image_pdfimage_print

Une paix qui dépasse toute intelligence

image_pdfimage_print

Regarder la vidéo

La semaine dernière, nous avons évoqué la paix que le Christ laisse à ses disciples peu de temps avant de les quitter, une paix qui découle de sa présence auprès d’eux, auprès de nous et en nous par son Esprit. C’est une paix que nul autre ne peut nous donner ! Ce matin, je vous propose de nous arrêter sur un autre aspect de la paix de Dieu, que l’apôtre Paul évoque dans son exhortation aux chrétiens de Philippe.

Les deux versets que nous allons lire font partie des différentes recommandations que l’apôtre adresse à ses lecteurs, à l’issue de sa lettre. Le contexte n’est pas facile, tant pour Paul que pour ses lecteurs. L’apôtre est en prison lorsqu’il écrit sa lettre. Et les chrétiens de Philippe font face eux-mêmes à des difficultés. Paul les considère comme ses partenaires dans la lutte pour la propagation de la Bonne Nouvelle du Christ. Car elle progresse, malgré les oppositions.

Dans un tel contexte, qui peut être source de craintes et d’inquiétudes, au coeur de ses exhortations, l’apôtre Paul adresse un appel à ses lecteurs, avec une promesse, celle de la paix de Dieu :

Philippiens 4.6-7
6 Ne vous inquiétez de rien, mais en toute circonstance demandez à Dieu dans la prière ce dont vous avez besoin, et faites-le avec un cœur reconnaissant. 7 Et la paix de Dieu, qui dépasse toute intelligence, gardera vos cœurs et vos pensées unis avec Jésus Christ.

 

Une paix qui dépasse toute intelligence

Intéressons-nous d’abord à la formule originale utilisée par Paul au verset 7 : “la paix de Dieu, qui dépasse toute intelligence”. Qu’est-ce que ça signifie exactement ? De quelle intelligence parle-t-on ?

C’est le terme grec noûs qui est utilisé ici. Un terme qu’on peut traduire avec plusieurs termes en français : l’esprit, la pensée, la raison, l’intellect… En fait, on peut dire que le terme désigne notre faculté de penser.

Paul affirme donc que la paix de Dieu dépasse notre faculté de penser. Est-ce à dire que c’est une paix qui n’a rien à voir avec l’intelligence ? Une paix irrationnelle, qui ne s’explique pas ? Il me semble que c’est plutôt une paix qui surpasse les limites de notre intelligence.

Car, il faut le dire, notre intelligence peut nous procurer une certaine paix. Face à une situation de stress ou d’inquiétude, on peut se raisonner, analyser le problème. On peut mettre à profit notre expérience, nos connaissances, faire preuve de sagesse. Et cela peut suffire à nous procurer la paix, lorsqu’on comprend, ou qu’on maîtrise la situation.

Dieu nous a donné une intelligence et nous appelle à faire preuve de bon sens. Cela suffit à nous procurer la paix dans un certain nombre de cas. Ce n’est pas parce qu’on est croyant qu’on est obligé de vivre toujours dans l’irrationnel !

Mais il y a des circonstances qui échappent à notre compréhension et notre sagesse, des situations qu’on ne maîtrise pas du tout, qui nous dépasse, où on se sent complètement démuni… C’est alors que la paix de Dieu est si importante, elle qui surpasse toutes nos facultés intellectuelles.

La paix de Dieu va au-delà de notre sagesse et notre bon sens. Elle nous est accordée même lorsque notre intelligence ne peut nous procurer aucune paix. Même quand, humainement, il ne semble y avoir aucune issue favorable possible, le croyant peut être rempli de la paix de Dieu. De nombreux exemples peuvent être cités, hier et aujourd’hui, pour des croyants face à la persécution, dans le creuset de l’épreuve ou au cœur de la maladie. Alors que tout semble perdu humainement, ils font preuve d’un calme, d’une confiance et d’une paix incroyables. Cette paix-là est d’ailleurs parfois un témoignage plus fort et parlant qu’un miracle. En fait, elle est un miracle… parce qu’elle est l’effet direct de l’oeuvre de Dieu.

 

La paix dans l’union avec Jésus-Christ

Arrêtons-nous maintenant sur la suite de l’exhortation de l’apôtre Paul, qui permet de préciser ce qu’est cette paix de Dieu qu’il promet. Relisons l’ensemble du verset 7 : “la paix de Dieu, qui dépasse toute intelligence, gardera vos cœurs et vos pensées unis avec Jésus Christ.”

Le fruit de la paix de Dieu chez le croyant, c’est de garder son coeur et ses pensées unis avec Jésus-Christ. Le coeur et les pensées, ce sont différentes dimensions de notre être intérieur. Le coeur, c’est plutôt le siège de la volonté, de nos intentions et de nos motivations. Les pensées (le terme grec est apparenté à noûs) sont le fruit de notre intellect, nos réflexions, nos préoccupations…

Les soucis, les inquiétudes, les préoccupations peuvent altérer notre paix intérieure. Mais pour le croyant que nous sommes, ils peuvent aussi facilement nous éloigner du Christ, nous faire oublier sa présence, nous donner l’impression de ne plus la ressentir. Absorbés que nous sommes par les soucis et l’inquiétude, on peut en venir à oublier la présence du Christ à nos côtés…

Or la paix de Dieu garde nos coeurs et nos pensées unis avec Jésus-Christ. On pourrait même dire qu’on a ici une sorte de définition de la paix pour le chrétien : c’est avoir son coeur et ses pensées unis avec Jésus-Christ. Être en harmonie avec le Christ. Se reposer en lui.

On pourrait appeler cela le cercle vertueux de la paix de Dieu. Elle garde notre coeur et nos pensées unis au Christ, et le fait de garder notre coeur et nos pensées unis au Christ nous procure la paix en toutes circonstances !

 

Le rôle de la prière

Si on revient un peu en arrière dans l’exhortation de Paul, on constate qu’il y a un rôle spécifique de la prière pour recevoir la paix de Dieu. C’est le verset 6 : “Ne vous inquiétez de rien, mais en toute circonstance demandez à Dieu dans la prière ce dont vous avez besoin, et faites-le avec un cœur reconnaissant.”

Il s’agit donc, en toutes circonstances, de demander à Dieu ce dont nous avons besoin, et de le faire avec un coeur reconnaissant.

Ca ne veut pas dire que Dieu nous donnera automatiquement tout ce que nous lui demanderons. L’apôtre Paul n’est pas en train de nous donner un truc infaillible pour obtenir de Dieu tout ce qu’on veut ! L’idée de cette exhortation est qu’en demandant à Dieu tout ce dont nous avons besoin, nous lui exprimons notre attente, notre confiance, nous reconnaissons que nous dépendons de lui.

Le faire avec un coeur reconnaissant, c’est justement le faire dans la confiance que Dieu répondra selon nos besoins, qu’il prendra soin de nous. Ici encore, ce n’est pas une formule magique. Comme s’il suffisait de dire merci par avance pour avoir ce qu’on demande. Vous savez que certains l’ont compris comme ça ! Ce n’est plus de la reconnaissance, c’est une tentative de manipulation… et une sacrée preuve d’immaturité chrétienne !

Il ne faut pas oublier que ce que Dieu promet en réponse à nos prières, dans cette exhortation de l’apôtre, ce n’est pas forcément ce qu’on lui demande mais c’est toujours sa paix. Notre texte dit : “Demandez à Dieu tout ce dont vous avez besoin… et il vous donnera sa paix.” Que l’on obtienne ou non ce que nous avions demandé, Dieu promet de nous donner sa paix.

 

Conclusion

Je nous invite ce matin à entrer dans le cercle vertueux de la paix de Dieu ! Gardons notre coeur et nos pensées unis au Christ pour recevoir la paix de Dieu, cette paix qui elle-même gardera notre coeur et nos pensées unis au Christ !

Ce cercle vertueux nous gardera en paix, quelles que soient les circonstances de notre vie, quelles que soient les menaces ou le tumulte qui nous entoure.

La lumière de Sa présence (Quand Dieu se révèle 4/4)

image_pdfimage_print

Voir la vidéo ici

D’après Exode 40.16-38

16 Moïse exécuta scrupuleusement les ordres du Seigneur : 17 le premier jour du premier mois, une année après le départ d’Égypte, on édifia la demeure. 
18 Moïse fit dresser la demeure : il mit en place les socles, les cadres et les traverses, de même que les colonnes. 19 Il déploya les toiles de tente sur la demeure, puis il plaça la couverture protectrice par-dessus, comme le Seigneur l’avait ordonné à Moïse. 
20 Moïse prit les tablettes de pierre des dix paroles et les déposa dans le coffre ; il mit en place les barres du coffre et il recouvrit celui-ci de son couvercle. 21 Il l’introduisit dans la demeure, puis il suspendit le rideau de séparation pour cacher le coffre, comme le Seigneur l’avait ordonné à Moïse.
22 Il plaça la table dans la tente, du côté nord, devant le rideau de séparation ; 23 il y arrangea les pains offerts au Seigneur, comme le Seigneur l’avait ordonné à Moïse.
24 Il plaça le porte-lampes dans la tente, du côté sud, en face de la table ; 25 il en alluma les lampes, devant le Seigneur, comme le Seigneur l’avait ordonné à Moïse.
26 Il plaça l’autel d’or dans la tente, devant le rideau de séparation ; 27 il fit brûler dessus le parfum, comme le Seigneur l’avait ordonné à Moïse.
28 Il fixa le rideau d’entrée de la demeure, 29 puis il plaça l’autel des sacrifices près de l’entrée de la demeure de la tente de la rencontre ; il y fit brûler un sacrifice complet et une offrande végétale, comme le Seigneur l’avait ordonné à Moïse.
30 Il plaça le bassin entre la tente et l’autel, et il le remplit d’eau, pour les purifications. 31 Moïse, Aaron et ses fils utilisaient cette eau pour se laver les mains et les pieds. 32 Ils se purifiaient de cette manière chaque fois qu’ils pénétraient dans la tente de la rencontre ou qu’ils s’approchaient de l’autel, comme le Seigneur l’avait ordonné à Moïse.
33 Moïse fit dresser les tentures de la cour, tout autour de la demeure et de l’autel, et il fit suspendre le rideau à l’entrée de la cour. Il mit ainsi un terme aux travaux.

34 Alors la nuée vint recouvrir la tente de la rencontre et la gloire du Seigneur remplit la demeure. 35 Moïse ne pouvait plus pénétrer dans la tente, car la nuée y demeurait et la gloire du Seigneur remplissait la demeure.
36 Pour leurs déplacements successifs, les Israélites ne se mettaient en route que si la nuée s’élevait au-dessus de la demeure. 37 Si la nuée ne bougeait pas, ils ne partaient pas ; ils attendaient le jour où elle s’élevait.38 Le Seigneur manifesta sa présence aux Israélites par la nuée qui enveloppait la demeure pendant le jour ou par le feu qui y brillait pendant la nuit, et cela tout au long de leur voyage.

Ca y est, les travaux sont presque finis ! Enfin ! C’était tellement long… plusieurs mois pour rassembler et construire tout ce qui était demandé… Dans ce contexte, en plus, c’était très compliqué de trouver les ressources nécessaires ! Il a fallu trouver les bons tissus, les bonnes pierres, les bons matériaux… et surtout, croiser les bonnes personnes ! Même en y mettant le prix, c’était compliqué ! Les chefs de projet en ont passé, des nuits sans dormir ! Mais bon, ça y est, presque 9 mois après le lancement du projet, tout est prêt pour l’assemblage final…

Ce n’est pas la première fois que Siméon & ses collègues travaillent sur un projet de bâtiment : en Egypte déjà, ils étaient dans le milieu de la construction. Mais là, le projet est vraiment à part ! Il ne faut pas se tromper, les exigences sont hautes. Vous comprenez, le bâtiment qu’ils construisent, c’est pour Dieu ! Rien que ça ! Pour Dieu !

Siméon se souvient, il y a 9 mois, quand Moïse est redescendu du Mont Sinaï avec un genre de contrat entre Dieu et le peuple d’Israël : Dieu allait guider son peuple avec fidélité, vers un pays où le peuple serait libre, en sécurité, et plongé dans l’abondance.

En retour, le peuple devait accepter que vivre avec Dieu, ce n’est pas vivre avec n’importe qui ! Pour vivre avec Dieu, le grand Dieu tout-puissant, dont la force n’a d’égale que la pureté et la sagesse, pour vivre avec ce Dieu là, on ne peut donner que le meilleur.

Pour symboliser le lien, la relation entre son peuple et lui, Dieu a aussi demandé qu’on lui construise un genre de temple mobile, un lieu qui concrétise la rencontre.

Ils ont eu du mal à trouver un nom pour ce lieu inédit : la tente de la rencontre, la demeure ? D’après ce que Siméon a compris, ils ont opté finalement pour le mot « tabernacle ».

Et donc, pendant 9 mois, tout en avançant dans le désert, ils ont rassemblé les matériaux, mis en commun leurs possessions, quand ça n’allait pas ils échangeaient avec les caravanes de commerçants qu’ils rencontraient sur la route, jusqu’à ce qu’ils aient tout le nécessaire pour bâtir ce temple mobile, ce tabernacle.

 

Ils ont patienté quelques semaines, ici, pour attendre la date anniversaire : un an, tout juste, après leur libération, un an qu’ils sont sortis d’Egypte sous la houlette de Moïse. Siméon revoit l’agitation de cette nuit-là, la course, le bras de mer qui s’ouvre pour les laisser passer, et les chants, les danses, les pleurs, même, quand ils ont compris qu’ils étaient enfin libres !

Moïse s’avance. Tôt ce matin, il a fait rassembler tout le peuple. Il a prié pour que Dieu conduise cette journée solennelle. Maintenant, il appelle son équipe, triée sur le volet pour manier les matériaux précieux avec respect et précision. Les instructions fusent, tout le monde est concentré. Moïse surtout, lui qui est responsable, on dirait qu’il n’a pas dormi de la nuit, qu’il a répété pendant des heures dans sa tête le schéma de l’assemblage de ce tabernacle, le lieu de résidence du Dieu très-haut – il ne faut pas se tromper !

Siméon est là, sur le côté, et il regarde avidement s’achever l’œuvre à laquelle il a participé.

D’abord, les ouvriers mettent en place le cœur du tabernacle, l’espace très saint : ils y mettent un coffre, avec les tablettes où sont gravés les Dix Commandements. Ils ajoutent les décorations : Siméon n’a jamais vu autant d’or – c’est une façon d’honorer le Dieu tout-puissant qui les a libérés. Ensuite, les ouvriers placent la structure tout autour, puis ils suspendent les couvertures richement brodées, et enfin les rideaux qui ferment ce lieu que Siméon ne verra plus jamais : seul le grand-prêtre pourra y entrer, une fois par an, pour la fête du Grand Pardon, qui célèbre la justice et la compassion de Dieu.

Dans le prolongement de ce lieu caché, les ouvriers construisent le lieu saint. Ils y placent la table pour les pains offerts quotidiennement à Dieu – non que Dieu en ait besoin pour manger ! c’est une façon plutôt de reconnaître chaque jour que tout vient de Dieu, que c’est lui qui prend soin de nous, et de l’en remercier. Les ouvriers placent aussi la lampe rituelle – un rappel que Dieu est lumière, et que comme la lumière, il réchauffe ceux qui s’approchent de lui, comme la lumière il les conduit, même quand la nuit se fait noire et le chemin incertain. Siméon voit aussi qu’on y met la table pour le parfum, l’encens, qui symbolise les prières qui montent vers Dieu. Là non plus, Siméon ne rentrera jamais ! Ce lieu saint est réservé aux prêtres.

Enfin, autour de ces lieux cachés, comme dans une cour, on place l’autel pour les sacrifices qu’on offrira à Dieu en signe de reconnaissance, de repentance ou d’engagement. Il y a aussi une cuve, là, pour que les prêtres se lavent avant d’entrer pour les rituels.

C’est tellement solennel ! tout ce protocole ! Tous ces espaces, toutes ces étapes, tous ces gestes, qui matérialisent la distance avec le Dieu créateur. Siméon reprend conscience de la majesté de Dieu : comment un simple mortel pourrait-il prétendre s’approcher de Dieu ?

Les ouvriers s’affairent. Les dernières tentures sont accrochées, le tabernacle est fermé. Le sentiment de satisfaction est palpable : ça y est, ils ont fini – et en même temps, comme une attente. Maintenant que le tabernacle est terminé, que va-t-il se passer ? Quelle page va s’ouvrir pour eux ?

 

C’est d’abord le bruit qui les alerte, comme un souffle de vent, ou un bourdonnement ? Puis une masse, comme un nuage, mais en plus dense, plus épais, qui leur apparaît, là, d’un coup, au-dessus du tabernacle. Elle descend et couvre entièrement l’édifice. On dirait même que cette masse s’infiltre dans le tabernacle, et qu’elle le remplit jusqu’à en déborder… Siméon voit, ou plutôt ressent, dans tout son être, la présence de ce « nuage » : il ne peut pas se tromper – ce nuage, c’est le même que celui qui est apparu, à l’époque, sur le Mont Sinaï, quand Dieu a fait alliance avec son peuple ; c’est le même nuage que celui qui les a guidés de l’Egypte jusqu’ici ; c’est le même nuage qui rencontrait Moïse dans la petite tente à l’extérieur du camp – ce nuage, c’est la façon dont Dieu montre sa présence. Mais Siméon ne l’a jamais vu si près, si dense, si large… C’est comme si Dieu s’installait dans le tabernacle, qu’il en faisait sa maison : Dieu vient habiter parmi son peuple !

Siméon se souvient de tous ces temples qu’il a vus en Egypte, ces lieux de culte avec une, deux, trois, dix statues de divinités… On les voyait, on leur adressait des prières, on leur faisait des cadeaux… Mais Dieu, Yahwé, celui qui s’est révélé à Moïse dans un buisson enflammé, qui a lutté avec le Pharaon à coups de fléaux pour le pousser à libérer le peuple juif, ce Dieu-là est trop grand, trop insaisissable, trop puissant, pour se laisser enfermer dans une statue qu’on mettrait dans une pièce. Le nuage lui va bien : on le voit, on sent son ombre, mais on ne peut pas le contenir ni le maîtriser…

Siméon est impressionné. Il se sent en présence de Dieu, presque écrasé par les vibrations de sa gloire. Reconnaissant : Dieu est tout près ! Presque effrayé : Dieu est tout près ! Autour de lui, personne ne parle, personne ne bouge, tous sont subjugués. Même Moïse, le prophète, familier de Dieu, même Moïse se tient à l’écart, au bord, les yeux écarquillés : Dieu prend toute la place.

Cela dure – combien de temps ? jusqu’à la nuit. Dès que le soleil disparaît, le nuage devient comme du feu : lumière réconfortante et majestueuse à la fois… Le feu s’estompe, et peu à peu, chacun rejoint sa tente et sa tribu pour la nuit. La journée a été longue !

 

Cette nuit-là, Siméon fait un rêve. Il est seul, sur une route, le nuage est devant lui. Il marche, il marche, il marche, et il arrive à une ville un peu en hauteur. Là, sur une esplanade, il voit un grand temple de pierre, un roi, un cortège, des prêtres et des taureaux pour les sacrifices, des chanteurs, des musiciens, des danseurs, toute une foule rassemblée et concentrée… Il entend le roi prier, remercier Dieu pour le chemin parcouru dans le désert, pour l’installation dans le pays promis, pour sa fidélité à toute épreuve. Et ce roi prie que Dieu continue de se rendre présent, malgré les failles et les limites du peuple. Alors le nuage, fumant, radieux, remplit le temple. Les chants s’élèvent, les gens se prosternent… Dieu est là !

Puis la vision disparaît, et Siméon se trouve à nouveau sur un chemin. Il marche, il marche, il marche, et il croise un homme. Le nuage quitte Siméon et tourne autour de cet homme, qui se met à briller. Sur son manteau est brodé « Yeshoua » (Dieu sauve) et sur sa manche, « Immanuel » (Dieu avec nous). Mais qui ? qui est cet homme, qui semble habité de lumière comme le tabernacle était habité de Dieu ?

Siméon voit défiler les foules autour de Yeshoua, des gens malades le touchent, des enfants jouent avec lui… Il participe à des banquets, des débats, des fêtes… Il vit avec eux, comme eux – et au milieu d’eux, il rayonne.

Une croix se dresse sur le côté – mais avant que Siméon ait pu s’approcher, tout disparaît à nouveau, et Siméon se retrouve sur le chemin. Il marche, marche, marche, avec le nuage devant lui. Il traverse une vallée, un petit bois, et voilà, un palais ! Le nuage se pose sur le palais, et les murs du palais tombent, s’évaporent, jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’un trône d’où coule une lumière aveuglante, comme un fleuve de soleil.

Siméon éprouve la même sensation que devant le tabernacle : c’est réconfortant, et impressionnant en même temps. Au milieu de cette lumière, Siméon reconnaît l’homme de tout à l’heure. Yeshoua lui sourit.

La lumière se répand, touche chaque arbre, chaque oiseau, chaque rivière. Des foules arrivent des quatre coins de l’horizon, en courant, en dansant, en riant, pour se plonger dans cette lumière. L’air vibre à nouveau –

Et Siméon se réveille. Il se redresse sur sa paillasse, chamboulé par ce qu’il vient de vivre. C’était un rêve, oui, mais bien plus… presque une promesse. La promesse que Dieu allait habiter parmi les hommes, les abreuver de sa bonté, les rassasier de sa justice. Siméon comprend que Dieu n’a pas seulement en vue un peuple, un pays, mais le monde entier, en totale harmonie. Immanuel : Dieu, avec nous.

« Siméon ! » Son frère l’appelle : il est temps de se mettre en route, le nuage s’est levé, prêt à conduire le peuple sur le chemin de Dieu.

————–

“Yeshoua”, Jésus, a incarné Dieu parmi les hommes. Bien plus, il a accompli tout le protocole nécessaire pour que nous puissions approcher Dieu : dans sa mort sur la croix, il a assumé nos fautes et nos limites, nos failles et nos défaillances, comme l’ultime sacrifice. Il a donné sa vie, pour que nous puissions, par la foi, recevoir la vie et la présence de Dieu. Avant d’être arrêté et condamné à mort, Jésus annonce à ses disciples lors d’un repas que sa vie, son corps, son sang, va sceller le contrat, l’alliance entre Dieu et nous : en Jésus, Dieu garantit son amour et son pardon.

Jésus, dans ce dernier repas, invitait ses disciples à manger le pain en souvenir de son corps meurtri, à boire le vin en souvenir de son sang versé. Comme une invitation à nous laisser remplir – en effet, par la foi en Christ, nous recevons un avant-goût de la présence glorieuse de Dieu, en nous, par son Esprit qui vient demeurer en nous et qui nous accompagne sur notre chemin, comme des petits temples mobiles d’où Dieu fait briller sa lumière.

Je vous donne ma paix

image_pdfimage_print

 Regarder la vidéo

Je ne sais pas ce qu’il en est pour vous mais moi je suis fatigué… Fatigué de la cacophonie ambiante, des discours excessifs et irrationnels des uns, du ton de donneur de leçons des autres. Fatigué des disputes, des revendications et contestations de tout poil, de l’agressivité globale. Fatigué des dialogues de sourds où l’écoute et la bienveillance n’ont plus leur place.

J’ai besoin de paix et d’apaisement. Et je me suis dit que je ne suis sans doute pas le seul à en avoir besoin. C’est pourquoi je vous propose, pour ce mois d’août, une mini-série de quatre prédications que j’espère apaisante… autour de quatre textes bibliques qui parlent de paix, et d’abord de la paix que Dieu nous donne.

Je propose de commencer avec une parole de Jésus lui-même, qu’il a adressée à ses disciples peu de temps avant d’être arrêté et condamné pour être crucifié.

Jean 14.26-29
26 Celui qui doit vous venir en aide, l’Esprit saint que le Père enverra en mon nom, vous enseignera toutes choses et vous rappellera tout ce que je vous ai dit.
27 C’est la paix que je vous laisse, c’est ma paix que je vous donne. Je ne vous la donne pas à la manière du monde. Ne soyez pas troublés, ne soyez pas effrayés. 28 Vous m’avez entendu dire : “Je m’en vais, mais je reviendrai auprès de vous.” Si vous m’aimiez, vous vous réjouiriez de savoir que je vais auprès du Père, parce que le Père est plus grand que moi. 29 Je vous l’ai annoncé maintenant, avant que ces choses arrivent, afin que lorsqu’elles arriveront vous croyiez.

C’est en particulier le verset 27 sur lequel j’aimerais m’arrêter ce matin : “C’est la paix que je vous laisse, c’est ma paix que je vous donne. Je ne vous la donne pas à la manière du monde. Ne soyez pas troublés, ne soyez pas effrayés.”

 

N’ayez pas peur

On l’a dit, ces paroles de Jésus font partie des dernières qu’il a dites à ses disciples, avant son arrestation. Il sait que sa fin est proche. On se rend compte aussi que ses disciples perçoivent bien que c’est un moment spécial. On les sent inquiets, préoccupés. Ils sentent que quelque chose va se passer, et Jésus veut les rassurer : ”Ne soyez pas troublés, ne soyez pas effrayés.”

Ce n’est pas la première fois que Jésus dit à ses disciples : n’ayez pas peur. Il l’a dit lors de la Transfiguration, ou lorsqu’il a marché sur l’eau par exemple… Ce n’est pas non plus la dernière fois. Il le redira lorsqu’il leur apparaîtra après sa résurrection par exemple. Plus largement, dans la Bible, c’est une phrase, au singulier ou au pluriel, qui est très courante. Certains en ont même dénombré 365 occurrences. Une pour chaque jour !

C’est bien que nous avons besoin de l’entendre et de le réentendre. N’ayez pas peur ! Ces paroles nous font du bien aussi aujourd’hui. Peut-être même particulièrement aujourd’hui, alors que tant de discours maniant la peur résonnent partout autour de nous. Que ce soit la peur de la mort avec les chiffres quotidiens du Covid qui tournent en boucle depuis 18 mois, la peur d’une pandémie dont on ne se sortirait jamais, ou la peur du complot ou de la dictature qu’on brandit comme des épouvantails.

La peur et la paix ne peuvent pas coexister… Alors Jésus nous dit : N’ayez pas peur !

 

La manière du monde

Ce que Jésus veut laisser à ses disciples, c’est sa paix. Il leur donne sa paix… et il précise qu’il ne la donne pas “à la manière du monde”. Que veut-il dire par là ?

Chez Jean, le monde peut avoir plusieurs sens. Ca peut-être l’humanité dans sa globalité, celle que Dieu a tant aimé qu’il a envoyé son Fils pour la sauver. Mais le mot peut avoir un sens plus péjoratif, et c’est le cas ici. C’est ce monde dont il parle quelques versets plus haut, incapable de voir et de connaître Dieu parce qu’il ne le reçoit pas. C’est ce monde dont Jésus parlera un peu plus tard à ses disciples disant qu’il les détestera comme il l’a détesté, lui.

Ce monde n’a pas vraiment changé… C’est aujourd’hui un monde impitoyable et froid, un monde où le pouvoir, les jeux d’influence, l’argent écrasent l’humain. Un monde dans lequel on ne donne pas… où ce qui est gratuit cache toujours une contrepartie plus ou moins cachée. Un monde dans lequel la grâce n’existe pas. La paix que peut “donner” ce monde-là se paie et se monnaie. Et ce n’est pas de cette manière que Jésus donne sa paix…

Il faut ici préciser que ce monde-là, n’est pas forcément extérieur aux chrétiens. Il n’y a pas d’un côté les croyants qui sont toujours proches de Dieu et dont le comportement est irréprochable, et de l’autre le monde, dont il faut se méfier, et même se couper, parce qu’il nous éloignerait de Dieu. Les frontières sont poreuses. Le monde dont parle Jésus ici, on le trouve aussi dans l’Eglise, malheureusement, où les relations ne sont pas toujours animées par la grâce…

Mais Jésus, lui, n’est pas de ce monde. Il ne donne comme le monde donne. Sa paix, il nous l’offre. Il donne ce qu’il promet. Sans contrepartie cachée. Sa paix, elle découle de la grâce.

 

La paix que Jésus donne

“C’est la paix que je vous laisse, c’est ma paix que je vous donne.”

Quelle est donc cette paix que Jésus donne ? Et comment la donne-t-il ?

La paix dont Jésus parle ici, c’est sans doute d’abord celle qui découle de sa présence. Jésus est bel et bien en train de dire à ses disciples : oui, je m’en vais… mais je serai toujours là, avec vous. Je m’en vais en chair et en os, mais je serai avec vous, par mon Esprit, cet autre Consolateur que le Père enverra. Il le dit explicitement au verset 18 : “Je ne vous laisserai pas seuls comme des orphelins ; je viendrai auprès de vous.”

La paix que Jésus donne, c’est celle de sa présence auprès de nous, en toutes circonstances. “N’ayez pas peur : je suis avec vous, je vous offre ma présence, sans contrepartie cachée.”

C’est une paix dans l’épreuve et face à l’adversité, que l’on n’affronte jamais seul. C’est une paix devant l’inconnu et face à l’incertitude, car celui qui est auprès de nous connaît toutes choses, rien ne lui échappe. C’est une paix face à la mort. Parce que le Christ vivant est ressuscité, il a vaincu la mort.

Voilà la paix que le Christ donne. C’est une paix que nul autre ne peut donner.

 

Conclusion

Face à la cacophonie ambiante, face aux messages de peur et aux attitudes agressives qui nous atteignent, d’une manière ou d’une autre, devant l’incertitude du moment, entendons la promesse du Christ : “je vous donne ma paix.”

Quand il dit cela à ses disciples, c’est pour leur promettre qu’il ne les abandonnera jamais. S’il s’en va, c’est pour mieux être présent auprès d’eux, par son Esprit. Du coup, la promesse demeure pour nous !

Cette présence du Christ à nos côtés, en toutes circonstances, c’est la garantie de sa paix. Une paix que le monde ne peut pas donner. Une paix que nul autre ne peut donner. Une paix qui se reçoit par la foi, qui s’affermit dans la confiance. Une paix que nous pouvons vivre, dans une relation avec le Christ vivant, quel que soit le tumulte du monde qui nous entoure.

“C’est la paix que je vous laisse, c’est ma paix que je vous donne. Je ne vous la donne pas à la manière du monde. Ne soyez pas troublés, ne soyez pas effrayés.”

Dieu nous invite à œuvrer avec lui (Quand Dieu se révèle 3/4)

image_pdfimage_print

Regarder ici

Je poursuis ma série sur la façon dont Dieu se révèle à nous… avec des épisodes tirés de la Genèse. Aujourd’hui, j’aimerais m’attarder sur un passage de la vie de Joseph, l’un des fils de Jacob, arrière-petit-fils d’Abraham.

Joseph est aimé de Dieu, et Dieu lui prévoit une place particulière dans l’Histoire : il sera le bras droit du pharaon, gestionnaire avisé lors d’une crise économique qui aurait pu dévaster l’Egypte. Sa grande compétence, ce sera la sagesse que Dieu lui donne pour analyser les situations. Dieu annonce ce destin prestigieux à Joseph dès sa jeunesse, par des rêves prémonitoires, mais cela suscite la jalousie des frères de Joseph, qui complotent contre lui. Ca commence mal ! Alors Joseph se retrouve en Egypte, vendu comme esclave à un certain Potiphar. Dieu est avec lui, et Potiphar remarque la sagesse de Joseph, au point de lui donner certaines responsabilités. Or la femme de Potiphar, elle aussi, remarque Joseph, et elle cherche à le séduire. Joseph refuse de trahir son maître – furieuse, la femme de Potiphar accuse Joseph de la harceler. Joseph se retrouve à nouveau emprisonné, pour un crime qu’il n’a pas commis – nouvelle déception !

Lecture biblique : Genèse 39.21-40.23

Joseph se retrouva donc en prison. 

21 Pourtant, là aussi, le Seigneur fut avec lui et lui montra sa bienveillance en lui obtenant la faveur du commandant de la prison. 22 Celui-ci confia à Joseph tous les autres prisonniers qui étaient là. C’était lui qui devait diriger tous les travaux effectués par les détenus. 23 Le commandant de la prison ne s’occupait plus de rien, parce que le Seigneur était avec Joseph et faisait réussir tout ce qu’il entreprenait.

1-2 Après quelque temps, deux hauts fonctionnaires du roi d’Égypte commirent une faute contre lui. C’étaient le responsable des boissons du roi et le chef des boulangers [deux fonctionnaires importants car responsables de la nourriture – lieu sensible car empoisonnements fréquents] Le pharaon se mit en colère 3 et les fit enfermer dans la prison du chef de la garde royale, là même où Joseph était détenu. 4 Le chef de la garde les confia aux soins de Joseph, et ils furent maintenus quelque temps en prison.    

5 Une nuit, le responsable des boissons et le chef des boulangers du roi d’Égypte firent tous deux un rêve dans leur prison. Chacun de ces rêves avait sa propre interprétation [càd qu’ils ont un sens différent]

6 Le matin, quand Joseph vint les voir, ils étaient troublés. 7 Il leur demanda : « Pourquoi avez-vous l’air si triste aujourd’hui ? » – 8 « Chacun de nous a fait un rêve, répondirent-ils, et il n’y a personne ici pour l’interpréter. » Joseph leur dit : « Les interprétations n’appartiennent-elles pas à Dieu ? Racontez-moi donc ce que vous avez rêvé. »    

9 Le responsable des boissons du roi raconta son rêve : « Dans mon rêve, dit-il, il y avait un plant de vigne devant moi. 10 Ce plant portait trois rameaux. Dès qu’il eut bourgeonné, il se couvrit de fleurs, puis de grappes mûres. 11 J’avais en main la coupe du pharaon. Je cueillis alors des grappes, j’en pressai le jus dans la coupe et je la lui tendis. » 12 Joseph lui dit : «Voici ce que signifie ton rêve : les trois rameaux représentent trois jours. 13 Dans trois jours, le pharaon t’offrira une haute situation : il te rétablira dans tes fonctions. Tu lui tendras de nouveau la coupe, comme tu le faisais précédemment. 14 Essaie de ne pas m’oublier, quand tout ira bien pour toi ; sois assez bon pour parler de moi auprès du pharaon et me faire sortir de cette prison. 15 J’ai été amené de force du pays des Hébreux, et ici je n’ai rien fait qui mérite la prison. »        

16 Lorsque le chef des boulangers vit que Joseph avait donné une interprétation favorable du rêve, il lui dit : « Moi aussi j’ai fait un rêve. Dans ce rêve, je portais sur la tête trois corbeilles de gâteaux. 17 La corbeille supérieure était pleine des pâtisseries préférées du pharaon, mais des oiseaux venaient les picorer dans la corbeille, sur ma tête. » 18 Joseph lui dit : « Voici ce que signifie ton rêve : les trois corbeilles représentent trois jours. 19 Dans trois jours le pharaon t’offrira une haute situation, plus haute que tu ne voudrais : on te pendra à un arbre, et les oiseaux viendront picorer ta chair. »           

20 Trois jours après, le pharaon fêtait son anniversaire [sûrement l’anniversaire de son arrivée au pouvoir, un moment où le pharaon pouvait faire grâce à certains prisonniers] ; il offrit un banquet à toutes les personnes de son entourage. En leur présence, il offrit une haute situation au responsable des boissons et au chef des boulangers : 21 il rétablit le premier dans ses fonctions, pour qu’il lui tende de nouveau la coupe, 22 mais il fit pendre le second, selon l’interprétation que Joseph leur avait donnée. 23 Pourtant le responsable des boissons ne se souvint plus de Joseph et l’oublia.

Dieu présent avec Joseph, même en prison

Dieu est avec Joseph, même en prison. Il nous est dit que Joseph, en tout, passe 13 ans en esclavage et en prison. Après notre histoire, il faudra encore 2 ans avant que Joseph puisse sortir de prison. C’est long ! Pourtant Dieu est avec lui.

Dans les situations difficiles de notre vie, lorsque rien ne change, on peut être tenté de croire que Dieu nous a abandonnés… Joseph aurait pu avoir cette impression, lui qui espérait tant être libéré, comme il l’exprime au chef des boissons, qui le décevra en l’oubliant. Mais même si Dieu ne le libère pas encore de prison, il agit en sa faveur : Dieu ouvre des opportunités pour que Joseph puisse avoir certaines responsabilités même en prison. Il l’équipe, et le forme à la sagesse – notamment dans l’interprétation des rêves, puisque c’est par ce biais-là que Joseph pourra quitter la prison, en interprétant les rêves du Pharaon. C’est une période d’épreuve pour Joseph, mais aussi une période de formation : il apprend la gestion des personnes, il développe ses dons de discernement et de sagesse – tout cela avec l’aide de Dieu. Il apprend aussi à reconnaître que ses compétences lui viennent de Dieu. Tout cela lui sera infiniment précieux lorsqu’il sera à son tour haut fonctionnaire !

De la même façon, pour nous, dans les situations pesantes, Dieu ne révèle pas toujours sa présence en annulant le problème immédiatement. Parfois, Dieu choisit plutôt de nous former, en caractère et en dons, même si ça nous est douloureux ou frustrant. Lui seul connaît son objectif, et il a en tête de plus grands projets, que nous ne pouvons imaginer…

Une bénédiction pour les nations

Dieu équipe Joseph et il l’appelle, déjà, à être une bénédiction, dès maintenant, dans ce contexte peu favorable. Bénir les autres, bénir les nations, c’était dans la promesse de Dieu à Abraham : « À travers toi, toutes les familles de la terre seront bénies. » (Genèse 12.3) Joseph sera l’exemple modèle de cette bénédiction : grâce à ses conseils et à sa gestion, toute l’Egypte (et les immigrés qui fuiront la famine dans les pays alentour) pourra subvenir à ses besoins. Et Jésus, lui, incarnera ce désir divin de bénir le monde entier en offrant un salut large à tous ceux qui viennent à lui.

Mais revenons à Joseph : déjà en prison, il apprend à être bénédiction pour ceux qui l’entourent. Lorsqu’il interprète ces rêves, Joseph est dans une posture de service, d’aide, et aussi de témoin : il parle de la part de Dieu, pour décrypter ce que ces prisonniers ont expérimenté. C’est pour cela qu’il donne des interprétations au plus juste, même si c’est dur à entendre pour le chef des boulangers… Même en prison, il apprend à aimer Dieu et les autres !

Vu que ses interprétations sont justes, les rêves adressés aux fonctionnaires devaient bien venir de Dieu… C’est intéressant de voir qu’ici, Dieu ne parle pas seulement à ceux qui croient en lui, mais qu’il s’adresse, d’une manière ou d’une autre, à chacun. Ce n’est pas toujours par des rêves ! Mais peut-être par des prises de conscience, une expérience un peu mystique, une opportunité qui s’ouvre, un événement bousculant… Dieu s’adresse à ceux qui sont autour de nous, même si ceux-ci ne discernent pas toujours d’où vient ce qu’ils vivent ni pourquoi. Et ici, les fonctionnaires ont besoin de l’aide de Joseph pour décrypter ce qu’ils ont rêvé.

C’est aussi une façon de témoigner, lorsque nous sommes porte-parole de Dieu pour l’autre. Lorsque nous voyons Dieu à l’œuvre dans la vie de l’autre, et que simplement nous le nommons. Une jeune femme p. ex. me parlait d’un moment où elle avait touché le fond dans sa dépression, envisageant la mort, quand elle a senti une force la tirer, intérieurement, vers la vie. C’est lorsqu’elle a parlé avec un chrétien qu’elle a compris que c’était Dieu…

Bien sûr, il nous faut de la prudence ! On tombe vite dans des interprétations farfelues, plus ou moins nocives, faites au nom de Dieu. Il ne s’agit pas de dire n’importe quoi !! Pourtant, malgré tous les excès qui existent et leur danger réel, nous pouvons avoir une part dans notre entourage pour décrypter ce que Dieu est peut-être en train de faire… en toute humilité, bien sûr.

          Un peu de curiosité

Ce qui m’interpelle surtout dans l’attitude de Joseph, c’est qu’il ne commence pas par interpréter. Son premier mouvement, ce qui va déclencher tout le reste, c’est qu’il porte attention à ces prisonniers : il les remarque, il voit leur visage abattu, il s’intéresse à eux, et il leur pose cette question « Pourquoi avez-vous l’air si triste ? ». Joseph est plein d’attention, de compassion, de sollicitude. Et il continue : « racontez-moi vos rêves ». Il est curieux ! Mais une curiosité dans le bon sens du terme ! pas pour des ragots… mais dans l’attention à l’autre, un esprit de découverte et d’écoute. J’étais surprise cette année de lire que la curiosité fait partie d’une personnalité saine, ouverte sur le monde, ouverte sur l’autre. L’un des symptômes de certaines personnalités dysfonctionnelles, par exemple, c’est justement le manque de curiosité !

Cette curiosité bien comprise, c’est le premier pas pour être une bénédiction pour les autres. C’est une façon de donner une vraie place à l’autre, de ne pas anticiper les solutions avant de connaître les problèmes, de ne pas réduire l’autre à un cas, mais de le laisser déployer son expérience.

Dieu le fait avec nous ! Souvent, il commence par une question : d’où viens-tu ? Pareil, Jésus préfère les questions lorsqu’il rencontre quelqu’un, même si le problème paraît évident. Cette curiosité divine, c’est une qualité que nous pouvons développer avec ceux qui nous entourent. Lorsque nous sommes attentifs à l’autre, nous sommes déjà témoins de l’attention que Dieu lui porte. Et ça, on en est tous capables !! En plus, c’est sans risque !

Notre contribution sera peut-être moins technique ou spectaculaire que celle de Joseph. Ce sera parfois un conseil, un coup de main, un passage de relais, une présence, un soutien, tout simplement la prière… Même si c’est juste un maillon dans une chaîne, nous pouvons être ici, maintenant, dans le contexte qui est le nôtre, qu’on l’ait choisi ou pas, nous pouvons être celui ou celle par Dieu va rejoindre l’autre, à l’instant T. Tout commence par cette simple curiosité, comme une porte qui s’ouvre.

Conclusion

Dieu se révèle à nous par bien des moyens – par les circonstances, par des coïncidences, par des pensées ou même des rêves/ des visions/ des images, par la Parole, par l’autre… La curiosité de Joseph est un chemin intéressant pour découvrir Dieu et ce qu’il veut nous transmettre, une curiosité saine qui s’intéresse à l’autre, une curiosité qui s’applique aussi à notre vie, en posant très largement la question : « qu’est-ce que Dieu est en train de faire ici ? » C’est la première étape par laquelle Dieu agit !

Dieu nous transforme pour nous faire avancer (Quand Dieu se révèle 2/4)

image_pdfimage_print

Regarder ici

Dieu se révèle dans le monde qu’il a créé, par la Bible qui le décrit, par des messages personnels, par le Christ… et dans des moments-clefs. Je vous invite à une incursion dans la saga de Jacob, dans le livre de Genèse. Jacob est le petit-fils d’Abraham, le patriarche fondateur du peuple d’Israël, et nous sommes aux alentours de 1900-1800 avant JC. Jacob a un frère jumeau, de quelques minutes son aîné, Esaü. Et Jacob, depuis sa jeunesse, est un opportuniste, voire un filou. Une fois, Esaü avait faim, et Jacob lui a « vendu » à manger contre son héritage. Plus tard, à l’initiative de sa mère, il s’est déguisé en Esaü pour rafler la bénédiction de leur père Isaac. Cette bénédiction qui donne la première place à l’un des frères et qui en fait l’héritier de la promesse, voilà l’héritage pour lequel Jacob a manigancé. Evidemment, Esaü se met en colère, et Jacob doit fuir – il traverse le désert pour aller vivre chez son oncle. En chemin, il reçoit la promesse que Dieu est avec lui, malgré tout. Chez son oncle, il tombe sur un homme encore plus retors que lui, et après bien des péripéties, il décide de revenir chez lui, donc sur les terres qu’habite son frère. Des années et des années se sont passées, mais Jacob ne sait pas à quoi s’attendre de la part d’Esaü. Dans une prière, Jacob exprime à Dieu ses inquiétudes, et puis, il élabore toute une stratégie pour amadouer son frère, avec des cadeaux, des messagers etc. tout un cortège qui permet de tester le terrain et surtout de le préparer. La dernière nuit avant de rencontrer Esaü, Dieu se révèle à Jacob.

Genèse 32.23-33

23-24 Au cours de la nuit, Jacob se leva, prit ses deux femmes, ses deux servantes et ses onze enfants. Il leur fit traverser le torrent du Yabboq avec tout ce qu’il possédait. 

25 Il resta seul, et quelqu’un lutta avec lui jusqu’à l’aurore. 26 Quand ce dernier vit qu’il ne pouvait pas avoir l’avantage sur Jacob dans cette lutte, il le frappa à l’articulation de la hanche, et celle-ci se déboîta.                       

27 Il dit alors : « Laisse-moi partir, car voici l’aurore. » – « Je ne te laisserai pas partir si tu ne me bénis pas », répliqua Jacob. 

28 L’autre demanda : « Comment t’appelles-tu ? » – « Jacob », répondit-il. 

29 L’autre reprit : « On ne t’appellera plus Jacob mais Israël, car tu as lutté avec Dieu et avec des hommes, et tu as eu l’avantage. »

30 Jacob demanda : « Dis-moi donc quel est ton nom. » – « Pourquoi me demandes-tu mon nom ?» répondit-il. Là même, il bénit Jacob.                          

31 Celui-ci déclara : « J’ai vu Dieu face à face et j’ai eu la vie sauve. » C’est pourquoi il nomma cet endroit Penouel – ce qui veut dire “face de Dieu”. 

32 Le soleil se levait quand Jacob traversa le torrent de Penouel. Il boitait à cause de sa hanche. 

33 Aujourd’hui encore les Israélites ne mangent pas le muscle de la cuisse qui est à l’articulation de la hanche, parce que Jacob a été blessé à ce muscle.

Quelle scène étrange !  De nuit, Jacob, peut-être agité à l’idée de revoir son frère, entreprend de faire traverser à ses plus proches le gué d’un torrent – sans lumière ! – et alors qu’il revient, peut-être pour récupérer ses dernières affaires, un homme sorti d’on ne sait où l’attaque, là, dans l’obscurité, dans le silence. Ca ressemble presque à un cauchemar ! Comme si les craintes de Jacob prenaient forme humaine : lui qui a si peur de la haine de son frère, le voilà en train de lutter. De lutter plusieurs heures, jusqu’à l’aube ! Et quand l’aube arrive, l’homme met fin au combat en donnant un coup final à Jacob alors que jusqu’ici, ils étaient à égalité. Cette scène pose beaucoup de questions, mais nous n’avons pas d’autre clef de lecture que les maigres informations que Jacob réussit à soutirer.

L’homme veut partir, pour préserver le mystère de son identité ? Mais Jacob réclame sa bénédiction – comme dans sa jeunesse, il est prêt à tout, il s’accroche, pour recevoir la bénédiction, l’approbation de l’autre.

L’autre, cependant, le force à se regarder en face : quel est ton nom ? Jacob, ça veut dire « il talonne » en référence au fait qu’il est le 2e jumeau, né sur les talons de son frère. Mais Esaü avait vu autre chose dans son nom : celui qui usurpe, celui qui trompe, celui qui talonne au point de rafler ce qui ne lui appartient pas (Gn 27.36).

Et avant de bénir Jacob, il va le renommer : Israël, littéralement « Dieu lutte ». Mais il rattache ce nom à Jacob en soulignant sa force : « tu as lutté avec Dieu & avec les hommes et tu l’as emporté. »

Deux choses : l’homme révèle un peu de son identité – c’est un homme, mais il représente Dieu… Le prophète Osée dira que Jacob a lutté avec un ange (Osée 12.4), en tout cas quelqu’un qui représente Dieu.

Et puis, Jacob l’a emporté, vraiment ? Le coup final a été porté par l’autre ! Oui, mais Jacob a tenu bon, tout le combat, jusqu’à la fin, où il réclame la bénédiction de l’autre qui essaie de lui échapper. Il ne lâche rien, j’imagine qu’il s’agrippe à son adversaire, et l’autre finit par céder pour pouvoir partir. Sa victoire, c’est de sortir de ce combat, vivant, béni.

Lorsque l’homme disparaît, peut-être instantanément, Jacob prend conscience de ce qui vient de se passer : « j’ai vu Dieu en face ! ». Oui, c’était vraiment un face-à-face ! Jacob s’en souviendra, et toute sa descendance : le peuple issu de lui prend ce nom « Israël », et le texte mentionne une pratique juive de l’époque qui rappelle la blessure infligée à Jacob.

          Dieu nous transforme pour nous permettre d’avancer

Dans l’histoire de Jacob, c’est un moment pivot. Il a pris la décision de rentrer, mais tout dépend de l’attitude d’Esaü ! La bénédiction de Dieu est une promesse : puisque Jacob a pu tenir bon face à un représentant de Dieu, il n’a rien à craindre de son frère. Il peut y aller !

Mais au-delà de la promesse rassurante, que Dieu aurait pu communiquer de façon plus calme ( !), le texte insiste sur le changement de nom – élément crucial, puisque cela devient le nom du peuple de Dieu par la suite, Israël. Ce changement de nom symbolise un changement d’identité. Jacob n’est plus l’usurpateur, mais le persévérant, le vainqueur, le vivant. Alors que Jacob revient vers son frère, plein de bons sentiments, demandeur de réconciliation et de nouveau départ, il est nécessaire que quelque chose change. Les bons sentiments ne suffisent pas : si rien ne change, rien ne change ! Jacob, s’il veut avoir une chance de vivre autrement, de vivre chez lui dans la bénédiction de Dieu, Jacob doit changer.

C’est vrai pour nous aussi ! nous pouvons espérer tous les nouveaux départs, tous les nouveaux horizons, si rien ne change en nous, rien ne changera autour de nous. Pour nous permettre de vivre autrement, Dieu nous invite à changer, il vient nous transformer.

Dieu nous offre le salut en Christ, qui que nous soyons, où que nous soyons – mais une fois que nous avons reçu par la foi ce salut, pour commencer à le vivre concrètement, pour vivre la paix, le pardon, l’amour, la justice, la vérité… il faut changer ! La transformation est un passage, ou plutôt un processus, obligé ! Sinon, nous retombons toujours dans nos travers, dans nos cercles vicieux, dans nos vieilles habitudes.

Et cette transformation en profondeur ne vient pas de nous : nous devons l’accepter, la vouloir même, mais seul Dieu peut tout changer, peut nous changer. Seul le créateur peut recréer en nous un cœur, un état d’esprit, juste et bon. Dans le texte, c’est lui qui change le nom… Lorsque nous croyons en Jésus, Dieu nous donne un nom nouveau « ma fille, mon fils » et il nous transforme pour que ses gènes deviennent de plus en plus visibles en nous. C’est lui qui le fait… Nous le désirons, mais c’est lui qui le fait, par son Esprit. Notre part, c’est de l’accepter.

Or justement cette transformation, ou ces transformations, ne sont pas toujours faciles à accepter. Jacob repart en boitant, blessé par son combat : il y a des séquelles, peut-être pas jusqu’à sa mort, mais pour le moment il boite. De même, nos transformations, quand elles sont profondes, sont souvent coûteuses et douloureuses. Sinon, il n’y aurait aucun problème à les accepter ! Mais elles sont douloureuses parce qu’elles viennent souvent dans des crises, et puis elles nous confrontent à nous-mêmes, et ça, ça fait mal ! Nous confronter à la réalité de notre cœur, de notre orgueil, de notre manque de foi, de nos peurs, de nos blessures, de notre culpabilité ou de nos ambivalences…

Lorsque nous nous tournons vers le Christ dans la foi, la confiance s’accompagne de repentance : nous abandonnons notre vie sans Dieu, ou ce qui n’est compatible avec Dieu dans notre vie. Mais ce mouvement d’abandon, il revient dans toute notre vie de foi ! Et de manière plus intense lorsque nous traversons des crises.

Nos luttes comme des lieux de transformation

Ce qui frappe, dans ce récit, c’est que Dieu a lutté avec Jacob. A quoi joue Dieu ici ? A quoi joue Dieu dans les crises que nous traversons ? Cette rencontre entre Dieu et Jacob nous renvoie à toutes ces fois où on a l’impression de se battre avec Dieu, non ? je ne crois pas que ce soit des événements particuliers, tout le monde vit des joies et des malheurs, mais la crise c’est ce que chacun, de façon unique, va vivre suite à tel ou tel événement : la façon dont une naissance remet en question nos priorités, ou une maladie, une difficulté dans les relations, une pression difficile à gérer, une perte qui nous fait chavirer, un déménagement… Peu importe la cause !

Or cette rencontre nous montre que Dieu ne lutte pas avec nous pour nous briser, pour nous rejeter, pour nous casser, mais pour nous transformer et nous permettre d’aller plus loin, avec sa bénédiction. Dieu nous transforme pour que nous puissions avancer. Et parfois, dans ces transformations, ces crises, Dieu nous résiste. Attention, ce texte n’est le seul modèle de la façon dont Dieu nous transforme ! Mais c’est un exemple : parfois, pour nous changer, Dieu lutte avec nous. Le mot utilisé pour désigner la combat entre Jacob et l’inconnu dérive du verbe « prendre dans ses bras », comme un combat rapproché, où les adversaires se tiennent. Comme un maître en arts mariaux, en judo par exemple, qui nous pousse dans nos derniers retranchements pour que nous puissions nous dépasser. Ou un maître d’échecs, qui déjoue tous nos coups, pour nous obliger à progresser.

Quand nous avons l’impression de lutter avec Dieu, nous imaginons que Dieu est notre ennemi, ou qu’il nous rejette, ou qu’il nous punit. Mais cette rencontre jette une autre lumière sur ces luttes : Dieu nous prend à bras-le-corps pour nous transformer et nous bénir. Quand Dieu résiste, c’est pour nous pousser dans nos retranchements, dans ces lieux de vérité où il agit en profondeur. N’ayons pas peur de ces luttes, n’ayons pas honte de nos questionnements, de nos doutes, de nos réclamations… n’ayons pas peur quand ça prend du temps (Jacob a lutté toute la nuit). N’ayons pas peur de lutter, même si c’est chaotique et que ça fait un peu mal : Dieu est en train de nous transformer.

 

Quand Dieu se révèle, ce n’est pas toujours très clair, paisible ou agréable. Parfois il nous faut du temps pour comprendre qu’il est à l’œuvre, pour comprendre à quoi il veut en venir… Mais Dieu a toujours en vue de nous faire expérimenter son salut, sa bénédiction, sa paix… de nous transformer pour que nous avancions avec plus de foi et de détermination, plus de justice et d’amour – nos progrès lui font honneur, et nous en ressortons bénis, changés, plus forts avec lui.