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Le défi de la communion

Cette prédication fait partie d’un mini-culte filmé pendant la période de confinement due au CoVid 19. La vidéo peut être visionnée ci-dessous.

On dit parfois que l’Eglise, ou les Églises, appartiennent au passé. Mais depuis 2000 ans que l’Eglise existe, elle a dû sans cesse se réinventer. Elle a plus ou moins réussi à le faire… et il faut avouer que les circonstances particulières que nous traversons nous y invitent de façon nouvelle.

Or, l’un des textes proposés pour ce dimanche nous ramène justement aux origines de l’Eglise. Plus précisément au lendemain de ce qu’on peut considérer comme l’événement fondateur de l’Eglise : la descente du Saint-Esprit sur les croyants réunis à Jérusalem, lors de la fête de la Pentecôte. Mais ce n’est pas ce récit qui nous est proposé, plutôt celui qui le suit immédiatement. On le trouve dans le livre des Actes des apôtres, au chapitre 2, les versets 42 à 47. Le passage que nous allons lire trace le portrait de la toute première Église.

Actes 2.42-47
42 Tous s’appliquaient fidèlement à écouter l’enseignement que donnaient les apôtres, à vivre dans la communion fraternelle, à partager ensemble le pain et à participer aux prières. 43 Chacun reconnaissait l’autorité de Dieu car il accomplissait beaucoup de prodiges et de signes extraordinaires par l’intermédiaire des apôtres. 44 Tous les croyants étaient unis et partageaient entre eux tout ce qu’ils possédaient. 45 Ils vendaient leurs propriétés et leurs biens et ils répartissaient l’argent ainsi obtenu entre tous, en tenant compte des besoins de chacun. 46 Chaque jour, d’un commun accord, ils se réunissaient dans le temple, ils partageaient ensemble le pain dans chaque maison et prenaient leur nourriture avec joie et sincérité de cœur. 47 Ils louaient Dieu et ils étaient estimés par tout le monde. Et le Seigneur ajoutait chaque jour à leur groupe les personnes qu’il amenait au salut.

 

Voilà un texte qui peut paraître incongru pour un temps de confinement ! Ce portrait de la première communauté chrétienne a sans doute valeur d’exemple… Mais comment l’entendre, alors que nous sommes contraints de rester chez nous et que nous ne pouvons pas nous réunir ?

Il y a forcément des choses évoquées dans ce texte qu’on ne peut pas faire : se réunir chaque jour, au temple ou ailleurs, partager le pain et manger ensemble, c’est impossible aujourd’hui. Même partager ses biens pour venir en aide à ceux qui sont dans le besoin n’est pas forcément évident aujourd’hui. Il y a, bien-sûr, des choses qu’on peut faire autrement. Une forme de partage et de solidarité peut s’organiser. On peut aussi profiter des moyens technologiques actuels pour se réunir par vidéoconférence et prier ensemble, on peut proposer des ressources sur Internet pour lire la Bible, etc.

Mais ce n’est pas la même chose… les téléphones et les vidéoconférence ne peuvent pas remplacer le contact humain et la proximité.

 

Le défi de la communion

En réalité, ce texte pose le défi de la communion, quelles que soient les circonstances. Evidemment, c’est un défi que ressentent particulièrement ceux qui sont contraints de vivre aujourd’hui dans l’isolement…

Peut-on dire pour autant que la communion n’est pas possible en confinement ? Qu’est-ce qui unissait les chrétiens de Jérusalem au lendemain de la Pentecôte et qui continue d’unir les chrétiens aujourd’hui, au milieu de la pandémie de coronavirus ?

En tout temps, l’unité de l’Eglise dépend de l’Esprit saint. C’est lui qui est descendu sur les croyants réunis le jour de la Pentecôte. C’est lui qui nous unit, qui garantit notre communion, hier comme aujourd’hui, et en toutes circonstances. Ce ne sont pas les moyens technologiques, aussi performants soient-ils. Et aucune restriction, aucune barrière, aucun virus ne pourra jamais empêcher le Saint-Esprit d’agir, et de nous unir à Dieu, et les uns aux autres. Mais il ne le fait pas sans nous, sans notre participation active. Et les circonstances que nous connaissons nous poussent à trouver des nouvelles façons d’être en communion.

Au temps du Nouveau Testament, il n’y avait pas de Zoom, de Skype ou de WhatsApp. Mais lorsque l’apôtre Paul a été emprisonné, il écrivait. Par ses nombreuses lettres, il entretenait la communion avec les Églises qu’il connaissait. Et nous en sommes aussi les bénéficiaires aujourd’hui encore, grâce aux épîtres parvenues jusqu’à nous à travers le Nouveau Testament. Alors qui sait ? Que restera-t-il de ce temps que nous vivons, pour notre communion demain ?

 

Le risque d’un “retour à la normale”

Attention au risque d’un simple “retour à la normale”. Je parle d’un risque, parce ce que ce serait une erreur de simplement recommencer comme avant, sans tirer les leçons de l’épreuve traversée. Et là, ce ne sont pas que les chrétiens qui sont concernés… Comment sera notre monde demain ? Comment seront nos relations sociales au quotidien alors qu’aujourd’hui l’autre est devenu pour nous un danger de contamination avec lequel il faut garder ses distances ? Comment sera notre économie alors qu’on se rend compte aujourd’hui des dangers de ne rechercher que la production au moindre coût ? Comment sera le monde du travail alors que nous voyons que les métiers les plus utiles, et même nécessaires à la société, ne sont pas les plus valorisés et reconnus ?

Apprendrons-nous de cette épreuve ou recommencerons-nous tout comme avant ?

Et pour l’Eglise aussi, la question se pose. Est-ce que, demain, nous continuerons de vivre l’Église à distance, de façon presque virtuelle ? C’est la façon de vivre l’Eglise habituellement pour certains… sans forcément participer aux rassemblements de l’Église, ou seulement occasionnellement. Et comment se prolongeront, concrètement, les nouvelles façons de communiquer, de prendre des nouvelles les uns des autres, de prier ensemble ? Notre communion demain sera-t-elle enrichie des leçons apprises à travers cette épreuve ?

 

Réinventer l’Église

Le temps particulier que nous traversons nous oblige à prendre du recul sur notre vie, et si nous sommes croyants, sur notre foi, notre façons de vivre l’Église.

Si, par la force ces choses, nous devons réinventer l’Eglise aujourd’hui, il faudra la réinventer demain encore. Le portrait de la première Église témoigne de la façon dont les premiers chrétiens ont vécu la mission qui leur était confiée. Il ne s’agit pas de bêtement copier ce qu’ils faisaient. Le contexte a changé. Et il changera encore ! La vraie question est de se demander comment vivre la mission de l’Eglise aujourd’hui, et comment la vivre demain.

Or, il me semble que le récit du livre des Actes des apôtres souligne trois aspects de la mission de l’Eglise auxquels nous devons toujours rester attentifs :

  • Ecouter Dieu et le voir agir.
  • Vivre le partage et la solidarité.
  • Rayonner de l’amour de Dieu.

Ecouter Dieu et le voir agir. C’est la première priorité, en toutes circonstances. L’Église se nourrit de la Parole de Dieu et de son action. Notre texte souligne d’une part l’assiduité de l’Eglise réunie pour écouter l’enseignement des apôtres et d’autre part une action visible de Dieu dans l’Eglise. Et les deux sont liés ! C’est en se mettant à l’écoute de Dieu que nous le verrons agir. Ce moment où, pour la plupart, nous sommes obligés de nous arrêter est un temps propice pour la prière et l’écoute de Dieu. Profitons-en ! Mais nous devrons apprendre demain à ne pas compter sur les circonstances pour consacrer du temps à Dieu.

Vivre le partage et la solidarité. Les premiers chrétiens ont vécu cet impératif de façon très concrète. En réalité, c’est la seule façon de voir si la foi que nous professons n’est pas qu’un discours creux et superficiel. Voilà la question à se poser : comment notre foi se traduit-elle en actes ? La réponse est : par le partage et la solidarité. Et nous en aurons particulièrement besoin demain. On ne mesure pas encore les conséquences, les difficultés, la précarité accentuée dans laquelle se trouveront beaucoup. Serons-nous au rendez-vous ?

Rayonner de l’amour de Dieu. Ce troisième impératif, je le retire des deux verbes associés au verset 47 : “Ils louaient Dieu et ils étaient estimés par tout le monde.” La louange du croyant exprime son amour pour Dieu, et sa vie entière est appelé à le manifester, si bien qu’elle suscite un regard favorable de la part des autres.

Alors comment est-ce que nous rayonnons, aujourd’hui, en ce temps de confinement ? Je m’interroge notamment sur ce que nous postons ou relayons sur les réseaux sociaux… je ne suis pas sûr qu’ils expriment toujours la foi, l’espérance et l’amour que nous sommes censés montrer ! Et comment allons-nous rayonner demain, pour que notre vie entière soit une louange à Dieu et suscite un regard favorable de nos contemporains ?

Encore une fois, si nous réinventons l’Eglise aujourd’hui, contraints par les circonstances, il nous faudra encore le faire demain. Car si la mission ne change pas, la façon de l’accomplir évolue, parce que notre monde évolue. Voilà notre triple défi, aujourd’hui comme demain : écouter Dieu et le voir agir en nous et à travers nous, vivre vraiment le partage et la solidarité et rayonner de façon pertinente de l’amour de Dieu.

Attendre sa venue

Aujourd’hui c’est le premier dimanche de l’Avent… Dans quel état d’esprit êtes-vous au début de cette période des fêtes de fin d’année ?

Pour certains, c’est une période de joie et d’excitation… et je ne parle pas seulement des enfants ! On ressort les décorations de Noël pour le sapin, on profite des illuminations le soir dans la ville, on va faire un tour au marché de Noël, on peaufine sa “liste pour le père Noël”, on réfléchit aux cadeaux originaux à acheter ou confectionner pour ceux qu’on aime, on ressort les CD de chants de Noël traditionnels, on imagine les bons menus pour le Réveillon… “Les fêtes ? C’est le meilleur moment de l’année !”

Pour d’autres, c’est une période de stress… C’est un vrai casse-tête pour trouver des cadeaux un peu originaux pour la belle-mère ou l’oncle machin, ou pour confectionner un menu qui plaira à tout le monde. Et puis il faut faire tous les achats, après les heures de boulot, et donc en se retrouvant aux heures de pointe dans les magasins et faire la queue pendant des heures aux caisses. Sans oublier une place pour le sapin, qui va mettre des épines partout dans la maison… et même si c’est un faux sapin, il faut quand même déménager la moitié du salon pour l’installer. “Les fêtes ? Vivement que ce soit fini !”

Pour d’autres enfin, c’est une période difficile et triste… Certains n’aiment pas les fêtes parce qu’elles font remonter à la surface des souvenirs douloureux. Je pense à ceux qui ont perdu récemment un être cher et passeront les fêtes sans lui ou sans elle. Et puis il y a ceux qui sont seuls et qui s’apprêtent à passer le réveillon de Noël devant la télé, ou les familles désunies ou en conflit pour lesquelles la perspective de réunions de famille est une vraie inquiétude… “Les fêtes ? J’angoisse…”

Je suis sûr qu’on peut trouver ces différents sentiments parmi nous. Parfois même avec un mélange de plusieurs sentiments…

Mais comment peut-on vivre autrement ce temps de l’Avent, dans l’Eglise et en tant que chrétien ? Le calendrier liturgique nous invite chaque année à consacrer quatre dimanches à préparer la célébration de Noël. En venant à l’église le dimanche matin, nous pouvons décider de faire une pause, pour attendre Noël autrement.

Qu’est-ce qu’on attend pendant l’Avent ? Etymologiquement, l’Avent c’est l’avènement, la venue. C’est un temps où on se prépare à commémorer la venue du Fils de Dieu sur terre mais aussi où on se rappelle qu’on attend encore sa venue, une autre venue, celle de son retour, comme il l’a promis.

La question du retour du Seigneur était, il y a quelques décennies, un sujet brûlant dans les églises évangéliques. Chacun se battait pour son schéma eschatologique (le calendrier des événements liés au retour de Jésus), et ça allait parfois jusqu’à l’anathème pour celui qui ne pensait pas comme nous ! Heureusement, on en est sorti… mais il ne faudrait pas pour autant oublier que l’attente du retour du Seigneur fait bien partie de l’enseignement du Nouveau Testament. Et le temps de l’Avent est un temps propice pour nous le rappeler !
Cette attente de la venue du Seigneur peut d’ailleurs aussi être vécue de différentes façons.
On peut l’attendre avec joie, voire avec impatience, en se remémorant les promesses de l’établissement du Royaume de Dieu !
Mais on peut aussi l’attendre dans le stress ou l’angoisse, en s’interrogeant : Serai-je prêt ? Aurai-je fait tout ce qu’il faut ?

La question de l’attente du retour de Jésus-Christ est au coeur de la première lettre de Paul aux Thessaloniciens et l’apôtre s’efforce surtout de rassurer et d’apaiser les craintes de ses lecteurs, tout en les encourageant à persévérer dans leur attente. C’est le texte du Nouveau Testament de ce dimanche :

1 Thessaloniciens 3.12-4.3
12 Que le Seigneur fasse grandir de plus en plus l’amour que vous avez les uns pour les autres et pour tous ! Que cet amour ressemble à notre amour pour vous ! 13 Ainsi, le Seigneur remplira vos cœurs de sa force. Et quand notre Seigneur Jésus viendra avec tous ceux qui lui appartiennent, vous serez saints devant Dieu notre Père, et on ne pourra rien vous reprocher.
1 Frères et sœurs chrétiens, vous avez appris de nous comment vous devez vivre pour plaire à Dieu, et c’est bien de cette façon que vous vivez. Mais faites encore des progrès ! Nous vous demandons et nous vous conseillons cela au nom du Seigneur Jésus. 2 En effet, vous connaissez les conseils que nous vous avons donnés de la part du Seigneur Jésus. 3 Ce que Dieu veut, c’est que vous soyez entièrement à lui. N’ayez pas une vie immorale.

La perspective de ce texte est bien le retour du Seigneur (v.13), et le fait que nous soyons prêts pour son retour : “quand notre Seigneur Jésus viendra avec tous ceux qui lui appartiennent, vous serez saints devant Dieu notre Père, et on ne pourra rien vous reprocher.”

Être saint, ici, ce n’est pas être parfait ! Car alors on pourrait craindre de ne jamais être à la hauteur ! Être saint, ici, c’est être consacré à Dieu, lui appartenir… autrement dit, être prêt pour accueillir le Seigneur qui vient.

C’est Lui qui nous prépare

La première chose que dit ce texte à propos de notre attente du retour du Seigneur, c’est que c’est Dieu qui nous prépare à sa venue : c’est lui qui fait grandir son amour en nous, c’est lui qui nous remplit de sa force.

C’est quand même réconfortant. Ça nous enlève une sacrée pression : c’est lui qui nous prépare ! Pas besoin de nous demander si nous serons à la hauteur, si nous aurons fait tout ce qu’il fallait, si nous avons les ressources et les compétences nécessaires pour être prêt. C’est lui qui nous prépare à sa venue !

Il suffit de nous laisser remplir de son amour et de sa présence. Il y a comme un paradoxe : avant son retour, le Seigneur n’est pas absent. Être dans l’attente de la venue du Seigneur, c’est aussi s’ouvrir à sa présence aujourd’hui, par son Esprit. C’est lui qui nous remplit de l’amour de Dieu et de sa force, que nous soyons dans la joie, dans la tristesse ou l’angoisse.

C’est nous qui devons progresser

Mais la deuxième chose que dit ce texte à propos de notre attente du retour du Seigneur, c’est que nous ne pouvons pas vivre cette attente les bras croisés, passifs. Nous avons toujours des progrès à faire… Paul le dit aux chrétiens de Thessalonique : “Faites encore des progrès !” (v.1). Et il rappelle un peu plus loin que ce que Dieu attend de nous, c’est un chemin de progrès spirituels constants : “Ce que Dieu veut, c’est votre sanctification” (v.3)

Ce rappel, chaque année, de l’attente de la venue du Seigneur doit entretenir en nous une certaine insatisfaction. Non pas pour ne jamais être content mais pour ne pas croire qu’on est arrivé au bout du chemin… Un des plus grands dangers pour notre vie spirituelle, c’est la suffisance, l’autosatisfaction. Elle commence quand on se compare aux autres et qu’on se dit que, finalement, on est plutôt pas mal comme chrétien.

Les chrétiens de Thessaloniques étaient plutôt des bons chrétiens ! Paul le dit : “vous avez appris de nous comment vous devez vivre pour plaire à Dieu, et c’est bien de cette façon que vous vivez.” Vous êtes de bons chrétiens ! Mais il ajoute aussitôt : “faites encore des progrès !” Ne vous contentez pas de vos acquis, ne pensez pas une seconde que vous êtes arrivés au bout du chemin !

Et ce n’est pas contradictoire avec ce qui précède, c’est complémentaire… C’est Dieu qui nous prépare mais il ne le fera pas sans nous, à notre insu.
Oubliez que c’est Dieu qui nous prépare, et vous vous épuiserez à chercher à plaire à Dieu par vos propres forces, vous ploierez sous la culpabilité parce que vous n’y arriverez pas et vous vous découragerez de ne pas voir assez de progrès dans votre vie spirituelle !
Mais oubliez que vous avez votre part à faire, et vous oublierez aussi de vivre l’attente du Seigneur comme une autre façon de vivre sa présence. Votre attente sera vide, triste, sans espérance.

Conclusion

Et si nous vivions ce temps de l’Avent comme une occasion de nous rapprocher du Seigneur ? Attendre le Seigneur, c’est s’attendre à lui, dès aujourd’hui ! Il vient, par son Esprit, il s’approche de nous, là où nous sommes. Chacun peut y trouver son compte.

Regardez le récit de Noël ! C’est la fête, le choeur des anges se réjouit ! Mais c’est aussi le stress et l’angoisse : il vient dans une famille modeste en situation précaire puisqu’elle doit loger dans une étable !

Jésus nous rejoint là où nous sommes. Il vient se réjouir avec nous. Il nous apporte le repos au milieu du stress. Il apaise notre angoisse et nous console. Nous rapprocher de lui c’est le laisser nous rejoindre… et vivre sa présence autrement, dans l’attente de son retour !

Motivés par l’essentiel (5) Formés pour servir Dieu

 

Ne vous arrive-t-il pas, parfois, d’avoir l’impression de perdre votre temps ? Et je ne parle pas seulement des moments où vous faites la queue dans une administration pour remplir tel ou tel formulaire et qu’il vous manque toujours un document pour finaliser le dossier ! Je parle de ce sentiment de ne pas être à sa place, et qui crée de la frustration, du découragement, de la fatigue. Un sentiment que vous pouvez ressentir dans votre vie de tous les jours, dans votre travail ou même dans l’Eglise !

Par exemple, lorsque vous êtes mis au placard dans votre entreprise, parce que la direction ne peut pas vous licensier mais qu’elle vous attribue un poste où vous êtes payé pour ne rien faire… Ou quand vous faites partie d’un groupe mais que vous y êtes réduit à un rôle de spectateur, soit parce que vous ne comprenez pas grand chose à ce qui s’y vit, soit parce que vous n’êtes jamais intégré dans la vie du groupe. Et ce groupe peut d’ailleurs aussi être une Eglise…

On entend assez souvent les chrétiens se demander : “Quelle est la volonté de Dieu pour ma vie ?” En réalité, si on est honnête, je crois qu’il faut surtout entendre derrière cette question très spirituelle, une question existentielle : “A quoi je sers ?” ou une question plus pragmatique : “En quoi puis-je être utile ?” Et c’est une question qui se pose plusieurs fois dans notre vie, avec une nuance : “Est-ce que je suis encore à ma place ? Est-ce que je ne serais pas plus utile ailleurs ?”

Ces questions, ainsi formulées, sont légitimes. Car pour que notre vie, notre engagement, ait un sens, nous avons besoin de nous sentir utiles. Nous avons besoin de comprendre pourquoi nous faisons telle ou telle chose. Et le fait de savoir que ce que nous faisons correspond bien à ce que Dieu attend de nous contribue évidemment à se sentir utile !

Nous retrouvons les mêmes préoccupations dans ce que l’apôtre Paul écrivait aux chrétiens d’Ephèse :

Ephésiens 2.8-10
En effet, vous êtes sauvés grâce à la bonté de Dieu, et parce que vous croyez. Cela ne vient pas de vous, c’est Dieu qui vous donne le salut .
Ce salut ne vient pas de vos actions à vous, donc personne ne peut se vanter !
Oui, c’est Dieu qui nous a faits. Il nous a créés dans le Christ Jésus pour que nous menions une vie riche en actions bonnes. Et ces actions, Dieu les a préparées pour que nous les fassions.

Le salut et les oeuvres

Il y a, dans ces quelques versets, plusieurs concepts clés de l’Evangile : le salut, la foi, la grâce, les oeuvres… Et il y a notamment cette formule étonnante où l’apôtre Paul parle des actions bonnes, ou des oeuvres bonnes, que Dieu a préparées d’avance pour que nous les pratiquions.

Il le rappelle clairement, ce ne sont pas nos oeuvres qui nous sauvent. C’est Dieu qui nous sauve, pas ce que nous pouvons faire ou mériter. Nous sommes sauvés parce que Jésus-Christ est mort et ressuscité ! Son pardon nous est offert, la vie éternelle nous est acquise. C’est une donnée fondamentale de l’Evangile. Mais ça ne signifie pas que les oeuvres, les bonnes actions, ne sont pas notre affaire !

Les œuvres ne sont pas à l’origine de notre salut mais elles font bien partie de la dynamique du salut. Il faut absolument sortir d’une compréhension statique du salut qui voudrait qu’être sauvé, c’est échapper au jugement de Dieu, assurer sa place au Paradis ! Si votre conception du salut s’arrête là, quelle tristesse !

Le salut, c’est toute l’oeuvre de restauration de Dieu en nous. Une restauration qui est un don de Dieu, une grâce que nous recevons. Et cette grâce, elle nous transforme et elle crée en nous des oeuvres bonnes, elle nous poussent à agir, à servir. L’oeuvre restauratrice de Dieu se manifeste aussi en nous par des oeuvres bonnes.

Dans ces versets, l’apôtre Paul compare le salut à une oeuvre de création : “Dieu nous a créés dans le Christ Jésus.” C’est une autre façon de dire “Dieu nous a sauvés”, c’est le début d’une vie nouvelle. Mais depuis quand un bébé reste-t-il un bébé toute sa vie ? Un bébé ne fait pas grand chose, à part manger, faire pipi, dormir et pleurer. Et on peut être chrétien et ne pas en faire beucoup plus qu’un bébé !

Si Dieu nous a créés en Christ, c’est pour que nous vivions, pour que nous grandissions, pour que nous agissions ! C’est donc tout à fait légitime de se poser la question : “qu’est-ce que Dieu attend de moi ? Que veut-il que je fasse ?” Et se demander “à quoi je sers ?”, “en quoi puis-je être utile” est une démarche très spirituelle.

Les oeuvres que Dieu a préparées

Mais que sont donc ces “oeuvres que Dieu a préparées” ?

Ce n’est certainement pas une sorte de planning personnalisé que Dieu aurait préparé pour chacun de nous, et qu’il nous faudrait discerner, ou deviner, pour l’accomplir. Ce n’est pas une liste de tâches qu’il faudrait avoir entièrement cochée pour avoir réussi sa vie aux yeux de Dieu !

L’Evangile nous libère du poids de notre salut : ce ne sont pas nos oeuvres qui nous sauvent mais la grâce de Dieu. Ça n’est pas pour nous remettre sous un autre poids, en nous imposant le fardeau d’oeuvres à accomplir pour réussir notre vie.

Il faut voir dans ces paroles de l’apôtre Paul une promesse. Celle d’un Dieu qui ne nous laisse pas seul dans la mise en oeuvre de notre salut. Un Dieu qui nous prend par la main et qui préparent toutes choses pour nous permettre d’accomplir ses oeuvres bonnes. Il me semble qu’on peut le comprendre de deux façons au moins :

  • D’une part que Dieu va nous préparer, nous rendre capable d’accomplir ces œuvres, parce qu’il nous a créés pour ça en Christ !
  • D’autre part qu’il va préparer les conditions et les circonstances qui vont nous permettre d’accomplir les oeuvres qu’il a prévues pour nous.

Bref, Dieu rend possible, dans notre vie, la mise en pratique de son oeuvre de restauration. Et cela aussi, c’est le fruit de sa grâce !

C’est pourquoi dans le processus de discernement auquel nous sommes appelés, je vois une double mouvement, une double dynamique dans laquelle entrer.

La première dynamique me pousse vers les autres et vers mon environnement. Là où je suis, là où je vis. Je vais être attentif aux circonstances de ma vie, aux besoins qui se manifestent autour de moi, aux rencontres que je vais faire. Les questions que je vais me poser seront alors : “Quels sont les besoins de ceux que je côtoie au quotidien ?”, “Dans quels services a-t-on besoin d’aide autour de moi, ou dans l’Eglise que je fréquente ?”

La deuxième dynamique me pousse vers Dieu et vers moi-même. En approfondissant ma relation avec mon Créateur et Sauveur, je vais apprendre à mieux le connaître et par la même occasion, à mieux me connaître moi-même. Et je vais écouter mon coeur, là où l’Esprit de Dieu est venu faire sa demeure. Je vais être attentif à mes aspirations, à ce qui me fait vibrer, à ce que Dieu prépare dans mon coeur.

Et il peut arriver que les besoins autour de moi et les aspirations de mon coeur se rejoignent. C’est l’idéal. Et là, on n’a pas le droit d’hésiter et d’attendre ! Tous les voyants sont au vert : il faut foncer ! Mais ce n’est pas toujours le cas. Parfois, ce sont les besoins autour de moi qui prévaudront et me pousseront au service. Et il faudra accepter d’être patient avec certaines aspirations de notre coeur, qui ne se concrétiseront pas tout de suite dans un service…

Même si Dieu prépare des oeuvres bonnes pour que nous les pratiquions, il ne faut pas s’attendre à ce que tout nous tombe du ciel, de façon évidente. Il est de notre responsabilité d’être attentif aux autres et à notre environnement, et d’écouter Dieu, et notre coeur.

Conclusion

Dieu ne veut pas que vous vous sentiez inutile. Il ne veut pas que vous perdiez votre temps, que vous ne vous sentiez pas à votre place. Il vous a créé en Jésus-Christ pour que votre vie soit riche en oeuvres bonnes, en actions utiles, pour votre prochain, pour Dieu lui-même !

C’est pourquoi, par sa grâce il vous a sauvé. Et par sa grâce, il a préparé, en vous et autour de vous, les oeuvres que vous allez pratiquer. Alors soyez attentif aux besoins autour de vous et écoutez votre coeur. Dieu vous appelle à vous mettre au service !

Découvrir l’amour

 

Ephésiens 2.1-10
1 Autrefois, vous étiez morts à cause de vos fautes, à cause de vos péchés. 2 Vous viviez dans le péché en suivant les forces de ce monde. Vous obéissiez au chef des puissances mauvaises qui règnent entre ciel et terre. Ce chef, c’est l’esprit du mal qui agit maintenant chez ceux qui désobéissent à Dieu. 3 Autrefois, nous aussi, nous faisions tous partie de ces gens-là quand nous vivions selon nos désirs mauvais. Nous obéissions à ces désirs et à nos pensées mauvaises. À cause de notre nature, nous méritions la colère de Dieu comme les autres.
4 Mais Dieu est riche en pitié : à cause du grand amour dont il nous a aimés, 5 à nous qui étions morts à cause de nos fautes, il nous a donné la vie avec le Christ. Oui, vous êtes sauvés par grâce. 6 Avec le Christ Jésus, il nous a réveillés de la mort et avec lui encore, il nous a fait asseoir dans les cieux. 7 Ainsi, en montrant sa bonté pour nous dans le Christ Jésus, Dieu a voulu prouver pour toujours la richesse extraordinaire de sa grâce. 8 En effet, c’est par la grâce que vous êtes sauvés, au moyen de la foi. Cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. 9 Ce salut ne vient pas de vos actions à vous, donc personne ne peut se vanter ! 10 Oui, c’est Dieu qui nous a faits. Il nous a créés dans le Christ Jésus pour que nous menions une vie riche en actions bonnes. Et ces actions, Dieu les a préparées pour que nous les fassions.

 

Découvrir l’amour change une vie. Radicalement. Dans ma vie, il y a clairement un avant et un après ma rencontre avec celle qui est devenue ma femme ! Ma vie n’était pas la même avant et après !

C’est vrai aussi (c’est même encore plus vrai !) pour notre rencontre avec l’amour de Dieu. Il y a un avant et un après…

Un avant et un après

L’amour de Dieu, au cœur de ce texte, est à la base d’un changement radical, le plus grand changement possible dans la vie d’un être humain. Paul évoque bien ici un avant et un après :
Un avant : « Autrefois vous étiez mort à cause de vos fautes… » (v.1). Et la description continue jusqu’au verset 3 qui se termine par cette conclusion : « nous méritions la colère de Dieu comme les autres. »
Un après : « Mais Dieu est riche en pitié » (v.4), et un peu plus loin : « A nous qui étions morts à cause de nos fautes, il nous a donné la vie avec le Christ. » (v.5)

Autrement dit : autrefois, nous étions morts, maintenant nous sommes vivants !

On parle souvent de la vie chrétienne, et c’est bien une image biblique, comme d’une vie nouvelle, qui débute avec une nouvelle naissance. C’est ce que Jésus disait à Nicodème : « Je te le dis, c’est la vérité, personne ne peut voir le Royaume de Dieu, s’il ne naît pas de nouveau. » (Jean 3.3)

Mais le langage utilisé par Paul ici est encore plus fort. Cette nouvelle naissance, c’est une résurrection ! Il ne s’agit pas seulement de changer de vie, de choisir une vie meilleure… il s’agit de passer de la mort à la vie ! Une résurrection !

La vie chrétienne est alors perçue comme une expérience de résurrection, grâce à l’amour de Dieu. La notion même de résurrection implique un changement radical, une vie nouvelle. La résurrection du Christ n’est pas une simple réanimation de son corps. C’est l’entrée dans une vie nouvelle qui ne connaîtra plus la mort. Il est vivant, pour toujours ! C’est la même chose pour notre expérience chrétienne.

L’amour de Dieu, ce n’est pas seulement d’avoir donné son Fils Jésus-Christ, mort et ressuscité, il y a 2000 ans. C’est aussi de nous rendre aujourd’hui participants de cette mort et de cette résurrection.

La vie chrétienne à laquelle l’Evangile nous appelle, c’est une vie de résurrection, de changements, d’évolution permanente, au contact de l’amour de Dieu. Notre sève, notre force vitale, le sang qui coule dans nos veines spirituelles, c’est l’amour de Dieu ! Le même qui a ressuscité Jésus-Christ d’entre les morts !

Les mots de l’amour

Un seul terme ne suffit pas à décrire l’amour de Dieu ! En plus de l’expression « le grand amour dont il nous a aimés », au verset 5, on trouve aussi utilisé, au verset 4, le terme « pitié » (PdV), que la NBS traduit par « compassion » et la TOB par « miséricorde ». Et puis au verset 7, la bonté. On pourrait encore ajouter la mention, à trois reprises (v.5,7,8) de la grâce comme une expression de l’amour de Dieu.

Le terme le plus englobant, c’est l’amour, qui traduit le grec agapê. C’est le terme que les auteurs du Nouveau Testament ont choisi pour décrire l’amour de Dieu, l’expression même de sa personne puisque, selon Jean dans sa première épître, « Dieu est amour » (1 Jn 4.8). Dans notre texte, Paul le dit avec une certaine emphase : « A cause du grand amour dont il nous a aimés » (v.4)

Cet amour de Dieu se décline ici sous trois formes : la pitié, la bonté et la grâce.

  • La pitié (eleos), ou la compassion, c’est l’amour qui pousse à venir en aide à ceux qui sont dans la détresse. Dieu ne veut pas nous laisser dans le péché : « Autrefois vous étiez morts… » et Dieu ne peut pas se satisfaire de cela. Alors dans son amour, il prend pitié de nous et met en œuvre son projet de salut.
  • La bonté (chrestotês), c’est l’amour qui se montre généreux. Ici, la bonté est associée à « la richesse extraordinaire de sa grâce ». Ce sont les bienfaits de Dieu qui sont répandus sur tous, comme quand Jésus dit « il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et les injustes. » (Mt 5.45)
  • Quant à la grâce, c’est le don gratuit de Dieu. Elle est associée par deux fois au salut dans notre texte, et une fois à l’abondance de la bonté de Dieu manifestée en Jésus-Christ. La grâce est la réponse de Dieu à notre culpabilité, la solution au péché : c’est son pardon.

La pitié, la bonté et la grâce. Trois termes qui qualifient l’amour agapê de Dieu, manifestés à leur paroxysme dans la personne et l’oeuvre de Jésus-Christ. Il a eu pitié de nous : il est venu à notre secours en se faisant serviteur. Dans sa bonté il a tout donné, jusqu’à sa propre vie. Sa grâce s’est manifestée dans son sacrifice à la croix, allant jusqu’à dire en agonisant : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font. »

Parler de l’amour de Dieu, ce n’est donc pas simplement parler du « bon Dieu ». C’est parler de la façon concrète dont Dieu a témoigné son amour envers nous. C’est parler d’un amour à multiples facettes, dont la pitié, la bonté et la grâce font partie… mais il y en a bien d’autres encore que nous sommes appelés à découvrir tout au long de notre vie chrétienne.

Les fruits de l’amour

Si, précédemment, Paul a décrit la vie nouvelle reçue en Christ comme une résurrection, au verset 10 il la compare à une véritable nouvelle création : « Oui, c’est Dieu qui nous a faits. Il nous a créés dans le Christ Jésus pour que nous menions une vie riche en actions bonnes. Et ces actions, Dieu les a préparées pour que nous les fassions. » (v.10)

L’image est aussi forte et traduit bien la nouveauté radicale que cela représente. En Christ, nous sommes de nouvelles créatures… et nous devons agir comme telles. Il s’agit alors de mener une vie « riche en actions bonnes », des actions que Dieu a préparées pour nous.

Il faut bien comprendre cette expression. Paul n’est pas en train de dire qu’il aurait établi une liste de choses à faire et puis qu’il nous dirait ensuite : « allez-y, j’ai préparé la liste, maintenant débrouillez-vous ! »

Dieu ne prépare pas une liste, il prépare notre cœur ! Il nous façonne, nous transforme, nous sommes son ouvrage ! Oui, c’est nous qui pratiquons ces œuvres, mais grâce à l’amour de Dieu. Ces œuvres bonnes, ce sont les fruits de l’amour de Dieu dans notre vie.

C’est pourquoi, il y a un lien entre l’amour de Dieu et les œuvres bonnes que nous sommes appelés à faire. L’amour de Dieu envers nous inspire notre amour envers notre prochain. On peut alors reprendre les trois facettes de l’amour de Dieu : la pitié, la bonté et la grâce.

La pitié, ou la compassion, nous conduit à prendre soin de ceux qui souffrent, de ceux qui sont dans la détresse… Et franchement, ce ne sont pas les occasions qui manquent. Il y a toujours, autour de nous, quelqu’un qui a besoin de nous, de notre aide, de notre écoute, de notre prière. Il suffit d’ouvrir les yeux !

La bonté de Dieu nous invite à la générosité. Dans la perspective du Royaume de Dieu, on n’est pas riche de ce que l’on possède, on est riche de ce que l’on partage. Et je ne parle pas ici seulement de notre porte-monnaie (même s’il est aussi concerné !), je parle aussi du temps qu’on consacre aux autres, de l’ouverture dont on fait preuve, de l’accueil que l’on réserve.

La grâce, enfin, nous pousse à la gratuité. L’amour véritable est gratuit, il ne calcule pas, il n’attend rien en retour. Nous avons tellement besoin de gratuité dans nos relations… et une des expressions ultimes de la gratuité, c’est le pardon !

Conclusion

L’amour de Dieu rend tous les changements possibles, il offre une vie nouvelle, une véritable résurrection, une création nouvelle. Il s’est exprimée de façon parfaite en Jésus-Christ, et il continue de nous le manifester aujourd’hui par son Esprit.

Nous sommes au bénéfice de l’amour parfait de Dieu, de sa compassion, de sa bonté et de sa grâce… et nous sommes appelés à notre tour à faire preuve d’amour envers notre prochain, dans la compassion, la bonté et la grâce. Laissons donc mûrir dans notre vie les fruits de l’amour de Dieu !

Réhabiliter Zachée !

 

Lecture biblique : Luc 19.1-10

Le regard traditionnel sur Zachée voit en lui un méchant collecteur de taxes, malhonnête, qui a besoin de se repentir, de changer de vie, pour être sauvé. On voit alors dans sa rencontre avec Jésus l’occasion pour lui de se convertir : c’est à ce moment-là qu’il décide de réparer ses torts et de rembourser généreusement ceux qu’il a extorqué. Alors Jésus affirme qu’il est sauvé !

Sauf que ce n’est pas forcément ce que dit le texte… Malgré la traduction de certaines versions françaises, au verset 8, Zachée ne parle pas au futur. Il ne dit pas : « Désormais je vais donner la moitié de mes richesses aux pauvres et je vais rembourser au quadruple celui à qui j’ai pris trop d’argent. ». Il dit : « Ecoute, Seigneur ! Je donne la moitié de mes richesses aux pauvres et si j’ai pris trop d’argent à quelqu’un, je lui rend quatre fois plus ! ». Il ne dit pas ce qu’il va désormais faire mais ce qu’il fait déjà.

En fait, c’est comme s’il disait à Jésus : « Tu sais, je ne suis pas comme ce que les gens disent de moi. Je ne mérite pas ma réputation… » Car d’où vient la réputation de Zachée ? De ce que disent les foules de lui : « Voilà que Jésus s’arrête chez un pécheur ! » Tout est dit : Zachée est un collecteur de taxes, donc c’est un pécheur !

Il faut dire que les collecteurs d’impôts n’avaient pas bonne réputation. Ils étaient la figure même du collaborateur à la solde de l’occupant romain : ils collectaient les taxes pour l’envahisseur. Et ils avaient souvent tendance à s’en mettre un peu dans les poches au passage… Qu’est-ce qu’on disait alors des collecteurs de taxes ? Ils sont tous pourris !

Jésus, lui, a une toute autre attitude puisqu’il dit à Zachée qu’il veut manger chez lui. Qu’est-ce qui l’a décidé à le faire ? Peut-être le fait de le voir, ainsi, monter sur un arbre à son passage. Une attitude qui n’est pas très digne d’un homme de son statut social… et qui traduit surtout son ardent désir de rencontrer Jésus. Peut-être Jésus a-t-il vu que Zachée n’était pas un collecteur de taxes comme les autres.

Car, il faut le dire, Jésus ne se laissait pas enfermer dans les a priori sur les gens. Ce n’est pas la première fois qu’il approchait un collecteur de taxes. Il a même appelé l’un d’eux à devenir son disciple et il l’a ensuite choisi pour faire partie des 12 apôtres. Il s’agit de Matthieu (appelé Lévi). Jésus mangeait aussi avec les collecteurs de taxes, comme avec tous ceux qu’on rejetait ou qu’on considérait comme pécheur. Les évangiles nous disent même que plusieurs suivaient Jésus.

Jean le baptiste, lui aussi, a vu des collecteurs de taxes venir à lui. Et lui non plus ne les a pas chassés. Il leur disait seulement d’être intègre dans leur tâche :

« Des collecteurs des taxes aussi vinrent pour recevoir le baptême ; ils lui demandèrent : Maître, que devons-nous faire ? Il leur dit : N’exigez rien au-delà de ce qui vous a été ordonné. » (Luc 3.12-13)

Et si Zachée avait reçu le baptême de Jean ? On n’en sait rien, évidemment, mais pourquoi pas ? Ca expliquerait son attitude intègre, peut-être même suite à son baptême. Ca expliquerait aussi son désir de rencontrer Jésus : Jean-Baptiste n’avait-il pas annoncé que le Messie allait venir à sa suite ?

Ce sont, bien-sûr, des conjectures. Mais ce qui est sûr, c’est que le texte de l’évangile laisse bien entendre que Zachée avait déjà une attitude intègre avant de rencontrer Jésus. Tous les collecteurs de taxes n’étaient donc pas des pourris ! Mais les foules n’étaient pas capables de le voir, semble-t-il…

Jésus, lui, non seulement décide d’aller manger chez Zachée mais il ne lui fait aucun reproche, il ne lui demande même pas de changer d’attitude. Il accueille au contraire ce que Zachée dit de son intégrité avec joie : « Aujourd’hui le salut est venu dans cette maison ! » De plus, il le réhabilite aux yeux de tous : « Zachée aussi est de la famille d’Abraham ! »

La conclusion du récit : « le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu » s’adresse donc peut-être moins à Zachée qu’à ceux qui le jugeaient… « Ne jugez pas afin de ne pas être jugés ! »

Les leçons de cet épisode

Je vous propose de tirer des leçons de ce récit non pas en se demandant s’il faut ou pas agir comme Zachée mais en considérant l’attitude de ceux qui entourent Zachée. Et dans ce cas, je crois qu’on peut dire que nous devons prendre exemple sur Jésus et considérer la foule comme un contre-exemple à ne pas suivre :
La foule juge et enferme Zachée dans ses a priori : c’est un collecteur de taxe donc c’est un pécheur !
Jésus accueille Zachée tel qu’il est et sait le reconnaître à sa juste valeur : c’est un fils d’Abraham !

Toute l’histoire de Zachée est résumée par ces deux affirmations : c’est un pécheur ou c’est un fils d’Abraham.

Pour la foule, Zachée est un pécheur !

Pour la foule, dire de Zachée « c’est un pécheur », c’est l’enfermer dans une catégorie. Les pécheurs, ce sont les gens à ne pas fréquenter. Ce sont les infidèles, les impurs, les gens de mauvaise vie. Pour la foule, Zachée est de ceux-là. Il est déjà jugé ! Victime des a priori.

Nous avons tous des a priori sur les gens. Mais il faut prendre conscience qu’ils sont autant de prisons qui enferment les autres… et nous-mêmes.

Ne souffrons-nous pas lorsque nous sommes victime d’a priori ? Je suis sûr qu’en tant que chrétien, peut-être plus encore en tant que protestant évangélique, vous avez déjà été confronté à des a priori des gens à votre égard. Convaincus que les chrétiens c’est comme ça, ils pensent ceci et ne font pas cela. Et ce n’est pas agréable…

Mais nous avons aussi nos a priori sur les autres. Regardez autour de vous. Que pensez-vous des gens que vous voyez ? Que savez-vous vraiment d’eux ? Quelle est la part d’a priori dans votre jugement sur eux ? Avez-vous déjà collé une étiquette sur leur front ?

Pour sortir de nos a priori, il y a deux règles d’or :
– Il faut se méfier des apparences.
– Il faut rejeter les étiquettes.

Les apparences sont trompeuses. La première impression que vous avez de quelqu’un est très rarement conforme à la réalité. Et pourtant, on en reste si souvent à cette première impression… Passez du temps avec quelqu’un, apprenez à le connaître vraiment et vous découvrirez quelqu’un d’autre. En bien ou en mal d’ailleurs…

Il faut rejeter les étiquettes. C’est pourtant tellement facile. On classe les gens en catégories et on les y enferme. Les politiciens. Les artistes. Les patrons. Les pasteurs (!) Ou alors les non-chrétiens. Les « gens du monde ». Ou même les catholiques. Les pentecôtistes… Et derrière ces étiquettes, on met en gros tout le monde dans le même panier.

Mais enfermer l’autre dans ses a priori, c’est refuser de le rencontrer tel qu’il est ! Et c’est, d’une certaine manière, le juger…

Pour Jésus, Zachée est un fils d’Abraham !

Pour Jésus, dire « c’est un fils d’Abraham », c’est reconnaître en Zachée un frère, un homme de foi. Et le dire publiquement, c’est inviter les autres à faire de même et changer de regard sur lui.

Jésus, lui, savait reconnaître la vraie valeur des gens et ne pas se laisser piéger par les apparences ou la réputation. Alors bien-sûr, on n’arrivera jamais à être comme Jésus. Il n’empêche, Jésus n’allait pas tout seul voir Zachée et les gens de mauvaise réputation qu’il n’hésitait pas à rencontrer. Il emmenait ses disciples avec lui ! N’est-ce pas aussi pour leur montrer l’exemple et les inviter à faire de même ?

N’y a-t-il pas pour nous un défi à accueillir comme Jésus accueille, à regarder comme Jésus regarde ? N’est-ce pas ainsi que nous pourrons glorifier Dieu dans nos relations ?

« Accueillez-vous les uns les autres, comme le Christ vous a accueillis, pour la gloire de Dieu. » (Romains 15.7)

Sommes-nous prêts à changer notre regard ?
Sommes-nous prêts à aller au-delà des apparences et des réputations ? A aller vraiment à la rencontre des autres, à nous laisser surprendre par eux ?
Sommes-nous prêts à croire que les gens peuvent changer ou les enfermons-nous à tout jamais dans des a priori, incapable de retirer l’étiquette que nous avons collé sur leur front ?

Conclusion

L’histoire de Zachée est donc peut-être moins l’histoire d’un pécheur qui se repent que d’un homme victime de sa réputation. Nous sommes comme la foule, victimes de nos a priori. Et l’accueil du Christ nous invite à changer notre regard. Non seulement sur Zachée, mais aussi sur notre prochain !