Archives de catégorie : Prédication dimanche matin

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Jésus, avec nous par son Esprit

Trouver Dieu dans notre quotidien. Il est vrai que par moments, nous voyons des signes de la présence de Dieu : dans la Nature, à travers les fonctions du quotidien, dans des situations qui se débloquent ou des expériences de sa paix, de sa tendresse, de sa force. Mais entre ces moments, il nous arrive d’être absorbés par ce que nous vivons, sans avoir conscience que Dieu est là (en cour de récré, dans le bus, lors d’une démarche administrative…)/ sans le chercher, ou de chercher Dieu sans vraiment le trouver. La connexion avec Dieu semble se faire par intermittences, comme s’il y avait des connexions et des déconnexions, des présences et des absences.

Lorsque Jésus était sur terre, sa présence était indéniable, visible, palpable. Mais nous, nous n’avons pas Jésus, là, à nos côtés, ce qui rend bien plus difficile la perception de sa présence. Or Jésus est tout à fait conscient de ce défi, il en parle même à ses disciples la nuit avant de se faire arrêter : il sait ce qui l’attend – arrestation, procès, mise à mort, et par anticipation, il veut encourager ses disciples qui n’ont pas encore saisi la gravité de ce qui arrive. Nous sommes donc dans les derniers moments où Jésus est avec ses disciples, cette nuit de Pâque juive qui précède sa mort.

Lecture biblique : Jean 14.15-20

15 Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements. 

16 Moi, je demanderai au Père de vous donner un autre défenseur pour qu’il soit avec vous pour toujours, 17 l’Esprit de la vérité, que le monde ne peut pas recevoir, parce qu’il ne le voit pas et qu’il ne le connaît pas ; vous, vous le connaissez, parce qu’il demeure auprès de vous et qu’il sera en vous.

18 Je ne vous laisserai pas orphelins ; je viens à vous. 19 Encore un peu, et le monde ne me verra plus ; mais vous, vous me verrez, parce que, moi, je vis, et que vous aussi, vous vivrez. 20 En ce jour-là, vous saurez que, moi, je suis en mon Père, comme vous en moi et moi en vous. 

L’envoi de l’Esprit

A l’approche de son arrestation, Jésus sait que ses disciples vont se sentir abandonnés, et il veut les rassurer en leur promettant l’envoi de l’Esprit saint (v.16-17). Cette promesse est un peu mystérieuse : Dieu leur enverra un autre défenseur (dans d’autres traductions : un autre consolateur, un autre Paraclet). Le paraclet (chez les Grecs à l’origine, mais c’était répandu aussi en Israël à l’époque de Jésus), c’est quelqu’un appelé à vos côtés, en particulier lors d’un procès, pour vous conseiller sur le plan juridique et éventuellement parler à votre place. Si vous vous sentez désemparés devant une situation trop complexe, que vous avez du mal à comprendre ou à vous défendre, le paraclet est là pour vous soutenir.

Jésus annonce donc une période difficile, qui ressemblera à un procès : comme lui-même, ses disciples seront rejetés, accusés, persécutés – mais ils ne seront pas seuls : Dieu viendra à leurs côtés pour les soutenir et les défendre. Sous pression, on peut être tenté de changer de version, ou de douter de ce qu’on pensait savoir : Dieu leur rappellera ce qui est vrai, comme un témoin véridique qui aide à y voir clair. Jésus est vraiment venu, il a vraiment fait des miracles, il a vraiment offert l’amour et la sagesse de Dieu, il a vraiment accompli les promesses de Dieu. Il y aura un conflit, entre ceux qui ont cru en Jésus et les autres (« le monde »), mais Dieu lui-même viendra soutenir ceux qui croient en Jésus.

Jésus se considérait lui-même comme un témoin de la vérité de Dieu : à l’heure de son départ, il promet un successeur, un autre défenseur : son Esprit, qui sera avec les disciples, à côté des disciples, et dans les disciples. Autrement dit, il sera du côté des disciples, il sera proche d’eux, tellement proche qu’il sera « dedans ».

Qui est la personne humaine la plus proche de vous ? Même cette personne n’est pas toujours avec vous, 24/7. Il y a des intermittences. La seule personne qui soit toujours avec vous, c’est vous. Or Jésus promet d’envoyer un soutien qui ne sera pas simplement à nos côtés, comme un ami, un parent, un conjoint, avec des moments proches et plus distants (ne serait-ce que sur le plan géographique) : Dieu viendra lui-même soutenir ses disciples 24/7, en se répandant dans tout ce que nous vivons, dans tout ce que nous sommes. Dieu est à côté des croyants, pour les soutenir (geste du bras) et il est en eux, pour qu’il n’y ait jamais de déconnexion.

C’est particulièrement important vu les conflits qui vont s’ouvrir autour des disciples de Jésus, ceux qui sont avec lui dans la pièce la nuit de Pâque mais ensuite, tous ceux qui croiront en lui, jusqu’à nous. Dans le livre des Actes, les disciples sont accusés, condamnés, emprisonnés parfois mis à mort – comme bien d’autres chrétiens aujourd’hui, persécutés ou sous pression pour s’éloigner du Christ.

Mais la promesse de l’envoi de l’Esprit n’est pas limitée aux cas difficiles : elle rassure pour les moments difficiles, mais une fois que l’Esprit est en nous, il ne part plus ! Il est là, pour toujours, même si nous ne sommes pas persécutés.

Si vous avez du mal à vous représenter la présence de Dieu en vous, une présence spirituelle et pas matérielle, bienvenue au club ! Une image imparfaite : l’éponge. Une fois imbibée d’eau, vous ne pouvez pas faire la différence entre l’éponge et l’eau. Et partout où va l’éponge, l’eau suit. Quand vous ferez la vaisselle la prochaine fois, rappelez-vous que l’Esprit vous remplit comme l’eau imbibe l’éponge!

          La vie du Christ en nous

Jésus continue. Peut-être a-t-il senti que ses disciples ne sont pas complètement rassurés : ce qui compte pour eux, c’est Jésus, et Jésus annonce son départ. Alors il insiste : je ne vous laisserai pas orphelins, mais je reviens. A mots couverts, Jésus fait sûrement référence à sa résurrection : il s’en va, il va mourir, mais il reviendra vers ses disciples ; alors ils sauront que Jésus est vivant, d’une vie éternelle, autre, que Jésus veut partager avec tous ceux qui se tournent vers lui avec foi.

Et là, ça devient un peu confus : Jésus va faire envoyer un défenseur, l’Esprit, mais il va lui aussi revenir (ressuscité), et il sera dans les disciples et les disciples en lui, comme Jésus est en Dieu : là on revient plutôt à l’Esprit, non, puisque c’est en nous ?

Jésus et l’Esprit sont tellement liés que recevoir l’Esprit, c’est recevoir Jésus. Jésus a un corps, même après sa résurrection, donc il ne va pas venir s’installer à l’intérieur de nous, en poussant nos organes (ce serait inconfortable) : il demeure en nous par son Esprit. Être rempli de l’Esprit, c’est donc être rempli de Jésus – et par là, rempli de la présence de Dieu. Comme l’oxygène qui est présent dans l’eau (H2O) qui vient imbiber l’éponge.

Par l’Esprit, Jésus demeure en nous et nous attache solidement à lui, pour que nous puissions participer à la vie de Dieu. C’est pour cela qu’il est venu sur cette terre : pour s’approcher de nous, pour écarter tout ce qui nous sépare de lui (nos fautes, nos révoltes, nos mensonges, nos indifférences) et nous reconnecter à son amour, pour toujours.

La fidélité, de part et d’autre

S’arrêter là serait mettre de côté un élément important sur lequel Jésus insiste avant et après la promesse d’être avec nous par l’Esprit : « si vous m’aimez, vous garderez mes commandements » (v.15, 21). Les commandements, ce sont… aimer, rester authentiquement dans la vérité de Dieu, c’est-à-dire aimer Dieu de tout notre cœur en l’honorant dans tout ce que nous sommes, et aimer notre prochain, notre lointain, et même notre ennemi.

Jésus conditionnerait-il le don de l’Esprit à notre obéissance ? comme si Jésus allait retirer son Esprit lorsque nous nous égarons ? C’est ce que nous imaginons parfois. Mais il n’y a pas de lien de cause à effet dans le texte, faisant de l’obéissance la base pour recevoir la présence de Dieu – et heureusement ! Sinon, je crois que Dieu ne serait pas souvent avec moi, en tout cas pas toujours : qui se croirait totalement aimant et saint ? Jésus vient nous rejoindre dans nos mensonges, nos faiblesses, nos échecs, il ne va pas conditionner sa présence à notre réussite !

Cela dit, être sauvés par grâce ne veut pas dire que nous restons passifs. Dans une relation, même si l’initiative n’a été prise que par l’un des deux, si on veut que la relation perdure, il faut que chacun y mette du sien, il faut de la réciprocité, ou en tout cas du répondant. Dieu met tout : sa vie, en Jésus, jusqu’au sacrifice, et son Esprit. Et nous ? Nous sommes appelés à cultiver notre relation avec Dieu, à rester fidèles, à le suivre, à le chercher, à respecter ses principes – même, et peut-être en particulier, quand nous sommes un peu perdus, que nous ne savons pas où aller, que la pression est forte : Jésus nous invite à lui rester fidèles, à nous accrocher à lui – parce que lui ne bouge pas, il est là, que nous le voyons ou pas, il est là.

Alors, dans les moments faciles ou difficiles, laissons cette vérité nous remplir, comme l’eau remplit l’éponge : Dieu est avec nous, à chaque instant, grâce à Jésus, par son Esprit. Que sa vérité et son amour soient notre boussole pour avancer…

Apporter nos pépites à Dieu

Regarder la vidéo ici.

Depuis quelques semaines, nous explorons le thème de la justice. Mais dans un monde qui ne tourne pas très rond, on a parfois l’impression que nos actes de justice apportent bien peu de résultats, et que quoi qu’on fasse, c’est l’injustice qui l’emporte. Quand un adversaire est trop puissant, que les dysfonctionnements s’enracinent dans un système international ou que tout simplement, nous retombons dans les mêmes travers…

L’apôtre Jean, disciple de Jésus, écrit vers la fin de sa vie (vers 90 ap. JC) aux églises d’Asie mineure (Turquie) dans le but de les encourager à tenir ferme, sans céder au découragement – et elles avaient de quoi être découragées : elles étaient persécutées, elles baignaient dans un système économique injuste, corrompu, dans une atmosphère spirituelle complètement détournée de Dieu. Jean leur écrit parce qu’il a reçu une série de révélations, de visions, sur le fait que Dieu règne aujourd’hui (malgré les apparences, il n’est pas dépassé) et surtout, qu’il est en train de réaliser son projet, pour instaurer son royaume de justice et de paix, pour toujours.

C’est cette espérance dans le royaume qui vient, que je vous propose de nous réapproprier ce matin, avec un extrait de la dernière vision de Jean, une vision glorieuse : des nouveaux cieux, une nouvelle terre, un monde transfiguré dans lequel descend une ville, la Nouvelle Jérusalem, symbole de la cité de Dieu, symbole du peuple de Dieu. Lisons donc un extrait de cette vision.

Lecture biblique : Apocalypse 21.1-2, 22-27

1 Ensuite, je vois un ciel nouveau et une terre nouvelle. En effet, le premier ciel et la première terre ont disparu […]. 

2Et je vois la ville sainte, la Jérusalem nouvelle. Elle descend du ciel, envoyée par Dieu. Elle s’est faite belle comme une jeune mariée qui attend son mari. 

22 [là] Je ne vois pas de Temple, car le Seigneur Dieu, le Tout-Puissant, est son Temple, ainsi que l’Agneau. 

23 La ville n’a besoin ni du soleil ni de la lune pour y briller, car la gloire de Dieu l’éclaire, et sa lampe, c’est l’agneau. 

24 Les nations marcheront à sa lumière, et les rois de la terre y apporteront leur gloire. 

25 Ses portes ne se fermeront jamais pendant le jour — or là il n’y aura pas de nuit. 

26 On y apportera la gloire et l’honneur des nations. 

27 Il n’y entrera jamais rien de souillé, ni faiseur d’abomination ou de mensonge, mais ceux-là seuls qui sont inscrits dans le livre de la vie de l’agneau.

Une remarque de méthode avant d’aller plus loin : Jean utilise un langage imagé, très imagé ! Il intègre aussi des références aux prophètes juifs (surtout Esaïe et Ezechiel) et il ajoute ce qu’il sait, depuis la venue de Jésus. Cela donne des images et des symboles qui se superposent, destinés aux églises du 1er siècle, avec leur culture, ce qui fait qu’il faut rester prudent dans l’interprétation des détails concrets : je crois fermement à l’instauration d’un monde nouveau, mais je ne mettrais pas ma main au feu que l’éternité ressemblera exactement à ça. Jean ici donne une vision pour encourager, pas forcément une description littérale, comme on mettrait des photos sur le bon coin pour une annonce. Il y a une part de symbole, d’autant que, de toute façon, dans notre état actuel, nous ne pouvons pas imaginer complètement l’éternité de la vie avec Dieu.

Essayons de voir quand même comment cette vision façonne notre espérance.

  • La vie dans la plénitude de la présence de Dieu

Jean marque le contraste entre l’ancien, et le nouveau. Ainsi, dans cette ville sainte :

Plus de Temple – le Temple juif, déjà détruit quand Jean écrit, c’était le lieu de la rencontre avec Dieu : un lieu glorieux, mais limité, à l’accès codifié et discriminant… Il n’est pas remplacé par un nouveau Temple, mais par la présence de Dieu partout, tout le temps, visible de tous. Sa gloire remplit la ville. Le Seigneur, Dieu, le Tout-Puissant – le trois fois saint – se déploie dans toute sa densité, et tous y ont accès. Lui qui est aujourd’hui caché, distant – parce que nous sommes trop indignes pour l’accueillir – à ce moment-là, dans un monde apaisé, guéri, renouvelé, il se rendra pleinement présent.

Notez la présence de l’Agneau, c’est-à-dire Jésus, le Crucifié, sacrifié pour rembourser nos injustices, l’Agneau ressuscité est présent à côté de Dieu, et il partage sa gloire.

Plus de soleil ni de lune : c’est Dieu qui illumine, avec l’Agneau. Plus besoin de sources de lumière ici et là, imparfaites et partielles, accompagnées de leur ombre : la lumière de Dieu resplendira complètement.

Jean nous indique, incidemment, que le monde créé, la Nature qui nous entoure, sont des signes de ce que Dieu est : le plus beau des couchers de soleil, le plus majestueux des ciels étoilés, ne sont que des fragments de l’immense splendeur de Dieu, que nous pourrons contempler à loisir. Autrement dit, prenez ce qui vous émeut, ce que vous trouvez beau : ce n’est qu’un fragment de la beauté de Dieu, que nous verrons face-à-face.

La lumière est aussi symbole de sécurité, de vérité, de sûreté – opposée aux ténèbres et au mensonge. Dans la même veine, on voit que les portes de la ville ne se ferment pas : les portes, dans les murailles, se fermaient la nuit pour protéger la ville du danger. Là, il n’y a plus de danger, c’est fini : paix, sécurité, liberté.

Et on le voit, ça circule, il y a du mouvement : les peuples entrent et sortent, tous sont libres et respectés, il n’y a plus d’exploitation, de guerre, de famine…

Le mal, l’abomination, le mensonge n’ont plus droit de cité : il n’y a plus personne pour abîmer ce que Dieu a instauré. Tout est cohérent, harmonieux, marqué par l’abondance et la paix, et la vie peut s’épanouir pleinement, à la lumière de Dieu.

  • La gloire des peuples, ajoutée à la gloire divine

Une image frappante, ce sont les nations qui apportent leurs trésors à Dieu, comme un cortège d’hommages pour honorer Dieu. Elles prennent ce qu’elles ont de plus beau et elles l’offrent à Dieu. C’est inspirant, de se dire que ce dont nous sommes fiers, notre patrimoine collectif, peut honorer Dieu : en art, en savoir-faire, en gastronomie, en architecture, en couture, en génie civil, en philosophie, en initiatives sociales… comme des dessins d’enfant qui honorent notre Père, notre Dieu créateur et sauveur.

Mais je me demande si ça ne va pas un peu plus loin, car Jean utilise un mot étonnant pour parler de nos trésors : il dit que les nations apportent leur gloire (et il le dit 2 fois, donc ce n’était pas une erreur !). Leur gloire. Nos trésors peuvent paraître dérisoires devant la gloire de Dieu – après tout, même le soleil et la lune disparaîtront ! Mais Dieu les regarde comme une gloire et un honneur, des gloires ajoutées à sa gloire, des gloires intégrées à sa gloire.

Imaginez… Imaginez un père, artiste peintre, qui prépare une grande fresque sur les murs de la ville : ses enfants lui apportent leurs dessins maladroits, et il les accroche dans sa fresque, en plein milieu de son œuvre. Imaginez un compositeur qui écrit une œuvre triomphale pour un orchestre de talent, et qui choisit d’intégrer la nouvelle clarinettiste dans un solo. Imaginez encore une mère qui prépare de délicieux cookies et qui laisse ses enfants y ajouter des pépites de chocolat, en fin de préparation. Eh bien, dans sa gloire éclatante, Dieu choisit d’intégrer nos pépites.

Je n’en reviens pas de voir à quel point Dieu est généreux : lui qui est tout, qui a tout, qui peut tout, qui surpasse tout, quand il remplira le monde de toute sa plénitude, il n’écrasera personne, mais au contraire, quand il aura toute la place, il nous fera une place, il intègrera tout que nous avons fait de beau, de bon, de juste et de vrai, à sa gloire, comme des pépites dans ses délices éternels.

Cela ne devrait pas nous étonner, parce que Dieu est comme ça depuis le début : à la création, dans la Genèse, il fait de l’être humain son ambassadeur dans le monde, appelé à cultiver et développer ce qu’il a semé. Lorsque Jésus vient annoncer la Bonne Nouvelle du salut, Dieu fait des croyants ses ambassadeurs à nouveau, ses partenaires dans le partage de l’amour de Dieu – il pouvait agir seul ! Mais non, il fait de nous ses partenaires. Et c’est vrai jusque dans l’éternité : il nous associe à son œuvre, il nous associe à sa gloire.

Entendons-nous bien : ce que nous faisons de bien n’est pas vraiment de notre fait – c’est l’Esprit de Dieu qui nous inspire, nous pousse, nous tire, nous coache, pour nous donner la joie de participer à l’œuvre vivante et vivifiante que Dieu réalise, dans ce qui est visible et invisible. Imaginez une célèbre pianiste, qui invite une jeune élève à jouer à quatre mains dans une grande salle de concert : évidemment, elle la prépare en amont ! elle lui montre comment faire, elle lui apprend, dans le but d’expérimenter cette joie complice de jouer ensemble. Sa joie déborde. Dieu ne nous laisse pas spectateurs de sa virtuosité, mais il nous invite par son Esprit à expérimenter cette complicité dans son œuvre : il est tellement fier (glorifié) quand nous sommes heureux avec lui et en lui. Quelle grâce !

  • L’impact de notre espérance sur le quotidien

Après quelques dimanches sur le thème de la justice, dans un contexte marqué par les inquiétudes, les questions, les élections, cette vision de Jean nous rappelle quelques fondamentaux.

D’abord, le royaume de justice et de paix n’est pas encore établi (au cas où vous en doutiez !), et nous sommes invités à attendre avec espérance : sa justice et sa paix vont s’établir – parole de Créateur ! Il nous appelle à relever la tête pour tourner nos yeux vers l’horizon, en nous accrochant à sa promesse. L’Agneau ressuscité est le garant que cette promesse est vivante, solide, en route.

Puisque la perfection est pour « demain », il est logique (atrocement douloureux et frustrant, mais logique) que le monde d’aujourd’hui soit encore dans l’injustice. Notre espérance s’accompagne de réalisme pour aujourd’hui : même si Dieu est présent, il agit pour l’instant en coulisses, par petites touches, avant de se révéler au grand jour.

A la lumière de cette espérance, nos actes d’aujourd’hui sont des avant-goûts du Royaume, mais pas seulement : ce sont aussi des pépites dont Dieu se délectera pour l’éternité. Ce que nous vivons aujourd’hui, avec maladresse et imperfection, certes, mais marqué par l’amour, la fraternité, l’hospitalité, la patience, l’endurance, la vérité, la justice, la paix, la beauté, la minutie, la créativité, la joie, la sagesse, le courage,… ce que nous vivons, et faisons, aujourd’hui, aussi simple et temporaire que cela paraisse, tout a de la valeur, parce que Dieu, dans son incroyable générosité, donne le poids de l’éternité, le poids de la gloire, à tout ce qui est bon et beau, juste et vrai.

Alors que Dieu nous inspire, aujourd’hui, demain, dans les moments simples du quotidien, pour créer avec lui, dans la complicité de son Esprit, des pépites à la saveur éternelle. Que gloire lui soit rendue !

Propriété, équité, sainteté (Lv 19.1-2, 9-10)

INTRODUCTION

Nous aspirons tous à vivre dans un pays parfait. Un pays, un monde où règnent l’équité, le partage, l’harmonie sociale.

On espère évidemment que notre prochain gouvernement saura satisfaire cette aspiration… Mais comment nous pouvons nous, déjà à notre échelle, travailler à ces si belles valeurs ?

Aujourd’hui, nous poursuivons notre série « Vivre une vie juste et généreuse », en étudiant un peu les concepts de propriété, équité et sainteté. Comment la Bible en parle ?

LECTURE LV 19.1-2, 9-10

1Le Seigneur dit à Moïse : 2« Communique ceci à toute la communauté d’Israël :

Soyez saints, car je suis saint, moi, le Seigneur votre Dieu !

9Quand tu moissonnes, ne coupe pas les épis qui ont poussé en bordure de tes champs, et ne retourne pas ramasser les épis oubliés ;

10 ne repasse pas non plus dans tes vignes pour ramasser les grappes oubliées ou les grains tombés à terre. Laisse-les pour les pauvres et pour les immigrés. Je suis le Seigneur votre Dieu !

Le livre du Lévitique est un peu le mal-aimé de la Bible. Pourtant, il est très riche, rempli de lois civiles très bonnes. Ce livre est un recueil de paroles de Dieu adressées à Moïse pour les Lévites, les prêtres ainsi qu’à l’ensemble du peuple. Les lois transmises visent justement à faire vivre l’harmonie sociale, l’équité et surtout adopter la sainte culture de Dieu.

Le chapitre 19 reprend chacun des 10 commandements, les détaille, et ponctue régulièrement d’une phrase « Je suis le Seigneur votre Dieu ». Le Seigneur Dieu est saint, alors il veut inspirer chacun à être saint comme lui. La culture de Dieu est sainte, c’est-à-dire extraordinairement pure, unique, sans mal, sans péché. Dieu veut transmettre sa culture.

  1. Propriété

Pour ce faire, il donne cette parole à chacun: « Quand tu moissonnes tes champs, limite-toi. Ne repasse pas derrière ta première récolte pour ramasser ce qui est tombé ».

Il n’est pas même question de laisser, ici, un cinquième du champ ou de la récolte pour le donner aux pauvres. Donc ce n’est pas vraiment de la charité. Dieu demande simplement de limiter le profit jusqu’auboutiste. Il demande au propriétaire de se limiter lui-même. De ne pas grappiller jusqu’à l’épis tombé par terre, la grappe isolée que l’on n’a pas vu la première fois.

A ce moment-là, Dieu n’est apparemment pas contre le concept de propriété. La propriété n’est pas le vol ici (cf. Pierre-Joseph Proudhon, 1840). Toutefois, Dieu inspire le partage rudimentaire. Le minimum, les épis des bords de champs, mélangés peut-être avec des herbes hautes, les grains tombés par terre, le pommes de terre trop petites pour être vendues, les fruits et légumes trop mûrs, invendables. Peut-être que le propriétaire aurait même jeté ou laissé dans la terre ces denrées alimentaires. En plus, cette pratique n’impose aucune charge supplémentaire au propriétaire. Il n’a rien à payer pour la collecte de ces glanages.

Cependant lorsque l’on voit que nos biens, même dont on n’a pas l’utilité, être pris gratuitement, c’est une autre histoire. Soit on peut se réjouir, soit on est titillé. Peut-être qu’on aurait pu rentabiliser notre propriété jusqu’au bout. Mais, Dieu prescrit aux propriétaires un préventif à la cupidité. Il leur inspire la reconnaissance pour la récolte. Il leur inspire le moyen d’exprimer leur reconnaissance envers lui qui les a bénis richement, et ce, en partageant l’infime partie de la récolte avec les pauvres et les immigrés.

Celui qui a fait pleuvoir sur ces champs, c’est le Seigneur. Celui qui a créé l’univers, créé la terre, le cycle de l’eau, les semences et leur germination, c’est le Seigneur. Dieu a créé, l’humain a replanté, Dieu a fait croître, l’humain a récolté.

En même temps, Dieu protège les propriétaires du vol ou du glanage excessif. Dans Deutéronome 23 (v.24-25), Dieu permet que les Israélites puissent manger chez le voisin, autant que nécessaire, mais sans faire de réserves. Il le permet à tous, alors c’est équitable.

Et en même temps, si un propriétaire Israélite refusait tout glanage dans son champ, ne respectait pas un commandement de Dieu, donc ne respectait pas Dieu, alors des malheurs pouvaient arriver… La stérilité de la terre, la sécheresse, la colonisation (Lv 26.14ss). Ces malheurs « pour briser votre orgueilleuse assurance » dit Dieu en Lv 26.19.

La Bible n’est pas un recueil classique, où le riche est toujours le méchant, et le pauvre toujours la victime. Au v.15 de notre chapitre, Dieu commande : « Ne commets pas d’injustice dans tes jugements : n’avantage pas un faible, ne favorise pas un puissant, mais rends la justice de façon équitable envers les autres Israélites. » Dieu est équitable et ne fait jamais de favoritisme.

  1. Equité

Lorsque j’ai effectué quelques recherches sur le glanage aujourd’hui, une expression m’a faite doucement rire… « En Belgique, le glanage est encore encadré par une loi veille de plus de 130 ans ! ». Les amis, notre Dieu avait légiféré cette pratique il y a bien plus que 130 ans ! Quelle fierté !

En 1857, Jean-François MILLET expose pour la première fois son œuvre « Les Glaneuses ». Dans le tableau, les femmes se courbent, et scrutent nerveusement le sol à la recherche de blé. Chaque femme est courbée différemment, représentant les 3 phases nécessaires du glanage : se pencher, ramasser les épis, puis, se redresser avant de se courber encore. Elles apparaissent dignes, actrices d’une tâche nécessaire pour pouvoir se nourrir ainsi que leur famille.

Ceux qui glanent ne reçoivent pas la charité. Ils travaillent pour se nourrir. Ils sont respectables par ce fait d’avoir effectué des efforts pour obtenir leur nourriture. Dieu valorise le travail ! Peut-être pensez-vous à Ruth, immigrée, qui alla glaner tous les jours ardemment, pour nourrir sa belle-mère et elle-même.

Comme Ruth, les glaneurs sont les pauvres, les orphelins, les veuves, comme les immigrés : tous ceux qui n’ont pas accès à une propriété pour subvenir à leurs besoins.

Cela me fait penser aux deux équatoriens venus chez mes parents cet hiver. En plus d’un travail précaire la semaine, les week-ends, ils sont allés couper les arbres tombés sur la route ou gênants chez les uns les autres, et ils les vendaient ensuite en bois de chauffage. Leur voisin leur a prêté un entrepôt et des outils, et ils ont pu sortir, un peu, de leur situation de précarité. Le partage de leur propriétaire, des arbres des uns des autres, qui ne leur a rien coûté personnellement, les a réhabilité socialement et matériellement.

Dieu se soucie du propriétaire, comme du pauvre et de l’immigré. Il leur assure une une protection sociale, et une dignité sociale. Il transmet à son peuple la culture du partage, de l’équité, de l’harmonie sociale. Les immigrés comme les pauvres ont droit à cette loi généreuse. D’autres lois permettaient une redistribution des richesses tous les trois ans par exemple. La préoccupation de Dieu pour les pauvres est si forte que cette multitude de lois établies en leur faveur, si elles étaient appliquées, auraient pratiquement éliminé toute sous-classe permanente. Notre Dieu est ambitieux… Mais surtout Saint.

  1. Sainteté

Dans le Lévitique, livre très législatif, on ressent une grande distance entre Dieu et les humains. Pourquoi à votre avis ?

Nous aspirons tous à vivre dans un pays où règnent le partage, l’équité, l’harmonie sociale… Mais un problème récurrent demeure. Il y a comme une force qui nous pousse à l’égoïsme, l’injustice, la cupidité, la honte ou le mépris. Cette force, nous l’appelons le mal. Le mal endommage notre relation à Dieu, et notre relation aux autres. Il nous éloigne à des années lumière de la culture de Dieu, de sa sainteté.

Au lieu d’instaurer la paix, la justice sociale, l’équité, nous instaurons le mépris, la honte, le vol, l’injustice, etc.… Nous avons pour cela une dette envers Dieu.

Par ses lois, Il voulait réhabiliter nos relations et notre relation à Lui. Ces lois servent d’itinéraire vers sa sainteté.

Bien sûr, le mal est ancré en nous, de génération en génération, et nous rend incapables d’être saints comme Lui. C’est pourquoi déjà, dans ce troisième livre de la Bible, le Seigneur prévoyait un jour d’expiations pour les péchés. Le Yom Kippour. Le Jour où notre dette envers Lui était payée, régulièrement. Le Jour du Grand Pardon, le grand prêtre tirait au sort deux boucs : l’un pour être sacrifié, l’autre, bouc émissaire, chassé dans le désert, chargé symboliquement de tous les péchés d’Israël.

Cet animal sacrifié, ce bouc émissaire chassé, n’ont pas été suffisants. La symbolique est insuffisante. Nos péchés sont récurrents… C’est le cœur de l’humain qu’il faut changer. Alors, Dieu s’est chargé lui-même de nos péchés. En Christ, Dieu s’est fait homme, et a donné sa vie en rançon pour payer notre dette envers Lui. Il s’est fait lui-même sacrifice et bouc émissaire, pour nous. Égoïsme, cupidité, paresse, honte, Christ s’en est chargé. Par sa vie, nous sommes rachetés. En Christ, nous sommes saints. En Christ, nous sommes réhabilités dans notre dignité première.

En Christ, Dieu réhabilite parfaitement sa sainteté en nous.

CONCLUSION

En Christ, Dieu réhabilite parfaitement l’harmonie sociale, l’équité et notre sainteté. Dans un pays encore à venir, son Royaume éternel, ceux qui auront accepté Christ comme Sauveur et Seigneur Dieu, vivront cette réhabilitation parfaite. En attendant, suivons l’itinéraire du Christ, Dieu Saint fait homme. Soyons inspirés par la sainteté de Jésus-Christ, notre Seigneur.

PRIERE

Dieu Saint, pour ta sagesse, bonté et pureté infinies, merci. Merci d’être si parfaitement juste, si parfaitement équitable, impartial, et ô combien généreux. Sans mérite devant ta grâce, sans plus aucune crainte devant ta face, nous sommes. Sans effort, non sans quelque résignation, nous t’acceptons Jésus, tout à nouveau, comme Sauveur et Seigneur. Par ton Esprit Saint, sanctifie-nous. Par ton Esprit, que je sois semblable à toi.

Cherchez Dieu, et sa justice

Quels sont les reproches que vous avez déjà entendus, ou pensés, vis-à-vis de l’Eglise, des chrétiens ? Un qui revient souvent, c’est l’hypocrisie. Parler d’amour, mais pas le montrer. Être toujours fourré à l’église, tout en étant imbuvable en famille. S’afficher comme chrétien au travail, et traiter ses collaborateurs sans respect. Une double vie qui donne l’impression que les convictions, les croyances, les activités religieuses, n’ont pas vraiment d’impact sur la réalité du quotidien.

Dans l’Ancien Testament, quelques siècles avant Jésus-Christ, le peuple d’Israël, avec qui Dieu a fait alliance, reçoit lui aussi ces reproches – mais pas de la part de ses voisins : de la part de Dieu lui-même ! Par le biais du prophète Esaïe, Dieu va révéler ce qu’il pense de leur pratique religieuse, en particulier du jeûne : le jeûne n’était obligatoire qu’une fois par an, mais il était beaucoup plus fréquent car ce renoncement physique venait appuyer les démarches de repentance (devant la culpabilité) ou les demandes, en montrant qu’on cherchait Dieu de tout son cœur – et de tout son corps. Dieu nous livre son analyse de la situation.

Lecture Esaïe 58.1-12

1 Crie à pleine voix, ne te retiens pas, dit le Seigneur. Comme le son de la trompette, que ta voix porte loin. Dénonce à mon peuple sa révolte, aux descendants de Jacob leurs fautes.

2 Jour après jour, tournés vers moi, ils désirent connaître ce que j’attends d’eux. On dirait un peuple qui agit comme il faut et qui n’abandonne pas le droit proclamé par son Dieu. Ils réclament de moi de justes jugements et désirent ma présence. 

3 Mais ils me disent : « À quoi bon pratiquer le jeûne, si tu ne nous vois pas ? À quoi bon nous priver, si tu ne le sais pas ? » Alors je réponds : Constatez-le vous-mêmes : jeûner ne vous empêche pas de saisir une bonne affaire, ni de malmener vos employés. 

4 Quand vous jeûnez, vous vous querellez, vous vous disputez et vous donnez des coups de poing ! Quand vous jeûnez ainsi, votre prière ne parvient pas jusqu’à moi.   

5 Est-ce en cela que consiste le jeûne tel que je l’aime, le jour où l’on se prive ? Courber la tête comme un roseau, revêtir l’habit de deuil, se coucher dans la poussière, est-ce vraiment pour cela que vous devez proclamer un jeûne, un jour qui me sera agréable ? 

6 Le jeûne tel que je l’aime, le voici, vous le savez bien : c’est libérer ceux qui sont injustement enchaînés, c’est les délivrer des contraintes qui pèsent sur eux, c’est rendre la liberté à ceux qui sont opprimés, bref, c’est supprimer tout ce qui les tient esclaves. 

7 C’est partager ton pain avec celui qui a faim, c’est ouvrir ta maison aux pauvres et aux déracinés, c’est fournir un vêtement à celui qui n’en a pas, c’est ne pas te détourner de celui qui est ton frère.   

8 Alors ce sera pour toi l’aube d’un jour nouveau, ta plaie ne tardera pas à se cicatriser. Le salut te précédera et la gloire du Seigneur fermera la marche.         9 Quand tu appelleras, le Seigneur te répondra ; quand tu demanderas de l’aide, il te dira : « J’arrive ! » Si tu cesses chez toi de faire peser des contraintes sur les autres, de les ridiculiser en les montrant du doigt, ou de parler d’eux méchamment, 10 si tu partages ton pain avec celui qui a faim, si tu réponds aux besoins du malheureux, alors la lumière chassera l’obscurité où tu vis. Au lieu de vivre dans la nuit, tu seras comme en plein midi. 11 Le Seigneur restera ton guide ; même en plein désert, il te rassasiera et te rendra des forces. Tu seras comme un jardin bien arrosé, comme une fontaine abondante dont l’eau ne tarit pas. 

12 Alors tu relèveras les anciennes ruines, et tu rebâtiras sur les fondations abandonnées depuis longtemps. On te nommera ainsi : « Celui qui répare les brèches », « Celui qui restaure les sentiers, pour rendre le pays habitable ».

1/ Un appel à la cohérence

Les auditeurs du prophète ont dû être surpris ! Dieu vient critiquer… les bons élèves ! Ceux qui prient, qui jeûnent, qui se privent, qui donnent pour le Temple… qui cherchent la volonté de Dieu, et qui ne comprennent pas pourquoi Dieu ne répond pas. C’est que Dieu rejette en bloc leur démarche. Il ne rejette pas le rite, le jeûne ou la prière en soi, c’est lui qui l’a demandé ! ce sont des formes qui aident à structurer la relation avec Dieu. Mais le problème, c’est le manque de cohérence et de sens. Au Temple, ils offrent un visage spirituel, concentré, consacré, mais à la maison, en réunion d’équipe au travail, avec leur porte-monnaie, ces « bons élèves » montrent un autre visage, comme s’ils avaient deux vies – sans aucune connexion.

De manière intéressante, Dieu n’évoque pas les gros péchés scandaleux qui nous feraient bondir, mais il pointe du doigt la violence du quotidien, l’agressivité, l’opportunisme, le mépris de l’autre, l’égoïsme ordinaire qui fait que je sers d’abord mes intérêts, quitte à nier l’autre. Ce qu’ils vivent avec Dieu n’a aucun impact sur leurs relations, sur leur comportement, sur leurs valeurs… Ce qui pose la question : que vivent-ils vraiment avec Dieu ? Cherchent-ils vraiment Dieu ou veulent-ils simplement obtenir des avantages ?

Puisqu’ils disent qu’ils cherchent la volonté de Dieu, Dieu la leur donne – pas pour Untel ou Untel, mais en général, pour tous : ce qu’il désire, c’est la justice. Au Temple comme au bureau, au magasin ou en réunion de syndic, en réunion de chantier ou en conseil de classe, c’est la justice. Le quotidien, bariolé et complexe, fait partie de la relation avec Dieu.

Voyons comment Dieu résume sa volonté [v.9-10] :

  • Eviter la pression sur les autres: la pression financière provenant de pratiques douteuses, la pression dans les relations, le chantage, les menaces, les horaires invivables…
  • Eviter le mépris: humiliation, moquerie, calomnie, commérage…

Une simple question de respect, finalement ! Mais dans nos cultures (familiales, sociales, d’entreprise), est-ce que la pratique du respect est toujours au centre ?

  • Et Dieu ajoute le partage. Ne faire de mal à personne, ce n’est pas faire le bien. C’est un premier pas ! mais sa vision à lui est aussi proactive : partager avec celui qui a faim, qui est nu, qui est déraciné…

Dieu invite à une relation avec lui qui nous décentre : au lieu de chercher notre intérêt, encore et encore, il nous appelle à nous ouvrir aux autres, dans la justice et dans l’amour. Sinon ? Sinon, tous nos actes religieux et « spirituels » ne sont que des offrandes sur l’autel de notre ego…

          2/ aimer Dieu et la justice

Car vraiment aimer Dieu, c’est aimer ce qu’il aime, et il aime la justice. La justice – c’est-à-dire que chacun soit traité selon la valeur et la dignité que Dieu lui a donnée en le créant, indépendamment de nos réussites ou de nos conditions de vie. En particulier ceux que la société méprise facilement : les pauvres, les étrangers… (v.7) Dieu nous invite à voir l’autre, dans sa chair, son visage, son regard, son histoire, sa personne – loin des statistiques ou des distances théoriques, sa chair est la mienne.

Ce texte ancien vient nous décoiffer aujourd’hui, et attaque notre mentalité individualiste, notre sentiment de mériter ce qu’on a et d’avoir bien le droit d’en profiter, quand même ! Dieu vient même piquer notre quête de « toujours plus », de bons coups et de bonnes affaires, qui garantissent rarement une rémunération juste du producteur…

L’autre a la même valeur que moi : c’est de l’humanisme basique. Mais l’Evangile ajoute un élément de poids : Jésus, qui était Dieu, riche et glorieux, s’est dépouillé lui-même, de sa gloire, de sa vie, pour donner aux pauvres, aux affamés, aux exilés, une vie nouvelle, dans l’éternité. Ces gens pauvres et nus, c’est nous ! Nous étions nus, honteux, affamés de sens et de paix, assoiffés d’amour et de justice – et en Christ, Dieu nous a nourris de pardon, il nous a abreuvés d’amour, il nous a habillés de dignité, il nous a donné une chambre dans sa maison.

          3/ Vivre la justice de Dieu

A ceux qui cherchent vraiment Dieu, de tout leur cœur et de toute leur vie, Dieu promet de répondre : il donnera sa lumière, il donnera l’abondance, il protègera, réparera, guidera. En somme, il prendra sa place parmi le peuple pour lui faire du bien. La vision qu’il donne est presque paradisiaque : Dieu annonce un royaume de justice et de paix, que nous attendons encore mais que le Christ a inauguré par sa vie, sa mort, sa résurrection.

Notez que Dieu invite à rassasier l’autre, et qu’il promet lui-même de nous rassasier… derrière le manque de partage ou la convoitise effrénée, on a souvent peur de manquer, de ne pas avoir assez : Dieu affirme qu’il pourvoira, qu’il prendra soin de ceux qui le suivent.

Dieu s’adresse ici au peuple d’Israël dans son ensemble, en tant que nation – mais la situation a changé : l’Eglise existe dans différentes nations, et les chrétiens ne sont pas entièrement responsables du système politico-socio-économique en place. Les enjeux de justice et d’injustice aujourd’hui impliquent à la fois l’individu, la collectivité, l’Etat et les dynamiques internationales, dans un réseau d’enchevêtrements complexes. On aurait tort de prendre sur nos épaules d’individu la culpabilité d’un tel système. Mais, admettre que ni vous ni moi ne sauverons le monde ne rend pas caduc l’appel à une vie juste et généreuse.

Dans le texte, Dieu annonce que son peuple aura un titre tout à fait particulier : « celui qui répare les brèches ». Celui qui met en œuvre la justice de Dieu, qui répare, qui restaure… Seul Dieu peut remettre notre monde dans un juste fonctionnement – c’est ce que nous attendons, c’est ce que nous réclamons lorsque nous prions « que ton règne vienne ». Mais notre attente ne se vit pas en salle d’attente, à passer le temps en feuilletant un magazine et ne regardant l’heure de temps à autre : Dieu est déjà en train d’agir, son projet est en cours de réalisation, et il nous invite à le rejoindre, maintenant, là où nous sommes, tels que nous sommes, avec nos moyens, pour participer à sa mission.

Conclusion

La plaidoirie de Dieu contre l’hypocrisie de son peuple est très concrète : elle touche aux actes du quotidien. Mais chaque quotidien est différent : si vous êtes retraité, étudiante, comptable, ouvrier, prof, aide-soignant, si vous vivez seul ou que vous avez charge de famille… Chacun est différent, avec ses responsabilités, ses défis et ses ressources. Mais dans ce quotidien, Dieu nous invite tous, sans exception, à laisser sa justice orienter un peu plus notre vie, notre mentalité, nos choix, nos pratiques. Nous ne règlerons pas tout ! mais par nos prières, nos prises de position, nos actions, nous œuvrerons pour Dieu, par Dieu, comme Dieu – et nous goûterons, en avant-première, à la douceur de sa paix et de sa joie.

Face au découragement

Regarder le culte ici.

On a beau être chrétien, avoir la foi, on est parfois découragé… Cela vous sûrement déjà arrivé ! Qu’est-ce qui a pu vous donner envie de baisser les bras ? Ce peut être une situation compliquée au travail ou en famille, un avenir bouché, une situation d’injustice ou de surcharge, les interrogations devant l’état de notre monde, le sentiment d’être isolé et sans appui…

Ces ressentis, on les retrouve dans un psaume, une prière du roi David, environ 1000 ans avant Jésus. David est un homme de foi, un homme choisi par Dieu, proche de Dieu – et malgré tout, il traverse lui aussi des périodes de découragement.

Lecture biblique: Psaume 11

1 Du répertoire du chef de chorale. Psaume de David.

Auprès du Seigneur, je trouve refuge.

Comment pouvez-vous me dire :

« File, comme un petit oiseau, dans les montagnes » ?

2 Regarde bien : les méchants tendent leur arc,

ils ajustent leur flèche sur la corde pour tirer dans l’ombre sur ceux qui ont le cœur droit.

3 Quand les fondements sont en miettes,

que peut alors faire la personne qui est juste ?

Une situation décourageante

On ne connaît pas les circonstances que David évoque dans ce psaume, même s’il donne quelques indices (très imagés) sur ce qu’il traverse :

  • La menace : l’image du méchant qui tend son arc pour tirer sur sa proie, évoque toutes sortes de dangers, notamment physiques (des agressions), avec une bonne dose de manipulations, des pièges, des situations perverses qui peuvent nous nuire (le méchant attaque « de nuit », sournoisement). On sent le poids de la malveillance, de la haine, chez ceux qui menacent David.
  • Les fondements en miettes: c’est l’image de la désolation, quand tout est en ruine, comme s’il n’y avait plus rien de solide, plus d’appui, que le mal avait gangréné jusqu’aux racines… Rien ne va plus ! Ce ressenti, on peut l’avoir à un niveau individuel, quand une relation est profondément entamée, ou qu’un projet part dans la mauvaise direction ; à un niveau plus global, c’est parfois l’impression que les choses vont de travers autour de nous sur le plan social, économique, moral, politique, environnemental… et je ne dis pas ça spécifiquement par rapport à la France ou à un pays particulier, on retrouve partout cette frustration, ce découragement /qu’on soit chrétien ou pas, d’ailleurs/ devant l’écart entre ce qui est et ce qui devrait être.

Devant le danger, les pressions, les manipulations, les profonds dysfonctionnements, le cri de David retentit : que peut faire le juste ? Autrement dit, même avec les meilleures intentions et les meilleures méthodes, la tâche paraît trop lourde, trop grave, trop dangereuse. C’est le découragement, l’envie de tout lâcher, de se retirer totalement de la situation.

La tentation de fuir

Vient le conseil du début : File, petit oiseau, réfugie-toi dans les montagnes… Conseil qui fait bondir David (Comment ?! Comment osez-vous me conseiller cela ?) mais c’est une vraie option, voire une tentation, pour nous face à la difficulté, la frustration, la menace ou le découragement : fuir. Et David de se positionner – il le met d’ailleurs en tête de son psaume : c’est dans le Seigneur que je me réfugie, pas dans les montagnes, pas là-bas au loin. Il oppose ici la confiance en Dieu et la fuite.

Cette opposition peut nous perturber, en particulier dans le contexte actuel. Mais est-ce que David parle vraiment d’une fuite physique, géographique, au point qu’on pourrait tirer comme conclusion : si vous avez vraiment confiance en Dieu, ne fuyez pas ? C’est peut-être vrai, parfois, mais la Bible donne bien des exemples de personnes qui fuient les conflits, la persécution, la sécheresse et la famine, ou simplement la pression familiale… avec la bénédiction de Dieu ! David lui-même a fui de nombreuses années lorsque son adversaire, le roi Saül, cherchait à le tuer. Même la famille de Jésus a fui quand Hérode a massacré les enfants de Bethlehem. On aurait donc tort d’en tirer des conclusions hâtives sur ceux qui fuient le conflit, comme en Ukraine en ce moment (ou d’autres conflits dans le passé, que ce soit en Europe, en Afrique, en Asie, en Amérique du Sud…) – bibliquement, faire confiance et fuir le danger peuvent totalement aller ensemble.

Il me semble que du coup, la fuite en question, c’est moins le fait de partir physiquement, que le fait de céder au découragement, de baisser les bras. Devant la pression, on peut être tenté de tout laisser tomber, de se retirer comme si on s’en lavait les mains… De se désintéresser de ce qui se passe, de tout laisser en plan, de se refermer sur nous pour prendre soin de nous – et après nous le déluge.

Or…

4 Le Seigneur est dans le temple qui lui appartient ;

le Seigneur a son trône dans les cieux.

Il ne perd pas de vue les humains, il les évalue d’un coup d’œil.

5 Le Seigneur sait à quoi s’en tenir sur ceux qui sont justes,

mais les méchants, les amateurs de violence, il les déteste.

6 Qu’il fasse tomber sur les méchants une pluie de catastrophes !

du soufre enflammé, un vent de tempête fondant sur eux.

Voilà le sort qui les attend.

7 Car le Seigneur est juste, il aime tout ce qui est juste

et les personnes qui mènent une vie droite le verront face à face.

Le Seigneur de justice

Au lieu de baisser les bras, David reprend conscience de la souveraineté de Dieu : Dieu est LE Roi, il trône sur la création – et rien ne lui échappe. David ne s’étend pas sur la contemplation de la majesté de Dieu, sur sa grandeur ou sa puissance ; ce qui le percute, c’est que Dieu veille sur le monde, et que rien ne lui échappe. Alors que lui se désespère, que d’autres l’invitent à chercher des stratégies de repli, il reprend conscience que Dieu est juste, et que sa justice s’appliquera.

Dans le psaume, cela prend la forme d’un châtiment violent sur les agresseurs, les ennemis – sur qui s’abattent toutes les catastrophes, dans une ambiance assez proche de la destruction de Sodome et Gomorrhe. Ce n’est pas forcément notre doctrine préférée ou la plus politiquement correcte (on aimerait chanter : « on ira tous au paradis… »), mais David affirme – non, il appelle de ses vœux, il réclame – la réalité d’un jugement. Derrière ce jugement qui peut nous gêner aujourd’hui et paraître peu aimant, il y a une revendication légitime : que justice soit faite. Que le mal soit stoppé – bien plus, éradiqué, rejeté, déraciné.

David prend courage en se rappelant que Dieu applique ce qui est juste – en stoppant les injustes, mais aussi en veillant sur les justes. Le regard que porte Dieu sur les justes signifie son attention, et son implication. Il ne regarde pas de loin, comme un flâneur indifférent, mais il est attentif, il scrute, il anticipe – pour prendre une image locale, pensez aux fans de rugby qui ont regardé le match Pays de Galles-France vendredi soir : ils étaient tendus, sur le bord de leur siège, attentifs à chaque détail, prêts à se réjouir ou à se lamenter selon l’action… Dieu scrute avec toute son attention les justes.

Nul doute que David se place lui-même parmi les justes… Mais c’est embarrassant ! Les « justes » reviennent souvent dans les psaumes, et on peut avoir du mal à se l’appliquer à soi directement. Qui peut dire : moi, je suis juste devant Dieu ? je mérite son soutien, son secours ? Par « juste », David évoque ceux qui s’attachent à Dieu, qui recherchent sa justice et se détournent du mal. Mais il est conscient de ne pas être irréprochable. Sans le savoir, il pointe vers le seul vrai « juste », Jésus, Dieu lui-même fait homme – innocent, parfait, droit, prophète de vérité, militant d’équité. Un juste qui nous a justifiés, qui nous a rendus justes, malgré nos injustices, en les portant sur la croix – il nous dépouille de notre honte pour nous recouvrir de sa justice. En lui, nous pouvons approcher Dieu et dire : « je suis juste… en Christ ! »

Du coup, depuis la venue du Christ, on n’écrirait peut-être pas le psaume exactement pareil… On demanderait la justice, oui, l’arrêt du mal, oui, la protection des justes, oui, mais peut-être pas la destruction des méchants – car nous sommes trop conscients que notre propre cœur est lui aussi gangréné… L’imprécation face aux méchants se transforme plutôt en intercession, pour que Dieu délivre l’autre du mal, même du mal dont il est coupable.

David est donc profondément encouragé par la présence du Dieu juste, devant qui rien ne passe inaperçu, et qui appliquera sa justice. Dieu veille sur les justes, il aime ce qui est juste, et ceux qui sont justes (ou justifiés) reçoivent cette promesse : ils verront Dieu face à face. C’est vrai que c’est réconfortant, quand vous êtes menacé, rejeté, victime, de savoir que Dieu, lui, vous voit, vous accorde de la valeur, et qu’il vous garde une place dans son cercle d’intimes. David voit plus loin que l’épreuve, il relève la tête pour contempler l’horizon : Dieu règne, le mal n’aura pas le dernier mot, et sa justice vient.

 

Mais David ne nous dit pas ce que ça veut dire, concrètement, de se confier à Dieu dans l’épreuve. Il l’affirme, mais il ne le décrit pas. La question « que peut faire le juste ? » semble rester sans réponse. Pourtant, vu l’atmosphère du psaume, deux pistes se dégagent :

1/ ne pas baisser les bras, mais persévérer. La fuite (pas forcément géographique, je le rappelle) s’oppose au fait de rester, de tenir, voire de résister. Cela peut prendre différentes formes : rester sur-place, ou partir mais agir de loin – dans le cas d’un conflit p. ex. ; ou rester engagé, se mobiliser, dans le cadre d’une situation qui nous décourage.

2/ L’insistance de David sur la justice – justice de Dieu, justice rendue, justice de ceux qui s’attachent à Dieu. Si Dieu aime ce qui est juste, et pas seulement ceux qui ont été justifiés, n’y a-t-il pas un appel implicite à agir avec justice en particulier quand nous sommes découragés ? Le découragement peut en effet donner envie de baisser les bras, de fuir, ou bien d’imiter ceux qui aiment le mal, d’utiliser leurs armes, par pragmatisme ou par colère.

Lorsque, face au découragement, Dieu nous invite à nous réfugier en lui, c’est à la fois pour nous rassurer et pour nous ressourcer, afin que nous puissions trouver la force de faire ce qui est juste à ce moment-là, de suivre ce chemin de justice que Dieu aime tant – et sur lequel il promet de nous accompagner.

Regarder à la croix du Christ nous conforte dans cette assurance que David avait : elle nous rappelle qu’en Jésus, Dieu s’est fait proche de nous, qu’il a porté nos blessures et nos culpabilités, pour nous en délivrer un jour. Il est mort, mais il est ressuscité, et il a rejoint le Père à côté de qui il règne aujourd’hui. Sa résurrection, c’est le socle inébranlable de notre espérance : il est vivant, il règne, et nous attendons son retour, pour qu’il établisse partout sa justice et sa paix.