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La vraie grandeur, c’est de servir

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lavement des pieds 2

Quand je serai grande, je veux être…

Qu’est-ce que ça veut dire d’être grand ? Il y a l’âge, l’expérience, la maturité… Mais au quotidien, être grand implique parfois aussi d’être parmi les grands, parmi les premiers, au-dessus des autres. Certaines écoles supérieures diront à leurs étudiants : vous êtes l’élite de ce pays ! Certaines entreprises diront : si vous voulez être parmi les grands, faites plus et mieux que les autres – et nous vous récompenserons avec toutes sortes de privilèges. Dès la cour d’école, on est tenté de se hisser vers le haut pour être apprécié : en soignant son apparence, en cultivant le bon réseau, voire en critiquant les moins populaires. Pour accéder au statut désiré, rabaisser les autres peut être une étape. On le voit aussi dans nos familles : les disputes entre frères et sœurs pour avoir la plus grosse part du gâteau, la place devant dans la voiture, ou plus tard la meilleure part de l’héritage. Que nous osions l’avouer ou pas, l’ambition d’être grand pousse bien souvent à vouloir être plus grand que les autres, à se comparer, à saisir des privilèges, pour nous sentir  à la hauteur – en tout cas en hauteur.

Cette ambition peut avoir plusieurs sources : le désir d’excellence, ou d’être honoré, ou d’être privilégié, ou d’être dans les petits papiers du chef, ou d’avoir du pouvoir/ de peser dans la balance. Plusieurs sources, plusieurs formes, mais l’ambition d’être plus grand ne vient pas que de notre société compétitive – déjà au temps de Jésus, le problème est bien présent.

Quelle grandeur?

Alors que Jésus chemine vers Jérusalem avec ses plus proches disciples, le sujet est abordé.

Lecture biblique Marc 10.35-45  

35 Alors, Jacques et Jean, les fils de Zébédée, vinrent auprès de Jésus. Ils lui dirent : « Maître, nous désirons que tu fasses pour nous ce que nous te demanderons. » — 
36 « Que voulez-vous que je fasse pour vous ? » leur dit Jésus. 
37 Ils lui répondirent : « Quand tu seras dans ton règne glorieux, accorde-nous de siéger à côté de toi, l’un à ta droite, l’autre à ta gauche. » 
38 Mais Jésus leur dit : « Vous ne savez pas ce que vous demandez. Pouvez-vous boire la coupe de douleur que je vais boire, ou recevoir le baptême de souffrance que je vais recevoir ? » 
39 Et ils lui répondirent : « Nous le pouvons. » Jésus leur dit : « Vous boirez en effet la coupe que je vais boire et vous recevrez le baptême que je vais recevoir. 40 Mais ce n’est pas à moi de décider qui siègera à ma droite ou à ma gauche ; ces places sont à ceux pour qui Dieu les a préparées. »
41 Quand les dix autres disciples entendirent cela, ils s’indignèrent contre Jacques et Jean.
42 Alors Jésus les appela tous et leur dit : « Vous le savez, ceux qu’on regarde comme les chefs des peuples les commandent en maîtres, et les grands personnages leur font sentir leur pouvoir. 43 Mais cela ne se passe pas ainsi parmi vous. Au contraire, si l’un de vous veut être grand, il doit être votre serviteur, 44 et si l’un de vous veut être le premier, il doit être l’esclave de tous. 45 Car le Fils de l’homme lui-même n’est pas venu pour se faire servir, mais il est venu pour servir et donner sa vie comme rançon pour libérer une multitude de gens. »

Jésus en parlera plusieurs fois avec ses disciples : pour lui, l’ambition est un enjeu essentiel. Revenons sur ce dialogue pour voir ce que Jésus nous invite à vivre.

35-37 Jésus marche devant. Jacques et Jean se détachent du peloton des disciples et se rapprochent de Jésus. « Promets que tu diras oui à notre demande ! » C’est toujours louche de commencer par ça !

Ils veulent partager le triomphe de Jésus.  Vous allez me dire, c’est déjà une confession de foi : ils ont compris que Jésus est le Roi éternel. Mais du coup ils calculent comment ça peut tourner à leur avantage. Ils veulent être les ministres, les proches, du Roi éternel.

Mais pourquoi cette demande ? Jésus vient de leur parler de ce qui l’attend à Jérusalem : Marc 10. 33 Il leur dit : « Écoutez, nous montons à Jérusalem, où le Fils de l’homme sera livré aux chefs des prêtres et aux maîtres de la loi. Ils le condamneront à mort et le livreront aux païens. 34 Ceux-ci se moqueront de lui, cracheront sur lui, le frapperont à coups de fouet et le mettront à mort. Et, après trois jours, il se relèvera de la mort. »

C’est la 3e fois que Jésus évoque sa mort et sa résurrection. Et sur quoi met-il l’accent ? sur la souffrance ! Le fils de l’homme (il parle de lui-même) sera : arrêté par les autorités juives, condamné à mort, emprisonné par les autorités romaines, insulté, humilité, torturé et mis à mort. Et après il reviendra à la vie.

Mais les disciples ont surtout retenu la fin – la partie souffrance, elle est vite oubliée.

38 Jésus, peiné par la question, les renvoie à ce qu’il vient de dire – « Vous voulez l’honneur et la victoire ? Et le chemin de douleur qui y mène ? Vous le voulez ? »

Jacques et Jean me font penser à des supporters sportifs qui iraient voir Usain Bolt (médaille d’or JO 2016 au sprint 100m) : « dis, dis, on peut monter sur le podium avec toi ? » Et Usain Bolt de répondre : « et vous, vous pouvez faire ce que je fais pour atteindre ce niveau d’excellence ? Est-ce que vous avez passé des heures, des mois, des années à vous entraîner pour y arriver ? Est-ce vous avez supporté le stress qui précédait cette course historique au point d’en être malade ? »

Jésus fait référence à sa souffrance avec deux images : la coupe de douleur et le baptême de souffrance. La coupe de douleur vient des prophètes juifs et évoque non seulement une épreuve à traverser, mais aussi le jugement de Dieu sur le mal et ceux qui le commettent. Jésus ne va pas seulement avoir mal, il va payer de sa vie le mal que nous commettons.

Le baptême, c’est un bain, une immersion, souvent en signe de repentance et de désir d’être purifié par Dieu. Mais la souffrance fatale de Jésus, elle va au-delà : elle compense nos fautes pour que nous puissions nous repentir devant Dieu, pour que nous puissions avoir un nouveau départ.

39a Ô douce naïveté : nous le pouvons ! En fait, ils n’avaient rien compris !

39b-40 Et Jésus se reprend : oui c’est vrai, ils vont avoir le même destin. Pas dans le sens du sacrifice : un seul pouvait donner sa vie pour tous, un seul – le seul juste et innocent – pouvait se charger de toute injustice pour nous en libérer. Mais les disciples, parce qu’ils ont décidé de suivre Jésus, vont eux aussi traverser beaucoup de difficultés : ils seront rejetés, persécutés, voire mis à mort.

Jacques & Jean demandaient l’honneur, Jésus leur parle de sacrifice et d’un engagement coûteux. Pour clore le débat, il leur dit même que ce n’est pas son problème : un autre que lui (Dieu le Père) s’occupera d’attribuer les honneurs éternels.

41 – 42a Devant l’indignation des autres disciples, sûrement jaloux, Jésus en profite pour donner une leçon générale – et il commence par parler de ceux qui ont les honneurs, le pouvoir, dans la société : les grands de ce monde, prompts à écraser leurs subordonnés pour se servir eux-mêmes – dans le commerce, l’entreprise ou la politique : là non plus, pas de changement ! C’est la loi du plus fort qui règne.

43a : Mais entre vous, que cela ne se passe pas ainsi… ah non pardon : cela ne se passe pas ainsi. Pas de ça chez vous !! Jésus n’exprime pas un souhait ou un ordre, mais une constatation : quand on vit avec Jésus, une autre règle s’applique. Quand on vit avec Jésus, notre rapport au pouvoir et aux honneurs change. Comment on se différencie de ceux qui ne connaissent pas Jésus ? Pour quoi les chrétiens, ou l’Eglise, sont-ils connus ? Est-ce que c’est parce qu’ils ont un autre rapport au pouvoir ?

La grandeur, le pouvoir, le statut, c’est vraiment un enjeu de poids – sur nos lieux de travail (quels gadgets/ quels voyages/ quelle voiture j’exhibe pour montrer mon statut social ?) ; dans les familles entre frères et sœurs (moi je suis le préféré – non c’est moi !) ; dans l’église aussi, avouons-le (moi j’ai des responsabilités… je suis pasteur ! missionnaire ! président ! ou tout simplement… dans l’église depuis tant d’années, j’ai tant fait pour l’église, je donne tant… donc : j’ai un certain rang).

43b-44 Chez vous, dit Jésus, la vraie grandeur c’est de servir. D’oeuvrer pour les intérêts de l’autre – quitte à vous abaisser, quitte à renoncer aux honneurs et aux privilèges, quitte à passer derrière ou à passer votre tour. Chez vous, la vraie grandeur c’est de servir.

C’est la troisième fois que Jésus en parle : la grandeur n’est pas un rang qu’on atteint en poussant les autres, mais elle passe par le service.

La vraie grandeur, c’est de servir. Et Jésus explique pourquoi. 45 Dieu, le très-haut, devient un fils d’homme, un homme faible et limité, il renonce à ses privilèges pour accomplir ce qu’aucun homme ne peut faire : le salut pour l’humanité. A Jérusalem, Jésus va tout donner, et tout perdre : sa réputation, ses amis, sa vie, sa justice – pas pour servir ses intérêts, mais pour servir ceux des autres.

Et cette attitude qui le mène à la croix, on la voit partout : quand il touche les lépreux pour les guérir, quand il accueille des gens de mauvaise réputation, quand lui, le Roi céleste, lave les pieds de ses disciples à la manière d’un simple serviteur, en leur disant : ce que je fais, faites-le vous aussi.

Servir, c’est la vraie grandeur parce que le plus grand que nous connaissions, Dieu lui-même, nous a servis en Jésus-Christ. Qu’est-ce qui peut être plus grand que de vivre comme Dieu lui-même ? En le suivant sur le chemin du service, nous laissons la mesquinerie des luttes de pouvoir ou d’honneur pour expérimenter la vraie noblesse, la grandeur de Dieu.

Dans notre vie

La vraie grandeur, c’est de servir. A quoi ça peut ressembler dans notre vie ?

Dans notre église, par exemple, ça peut être de participer aux tâches jugées parfois ingrates : venir faire le ménage en semaine de temps en temps, débarrasser et faire la vaisselle après un repas d’église, raccompagner quelqu’un après le culte. Mais il n’y a pas qu’à l’église qu’être disciple de Jésus nous pousse à servir : à la maison, quand on participe aux tâches quotidiennes ; au travail, quand on prend sur soi pour aider un collègue ; dans les transports ou les magasins, quand on cède sa place à quelqu’un. Au lycée, quand on va parler à celui que tous rejettent. C’est une attitude globale.

Mais certains diront : chacun sa tâche, moi je suis plutôt doué pour enseigner, parler, diriger la louange, animer un groupe d’étude… D’autres pourront le faire, j’ai des tâches plus importantes. Mais Jésus ne répartit pas les rôles : il enseigne, et il lave, et il nourrit, et il supporte. Si rien n’était trop indigne pour le fils de Dieu lui-même, qui sommes-nous pour nous penser exempts de servir ? Ou vous dites peut-être : je n’aime pas ça, je ne suis pas doué. Mais est-ce que Jésus aimait laver des pieds sales et puants ? Est-ce qu’il a aimé mourir sur la croix ?

La vraie grandeur c’est de servir. Jésus ne dit pas que la vraie grandeur c’est de s’abaisser, pour le plaisir de s’humilier ! Non, c’est de servir, servir quelqu’un. C’est ce qu’il a fait : il n’est pas mort pour montrer la puissance de sa vitalité lors de sa résurrection, mais il est mort pour nous ! Quand nous servons, au-delà de la tâche elle-même, c’est l’autre que nous servons.

Ceux qui font le ménage à l’église n’ont pas pour passion de nettoyer les WC, mais ils le font pour nous, pour qu’on vive le culte dans un cadre agréable. Comme un cadeau. D’autres s’engagent parce qu’ils voient un besoin – que ce soit dans un service d’église (comme avec les enfants) ou en dehors (renoncer à une sortie mensuelle pour pouvoir parrainer un enfant par le SEL, c’est aussi servir). C’est ça aussi, s’aimer les uns les autres !

J’ai rencontré il y a quelques années des gens très serviables mais qui utilisaient leur service pour se faire leur place dans l’église ou asseoir leur rang dans leur famille. Chez les chrétiens, le service devient parfois un lieu de compétition. Mais pour Jésus, servir c’est laisser de côté la compétition, arrêter de réfléchir à ce que nous allons y gagner ou comment les autres vont nous voir, pour nous concentrer sur ce qui fait du bien à l’autre.

Oui mais Jésus, c’est Jésus ! Il est parfait ! Certes, mais il nous remplit de son Esprit, il nous transforme de l’intérieur – pour bousculer nos priorités et nous apprendre à lui ressembler. Imaginez que tous les chrétiens soient connus pour leur humilité, pour leur attention envers les plus petits, pour leur simplicité. Imaginez l’impact dans nos réseaux professionnel ou scolaire, amical et familial, si nous exerçons nos responsabilités en donnant la même valeur à tous ceux que nous côtoyons, et en veillant à leurs intérêts ; si nous laissons de côté la question des privilèges ou de notre image de marque ; si nous sommes déterminés à ressembler au Christ de plus en plus.

Se laisser déranger

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Je vous propose ce matin de cheminer, pas à pas, avec le récit d’une rencontre de Jésus dans l’évangile selon Marc. Etape par étape, nous nous laisserons interpeller par le récit et nous en tirerons finalement quelques leçons, pour nous aujourd’hui. Le récit se trouve en Marc 10.46-52.

46 Jésus et ses disciples arrivent à Jéricho, puis ils sortent de la ville avec une grande foule. Un aveugle appelé Bartimée, fils de Timée, est assis au bord du chemin, c’est un mendiant.

Vous avez remarqué ? Le mendiant de cette histoire a un nom… il s’appelle Bartimée. Pourtant, il n’y a rien de plus anonyme qu’un mendiant. Surtout au milieu d’une grande foule. Vous connaissez, vous, le nom des SDF que vous croisez sur les trottoirs près de chez vous ?

Un mendiant, en général on l’ignore, ou on lui donne une petite pièce en passant. Mais souvent, il nous dérange, il ne nous donne pas vraiment bonne conscience… Quand il n’y a pas de notre part un jugement : “ce n’est certainement pas un hasard s’il en est arrivé là !”

Mais le mendiant de notre histoire a un nom. Rien ne nous dit qu’il était particulièrement connu. Peut-être même que son nom n’est devenu connu qu’après cet épisode, à cause de ce qu’il a vécu… Mais pour tous les lecteurs de la Bible depuis près de 2000 ans, cet homme à la sortie de Jéricho s’appelle Bartimée, fils de Timée.

47 Quand il apprend que Jésus de Nazareth arrive, il se met à crier : « Jésus, Fils de David, aie pitié de moi ! »
48 Beaucoup de gens lui font des reproches et lui disent : « Tais-toi ! » Mais l’aveugle crie encore plus fort : « Fils de David, aie pitié de moi ! »

Bartimée a beau être aveugle, il n’est pas muet ! Il a même visiblement une voix qui porte, jusqu’à couvrir le bruit de la foule. Et ça dérange…

La réaction de la foule aux cris de Bartimée est symptomatique : “Tais-toi !” Ce n’est peut-être pas toute la foule qui s’exprime… mais c’est quand même “beaucoup de gens”. Et les autres n’en pensent sans doute pas moins !

Déjà quand il mendie au bord de la route, il dérange, mais il pourrait au moins faire profil bas et rester discret… Non, il crie et appelle Jésus. Quel culot ! On essaye de le faire taire et il crie encore plus fort ! Non, il ne se taira pas !

Il interpelle Jésus, il réclame sa compassion.

49 Jésus s’arrête et dit : « Appelez-le. » Les gens appellent l’aveugle en lui disant : « Courage ! Lève-toi, il t’appelle ! »

La foule essaye de faire taire Bartimée, Jésus, lui, est prêt à se laisser déranger par lui. Au milieu de la foule, sans doute bruyante, il entend Bartimée qui l’appelle. Alors il demande qu’on le fasse venir à lui. Il veut l’extraire de la foule, le sortir de son anonymat.

Ici, je m’amuse du changement d’attitude des gens. Avant, ils disaient tous à Bartimée de se taire. Maintenant, ils l’encouragent : « Courage ! Lève-toi, il t’appelle ! » On ne peut pas faire confiance à une foule… c’est tellement versatile ! Mais au moins maintenant, leur attitude envers Bartimée est bien meilleure…

C’est l’accueil de Jésus qui fait passer les voix de la foule de “Tais-toi !” à “Courage ! Lève-toi !” Le regard qu’il porte sur Bartimée change l’attitude de la foule à son égard. C’est le regard que porte le Christ sur mon prochain qui devrait orienter mon attitude envers lui… alors que je peux facilement en rester à un regard de méfiance, de peur ou de jugement.

50 L’aveugle jette son manteau, il se lève d’un bond et il va vers Jésus.

Je vous rappelle qu’il est aveugle quand même ! Il jette son manteau, se lève d’un bond et va vers Jésus… et il n’y voit rien du tout !

Comment sait-il où est Jésus ? Est-ce que la foule le guide ? Ou se base-t-il sur la voix de Jésus qui l’appelle ? Je n’en sais rien…

En tout cas, il n’y a pas d’hésitation de sa part, et son enthousiasme impressionne. Il est aussi prompt à bondir vers Jésus qu’à crier jusqu’à ce qu’il soit entendu ! Quand on lui dit “Lève-toi”, il ne répond pas : “Mais je suis aveugle, je ne peux pas aller jusqu’à Jésus !” Il ne demande pas qu’on le conduise, ou qu’on demande à Jésus de venir lui-même…

Sans hésiter, il se lève ! Je ne suis pas sûr que nous ayons toujours le même enthousiasme à répondre à l’appel de Jésus… On dirait peut-être plutôt : une fois que je serai guéri, je me lèverai. Quand j’aurai retrouvé la vue, je répondrai. Quand j’aurai reçu une réponse à ma prière, quand j’y verrai parfaitement clair dans ma vie, pour mon avenir, alors je me lèverai…

51 Jésus lui demande : « Qu’est-ce que tu veux ? Qu’est-ce que je peux faire pour toi ? » L’aveugle lui dit : « Maître, fais que je voie comme avant ! »
52 Jésus lui dit : « Va ! Ta foi t’a sauvé ! » Aussitôt l’aveugle voit comme avant et il se met à suivre Jésus sur le chemin.

Non mais c’est quoi cette question de Jésus ? Franchement, ce n’est pas évident ce que veut Bartimée ? Jésus est en train de demander à un aveugle ce qu’il veut qu’il fasse pour lui…

Notez que la réponse de Bartimée (“Maître, fais que je voie comme avant !”) nous apprend qu’il a perdu la vue : il n’est donc pas aveugle de naissance. Jusqu’ici c’était un mendiant perdu dans la foule, maintenant on apprend un peu de son histoire. Le mendiant anonyme est en train de devenir Bartimée. Jésus ne veut pas seulement le guérir, accomplir un miracle. Il veut que Bartimée retrouve sa dignité, que la foule cesse de le voir seulement comme un mendiant…

Mais Jésus va bien le guérir. Et sur la base de sa foi : “ta foi t’a sauvé !” Mais est-ce qu’il ne va pas un peu vite ? De quelle foi parle-t-il ? Bartimée n’a pas fait une déclaration de foi en bonne et due forme, il n’a pas dit, comme Pierre, le bon élève : “Je crois que tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant !” Bref, Bartimée n’a pas montré patte blanche évangélique !

Jésus voit au coeur, OK. Mais peut-être aussi la foi de Bartimée transparaît-elle dans son attitude : sa soif de rencontrer Jésus, son enthousiasme à répondre à son appel… D’ailleurs, une fois guéri, il suit Jésus. C’est bien l’attitude du disciple… Jésus n’en demandait pas plus. Nous, on en aurait peut-être demandé plus !
Relisons le récit :

Marc 10.46-52
46 Jésus et ses disciples arrivent à Jéricho, puis ils sortent de la ville avec une grande foule. Un aveugle appelé Bartimée, fils de Timée, est assis au bord du chemin, c’est un mendiant.
47 Quand il apprend que Jésus de Nazareth arrive, il se met à crier : « Jésus, Fils de David, aie pitié de moi ! »
48 Beaucoup de gens lui font des reproches et lui disent : « Tais-toi ! » Mais l’aveugle crie encore plus fort : « Fils de David, aie pitié de moi ! »
49 Jésus s’arrête et dit : « Appelez-le. » Les gens appellent l’aveugle en lui disant :
« Courage ! Lève-toi, il t’appelle ! »
50 L’aveugle jette son manteau, il se lève d’un bond et il va vers Jésus.
51 Jésus lui demande : « Qu’est-ce que tu veux ? Qu’est-ce que je peux faire pour toi ? » L’aveugle lui dit : « Maître, fais que je voie comme avant ! »
52 Jésus lui dit : « Va ! Ta foi t’a sauvé ! » Aussitôt l’aveugle voit comme avant et il se met à suivre Jésus sur le chemin.

Se laisser déranger

L’attitude de Jésus, celle de la foule, l’enthousiasme de Bartimée… cet épisode nous interpelle.

Il y a, d’abord, cette figure du mendiant, qui dérange… et qui fait tout pour déranger la foule par ses cris qu’on cherche à étouffer. Et, en contraste, l’accueil de Jésus qui se laisse déranger, et qui arrive à faire changer d’attitude à la foule.

Quel est l’accueil que nous réservons à ceux qui nous dérangent, dans notre vie, dans notre Eglise ?

Dans notre quotidien, il y a tant de personnes qu’il est tellement facile d’ignorer… parmi nos voisins, nos collègues de travail ou d’étude, ceux que nous croisons parfois tous les jours. On ne s’en rend même plus compte. On les ignore même, parfois, quand ils font appel à nous. Leurs appels ne sont pas toujours aussi explicites que les cris de Bartimée… Mais on peut facilement ne plus être capable d’entendre leur appel, parce qu’on est trop préoccupé par nos soucis, notre zone de confort, notre bien-être, notre vie privée, notre équilibre… Parce qu’on n’est pas prêt à se laisser déranger.

La même question, nous pouvons nous la poser en tant qu’Eglise… En théorie, bien-sûr, notre Eglise est ouverte, nous accueillons tout le monde. En théorie… Mais en pratique ?Allez-vous à la rencontre de ceux qui sont là pour la première fois ? Vous n’êtes peut-être pas très à l’aise pour parler, mais vous pouvez au moins dire bonjour, accorder un regard bienveillant et accueillant. Et cela, y compris s’ils n’ont pas le code vestimentaire évangélique : une jupe trop courte à notre goût, un tatouage ou un piercing trop voyant. Ils ne sont peut-être pas très à l’aise, pas souriants, ils ne connaissent peut-être rien aux codes évangéliques, à ce qu’il faut dire, ce qu’il faut faire quand on vient dans une église, ils n’ont rien à voir avec le « chrétien moyen » qui, lui, ne nous dérange pas du tout… On est tellement prompt à juger, à enfermer dans des cases, à se laisser piéger par des a prioris !

Jésus, lui, s’est laissé déranger par Bartimée. On est frappé, dans les évangiles, par sa disponibilité, l’accueil qu’il réservait à tous, les invitations auxquelles il répondait, au risque de se faire critiquer par les chefs religieux bien pensant. On est frappé par son accueil bienveillant, sans jugement, et sa capacité à discerner la foi là où elle n’est pas toujours évidente pour nous.

Jésus est l’expression de la grâce de Dieu, qui accueille tous ceux qui viennent à lui. Il est venu pour cela ! C’est pour cela que le Fils de Dieu est devenu homme : pour venir à notre rencontre, jusque dans sa mort. Et sa résurrection nous ouvre les portes d’une espérance éternelle, dans une rencontre toujours renouvelée avec le Dieu de grâce.

Et heureusement qu’il en est ainsi, car comment pourrions-nous espérer être accueilli par lui aujourd’hui s’il ne nous accueillait pas avec grâce ? Et si nous sommes ses disciples, alors laissons-nous inspirer par son exemple d’accueil et de grâce. Comme lui, laissons-nous déranger. Et ouvrons-nous à des rencontres surprenantes, au-delà de nos a prioris et nos jugements.

Motivés par l’essentiel (5) Formés pour servir Dieu

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Ne vous arrive-t-il pas, parfois, d’avoir l’impression de perdre votre temps ? Et je ne parle pas seulement des moments où vous faites la queue dans une administration pour remplir tel ou tel formulaire et qu’il vous manque toujours un document pour finaliser le dossier ! Je parle de ce sentiment de ne pas être à sa place, et qui crée de la frustration, du découragement, de la fatigue. Un sentiment que vous pouvez ressentir dans votre vie de tous les jours, dans votre travail ou même dans l’Eglise !

Par exemple, lorsque vous êtes mis au placard dans votre entreprise, parce que la direction ne peut pas vous licensier mais qu’elle vous attribue un poste où vous êtes payé pour ne rien faire… Ou quand vous faites partie d’un groupe mais que vous y êtes réduit à un rôle de spectateur, soit parce que vous ne comprenez pas grand chose à ce qui s’y vit, soit parce que vous n’êtes jamais intégré dans la vie du groupe. Et ce groupe peut d’ailleurs aussi être une Eglise…

On entend assez souvent les chrétiens se demander : “Quelle est la volonté de Dieu pour ma vie ?” En réalité, si on est honnête, je crois qu’il faut surtout entendre derrière cette question très spirituelle, une question existentielle : “A quoi je sers ?” ou une question plus pragmatique : “En quoi puis-je être utile ?” Et c’est une question qui se pose plusieurs fois dans notre vie, avec une nuance : “Est-ce que je suis encore à ma place ? Est-ce que je ne serais pas plus utile ailleurs ?”

Ces questions, ainsi formulées, sont légitimes. Car pour que notre vie, notre engagement, ait un sens, nous avons besoin de nous sentir utiles. Nous avons besoin de comprendre pourquoi nous faisons telle ou telle chose. Et le fait de savoir que ce que nous faisons correspond bien à ce que Dieu attend de nous contribue évidemment à se sentir utile !

Nous retrouvons les mêmes préoccupations dans ce que l’apôtre Paul écrivait aux chrétiens d’Ephèse :

Ephésiens 2.8-10
En effet, vous êtes sauvés grâce à la bonté de Dieu, et parce que vous croyez. Cela ne vient pas de vous, c’est Dieu qui vous donne le salut .
Ce salut ne vient pas de vos actions à vous, donc personne ne peut se vanter !
Oui, c’est Dieu qui nous a faits. Il nous a créés dans le Christ Jésus pour que nous menions une vie riche en actions bonnes. Et ces actions, Dieu les a préparées pour que nous les fassions.

Le salut et les oeuvres

Il y a, dans ces quelques versets, plusieurs concepts clés de l’Evangile : le salut, la foi, la grâce, les oeuvres… Et il y a notamment cette formule étonnante où l’apôtre Paul parle des actions bonnes, ou des oeuvres bonnes, que Dieu a préparées d’avance pour que nous les pratiquions.

Il le rappelle clairement, ce ne sont pas nos oeuvres qui nous sauvent. C’est Dieu qui nous sauve, pas ce que nous pouvons faire ou mériter. Nous sommes sauvés parce que Jésus-Christ est mort et ressuscité ! Son pardon nous est offert, la vie éternelle nous est acquise. C’est une donnée fondamentale de l’Evangile. Mais ça ne signifie pas que les oeuvres, les bonnes actions, ne sont pas notre affaire !

Les œuvres ne sont pas à l’origine de notre salut mais elles font bien partie de la dynamique du salut. Il faut absolument sortir d’une compréhension statique du salut qui voudrait qu’être sauvé, c’est échapper au jugement de Dieu, assurer sa place au Paradis ! Si votre conception du salut s’arrête là, quelle tristesse !

Le salut, c’est toute l’oeuvre de restauration de Dieu en nous. Une restauration qui est un don de Dieu, une grâce que nous recevons. Et cette grâce, elle nous transforme et elle crée en nous des oeuvres bonnes, elle nous poussent à agir, à servir. L’oeuvre restauratrice de Dieu se manifeste aussi en nous par des oeuvres bonnes.

Dans ces versets, l’apôtre Paul compare le salut à une oeuvre de création : “Dieu nous a créés dans le Christ Jésus.” C’est une autre façon de dire “Dieu nous a sauvés”, c’est le début d’une vie nouvelle. Mais depuis quand un bébé reste-t-il un bébé toute sa vie ? Un bébé ne fait pas grand chose, à part manger, faire pipi, dormir et pleurer. Et on peut être chrétien et ne pas en faire beucoup plus qu’un bébé !

Si Dieu nous a créés en Christ, c’est pour que nous vivions, pour que nous grandissions, pour que nous agissions ! C’est donc tout à fait légitime de se poser la question : “qu’est-ce que Dieu attend de moi ? Que veut-il que je fasse ?” Et se demander “à quoi je sers ?”, “en quoi puis-je être utile” est une démarche très spirituelle.

Les oeuvres que Dieu a préparées

Mais que sont donc ces “oeuvres que Dieu a préparées” ?

Ce n’est certainement pas une sorte de planning personnalisé que Dieu aurait préparé pour chacun de nous, et qu’il nous faudrait discerner, ou deviner, pour l’accomplir. Ce n’est pas une liste de tâches qu’il faudrait avoir entièrement cochée pour avoir réussi sa vie aux yeux de Dieu !

L’Evangile nous libère du poids de notre salut : ce ne sont pas nos oeuvres qui nous sauvent mais la grâce de Dieu. Ça n’est pas pour nous remettre sous un autre poids, en nous imposant le fardeau d’oeuvres à accomplir pour réussir notre vie.

Il faut voir dans ces paroles de l’apôtre Paul une promesse. Celle d’un Dieu qui ne nous laisse pas seul dans la mise en oeuvre de notre salut. Un Dieu qui nous prend par la main et qui préparent toutes choses pour nous permettre d’accomplir ses oeuvres bonnes. Il me semble qu’on peut le comprendre de deux façons au moins :

  • D’une part que Dieu va nous préparer, nous rendre capable d’accomplir ces œuvres, parce qu’il nous a créés pour ça en Christ !
  • D’autre part qu’il va préparer les conditions et les circonstances qui vont nous permettre d’accomplir les oeuvres qu’il a prévues pour nous.

Bref, Dieu rend possible, dans notre vie, la mise en pratique de son oeuvre de restauration. Et cela aussi, c’est le fruit de sa grâce !

C’est pourquoi dans le processus de discernement auquel nous sommes appelés, je vois une double mouvement, une double dynamique dans laquelle entrer.

La première dynamique me pousse vers les autres et vers mon environnement. Là où je suis, là où je vis. Je vais être attentif aux circonstances de ma vie, aux besoins qui se manifestent autour de moi, aux rencontres que je vais faire. Les questions que je vais me poser seront alors : “Quels sont les besoins de ceux que je côtoie au quotidien ?”, “Dans quels services a-t-on besoin d’aide autour de moi, ou dans l’Eglise que je fréquente ?”

La deuxième dynamique me pousse vers Dieu et vers moi-même. En approfondissant ma relation avec mon Créateur et Sauveur, je vais apprendre à mieux le connaître et par la même occasion, à mieux me connaître moi-même. Et je vais écouter mon coeur, là où l’Esprit de Dieu est venu faire sa demeure. Je vais être attentif à mes aspirations, à ce qui me fait vibrer, à ce que Dieu prépare dans mon coeur.

Et il peut arriver que les besoins autour de moi et les aspirations de mon coeur se rejoignent. C’est l’idéal. Et là, on n’a pas le droit d’hésiter et d’attendre ! Tous les voyants sont au vert : il faut foncer ! Mais ce n’est pas toujours le cas. Parfois, ce sont les besoins autour de moi qui prévaudront et me pousseront au service. Et il faudra accepter d’être patient avec certaines aspirations de notre coeur, qui ne se concrétiseront pas tout de suite dans un service…

Même si Dieu prépare des oeuvres bonnes pour que nous les pratiquions, il ne faut pas s’attendre à ce que tout nous tombe du ciel, de façon évidente. Il est de notre responsabilité d’être attentif aux autres et à notre environnement, et d’écouter Dieu, et notre coeur.

Conclusion

Dieu ne veut pas que vous vous sentiez inutile. Il ne veut pas que vous perdiez votre temps, que vous ne vous sentiez pas à votre place. Il vous a créé en Jésus-Christ pour que votre vie soit riche en oeuvres bonnes, en actions utiles, pour votre prochain, pour Dieu lui-même !

C’est pourquoi, par sa grâce il vous a sauvé. Et par sa grâce, il a préparé, en vous et autour de vous, les oeuvres que vous allez pratiquer. Alors soyez attentif aux besoins autour de vous et écoutez votre coeur. Dieu vous appelle à vous mettre au service !

Motivés par l’essentiel (3) Créés pour ressembler au Christ

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Au cours des années, il m’est arrivé de rencontrer quelques personnes vraiment lumineuses. Des gens tout simples, d’apparence ordinaire (dans la rue je ne les aurais pas remarqués) mais quand ils commençaient à parler, c’était incroyable – ils irradiaient littéralement. Il y avait même quelque chose de l’ordre de la beauté, un peu comme un tableau d’art.

On a tous des gens qui nous ont marqués : souvent des personnes qui vous ont fait plaisir, ou qui vous ont donné de la joie, ou vous ont soutenus dans les difficultés… et puis il y a ces personnes qui vous ont montré qu’un autre chemin était possible : ils vous ont inspirés par leur sens de la justice, nourris par leur soif de vérité, fait du bien par leur attitude aimante et pacifique. Les rencontrer a marqué un tournant dans votre vie. Pour certains, c’est même des personnes qui ont marqué l’histoire et qui donnent le cap – comme un grand scientifique ou une personne qui s’est battue pour les autres. Ce sont des gens dans la meilleure version d’eux-mêmes, qui nous donnent envie de nous aussi devenir meilleurs.

Pourtant, si rencontrer ces gens nous inspire et nous remplit d’enthousiasme, il nous est bien difficile nous-mêmes de devenir comme eux, aussi lumineux. Et puis, nos « modèles » ont toujours leurs limites, leurs faiblesses – on le sait, ils sont humains comme nous, mais ça ne nous empêche pas d’être parfois profondément déçus quand la personne qui nous a fait si forte impression révèle son côté sombre.

Rechercher le meilleur modèle   

Un des disciples de Jésus, l’apôtre Paul, écrit aux chrétiens de Corinthe, en Grèce, justement sur ce sujet : qu’est-ce qui m’influence ? Qu’est-ce qui me tire vers le haut ? On peut s’inspirer de la vie de nombreuses personnes, mais pour lui, la plus grande source d’inspiration, celle qui ne nous décevra jamais et dont on ne peut pas atteindre les limites, c’est celui qui n’a pas de côté sombre : Dieu, celui qu’il appelle le Maître, le Seigneur. Selon la Bible, nous avons été créés pour ressembler à Dieu qui se révèle parfaitement à travers le Christ.

2 Corinthiens 3.18

18 Nous tous, le visage découvert, nous reflétons la gloire du Seigneur ; ainsi, nous sommes transformés pour être semblables au Seigneur et nous passons d’une gloire à une gloire plus grande encore. Voilà en effet ce que réalise le Seigneur, qui est l’Esprit.  

Je n’ai pas lu ce qu’il y avait avant, donc ça peut paraître bizarre. Paul parle de la spécificité de notre relation avec Dieu à travers Jésus, et il fait la comparaison avec la relation entre Dieu & Moïse (le grand prophète, le chef qui a conduit le peuple juif hors de l’Egypte, en passant par la mer rouge etc.). Moïse était très proche de Dieu – il y a notamment une période où il a passé de longues semaines seul en haut d’une montagne à noter par écrit le projet que Dieu avait pour son peuple. Ils étaient proches mais bien sûr Moïse ne le voyait pas directement. Quand il faisait des pauses et redescendait, il était si lumineux que le peuple avait presque peur ; alors Moïse mettait un voile pour atténuer son éclat. Imaginez que vous soyez si lumineux que vous en éblouissez les autres – et qu’ils doivent mettre des lunettes de soleil 😉 Nous avons chanté : ébloui, éblouis par Dieu – Moïse était ébloui par dieu, il était exposé à sa présence lumineuse au point d’en devenir éblouissant lui-même.

L’idée de Paul, c’est que Moïse n’a vécu cette expérience lumineuse que pendant une courte période – et voyez le résultat ! Mais le Christ révèle parfaitement qui est Dieu – c’est comme si Dieu était derrière nous et qu’il se laissait voir dans le reflet d’un miroir devant nous. L’image que nous voyons sur le reflet, c’est Jésus-Christ. Nous ne voyons pas encore Dieu complètement, mais nous avons déjà une image de lui très précise et très concrète, en Christ. Donc lorsque nous regardons Jésus par nos yeux ou à travers les récits de l’Evangile qui nous le décrivent, nous avons une représentation nette de la gloire, de l’être-même de Dieu (la gloire c’est le poids, la valeur, l’ampleur d’une personne). Lorsque nous regardons le Christ, il nous renvoie l’éclat de la lumière qui est en Dieu – et il n’est pas possible d’en sortir indemnes ! Quand vous allez au soleil, vous revenez avec de belles couleurs, imaginez le bien que nous fait la lumière de Dieu.

Mais la lumière nous transforme aussi à l’intérieur : comme le soleil vous fait secréter de la vitamine D qui est bonne pour vos os, votre humeur ou votre immunité, s’exposer à la lumière de Dieu fait naître en nous de bonnes choses. Dieu, quand nous nous tournons vers lui à travers Jésus, Dieu nous inspire, nous motive, nous guérit, nous corrige, nous allège – il nous transforme. Il répare ce qui est tordu, assainit ce qui moisit, fortifie ce qui est faible.

Alors, est-ce qu’on a vraiment besoin d’être réparés ? Est-ce que nos défauts ne font pas partie de notre charme ? Faut-il absolument de devenir meilleurs ? On l’entend souvent : si tout le monde était parfait, on s’ennuierait…

Est-ce que c’est si vrai, que sans nos défauts, la vie perdrait de son charme ?

Evidemment, si vous pensez à un artiste tellement dans les nuages qu’il en est un peu tête en l’air, ou à quelqu’un de si spontané qu’il met parfois les pieds dans le plat…

Mais nos défauts, en vrai, c’est pas ça ! c’est ce qui  nous attriste quand on se regarde dans la glace : nos mensonges, trahisons, échecs, colères, peurs, agressivité, tout ce qui est tordu voire pervers que nous ne voulons pas toujours avouer… ce qui peut vite nous faire basculer dans celui qu’on ne veut pas être, ce qui nous fait fuir chez l’autre. Je crois qu’on s’en passerait bien, de ça, non ? de ces poids, de ces fardeaux, de ces lourdeurs, de ces pilotages automatiques qui nous emmènent parfois droit au désastre…

Une chose que Paul et les ouvrages de développement personnel ont en commun : le processus est progressif ! Ca c’est sûr ! Mais la différence, c’est qu’est-ce qui me transforme. Combien de fois j’ai essayé d’être gentille, paisible, altruiste, courageuse – par moi-même c’est des sauts de puce et quand je m’améliore d’un côté, je relâche d’un autre. Mais la bonne nouvelle de l’Evangile (Evangile ça veut dire bonne nouvelle), c’est qu’en Jésus, Dieu lui-même porte nos défaillances – quand dieu me regarde à travers le miroir de la foi, il voit la justice la bonté et la paix de Jésus. Et quand je regarde Jésus, je reçois la vie de Dieu lui-même, qui par son saint esprit répare nos défaillances. Quand je me tourne vers Jésus, sa lumière agit en moi – et il met toute sa force pour me faire progresser.

De là où nous sommes, quel que soit notre parcours de vie, nous aspirons à un mieux, nous aspirons à devenir meilleurs, une meilleure version de nous, plus belle, plus généreuse, plus humble, plus courageuse ! A qui regarder ? Nous pouvons nous inspirer de milliers d’exemples, mais seul le Christ nous met en contact avec la source de toute justice, de toute joie, de toute vérité et de toute paix, d’un amour inégalé – et cette source nous transforme de l’intérieur.

S’exposer activement à la lumière du Christ  

Alors si c’est Dieu qui me transforme, je n’ai plus rien à faire ?! Si, bien sûr. Dieu ne me transforme pas malgré moi : c’est un processus où je suis impliqué ! Pour grandir, pour ressembler de plus en plus au Christ, je dois m’exposer activement à sa lumière. Et ça veut dire deux choses : 1/ renoncer à ce qui est sombre, 2/ rechercher tout ce qui est lumineux, tout ce qui vient de Dieu.

1/ Renoncer à ce qui est sombre. On ne peut pas suivre des influences contradictoires dans notre vie. Si nous voulons nous rapprocher de Dieu, nous devons renoncer à ce qui nous éloigne de lui. Si nous voulons plus de lumière, nous devons renoncer à ce qui tue la lumière en nous. Ca peut être renoncer à des penchants dégradants ou des habitudes destructrices, mais aussi à des fonctionnements stériles ou à des valeurs égoïstes. Peut-être aussi réfléchir à ce qui m’influence dans ma vie : ce que je regarde, ce que j’écoute, qui je fréquente (il n’y a pas que les ados qui ont de mauvaises fréquentations !). Qu’est-ce qui me fait grandir, et qu’est-ce qui me tire vers le bas ?

Pour vivre avec Dieu, il faut nous détourner de ce qui nous détourne de lui.

2/ Pour lui ressembler davantage, nous devons choisir ce qui nous rapproche de lui.

Ca demande d’abord de connaître Jésus, de toujours mieux le connaître, car on n’a jamais fait le tour de tout ce qu’il a à nous apprendre. Pour le connaître, le mieux c’est encore les évangiles : quatre biographies de Jésus qui présentent sa vie, ses actes, ses paroles, ses attitudes. Le reste de la Bible, avant et après, permet de comprendre les enjeux et la portée de la vie de Jésus. Donc lire les Evangiles, les méditer, s’en imprégner, c’est s’exposer à la lumière du Christ.

Il ne suffit pas de connaître Jésus. Si vous voulez vous mettre à la course, et que vous avez lu un manuel sur la meilleure méthode pour la course à pied et acheté de bonnes chaussures, mais c’est tout, vous n’irez pas loin ! Il faut vous y mettre, vous entraîner ! C’est pareil pour ressembler à Jésus : il faut s’entraîner concrètement à vivre comme lui. Il ne s’agit pas de fréquenter seulement des gens ou des lieux chrétiens ! D’ailleurs, Jésus n’était pas comme ça : il allait partout et fréquentait des gens de tous bords.

Vivre comme Jésus demande de changer de filtre par rapport à notre vie : au lieu d’agir par automatisme, demandons-nous comment Jésus réagirait, comment lui il aborderait la situation. Dans tout ce que nous vivons, facile ou difficile, nous pouvons grandir en choisissant de laisser Jésus nous inspirer.

Parfois/ souvent, nous nous tromperons – comme à la course, vous vous ferez des claquages ou vous tomberez – mais ce n’est pas grave : nous nous entraînons ! Peu à peu, les muscles se forment, le chemin se fait, la ressemblance au Christ grandit.

Tout cela, nous ne pouvons le vivre que dans la prière, car si nous avons notre part à faire, c’est surtout Dieu qui agit et nous le savons.

« Dieu, que veux-tu transformer en moi en ce moment ? »

ou « Conduis-moi dans ces circonstances confuses, car je ne sais pas où aller : montre-moi le chemin, donne-moi un signe ! » et le Dieu qui a créé la terre trouvera bien le moyen de vous guider !

ou, quand nous savons où aller mais que nous nous sentons faibles : « Donne-moi la force et la volonté de choisir le meilleur ! »

Conclusion

Est-ce que si nous ressemblons tous à Jésus nous serons tous pareils ? Non, car nous lui ressemblerons à notre manière. Imaginez que nous soyons tous des lampes avec des abat-jours de formes et de couleurs différentes. De très belles lampes ! mais éteintes. En nous approchant de Dieu par Jésus, le courant se branche à nouveau, et la lumière arrive dans l’ampoule (à faible consommation d’énergie) qui gagne progressivement en luminosité.

En marchant avec Jésus, la vie ne sera pas forcément plus simple ou plus facile, mais elle sera plus légère : avec le temps, certaines questions ne se posent plus, certaines tentations disparaissent, des évidences se forment – Dieu porte notre vie avec nous. Avec lui, nous vivrons plus de joie, car il agit en nous et autour de nous pour le meilleur. Et la paix ! La paix de se savoir toujours avec lui, dans sa lumière, une lumière que rien ni personne ne peut éteindre. Oui, laissant derrière nous la confusion et les tiraillements, nous recevrons la paix – car nous marchons dans la lumière de Dieu, vers le meilleur.