther a redécouvert, pour lui-même d’abord, combien le Christ suffit. Nous sommes tentés d’ajouter au salut, de mériter le cadeau, pour nous rassurer peut-être, en nous disant que nous contrôlons au salut ? ou par orgueil, ou un peu des deux… Mais en rajoutant à l’œuvre du Christ, en fait, nous disons qu’elle n’est pas suffisante, et nous la dévalorisons. Nous méprisons le Christ, lui Fils de Dieu devenu homme, notre médiateur éternel, nous nous mettons au-dessus de lui, et cela nous empêche de recevoir vraiment ce qu’il veut nous offrir, ce qui ne peut venir que de Dieu.

Nous n’avons rien à ajouter à notre salut car le Christ a tout accompli. Nous n’avons pas non plus besoin d’un autre intermédiaire entre Dieu et nous ou entre Jésus et nous… Le Christ est tout proche de nous, et de Dieu, il suffit ! Pas besoin d’en appeler aux anges, aux saints, aux médiums, aux prêtres, à des « prophètes » ou des « apôtres » : Dieu est tout proche, à travers le Christ. Cela vaut aussi pour les pasteurs, qui sont au même niveau que la communauté, même si avec le conseil ils en sont responsables – mais quelle que soit notre fonction, nous avons tous la même valeur devant Dieu, et notre prière a la même efficacité. C’est l’idée du sacerdoce universel : nous sommes tous prêtres, c’est-à-dire, tous invités à expérimenter au plus près le mystère de la vie avec Dieu.

Un pour tous ?

Le Christ seul ! Le Christ suffit pour nous reconnecter à Dieu, rien ni personne ne peut y ajouter. Ouf ! Dieu nous aime d’un amour conditionnel, mais la condition, c’est le Christ, et le Christ seul – nous n’avons qu’à recevoir avec foi ! C’est la Bonne Nouvelle annoncée par les Réformateurs : nous sommes en paix avec Dieu et cela ne dépend pas de nous, nous ne pouvons pas l’abîmer – c’est entre les mains du Christ. Quel soulagement, quel repos pour nos âmes…

Mais dire : le Christ « seul », autant au XVIe qu’aujourd’hui, c’est un peu polémique. A l’époque de la Réforme, Luther, Calvin etc. s’attaquent à tout ce qui a pu recouvrir et étouffer l’œuvre du Christ pour nous.

Aujourd’hui, le « seul » interpelle alors que nous sommes dans un contexte mondialisé, multiculturel, blasé des vieilles religions institutionnelles et des discours totalitaires. Le Christ seul nous sauve ? Et ceux qui ont une autre religion ? Et ceux qui ne peuvent pas comprendre, à cause de l’âge, du handicap ? Et ceux qui n’en ont jamais entendu parler ? Dieu les priverait-il de salut ? Cette revendication, libératrice à la Réforme, peut sonner aujourd’hui comme du fanatisme, de l’arrogance, du mépris pour les autres, discréditée aussi par toutes les injustices historiques commises par des chrétiens.

Paul, dans son invitation à la prière, insiste sur l’ambition universelle de Dieu, qui veut sauver toute l’humanité – pas juste moi ou vous personnellement, toute l’humanité ! Le Christ est mort pour tous, et il offre son pardon et son amour à tous. D’ailleurs, il invite ses disciples à témoigner de cette bonne nouvelle à toutes les nations… Et l’apôtre Paul y consacre sa vie entière : Jésus n’est pas le sauveur des Juifs, comme il pourrait y avoir un sauveur des Grecs, des Celtes, des Chinois, des Rwandais…

Si nous croyons que Jésus nous a sauvés parce qu’il est Dieu devenu humain, alors il est venu pour tous les humains, et nous ne pouvons pas atténuer notre propos en disant: nous sommes sauvés par le Christ, de préférence, ou autre chose… Comment pourrions-nous mettre sur le même plan Dieu venu en personne parmi nous et nos tentatives, nos méditations, nos rituels tout humains ?

Ce serait arrogant, et ça l’a été dans l’Histoire, si nous mettions en avant un système, une religion, quelque chose qui dépend de nous… mais ce n’est pas le cas! Nous annonçons simplement une personne, en qui Dieu se révèle pleinement (cf. Col 1.15-20).

N’empêche que, une fois qu’on a affirmé être sauvés par le Christ seul, il y a des cas limites (les nourrissons, les inconscients, les ignorants…). Et la Bible garde le silence sur cette question. On peut nous-mêmes réfléchir, spéculer, mais on tombe très vite dans une impasse : soit on diminue l’importance du Christ, soit on « prive » des foules entières du salut. Mais quand la Bible garde le silence, c’est sage d’être prudent et de savoir dire qu’on ne sait pas. Un peu d’humilité !

Cela dit, ce que nous savons, avec certitude (et personnellement, c’est à ça que je m’accroche), c’est que le Dieu est le créateur de tout être humain, qu’il connaît et chérit infiniment plus que nous ne le faisons (voir p. ex. l’histoire de Jonas). Dieu est infiniment plus juste que notre justice, ou notre idée de la justice, et il est infiniment plus compatissant que nous.

Et à côté de ces certitudes, il y a cette exhortation massive : priez, et vivez, pour que l’amour de Dieu en Christ se répande à tous, que chacun reçoive ce repos et cette liberté de Dieu. Dieu nous confie une mission (vivre son amour et en témoigner autour de nous), sans pour autant tout nous dire. Et cela doit nous encourager à agir, tout en restant humbles : nous ne savons pas tout… La personne que je rencontre, c’est d’abord Dieu qui la connaît… que je sois un simple messager de son amour !

 

Le Christ seul ! Cette affirmation résonne avec force, elle nous invite à l’assurance pour nous-mêmes : nous sommes enfants de Dieu, à la joie, et à une certaine humilité (voire une humilité certaine) : nous avons tous reçu de Dieu, nous lui faisons confiance, et nous voulons simplement vivre et proclamer son amour en Christ.