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Pardonner, jusqu’où?

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La grâce, le pardon, est au cœur de la foi chrétienne. Même sans être chrétien, il est au cœur de la vie en général : il est impossible d’avancer sans être blessé un jour par quelqu’un. Alors la question se pose, de pardonner – ou pas.

Quand il faut pardonner, nous ne réagissons pas tous de la même façon. Il y a ces actes ou ces défauts qui nous horripilent bien plus que d’autres : le mensonge scandalisera l’un mais l’avarice choquera un autre plus profondément. Il y a aussi des caractères : certains pardonnent presque tout, parce qu’ils craignent d’aller au conflit ou parce qu’ils ne veulent pas s’encombrer d’un poids. Certains au contraire se vengent. Et puis il y a ceux qui, tout simplement, vous rayent de la carte – c’est comme si vous n’existiez plus pour eux, une fois que vous les avez blessés ou déçus.

Au-delà de notre caractère et de notre habitude, pardonner fait débat : combien de fois peut-on pardonner la même faute, à quelle condition, doit-on tout pardonner, qu’implique le pardon ?… Ce genre de questions, les disciples de Jésus déjà se les posaient, et je vous invite à nous pencher sur une discussion entre Pierre, élève de Jésus, et Jésus.

Dans le contexte de la conversation, Jésus a expliqué aux disciples qu’ils devaient prendre l’initiative du pardon si quelqu’un les avait offensés, en allant les voir, d’abord seul, puis à deux, puis en groupe si vraiment l’offenseur ne se remettait pas en question. Mais Pierre sait que, même si celui qui nous a offensés demande pardon, il risque de recommencer… et que faire alors ? Lui pardonner encore ? et encore ? et encore ??

Lecture biblique : Mt 18.21-35.

21 Pierre s’approcha de Jésus et lui demanda : « Seigneur, combien de fois pardonnerai-je à mon frère s’il fait ce qui est mal envers moi ? jusqu’à sept fois ? »

Dans la tradition juive, on s’attendait à ce qu’un croyant compatissant pardonne 3 fois. 3 fois, ça montre déjà de la patience ! Pierre comprend que Jésus a des attentes plus hautes en termes de pardon et de compassion : il est prêt à aller jusqu’à 7 fois.

22 « Non, dit Jésus, je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante-dix fois sept fois. 

Ne calculez pas… Jésus invite à changer de logique ! A ne pas tenir les comptes mais à pardonner, point. Pour justifier cette exigence, il raconte une histoire.

23 À ce sujet, voici à quoi ressemble le royaume des cieux : Un roi décida de régler ses comptes avec ses serviteurs. 

24 Il commençait à le faire, quand on lui en amena un qui lui devait une énorme somme d’argent. 

Dans le texte original, on parle de 10 000 talents. Pour vous donner une idée, aujourd’hui, ça représenterait une dette de plusieurs milliards… Le genre de dette qu’un serviteur ne peut pas rembourser !

25 Cet homme n’avait pas de quoi rembourser ; aussi son maître donna-t-il l’ordre de le vendre comme esclave et de vendre également sa femme, ses enfants et tout ce qu’il possédait, afin d’être remboursé. 

26 Le serviteur se prosterna aux pieds du maître et lui dit : “Prends patience envers moi et je te rembourserai tout !” 

27 Bouleversé, le maître de ce serviteur le laissa partir et annula sa dette. 

Contre toute attente, tout est bien qui finit bien… Mais l’histoire n’est pas finie !

28 Le serviteur sortit et rencontra un de ses compagnons de service qui lui devait une petite somme d’argent.

Dans le texte original, il s’agit de 100 deniers, ce qui ferait 4-5000 euros. C’est une belle somme, mais comparée à des milliards, ça paraît dérisoire.

Il le saisit à la gorge et le serrait à l’étouffer en disant : “Rembourse ce que tu me dois !” 

29 Son compagnon de service se jeta à ses pieds et le supplia : “Prends patience envers moi et je te rembourserai !” 

30 Mais l’autre refusa ; bien plus, il le fit jeter en prison jusqu’à ce qu’il rembourse ce qu’il devait. 

Vous avez noté les points communs entre les deux histoires ? une dette, l’exigence de rembourser, le débiteur qui implore la pitié de l’autre… Et LA grande différence : alors que le roi, bouleversé, se laisse fléchir, le serviteur pardonné se montre intransigeant.

31 Quand les autres serviteurs virent ce qui était arrivé, ils furent profondément attristés et racontèrent tout à leur maître. 

32 À ce moment le maître fit venir ce serviteur et lui dit : “Mauvais serviteur ! j’ai annulé toute ta dette parce que tu m’as supplié. 33 Ne devais-tu pas toi aussi avoir pitié de ton compagnon de service, comme j’ai eu pitié de toi ?” 

34 Le maître était en colère et il envoya le serviteur aux travaux forcés jusqu’à ce qu’il ait remboursé tout ce qu’il devait. »

35 Et Jésus ajouta : « C’est ainsi que mon Père qui est au ciel vous traitera si chacun de vous ne pardonne pas à son frère ou à sa sœur de tout son cœur. »

La source du pardon

Avec cette histoire, Jésus nous invite à partir de plus loin. C’est bien beau de parler de pardon entre frères, entre humains, mais le pardon auquel il nous appelle prend sa source dans l’attitude que Dieu a envers nous. Dieu est un Dieu généreux. Avec des tripes et des plans B pour nous bénir malgré notre incorrigibilité. Dieu va au-delà de la comptabilité de ce qu’on doit et de ce qu’on mérite – tout simplement parce que devant lui, nous sommes tous perdants. Nous avons tous manqué d’amour et de respect envers lui, envers les autres, envers nous-mêmes – et nous avons contracté une énorme dette.

Pierre ne le sait pas encore, mais le pardon de Dieu repose sur le don de Jésus : lors de sa mort, il donnera toutes ses ressources, sa vie, sa justice, pour couvrir nos dettes. Grâce à lui, nous sommes réconciliés avec Dieu.

Si on reste au niveau humain pour parler du pardon, on va se heurter à des écueils : on va pardonner pour être tranquille (comme par exemple le pardon bouddhiste : pardonner pour ne pas garder la colère qui nous ronge), mais c’est un pardon sans amour, juste par désir d’être tranquille. D’autres pardonneront en se sacrifiant pour la paix de la relation – mais l’amertume pousse très bien sur ce terrain-là. Et puis, il y a des limites à ce qu’on peut accepter !

C’est seulement en regardant au pardon infini que Dieu nous accorde en Christ que nous pouvons espérer avoir les ressources nécessaires pour accorder un vrai pardon à l’autre.

Le conflit entre deux logiques

La générosité du roi nous surprend, mais l’attitude du serviteur dans la suite de l’histoire nous scandalise. On dirait qu’il n’a rien compris ! L’annulation de sa dette, sa nouvelle chance, n’a pas changé son comportement ni sa façon de voir les choses : il garde la même logique, du donnant-donnant. Lorsque ses collègues, puis le roi, s’en rendent compte, c’est la grosse déception. Pris par la colère, le roi fait ce qu’on attendait qu’il fasse dès le début : il se fait rembourser en envoyant le serviteur aux galères. Mais ce n’est pas parce qu’il est déçu et en colère que sa décision est injuste ! En fait, il applique au serviteur la règle que celui-ci s’est choisie. C’est soit la générosité qui annule les dettes, soit l’intransigeance qui exige le remboursement. C’est l’un ou l’autre, mais on ne peut pas jouer sur les deux tableaux, en prenant de chaque système ce qui nous arrange ! [cf.code métropolitain / coutume en Nouvelle Calédonie]

Si on a reçu le vrai pardon divin, celui qui nous libère de la honte et de la culpabilité, celui qui nous reconnecte avec Dieu, on ne peut plus revenir en arrière. Il n’est plus possible de ne pas pardonner – on a changé de système ! Le pardon de Dieu n’est pas quelque chose que l’on croit, c’est un mode de vie : on y entre, ou pas.

Et honnêtement, entrer dans la logique de la grâce va nous coûter, parce qu’apprendre à pardonner, c’est un sacrifice ! Alors bien sûr, à long terme, c’est complètement bénéfique (même pour la santé), et je suis absolument convaincue de la supériorité du système de la grâce ! Mais, sur le moment, choisir la grâce, c’est prendre sur soi pour « perdre » une juste colère, le droit de se plaindre, un ascendant sur l’autre…

A contrario, dans la logique du mérite, si sur le court terme on peut exiger de l’autre, sur le long terme on se retrouve confronté à nos propres dettes devant Dieu – et on y perd tout!

Jésus nous invite à changer de logique – et c’est bien pour ça que régulièrement, quand il parle de pardon, il associe le pardon reçu de Dieu et le pardon accordé à autrui. Quand je pardonne, je m’inscris dans la logique de Dieu. Et quand Dieu me pardonne, c’est si percutant que ça ne peut pas ne pas me transformer. Un grâcié ne peut plus que faire grâce à son tour.

Le pardon en pratique 

Alors concrètement, qu’est-ce que ça donne ? C’était d’ailleurs la question de Pierre : il faut pardonner, mais… jusqu’où ?

Jésus a répondu : jusqu’au bout. 70*7 fois – toujours ! Parce que le pardon à accorder ne dépend pas de l’autre – c’est-à-dire que personne ne mérite notre pardon. Si nous pardonnons, c’est forcément dans une logique de grâce, hors du cadre de la justice, avec Dieu comme critère et non pas l’offense commise.

Si on poursuit cette logique, que faire quand l’offenseur ne demande pas pardon ? peut-on effectuer un « remboursement » qu’il n’a pas demandé ?  C’est une vraie question, et plusieurs positions sont possibles – certains disent oui à cause de l’invitation à pardonner inconditionnellement, d’autres disent non car même le pardon de Dieu n’est efficace que si on le lui demande.

Il faut faire ici la distinction entre mon attitude intérieure, le pardon prononcé (officiel), et la restauration de la relation. L’idéal, l’objectif, c’est d’avoir les trois, comme ce que Dieu nous offre.

Mais quand l’offenseur est dangereux, la relation ne sera peut-être pas restaurée, même si un pardon est accordé. Pardonner à son mari violent ne signifie pas forcément qu’on reste sous le même toit. Pardonner à un agresseur sexuel ne signifie pas qu’on lui confie nos jeunes enfants.

Dans la même logique, si l’offenseur ne vient pas vers nous, le pardon ne peut pas être officialisé. Il ne peut pas le recevoir. Alors, sous prétexte qu’il ne nous a rien demandé, on justifie parfois notre propre dureté de cœur, notre refus de pardonner.

Mais en réalité, dans la logique de Jésus, quoi qu’il arrive, quel que soit l’offenseur, ce qui est toujours entre nos mains, c’est notre attitude intérieure. Même si l’autre ne nous demande rien ou qu’il est dangereux, Jésus nous invite à choisir le chemin du pardon et à nous préparer à cette possibilité. A choisir la grâce, même si nous ne pouvons pas la vivre de manière complète.

J’insiste sur le cœur. C’est dans mon cœur que je dois apprendre la grâce… parce que Dieu m’a touché, dans sa grâce. Cela dit, Dieu connaît notre faiblesse et notre incompétence à la grâce : il sait que nous avons besoin de temps. Besoin d’exprimer notre colère, nos lamentations, nos peurs. Mais encore une fois, le temps dont nous avons besoin pour arriver au pardon ne doit pas être une excuse pour repousser le pardon. Donc ne pas brûler les étapes – et ne pas faire brûler les étapes ! combien de fois j’ai entendu des chrétiens bien intentionnés : « il t’a fait ça… mais tu dois pardonner ! » Facile à dire, quand on n’est pas concerné ! l’injonction à pardonner, je dois d’abord l’entendre pour moi. Et pour l’autre, le frère, la sœur, il nous appartient de prier et d’accompagner avec grâce sur ce chemin qui peut être douloureux.

 

Il est essentiel de se rappeler que pour nous, le pardon n’est pas naturel. Qu’il nous coûte. Qu’il nous prend du temps. Mais Jésus n’a jamais dit qu’il serait automatique ! Simplement, il nous invite à changer de logique et à apprendre à faire grâce, de plus en plus, dans les petites et les grandes choses. Nos ressources ? l’amour infini de Dieu manifesté par Jésus-Christ, qui nous motive et nous modèle, et qui transforme notre cœur par son Esprit – si nous le lui demandons.

Choisis la vie !

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Récemment, je me suis converti ! J’ai abandonné les ceintures pour me convertir aux bretelles ! Et je ne regrette pas ce choix, ça a changé ma vie : je ne perds plus mes pantalons ! Ce n’est évidemment pas le choix le plus important que j’ai fait dans ma vie mais quand même…

En réalité, la vie est faite d’une succession de choix, souvent petits, parfois grands, dont on ne mesure pas toujours les conséquences. Certains choix comptent plus que d’autres, parce qu’ils peuvent impacter durablement notre vie.

On a tous des choix importants à faire, qui orientent notre vie, que ce soit pour les études, pour une profession, pour notre vie sentimentale, familiale, mais aussi à propos de la foi et de la pratique religieuse.

D’une manière générale, même dans ces domaines, il n’y a pas un choix initial qui déterminerait tout, une fois pour toutes… Chaque choix est révisable, corrigeable. Évidemment, en fonction de leur importance et de leurs conséquences, ces choix sont plus ou moins difficile à modifier. Même quand vous vous tenez à un choix initial, c’est un choix. Vous choisissez de poursuivre vos études jusqu’au bout, vous choisissez de rester avec votre conjoint, vous choisissez de continuer votre pratique religieuse… Continuer, c’est choisir.

Et même quand, dans un domaine ou un autre, vous vous laissez porter par le courant, par l’avis majoritaire, vous vous pliez à l’opinion commune… vous faites un choix. Celui de suivre le mouvement. Ne pas choisir, c’est déjà choisir !

Notre vie est fait d’une succession de choix, petits ou grands. Vivre, c’est choisir ! Un des textes bibliques proposés à notre lecture ce matin parle justement de l’importance de nos choix.

Deutéronome 30.15-20
15 Regarde : aujourd’hui je place devant toi la vie et le bonheur d’une part, la mort et le malheur d’autre part. 16 Mets en pratique ce que je t’ordonne aujourd’hui. Aime le Seigneur ton Dieu. Suis le chemin qu’il te trace. Obéis à ses commandements, à ses lois et à ses règles. Ainsi tu vivras, tu te multiplieras. Le Seigneur ton Dieu te bénira dans le pays dont tu vas prendre possession. 17 Mais si tu te détournes de lui, si tu lui désobéis, si tu adores d’autres dieux, 18 alors tu disparaîtras complètement. Je vous préviens dès aujourd’hui ; vous ne resterez pas longtemps dans le pays dont tu vas prendre possession au-delà du Jourdain.
19 Oui, je vous avertis solennellement aujourd’hui, les cieux et la terre m’en sont témoins : je place devant toi la vie et la bénédiction d’une part, la mort et la malédiction d’autre part. Choisis donc la vie et tu vivras, toi et ta descendance. 20 Aime le Seigneur ton Dieu ! Écoute sa voix ! Reste-lui fidèlement attaché. Alors tu vivras et passeras de longues années dans le pays que le Seigneur a promis de donner à tes ancêtres Abraham, Isaac et Jacob.

Ces paroles s’adressent au peuple Hébreu. Après 40 ans d’errance dans le désert, ils s’apprêtent, enfin, à entrer dans le pays que Dieu leur a promis. Ce sont, en quelque sorte, les dernières instructions que le Seigneur leur donne, par l’entremise de son prophète Moïse. Les promesses et les avertissements qu’on y trouve font écho à leur expérience : ils ont vu les promesses de Dieu se manifester, lors de la sortie d’Egypte, mais ils ont vu aussi que leur incrédulité avait des conséquences négatives, avec les 40 années de traversée du désert. Ils comprennent bien que leurs choix ont des conséquences.

Le peuple d’Israël avait, à nouveau, un choix à faire. Un choix qu’il devront renouveler une fois entré dans le pays, de génération en génération. Et c’est là que ce texte nous rejoint. Nous sommes aussi, d’une manière ou d’une autre, dans notre vie personnelle, confrontés à la nécessité de faire des choix et de les assumer. Vivre, c’est choisir.

Dieu nous dit aussi : “choisis la vie !”. Comment l’entendons-nous ?

 

Choisir la vie

La façon dont Dieu pose l’alternative au peuple d’Israël peut sembler radicale : “Je place devant toi la vie et la bénédiction d’une part, la mort et la malédiction d’autre part. Choisis donc la vie et tu vivras, toi et ta descendance.” (v.19)

On pourrait se dire qu’on ne se retrouve pas si souvent que cela devant un choix entre la vie et la mort. On peut penser à des situations extrêmes, en temps de guerre, dans une dictature ou face à une grave crise, par exemple. Dans de telles circonstances, on peut percevoir l’alternative entre la vie et la mort, parfois de façon littérale… On peut penser aussi à des moments cruciaux de notre existence, lorsque les choix que l’on est amené à faire déterminent tout le reste de notre vie ou presque, ou en tout cas nous orientent durablement dans une direction. Ce sont moins directement des choix de vie ou de mort, mais ce sont bel et bien des choix qui impactent profondément notre vie.

Le peuple d’Israël était devant un tel choix crucial : “Mets en pratique ce que je t’ordonne aujourd’hui. Aime le Seigneur ton Dieu. Suis le chemin qu’il te trace. Obéis à ses commandements, à ses lois et à ses règles. Ainsi tu vivras, tu te multiplieras.” (v.16)

Pour le peuple d’Israël, l’invitation à choisir la vie signifie choisir la confiance en Dieu : aimer Dieu, suivre le chemin qu’il trace, obéir à ses commandements. C’est, d’une certaine façon, la définition même de la foi !

Deux questions se posent alors à nous :

  • La foi est-elle un choix ?
  • La foi est-elle un choix de vie ou de mort ?

 

La foi est-elle un choix ?

Après tout, on peut se poser la question. Est-ce que la foi ne serait pas plutôt quelque chose qui est donné à l’un et pas à l’autre ? On entend parfois des gens qui disent : “moi, j’aimerais bien croire, mais je n’y arrive pas !” Est-ce qu’il n’y aurait pas d’un côté ceux qui ont la foi, mystérieusement, et de l’autre côté ceux qui ne l’ont pas reçue, on ne se l’explique pas vraiment mais on ne peut rien y changer ?…

En réalité, il me semble que la foi est, par définition, un choix. Sinon pourquoi y aurait-il cet appel que Dieu adresse ici à son peuple ? Pourquoi y aurait-il, dans les Evangiles, l’appel répété de Jésus à le suivre ? Pourquoi le coeur du message de la Bible serait-il une bonne nouvelle à recevoir… par la foi, c’est-à-dire en décidant de faire confiance à Dieu ?

Si on attend que la foi nous tombe dessus, on ne croira jamais… Croire, c’est choisir.

Et ce n’est pas seulement un choix initial, qu’on fait une fois pour toutes et c’est fini. Sans cesse, chaque jour, il s’agit de choisir de suivre Jésus-Christ. La foi est d’abord une question de confiance, qui se joue dans la relation avec Dieu. La confiance, ça se vit au quotidien. Sans cesse nous sommes appelés à renouveler notre confiance en Dieu, chaque jour nous sommes appelés à choisir de le faire.

Je m’adresse ici particulièrement à ceux qui sont croyants depuis longtemps. Il faut que nous intégrions dans notre quotidien des moments où nous pouvons exprimer notre choix renouvelé de suivre Jésus-Christ. C’est un des rôles de nos rassemblements cultuels, c’est aussi un des rôle de nos temps de qualité avec Dieu, dans la prière et la méditation de sa Parole.

On dit souvent que c’est important de prier et de lire la Bible pour se nourrir spirituellement. C’est vrai… mais pas seulement pour ça. On en a aussi besoin pour renouveler, consciemment, intentionnellement, notre choix de suivre le Seigneur. Comment est-ce que je renouvelle personnellement mon choix de suivre Jésus-Christ ?

La foi est bel et bien un choix, et c’est même un choix sans cesse renouvelé de suivre le Christ.

La foi est-elle un choix de vie ou de mort ?

Il me semble qu’on peut d’abord dire que la foi est un choix de vie ou de mort parce que c’est un choix qui impacte profondément notre vie. La foi est bien plus qu’une opinion ou même une croyance. C’est un choix qui oriente toute notre existence. Il impacte tous les domaines de notre vie, personnelle, familiale, sociale, parce que la foi change notre façon de voir le monde, de voir les autres et de nous percevoir nous-mêmes.

Mais la perspective biblique va plus loin encore. Dans notre texte, choisir la vie, c’est choisir d’aimer Dieu, de suivre le chemin qu’il trace, et d’obéir à ses commandements. On peut évidemment ne pas être d’accord avec cela mais dans la perspective biblique, la vie, c’est la vie avec Dieu. La mort, c’est la vie sans Dieu. Simplement parce que Dieu est la source de toute vie et qu’en tant que créatures faites à son image, c’est-à-dire pour être en relation avec lui, vivre sans Dieu c’est être coupé de la source de toute vie.

Dans cette perspective-là, la foi est un choix de vie ou de mort. C’est choisir de vivre avec Dieu ou choisir de vivre sans lui. Et ne pas choisir, c’est déjà choisir, c’est choisir de rester sans Dieu.

Ce choix de la foi, ce choix de vivre avec Dieu se manifeste dans notre quotidien, dans les grandes comme dans les petites décisions. Si bien que, d’une certaine façon, c’est tous les jours que nous sommes appelés à choisir entre la vie et la mort. Pas forcément littéralement, mais spirituellement, en choisissant de rester attaché à Dieu, source de toute vie.

L’enjeu, ici, n’est pas celui d’une obéissance servile, sans réfléchir. Obéir à ses commandements, c’est aimer Dieu. On pourrait dire l’inverse : aimer Dieu, c’est obéir à ses commandements. On n’obéit pas aux commandements de Dieu parce qu’on a peur, sinon, d’être puni (quelle vision terrible de Dieu !). On ne le fait pas non plus pour mériter sa faveur. Son amour nous est acquis. On le fait parce que c’est une façon de lui témoigner notre amour.

Or, la foi, comme l’amour, est fondamentalement un choix. Vous croyez qu’on peut aimer vraiment son prochain sans choisir de l’aimer ? Vous croyez qu’on peut aimer et rester fidèle à son conjoint sans choisir de l’aimer ? Il en est de même de la foi. C’est un choix qui, comme l’amour, s’affermit dans la relation.

La question que le croyant doit se poser, chaque jour, c’est donc : “qu’est-ce que mon amour pour Dieu me dicte comme choix dans ma vie, aujourd’hui ?”

 

Conclusion

Vivre, c’est choisir. Croire, c’est choisir. Aimer, c’est choisir. Toute notre vie est faite de choix, que nous sommes appelés à assumer.

La foi est-elle un choix ? Oui, sans cesse renouvelé. La foi est-elle un choix de vie ou de mort ? Oui, à chaque instant ! Parce que c’est le choix qui nous relie à Dieu, source de vie. Choisir la vie, c’est choisir de l’aimer, de suivre le chemin qu’il trace et d’obéir à ses commandements. C’est choisir de lui faire confiance, chaque jour, de manière renouvelée.

Couple et célibat

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Après Noël, la Galette, la Chandeleur, voici maintenant, dans le calendrier liturgique français… la Saint Valentin ! La Saint Valentin : ses bouquets, ses ballotins de chocolat, ses dîners en tête-à-tête… Avec ses publicités omniprésentes, la Saint Valentin met une petite pression sur les couples, qui souvent trouvent cette fête trop commerciale… mais elle peut aussi mettre mal à l’aise ceux qui ne sont pas, ou plus, en couple. Le 14 février remue le couteau dans la plaie, alors que c’est déjà un sujet sensible, le célibat !

Il vaudrait mieux parler d’ailleurs des célibats : il y a le jeune de 20 ans concentré sur ses études ; celle qui, à 45 ans, n’a jamais trouvé chaussure à son pied ; celui qui a des attirances incompatibles avec sa foi ; celle qui ne veut plus du couple après avoir trop souffert. Certains le supportent très bien, ils profitent d’une certaine liberté, d’une disponibilité plus grande… Mais pour d’autres, et pour tous peut-être à certains moments, la solitude reste un poids difficile à porter. Le sentiment d’isolement peut s’alourdir de questions existentielles : pourquoi pas moi ? de quoi sera fait mon avenir ? sur qui puis-je compter ? où trouver de l’affection ?

Et puis il y a les divorcés, et les veufs, qui, sans être célibataires, se retrouvent dans un quotidien qui peut ressembler, sous certains aspects, au célibat.

Je me suis dit que la Saint Valentin était un bon moment pour parler du célibat – et pas seulement aux célibataires ! Nous sommes tous concernés, non seulement pour mieux comprendre nos frères et sœurs célibataires, mais aussi parce que, en creux, réfléchir au célibat nous pousse à revisiter notre vision du couple et de l’amour.

Alors, je ne prétends pas aborder tout ce qui concerne le célibat ici ! Mais je voudrais partir du texte fondamental qui nous parle du couple, et qui se trouve au tout début de la Bible, dès le récit de la création de l’humanité. Je lis donc dans le livre de la Genèse, qui raconte de façon imagée les débuts de notre monde, au ch.2, qui zoome sur la création de l’humanité. Après avoir créé les cieux, la terre et tout ce qui les remplit, Dieu crée l’être humain, et il fait ce constat.

Lecture biblique : Genèse 2.18-24

18 Le Seigneur Dieu se dit : « Il n’est pas bon que l’être humain soit seul. Je vais lui faire un vis-à-vis qui lui corresponde, capable de le secourir. »

19 Avec de la terre, le Seigneur façonna quantité d’animaux sauvages et d’oiseaux, et il les conduisit à l’être humain pour voir comment celui-ci les nommerait. Chacun de ces animaux devait porter le nom que l’être humain lui donnerait. 20 Celui-ci donna donc un nom aux animaux domestiques, aux animaux sauvages et aux oiseaux. Mais il ne trouva pas de vis-à-vis qui lui corresponde, capable de le secourir.

21 Alors le Seigneur Dieu fit tomber l’homme dans un profond sommeil. Il lui prit un de ses côtés et referma la chair à sa place. 22 Avec ce côté, le Seigneur fit une femme et la conduisit à l’homme.

23 Celui-ci s’écria : « Ah ! Cette fois, voici quelqu’un qui est plus que tout autre du même sang que moi ! On la nommera compagne de l’homme, car c’est de son compagnon qu’elle fut tirée. »

24 C’est pourquoi l’homme quittera père et mère pour s’attacher à sa femme, et ils deviendront tous deux une seule chair.

 

« Il n’est pas bon que l’homme soit seul »

Ce texte, incontournable des mariages, on a tendance à le lire sous l’angle du couple. Lorsque Dieu crée l’humanité, il la crée mâle et femelle, avec la promesse d’une union féconde sous le signe de la complémentarité : homme et femme sont appelés à s’unir et à se multiplier pour remplir la terre. C’est vrai que le texte zoome sur le couple, comme il zoome sur tout signe de l’émergence de la vie : incroyable, cette vie qui advient, et qui est appelée, avec la bénédiction divine, à grandir, se multiplier, et bouillonner dans ce monde. C’est un hommage au Créateur vivifiant qui invite ses créatures à pro-créer, co-créer, avec lui.

Sauf que, le constat de base nous invite à voir plus large que le couple. Ce constat, c’est que : « Il n’est pas bon que l’être humain soit seul… » (diapo) Le problème, c’est la solitude ! Après différentes tentatives, c’est la création de la femme qui vient résoudre ce problème : homme et femme pourront être en vis-à-vis, se secourir mutuellement et créer, procréer, ensemble.

Que nous dit la création de la femme ? C’est le besoin pour l’être humain d’avoir en face de lui un être semblable mais différent. Le besoin d’une solidarité profonde (on se comprend) mais aussi d’une différence, d’une altérité, qui vient nous enrichir. Cette ressemblance-différence, elle est visible dans le couple homme-femme, mais on la vit dans toutes les relations humaines ! Dans la fratrie, avec les autres générations, avec les amis, les collègues, les voisins, et même l’étranger qui croise notre route. Aucun être humain que vous croisez n’est à 100% différent de vous, comme s’il était d’une autre espèce ou d’une autre planète. Mais il n’est pas non plus à 100% comme vous. Pour répondre à la solitude humaine, Dieu crée d’autres humains, semblables mais différents.

Alors il y a des gens qui ne supportent pas d’être seuls, et d’autres qui se qualifient facilement d’ours/ d’ermites, et qui aiment être tranquilles. Cela dit, hors exception (car il y en a toujours), la solitude totale de l’être humain est quelque chose d’insupportable – et d’abord, pour Dieu ! Pour Dieu, la solitude est insupportable. Pourquoi ? Car lui ne la connaît pas ! La Bible révèle de manière un peu mystérieuse que Dieu est à la fois unique (il n’y en a qu’un) mais qu’il est pétri de relations, saturé d’amour, entre les 3 personnes indissociables qui le composent, et qu’on appelle Père, Fils, et Saint-Esprit. Dieu n’est pas seulement amour ! De toute éternité, il aime et est aimé. Alors quand il décide de créer l’être humain à son image, la solitude est impossible : l’être humain est appelé à aimer et être aimé. A être en relation avec des personnes semblables mais différentes, à qui il peut donner mais de qui il peut aussi recevoir.

Le couple comme signe du besoin d’amour

Le couple est présenté, dans le texte biblique, comme une relation à part. On y trouve une différence incompressible : homme et femme fonctionnent vraiment différemment, au point que certains clament qu’on vient de 2 planètes différentes  Mais la proximité, l’intimité, l’union, dans le couple se vit de manière unique, charnelle. C’est la relation humaine ultime, dans la différence et l’unité.

Alors ça c’est l’idéal – et quand on est jeune, on s’imagine souvent qu’il s’agit de trouver chaussure à son pied. Cette recherche de l’âme sœur conduit parfois à des problèmes dans le mariage : quand ça coince, c’est que l’autre n’est pas « le bon », donc si je change de conjoint ça ira peut-être mieux. Il y a des gens comme ça qui enchaînent les relations, en quête de l’âme sœur. Je connais aussi des célibataires qui le sont parce qu’ils n’ont pas rencontré l’âme sœur, la personne qui correspond à leurs critères. La faille dans cette vision des choses, c’est que l’autre n’est pas une chaussure, c’est un pied ! Eh oui, dans toute relation, nous sommes des pieds, et personne n’est une chaussure pour l’autre ! Dans sa différence, l’autre (qu’il soit mon conjoint, ou, dans une moindre mesure, mon enfant, ma mère, mon frère ou mon amie), dans sa différence l’autre n’est pas une chaussure faite sur mesure pour répondre à mes attentes. Du coup, dans le mariage comme dans toute relation, on peut finalement se sentir très seul: on peut être incompris, rejeté, décalé, trahi…

Et là on touche à quelque chose de crucial : Dieu nous a créés à son image, et il nous a câblés pour aimer & être aimés. Mais il ne nous a jamais programmés pour que l’amour humain soit notre seul horizon. Au contraire, il a tissé dans notre humanité un besoin fondamental de l’autre, comme signe de notre besoin de l’Autre ! La seule source d’amour qui peut complètement envelopper notre pied, notre cœur, et nous combler – c’est l’amour de Dieu. C’est la relation avec Dieu. Et toutes nos relations humaines sont des reflets, des images, des expériences, des débordements de cette relation d’amour que Dieu veut d’abord vivre avec nous.

L’apôtre Paul comprend très bien cela lorsqu’il dit :

Comme il est écrit : « C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère pour s’attacher à sa femme, et les deux deviendront une seule chair. » 32 Il y a là un grand projet de salut. Je dis, moi, qu’il se rapporte au Christ et à l’Église. (Ephésiens 5.21-32)

Le couple n’est pas l’horizon ultime de notre bonheur et le sens de notre vie. C’est un signe, comme toute relation d’amour, un signe de l’amour que Dieu veut vivre avec nous, en Jésus.

On a beau être chrétiens, on oublie parfois cette réalité, et on place sur le couple toute la responsabilité de notre bonheur affectif, de notre équilibre émotionnel. Mais le couple n’est pas tout, et on a tendance à l’oublier quand on veut caser les gens à tout prix, comme s’ils n’existaient pas tant qu’ils n’étaient pas mariés. Les célibataires nous rappellent, par leur présence, que l’amour dont nous avons besoin est plus large que l’amour du conjoint. Dieu en est la seule source vivifiante, une source qui déborde dans différentes relations humaines. Même si vous êtes marié, comme un célibataire, vous avez besoin d’amitié, de fraternité, de complicité, en dehors du seul cadre du couple, non ?

Accueillez-vous les uns les autres

Jésus nous appelle à nous aimer les uns les autres dans l’église. Paul nous invite à nous accueillir les uns les autres. Alors on aime bien parler de communion fraternelle dans l’église, on aime boire le café et manger ensemble – et c’est très bien ! Mais dans l’église, au nom d’un Père commun, au nom d’un Sauveur qui nous unit à lui avec un amour d’une profondeur infinie, un amour inaltérable, au nom du saint Esprit qui nous fait voir la vie autrement, la fraternité signifie que, quelle que soit notre situation de vie, quel que soit l’état de nos relations au quotidien, l’Eglise est un lieu où personne n’est seul. Où nous pouvons compter les uns sur les autres. A cause de l’amour du Père répandu dans notre cœur par l’Esprit saint et garanti par le Christ mort et ressuscité, l’isolement n’est plus de mise.

J’aimerais simplement donner 3 pistes pour vivre la fraternité dans l’église, en particulier avec ceux qui vivent seuls.

1/ l’hospitalité. Inviter des personnes différentes. Vous avez remarqué que souvent on invite ceux qui nous ressemblent (couple jeune/couple jeune ; générations/ catégories sociales…) oser inviter dans autre catégorie.

2/ cela suppose d’apprendre l’écoute véritable. Souvent on discute de ce qu’on a en commun – mais mariés/ célibataires n’ont pas les mêmes préoccupations : oser poser des questions ouvertes. S’intéresser. Prier avec et pour. Conversations profondes – pas simplement « comment ça va »: être un vis-à-vis.

3/ proposer des services concrets. Un des défis pour les célibataires, c’est de manquer d’un partenaire attitré notamment pour s’entraider (trajets pour des rdv médicaux, bricolage, aide matérielle…). La sensation d’être démuni. Penser à demander si l’autre a besoin d’aide.

Conclusion

Ne limitons pas l’amour à l’amour romantique, à l’eau de rose, mais ouvrons – en hauteur, vers Dieu, en largeur, vers différentes relations dont la richesse et la diversité sont un hommage à cet amour divin inaltérable. Alors explorons, chacun, dans notre vie, là où nous en sommes, cet amour tous azimuts, en hauteur, en largeur, en longueur et en profondeur.

Alléger notre fardeau

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Notre vie ressemble parfois à celle du bousier… Et encore, lui il trimbale sa boule d’excréments pour une raison bien précise : il y pondra ses oeufs ou il en tirera les nutriments dont il a besoin pour se nourrir. Nous, parfois, on ne sait plus trop pourquoi on la trimbale…

Cette boule qu’on pousse ou qu’on tire, elle est faite des blessures et des remords liés au passé, des doutes d’aujourd’hui, des peurs pour demain. Elle est faite des habitudes voire des addictions qui nous rongent, elle est remplie de culpabilité, de honte, de tristesse ou de lassitude… Cette boule, elle nous pèse, elle nous fatigue.

Il y a justement une belle parole de Jésus, dans l’Evangile selon Matthieu, qui peut répondre à cette fatigue et cette lassitude :

Matthieu 11.28-30
28 Venez à moi vous tous qui êtes fatigués de porter un lourd fardeau et je vous donnerai le repos. 29 Prenez sur vous mon joug et laissez-moi vous instruire, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos pour tout votre être. 30 Le joug que je vous invite à prendre est bienfaisant et le fardeau que je vous propose est léger.

Ici il n’est pas question de bousier… mais bel et bien d’une charge que nous portons et qui nous fatigue. Jésus utilise des métaphores ouvrières et agricoles :

  • Même si c’est devenu un mot au sens figuré pour parler d’une chose pénible à supporter, le fardeau, c’est d’abord une charge pesante que l’ouvrier doit transporter.
  • Le joug, c’est une pièce de bois qu’on place sur la tête ou le cou des animaux de trait pour les atteler et tirer le meilleur profit de leur force de traction.

Les deux métaphores évoquent une charge que l’on porte, un poids qui provoque de la fatigue et de la lassitude dans notre vie. Et Jésus propose de nous donner du repos.

Un fardeau léger

Tout commence par un appel que Jésus nous adresse : “Venez à moi vous tous qui êtes fatigués de porter un lourd fardeau”. La réponse à cet appel, c’est la réponse de la foi : accepter ce que le Christ nous offre. C’est dire : j’accepte, à la place de mon fardeau, de porter le joug que tu me proposes. Or, le joug dont Jésus parle, ce sont ses instructions, son enseignement. Mais il précise bien que ce joug est bienfaisant. Il y a certes un fardeau mais il est léger.

Suivre le Christ, dans une démarche de foi, c’est un choix qui engage. Cela a des implications importantes pour nous, au niveau de notre vision du monde, de nos priorités dans la vie, de notre comportement… C’est bien une charge que nous acceptons. Mais si cela représente pour nous un fardeau insupportable, c’est qu’il y a un problème.

Car on peut se tromper de joug et prendre sur nos épaules ce que Dieu ne nous demande pas ! Parfois, on se met la pression pour être un croyant parfait, on cherche à mériter la faveur de Dieu, à être à la hauteur. Et le fardeau léger de l’amour et de la grâce de Dieu devient un fardeau lourd de nos efforts, de nos frustrations, de nos échecs.

Le joug que le Christ nous offre, celui de ses instructions, ne nous écrase pas sous des obligations et des interdits, il nous libère et nous allège de notre culpabilité, de notre honte et de nos remords. Par son amour et sa grâce, il nous offre le pardon et le renouvellement. Voilà qui est source de repos pour nous.

La foi : une béquille ? Pourquoi pas !

On entend dire parfois, avec un ton de mépris ou de suffisance : “la foi, c’est une béquille pour les faibles !” Eh bien c’est peut-être vrai. Mais attention : vous vous pensez inébranlable, inatteignable, suffisamment fort pour affronter toutes les épreuves ? Si c’est le cas, vous n’avez sans doute pas besoin de la foi… mais j’ai peur que vous tombiez de haut un jour ! Et ce même danger concerne aussi les croyants. On peut, parfois, penser que puisqu’on a la foi, on est inébranlable, rien ne peut nous arriver. Si c’est ce que vous pensez… c’est que vous n’avez plus besoin du Christ, et que vous avez peut-être plus foi en vous-mêmes que foi en Jésus-Christ. Mais là aussi, un jour vous tomberez de haut !

Cette belle parole de Jésus nous invite à reconnaître notre fatigue… Assumons nos faiblesses, nos coups de mou et nos failles. Ne nous prenons pas pour des super-héros, avec ou sans la foi ! Notre force c’est aussi de reconnaître nos faiblesses. Et notre faiblesse serait de croire que nous n’en avons pas…

Pas besoin d’être fort pour suivre Jésus. Pas besoin d’être inébranlable pour être un bon chrétien. Reconnaissons que nous boitons tous, d’une manière ou d’une autre, et que la foi peut être une béquille qui nous aide à avancer… et grâce à laquelle nous trouvons du repos dans nos vies plus ou moins brinquebalantes et cabossées.

L’important, c’est celui en qui on croit

Finalement, ce qui est important, c’est moins notre foi que celui en qui on croit. C’est Jésus, qui nous appelle à venir à lui, et qui est “doux et humble de coeur”. Le contraire d’un maître dominateur.

Notre vision de Dieu, de Jésus-Christ, détermine énormément la façon de vivre notre foi. Devant un maître intraitable ou un juge impitoyable, on se tait et on obéit. Mais devant un maître doux et humble de coeur, qui sait se mettre à notre hauteur et qui nous comprend, on se sent libre d’être soi-même.

La foi authentique, c’est être soi-même devant Dieu, dans la confiance et la reconnaissance. Parce qu’elle repose sur l’assurance de l’amour de Dieu pour nous. Parce qu’elle se construit dans une relation avec le Christ qui est présent, tout proche de nous.

Si votre foi vous conduit à une vie chrétienne qui est un poids lourd à porter, un fardeau insupportable, c’est que vous avez sans doute une vision faussée de Dieu. Car Jésus le dit : ”Le joug que je vous invite à prendre est bienfaisant et le fardeau que je vous propose est léger.” En réalité, c’est nous qui ajoutons du poids à ce fardeau léger, c’est nous qui le rendons lourd…

Conclusion

Notre vie ressemble parfois à celle du bousier… mais nous ne sommes pas aussi forts que le bousier. Savez-vous qu’il est capable de pousser 1141 fois son poids ? Pour un homme ça équivaudrait à pousser 6 bus double-étage remplis de passagers !

Alors à travers cette belle parole de l’Evangile ce matin, Jésus nous dit d’abandonner cette boule qu’on pousse ou qu’on tire, faite de blessures et de remords, de doute et de peur, d’habitudes voire d’addictions qui nous rongent, cette boule pleine de culpabilité, de honte, de tristesse ou de lassitude… Par sa grâce, il veut alléger notre fardeau et il nous offre de prendre à la place son joug bienfaisant et son fardeau léger.

Sa présence à nos côtés chaque jour, sa bonté et sa fidélité qui nous accompagnent, la foi qui nous relie à lui, sont source de paix et de repos. Laissons-le donc alléger notre fardeau !