Dieu nous transforme pour nous faire avancer (Quand Dieu se révèle 2/4)

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Dieu se révèle dans le monde qu’il a créé, par la Bible qui le décrit, par des messages personnels, par le Christ… et dans des moments-clefs. Je vous invite à une incursion dans la saga de Jacob, dans le livre de Genèse. Jacob est le petit-fils d’Abraham, le patriarche fondateur du peuple d’Israël, et nous sommes aux alentours de 1900-1800 avant JC. Jacob a un frère jumeau, de quelques minutes son aîné, Esaü. Et Jacob, depuis sa jeunesse, est un opportuniste, voire un filou. Une fois, Esaü avait faim, et Jacob lui a « vendu » à manger contre son héritage. Plus tard, à l’initiative de sa mère, il s’est déguisé en Esaü pour rafler la bénédiction de leur père Isaac. Cette bénédiction qui donne la première place à l’un des frères et qui en fait l’héritier de la promesse, voilà l’héritage pour lequel Jacob a manigancé. Evidemment, Esaü se met en colère, et Jacob doit fuir – il traverse le désert pour aller vivre chez son oncle. En chemin, il reçoit la promesse que Dieu est avec lui, malgré tout. Chez son oncle, il tombe sur un homme encore plus retors que lui, et après bien des péripéties, il décide de revenir chez lui, donc sur les terres qu’habite son frère. Des années et des années se sont passées, mais Jacob ne sait pas à quoi s’attendre de la part d’Esaü. Dans une prière, Jacob exprime à Dieu ses inquiétudes, et puis, il élabore toute une stratégie pour amadouer son frère, avec des cadeaux, des messagers etc. tout un cortège qui permet de tester le terrain et surtout de le préparer. La dernière nuit avant de rencontrer Esaü, Dieu se révèle à Jacob.

Genèse 32.23-33

23-24 Au cours de la nuit, Jacob se leva, prit ses deux femmes, ses deux servantes et ses onze enfants. Il leur fit traverser le torrent du Yabboq avec tout ce qu’il possédait. 

25 Il resta seul, et quelqu’un lutta avec lui jusqu’à l’aurore. 26 Quand ce dernier vit qu’il ne pouvait pas avoir l’avantage sur Jacob dans cette lutte, il le frappa à l’articulation de la hanche, et celle-ci se déboîta.                       

27 Il dit alors : « Laisse-moi partir, car voici l’aurore. » – « Je ne te laisserai pas partir si tu ne me bénis pas », répliqua Jacob. 

28 L’autre demanda : « Comment t’appelles-tu ? » – « Jacob », répondit-il. 

29 L’autre reprit : « On ne t’appellera plus Jacob mais Israël, car tu as lutté avec Dieu et avec des hommes, et tu as eu l’avantage. »

30 Jacob demanda : « Dis-moi donc quel est ton nom. » – « Pourquoi me demandes-tu mon nom ?» répondit-il. Là même, il bénit Jacob.                          

31 Celui-ci déclara : « J’ai vu Dieu face à face et j’ai eu la vie sauve. » C’est pourquoi il nomma cet endroit Penouel – ce qui veut dire “face de Dieu”. 

32 Le soleil se levait quand Jacob traversa le torrent de Penouel. Il boitait à cause de sa hanche. 

33 Aujourd’hui encore les Israélites ne mangent pas le muscle de la cuisse qui est à l’articulation de la hanche, parce que Jacob a été blessé à ce muscle.

Quelle scène étrange !  De nuit, Jacob, peut-être agité à l’idée de revoir son frère, entreprend de faire traverser à ses plus proches le gué d’un torrent – sans lumière ! – et alors qu’il revient, peut-être pour récupérer ses dernières affaires, un homme sorti d’on ne sait où l’attaque, là, dans l’obscurité, dans le silence. Ca ressemble presque à un cauchemar ! Comme si les craintes de Jacob prenaient forme humaine : lui qui a si peur de la haine de son frère, le voilà en train de lutter. De lutter plusieurs heures, jusqu’à l’aube ! Et quand l’aube arrive, l’homme met fin au combat en donnant un coup final à Jacob alors que jusqu’ici, ils étaient à égalité. Cette scène pose beaucoup de questions, mais nous n’avons pas d’autre clef de lecture que les maigres informations que Jacob réussit à soutirer.

L’homme veut partir, pour préserver le mystère de son identité ? Mais Jacob réclame sa bénédiction – comme dans sa jeunesse, il est prêt à tout, il s’accroche, pour recevoir la bénédiction, l’approbation de l’autre.

L’autre, cependant, le force à se regarder en face : quel est ton nom ? Jacob, ça veut dire « il talonne » en référence au fait qu’il est le 2e jumeau, né sur les talons de son frère. Mais Esaü avait vu autre chose dans son nom : celui qui usurpe, celui qui trompe, celui qui talonne au point de rafler ce qui ne lui appartient pas (Gn 27.36).

Et avant de bénir Jacob, il va le renommer : Israël, littéralement « Dieu lutte ». Mais il rattache ce nom à Jacob en soulignant sa force : « tu as lutté avec Dieu & avec les hommes et tu l’as emporté. »

Deux choses : l’homme révèle un peu de son identité – c’est un homme, mais il représente Dieu… Le prophète Osée dira que Jacob a lutté avec un ange (Osée 12.4), en tout cas quelqu’un qui représente Dieu.

Et puis, Jacob l’a emporté, vraiment ? Le coup final a été porté par l’autre ! Oui, mais Jacob a tenu bon, tout le combat, jusqu’à la fin, où il réclame la bénédiction de l’autre qui essaie de lui échapper. Il ne lâche rien, j’imagine qu’il s’agrippe à son adversaire, et l’autre finit par céder pour pouvoir partir. Sa victoire, c’est de sortir de ce combat, vivant, béni.

Lorsque l’homme disparaît, peut-être instantanément, Jacob prend conscience de ce qui vient de se passer : « j’ai vu Dieu en face ! ». Oui, c’était vraiment un face-à-face ! Jacob s’en souviendra, et toute sa descendance : le peuple issu de lui prend ce nom « Israël », et le texte mentionne une pratique juive de l’époque qui rappelle la blessure infligée à Jacob.

          Dieu nous transforme pour nous permettre d’avancer

Dans l’histoire de Jacob, c’est un moment pivot. Il a pris la décision de rentrer, mais tout dépend de l’attitude d’Esaü ! La bénédiction de Dieu est une promesse : puisque Jacob a pu tenir bon face à un représentant de Dieu, il n’a rien à craindre de son frère. Il peut y aller !

Mais au-delà de la promesse rassurante, que Dieu aurait pu communiquer de façon plus calme ( !), le texte insiste sur le changement de nom – élément crucial, puisque cela devient le nom du peuple de Dieu par la suite, Israël. Ce changement de nom symbolise un changement d’identité. Jacob n’est plus l’usurpateur, mais le persévérant, le vainqueur, le vivant. Alors que Jacob revient vers son frère, plein de bons sentiments, demandeur de réconciliation et de nouveau départ, il est nécessaire que quelque chose change. Les bons sentiments ne suffisent pas : si rien ne change, rien ne change ! Jacob, s’il veut avoir une chance de vivre autrement, de vivre chez lui dans la bénédiction de Dieu, Jacob doit changer.

C’est vrai pour nous aussi ! nous pouvons espérer tous les nouveaux départs, tous les nouveaux horizons, si rien ne change en nous, rien ne changera autour de nous. Pour nous permettre de vivre autrement, Dieu nous invite à changer, il vient nous transformer.

Dieu nous offre le salut en Christ, qui que nous soyons, où que nous soyons – mais une fois que nous avons reçu par la foi ce salut, pour commencer à le vivre concrètement, pour vivre la paix, le pardon, l’amour, la justice, la vérité… il faut changer ! La transformation est un passage, ou plutôt un processus, obligé ! Sinon, nous retombons toujours dans nos travers, dans nos cercles vicieux, dans nos vieilles habitudes.

Et cette transformation en profondeur ne vient pas de nous : nous devons l’accepter, la vouloir même, mais seul Dieu peut tout changer, peut nous changer. Seul le créateur peut recréer en nous un cœur, un état d’esprit, juste et bon. Dans le texte, c’est lui qui change le nom… Lorsque nous croyons en Jésus, Dieu nous donne un nom nouveau « ma fille, mon fils » et il nous transforme pour que ses gènes deviennent de plus en plus visibles en nous. C’est lui qui le fait… Nous le désirons, mais c’est lui qui le fait, par son Esprit. Notre part, c’est de l’accepter.

Or justement cette transformation, ou ces transformations, ne sont pas toujours faciles à accepter. Jacob repart en boitant, blessé par son combat : il y a des séquelles, peut-être pas jusqu’à sa mort, mais pour le moment il boite. De même, nos transformations, quand elles sont profondes, sont souvent coûteuses et douloureuses. Sinon, il n’y aurait aucun problème à les accepter ! Mais elles sont douloureuses parce qu’elles viennent souvent dans des crises, et puis elles nous confrontent à nous-mêmes, et ça, ça fait mal ! Nous confronter à la réalité de notre cœur, de notre orgueil, de notre manque de foi, de nos peurs, de nos blessures, de notre culpabilité ou de nos ambivalences…

Lorsque nous nous tournons vers le Christ dans la foi, la confiance s’accompagne de repentance : nous abandonnons notre vie sans Dieu, ou ce qui n’est compatible avec Dieu dans notre vie. Mais ce mouvement d’abandon, il revient dans toute notre vie de foi ! Et de manière plus intense lorsque nous traversons des crises.

Nos luttes comme des lieux de transformation

Ce qui frappe, dans ce récit, c’est que Dieu a lutté avec Jacob. A quoi joue Dieu ici ? A quoi joue Dieu dans les crises que nous traversons ? Cette rencontre entre Dieu et Jacob nous renvoie à toutes ces fois où on a l’impression de se battre avec Dieu, non ? je ne crois pas que ce soit des événements particuliers, tout le monde vit des joies et des malheurs, mais la crise c’est ce que chacun, de façon unique, va vivre suite à tel ou tel événement : la façon dont une naissance remet en question nos priorités, ou une maladie, une difficulté dans les relations, une pression difficile à gérer, une perte qui nous fait chavirer, un déménagement… Peu importe la cause !

Or cette rencontre nous montre que Dieu ne lutte pas avec nous pour nous briser, pour nous rejeter, pour nous casser, mais pour nous transformer et nous permettre d’aller plus loin, avec sa bénédiction. Dieu nous transforme pour que nous puissions avancer. Et parfois, dans ces transformations, ces crises, Dieu nous résiste. Attention, ce texte n’est le seul modèle de la façon dont Dieu nous transforme ! Mais c’est un exemple : parfois, pour nous changer, Dieu lutte avec nous. Le mot utilisé pour désigner la combat entre Jacob et l’inconnu dérive du verbe « prendre dans ses bras », comme un combat rapproché, où les adversaires se tiennent. Comme un maître en arts mariaux, en judo par exemple, qui nous pousse dans nos derniers retranchements pour que nous puissions nous dépasser. Ou un maître d’échecs, qui déjoue tous nos coups, pour nous obliger à progresser.

Quand nous avons l’impression de lutter avec Dieu, nous imaginons que Dieu est notre ennemi, ou qu’il nous rejette, ou qu’il nous punit. Mais cette rencontre jette une autre lumière sur ces luttes : Dieu nous prend à bras-le-corps pour nous transformer et nous bénir. Quand Dieu résiste, c’est pour nous pousser dans nos retranchements, dans ces lieux de vérité où il agit en profondeur. N’ayons pas peur de ces luttes, n’ayons pas honte de nos questionnements, de nos doutes, de nos réclamations… n’ayons pas peur quand ça prend du temps (Jacob a lutté toute la nuit). N’ayons pas peur de lutter, même si c’est chaotique et que ça fait un peu mal : Dieu est en train de nous transformer.

 

Quand Dieu se révèle, ce n’est pas toujours très clair, paisible ou agréable. Parfois il nous faut du temps pour comprendre qu’il est à l’œuvre, pour comprendre à quoi il veut en venir… Mais Dieu a toujours en vue de nous faire expérimenter son salut, sa bénédiction, sa paix… de nous transformer pour que nous avancions avec plus de foi et de détermination, plus de justice et d’amour – nos progrès lui font honneur, et nous en ressortons bénis, changés, plus forts avec lui.

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