image_pdfimage_print

Tous les articles par admin

Une communauté de grâce

Regarder la vidéo

1 Pierre 4.7-11
7 La fin de toutes choses est proche. Vivez donc d’une manière raisonnable et gardez l’esprit éveillé afin de pouvoir prier. 8 Avant tout, aimez-vous ardemment les uns les autres, car l’amour apporte le pardon d’un grand nombre de péchés. 9 Soyez hospitaliers les uns à l’égard des autres, sans mauvaise humeur. 10 Que chacun de vous mette au service des autres le don particulier qu’il a reçu de Dieu. Vous serez ainsi de bons administrateurs de la grâce infiniment variée de Dieu. 11 Que la personne qui a le don de la parole transmette les paroles de Dieu ; que celle qui a le don de servir l’utilise avec la force que Dieu lui accorde : il faut qu’en toutes choses gloire soit rendue à Dieu, par Jésus Christ à qui appartiennent la gloire et la puissance pour toujours ! Amen.

Dans son épître, Pierre se préoccupe des difficultés pour les chrétiens de vivre dans un monde qui nous est parfois hostile, ou avec lequel au moins nous nous sentons en décalage. Il nous invite à rester fermes et déterminés malgré les pressions que nous pouvons subir, solidement ancrés sur le roc de notre foi en Christ. C’est un défi de tous les jours !

Dans ce contexte difficile, Pierre a déjà évoqué l’importance de la communauté, de l’Eglise, pour le chrétien, notamment avec l’image de l’Eglise comme un édifice constitué de pierres vivantes. Elle est un secours, une aide précieuse pour se construire.

Du coup, on pourrait croire à un schéma un peu simpliste : pour le chrétien, dans le monde c’est compliqué et dans l’Eglise c’est toujours facile. Vraiment ?

Quand on regarde de près les exhortations de Pierre pour l’Eglise, dans ce passage, ce n’est pas ce qu’il dit. Au premier abord, certes, on voit une exhortation à l’amour mutuel, à l’hospitalité, et à servir selon ses dons. On peut se dire que tout va pour le mieux dans la meilleure des Églises…

Sauf que c’est plus compliqué que ça… Pourquoi Pierre insiste-t-il sur l’importance absolue de l’amour ? Parce que, dit-il, il permet le pardon. Donc si on a besoin de pardon dans l’Eglise, c’est que tout n’est pas rose dans nos relations ! Quant à l’hospitalité, Pierre invite à la vivre “sans mauvaise humeur”… l’accueil généreux dans l’Eglise n’est donc pas aussi évident qu’on pourrait le penser. Moi qui croyais que tout le monde s’aimait dans l’Eglise et que c’était le paradis sur terre…

Une autre exhortation de Pierre permet alors d’introduire explicitement une notion centrale pour l’Eglise, celle de la grâce. C’est au verset 10 : “Que chacun de vous mette au service des autres le don particulier qu’il a reçu de Dieu. Vous serez ainsi de bons administrateurs de la grâce infiniment variée de Dieu.”

Et au regard des exhortations précédentes, n’est-ce pas cette notion de grâce qui est centrale ? Être de bons administrateurs de la grâce de Dieu, c’est non seulement mettre ses dons au service des autres, mais c’est aussi vivre le pardon et l’accueil. Ainsi, nous pouvons dire que l’Eglise est appelée à être une communauté de grâce.

Le pardon

“Avant tout, aimez-vous ardemment les uns les autres, car l’amour apporte le pardon d’un grand nombre de péchés.” (v.10)

Le premier impératif, un impératif absolu, c’est celui de l’amour. Et Pierre insiste. “Avant tout, aimez-vous ardemment les uns les autres…” C’est l’amour qu’il place au-dessus de tout le reste.

Quand il parle de l’amour, il ne verse pas dans le sentimentalisme. Il ne décrit pas l’Eglise comme le monde des Bisounours où tout le monde s’aime et se fait des câlins. Cet amour ardent les uns pour les autres a un but : permettre de vivre le pardon. Et le pardon, c’est l’expression ultime de la grâce. C’est un don gratuit. On n’achète pas le pardon, on ne le mérite pas non plus. On le donne et on le reçoit.

On pourrait traduire, plus littéralement, que l’amour “couvre un grand nombre de péchés”. La traduction est meilleure car, en réalité, on ne pardonne pas les péchés, on pardonne les personnes qui ont commis un péché. En les pardonnant, on ne tient plus compte de leur faute, on les couvre. On fait comme si elles n’existaient plus.

Petite parenthèse. Dans le “Notre Père”, quand on dit “Pardonne-nous nos offenses”, en fait, on devrait dire, si on traduisait plus littéralement, “remets-nous nos dettes.” (c’est la traduction de la Nouvelle Bible Segond, par exemple) Quand Dieu nous pardonne, il efface notre ardoise. Et c’est ce que nous sommes appelés à faire aussi quand nous pardonnons les autres.

Pour l’Eglise, être une communauté de grâce, c’est accepter d’être une communauté de pécheurs pardonnés. Nous avons tous reçu le pardon de Dieu. C’est notre dénominateur commun. Si nous sommes conscients d’être des pécheurs, même pardonnés, alors nous savons que potentiellement, nous pouvons attrister, choquer, blesser notre soeur ou notre frère, par nos paroles, notre attitude.

C’est normal, dans l’Eglise, qu’il nous arrive de décevoir, d’attrister voire de blesser notre frère ou notre soeur. Parce que nous sommes pécheurs. Je ne dis pas que c’est bien ou que nous ne devons pas faire des efforts pour progresser. Je dis juste que c’est normal. Ce qui n’est pas normal, c’est que nous ne sachions pas pardonner. Dieu, lui, nous a pardonnés…

Si l’Eglise est une communauté de grâce, alors c’est une communauté où se manifestera le pardon. Et ce pardon commence dans une posture bienveillante envers les autres. Une communauté de grâce est patiente les uns envers les autres, elle refuse l’esprit de jugement et rejette la rancune.

 

L’accueil

“Soyez hospitaliers les uns à l’égard des autres, sans mauvaise humeur.” (v.9)

C’est intéressant ici aussi de s’arrêter sur le terme grec original. Philoxenos, qu’on traduit habituellement par hospitalier, désigne celui qui est généreux pour ses invités. Littéralement, c’est celui qui aime (philo) l’étranger (xenos). L’étranger, c’est celui que nous accueillons chez nous… Le mot grec est, d’une certaine façon, l’inverse de xénophobe, celui qui a peur ou qui rejette l’étranger !

Ce qui est visé par Pierre dans son exhortation, c’est l’accueil généreux, et en particulier l’accueil de celui qui nous est étranger. C’est pour cela que Pierre précise qu’il s’agit de le faire “sans mauvaise humeur”. Simplement parce que ça demande un effort supplémentaire d’accueillir celui qui est différent, qui ne me ressemble pas.

Exercer l’hospitalité, c’est accueillir chez soi. Quand vous êtes invités chez quelqu’un pour la première fois, que faites-vous ? En tout cas moi, je regarde comment est aménagé la maison ou l’appartement, ce qui est accroché aux murs, ce qu’il y a sur les étagères… et vous pouvez découvrir plein de choses sur les gens. Parce qu’en allant chez eux, vous entrez un peu dans leur intimité. Quand on accueille quelqu’un chez soi, on s’ouvre, on s’expose à celui qu’on invite. C’est bien une attitude qui relève de la grâce.

L’impératif de l’accueil généreux se manifeste, bien-sûr, quand on exerce l’hospitalité au sens premier, en invitant par exemple les gens à manger à la maison. Mais, plus largement, il concerne notre attitude d’ouverture à l’autre qui est différent. Parce qu’il est tout à fait possible de rester des étrangers les uns aux autres dans une Église. On peut se fréquenter sans se connaître, se parler sans s’accueillir.

Le service

“Que chacun de vous mette au service des autres le don particulier qu’il a reçu de Dieu. Vous serez ainsi de bons administrateurs de la grâce infiniment variée de Dieu.’ (v.10)

Nous en venons, enfin, à cet appel à être de bons administrateurs de la grâce de Dieu, en mettant au service des autres ce que nous avons reçu de Dieu. Ici, la grâce est mentionnée explicitement. Et même deux fois puisque le “don reçu de Dieu” traduit le terme charisma qui vient de charis, la grâce.

Le choix des mots est important. L’exhortation s’adresse à chacun. Personne n’a été oublié par Dieu. A nous de le reconnaître en bons administrateurs des dons de Dieu, pour la communauté. Notez l’insistance de Pierre sur la grâce “infiniment variée, ou si diverse, de Dieu”.

Ne cherchez pas dans une liste prédéfinie de dons lequel Dieu vous aurait réservé, avec cette question fébrile : “quel est mon don ?” J’avoue que je suis assez perplexe face à ces tests qui vous permettraient de savoir LE don que Dieu vous a donné. Je trouve que ça fait entrer les chrétiens dans des catégories, avec ceux qui ont tel don ou tel autre… Et si vous ne rentrez pas dans les cases, alors vous n’avez pas de don ?

D’ailleurs, Pierre ne fait pas de liste. Au verset 11, il est très général. Littéralement, il écrit : “Si quelqu’un parle, que ce soit pour transmettre les paroles de Dieu ; si quelqu’un sert, que ce soit avec la force que Dieu accorde…” Parler ou servir, ça laisse un très large éventail de possibilités !

Ce que Pierre veut dire ici, c’est que chacun a reçu de Dieu quelque chose qu’il peut mettre au service des autres. Chacun peut être utile à la communauté.

Une communauté de grâce, c’est une communauté de serviteurs, où chacun peut être utile à tous. Ce qui implique d’être prêt à offrir aux autres ce que nous avons reçu de Dieu, mais aussi d’être prêt à recevoir des autres ce que Dieu leur a donné.

Conclusion

Qu’on le veuille ou non, une communauté de pécheurs pardonnés ne peut qu’être une communauté de grâce, dont les membres sont tous au bénéfice de la grâce de Dieu. Mais cette même grâce caractérise-t-elle nos relations au sein de l’Eglise ? La grâce reçue de Dieu se transforme-t-elle en grâce les uns pour les autres ? C’est le défi que Pierre nous lance… Sommes-nous prêts à le relever, avec l’aide de Dieu ?

Si nous voulons y arriver, gardons à l’esprit ces trois mots-clés, prenons-les comme trois mots d’ordre pour chacun de nous, trois manifestations concrètes de la grâce dans nos relations : le pardon, l’accueil et le service.

Jésus, Noé et nous…

 Regarder la vidéo

Nous poursuivons notre lecture continue de la première épître de Pierre. Je lirai d’abord les versets 8-17 du chapitre 3, sans vraiment les commenter. Les exhortations qu’on y trouve sont dans la lignée du début de l’épître. Pierre y évoque la condition des croyants, au milieu d’une société qui leur est parfois hostile. Être fidèle au Christ dans un tel contexte n’est pas facile, et peut conduire à des souffrances.

1 Pierre 3.8-17
8 Enfin, ayez tous les mêmes dispositions d’esprit et les mêmes sentiments ; aimez-vous comme des frères et des sœurs, avec affection, soyez bienveillants et humbles les uns à l’égard des autres. 9 Ne rendez pas le mal pour le mal, ni l’insulte pour l’insulte. Au contraire, réagissez en bénissant, car c’est une bénédiction que Dieu a promis de vous accorder en héritage quand il vous a appelés. 10 En effet, voici ce qui est écrit :
« Celui qui veut aimer la vie et connaître des jours heureux,
qu’il se garde de médire, qu’il se garde de prononcer des paroles de ruse.
11 Qu’il se détourne du mal, qu’il pratique le bien
et qu’il recherche la paix avec persévérance.
12 Car le Seigneur a les yeux fixés sur les personnes qui sont justes,
prêt à écouter leurs prières ;
mais le Seigneur s’oppose à celles qui font le mal. »
13 Qui vous fera du mal si vous êtes pleins de zèle pour le bien ? 14 Même si vous aviez à souffrir parce que vous faites ce qui est juste, vous êtes heureux ! N’ayez aucune crainte des autres et ne vous laissez pas troubler. 15 Mais reconnaissez et honorez dans vos cœurs le Christ comme Seigneur. Tenez-vous toujours prêts à vous défendre face à tous ceux qui vous demandent de rendre compte de l’espérance qui est en vous. 16 Mais faites-le avec douceur et respect ! Ayez une conscience pure, afin que ceux qui insultent votre bonne conduite de chrétiens aient à rougir de leurs calomnies. 17 Car il vaut mieux souffrir en faisant le bien, si telle est la volonté de Dieu, plutôt qu’en faisant le mal.

Cette dernière affirmation est importante. Il ne faut pas rechercher l’opposition ni se réjouir des souffrances, il faut juste être conscient qu’elles peuvent se manifester lorsqu’on cherche à être fidèle à sa foi et avoir une vie cohérente avec ce que l’on croit. Mais ça ne doit pas nous décourager de faire le bien !

Mais lisons la suite, avec les derniers versets du chapitre, où Pierre va prendre de la hauteur théologique.

1 Pierre 3.18-22
18 En effet, le Christ lui-même a souffert à cause des péchés des humains, une fois pour toutes, lui l’innocent, pour des coupables, afin de vous amener à Dieu. Il a été mis à mort dans son corps humain, mais il a été rendu à la vie par l’Esprit saint. 19 Par la puissance de cet Esprit, il est même allé proclamer la bonne nouvelle aux esprits emprisonnés ; 20 ce sont ceux qui, autrefois, ont résisté à Dieu, quand celui-ci attendait avec patience, à l’époque où Noé construisait l’arche. Un petit nombre de personnes, huit en tout, sont entrées dans l’arche et ont été sauvées à travers l’eau. 21 Ces événements étaient l’image du baptême : celui-ci ne consiste pas à laver la saleté corporelle, mais à demander à Dieu une bonne conscience. Et c’est ainsi que vous êtes sauvés maintenant, vous aussi grâce à la résurrection de Jésus Christ ; 22 celui-ci est allé au ciel et il se tient à la droite de Dieu, où les anges et les autres autorités et puissances célestes lui sont soumis.
Pierre, dans ce passage, parle d’abord du Christ. Il évoque sa souffrance injuste, sa mort, lui l’innocent, pour des coupables. Il parle de sa résurrection et de sa proclamation de la bonne nouvelle “aux esprits emprisonnés”. Nous reparlerons de ce verset qui a donné lieu à de nombreux débats entre les exégètes et les théologiens… Et enfin il parle de son ascension. Désormais assis à la droite de Dieu, il règne sur toute autorité et toute puissance. Il s’agit donc pour Pierre, dans ce paragraphe, d’évoquer l’oeuvre de salut accomplie par le Christ, dans toute son ampleur.

Mais il parle aussi de Noé et du Déluge. De ce qui s’est passé alors, avec les contemporains du patriarche qui ont résisté à Dieu alors que Noé construisait l’arche, et Noé qui a été sauvé avec quelques-uns, les membres de sa famille, grâce à l’arche qu’il avait construite.

Enfin il parle aussi de nous, croyants, de notre lien au Christ. Les coupables pour lesquels il est mort, c’est nous ! Il parle aussi de notre baptême, qui exprime notre salut, grâce à la résurrection du Christ.

Et puis il entremêle ces trois fils. C’est ce qui fait la complexité de ce texte.
Les souffrances injustes du Christ renvoient à celle de Noé, seul juste au milieu d’une humanité rebelle, et aux nôtres, lorsque nous souffrons à cause de notre foi, dans un contexte hostile.
La puissance de la résurrection du Christ est la bonne nouvelle à proclamer, c’est vrai pour nous, à travers notre baptême, mais c’est vrai même pour ceux qui, au temps de Noé, résistaient à Dieu.

Nos souffrances, nos épreuves, nos difficultés de disciples du Christ aujourd’hui mais aussi notre foi et notre espérance s’inscrivent donc dans ce grand mouvement de salut, pleinement accompli par le Christ, mais déjà annoncé avec Noé. Nous sommes en bonne compagnie !

Jésus-Christ

C’est lui qui est au centre de ce passage de l’épître de Pierre : au cœur de notre foi, il y a la personne et l’oeuvre de Jésus-Christ ! On pourrait dire qu’il est le centre de gravité de l’histoire du salut. Tout tourne autour de lui.

Ses souffrances font échos à nos souffrances et la puissance de sa résurrection est notre espérance. C’est une bonne nouvelle à proclamer à tous. Même aux “esprits en prison” mentionnés au verset 19 ! Retenons simplement ici, de ce texte difficile, que cette bonne nouvelle est non seulement pour nous qui croyons aujourd’hui, pour ceux qui sont venus après Jésus… mais aussi pour ceux qui l’ont précédé, par exemple au temps de Noé. Il faut que cette bonne nouvelle soit proclamée à tous.

C’est bien d’ailleurs ce qui se manifeste avec éclat le jour de Pentecôte où l’Esprit saisit les disciples réunis pour qu’ils proclament dans toutes les langues les merveilles de Dieu. Cette bonne nouvelle atteint les quatre coins de la terre, et résonne à travers les siècles.

Jésus-Christ est le centre de gravité de l’histoire du salut. Tout tourne autour de sa personne et de son oeuvre. Partout et en tout temps. Aujourd’hui, hier et pour l’éternité.

Noé

Associé au personnage de Noé, il y a le motif du Déluge, qui évoque le jugement de Dieu face à la révolte des humains.

Le récit biblique en dit finalement assez peu sur le personnage de Noé. Mais il apparaît comme une figure du juste fidèle, quitte à se retrouver seul contre tous. La majorité n’a pas forcément raison… et parfois il faut être prêt à nager à contre-courant. C’est le cas de le dire pour Noé…

Noé a été fidèle à Dieu jusqu’au bout. Même seul face à tous les autres qui se moquaient de lui et ne prenaient pas au sérieux les avertissements divins. C’est en effet en particulier sur l’époque où Noé construisait l’arche que Pierre s’arrête (v.20). Avant le Déluge. Alors que le fait de construire un tel navire, à sec, pouvait sembler une folie…

Noé est aussi une figure de l’humanité sauvée. Il a été épargné, lui et sa famille. Grâce à lui, l’humanité n’a pas été anéantie. Noé devient ainsi porteur d’une promesse, que Pierre rattache au baptême pour les croyants. C’est la promesse du salut.

Et nous…

Jésus-Christ, Noé… et nous ! Nous sommes sauvés par le Christ et, d’une certaine façon, nous sommes embarqués avec Noé.

Sauvés par le Christ

Même si Pierre mentionne ici le baptême, ce n’est pas lui qui sauve… c’est la résurrection du Christ, c’est-à-dire son œuvre accomplie. Le baptême est un témoignage, un engagement, en réponse à l’œuvre accomplie par le Christ, et en réponse à son œuvre en nous.

Jésus-Christ doit être le centre de gravité de notre vie. Tout doit tourner autour de lui. Ça ne doit pas faire de nous des “grenouilles de bénitier” ou des super-spirituels qui n’ont que des versets bibliques à la bouche.

En physique, le centre de gravité, c’est le point de concentration des différentes forces qui permet à un corps de se tenir en équilibre. Avoir Jésus-Christ comme centre de gravité de notre vie, c’est trouver en lui l’équilibre, la stabilité, la plénitude, tous rendus possibles par sa grâce qui pardonne et son Esprit qui vivifie.

Si Jésus-Christ est le centre de gravité de notre vie, alors tous les aspects de notre vie pointeront vers lui, d’une manière ou d’une autre, parfois de manière évidente, parfois de manière discrète mais réelle.

Embarqués avec Noé

Nous sommes aussi, d’une certaine façon, embarqués avec Noé. Il nous emmène avec lui dans son arche, si nous le suivons dans son exemple de fidélité. En fait, nous ne sommes pas embarqués seulement avec Noé mais avec tous les autres croyants, par le baptême que nous partageons, par l’engagement de foi personnel qu’il représente.

Le croyant n’est pas seul dans sa lutte, il ne marche pas, ou il ne navigue pas, seul. Il y a, évidemment, le Christ qui l’accompagne par son Esprit. Mais il y a aussi les autres croyants. Tous ceux qui nous ont précédé et nous montrent l’exemple. Tous ceux qui nous accompagnent sur la route, aujourd’hui. C’est pourquoi, même peu nombreuse ou fragile, l’Eglise, la communauté, est essentielle à notre marche chrétienne.

C’est par elle que nous sommes encouragés à la persévérance, à la fidélité jusqu’au bout, quelles que soient les circonstances, quelle que soit l’opposition rencontrée.

Conclusion

Dans ce paragraphe foisonnant, Pierre veut évoquer toute l’ampleur de l’œuvre accomplie par Jésus-Christ, par sa vie, sa mort, sa résurrection, une œuvre qui traverse les siècles et atteint tous les humains, d’hier, d’aujourd’hui et de demain.

Prendre conscience de l’ampleur de l’œuvre du Christ, c’est aussi prendre conscience de tout son potentiel dans notre vie. C’est une formidable source d’espérance, une promesse qui nous accompagne et nous aide à affronter les épreuves et les difficultés.

En effet, la même puissance de l’Esprit de vie qui a ressuscité Jésus-Christ d’entre les morts vient faire sa demeure en nous, par la foi. C’est la promesse extraordinaire de Pentecôte. Alors non, nous n’aurons pas peur, quelle que soit l’adversité, car il vit en nous par son Esprit, celui qui “est allé au ciel et qui se tient à la droite de Dieu, où les anges et les autres autorités et puissances célestes lui sont soumis.”

Immigrés sur terre et citoyens exemplaires

Regarder la vidéo de la prédication.

1 Pierre 2.11-17
11 Je vous y encourage, très chers amis, vous qui êtes des immigrés, des gens de passage sur cette terre : tenez-vous à l’écart des penchants mauvais qui font la guerre à votre être. 12 Ayez une bonne conduite parmi les païens ; ainsi, même s’ils vous calomnient en vous traitant de malfaiteurs, ils seront obligés de reconnaître le bien que vous faites et de remercier Dieu le jour où il viendra.
13 Soyez soumis, à cause du Seigneur, à toute autorité humaine : à l’empereur, qui a le pouvoir suprême, 14 et aux gouverneurs, envoyés par lui pour punir les malfaiteurs et pour louer ceux qui font le bien. 15 En effet, ce que Dieu veut, c’est qu’en pratiquant le bien, vous réduisiez au silence les gens ignorants et stupides. 16 Conduisez-vous comme des personnes libres ; cependant, n’utilisez pas votre liberté comme un voile pour couvrir la malveillance, agissez plutôt comme des personnes qui sont au service de Dieu. 17 Respectez tous les êtres humains, aimez vos frères et vos sœurs en la foi, reconnaissez l’autorité de Dieu, respectez donc aussi l’empereur.

Après avoir parlé du miracle de l’Eglise, et après avoir encouragé les croyants à s’émerveiller de faire partie de ce miracle de Dieu, Pierre évoque maintenant la condition des croyants dans le monde, leur attitude à avoir dans la société. Et il ne cache que ce n’est pas évident…

Selon Pierre, nous sommes appelés à être à la fois des gens de passage, des immigrés sur cette terre, et des citoyens exemplaires.Et on peut comprendre qu’il n’est pas facile de concilier les deux. Pourtant, c’est bien dans la tension entre les deux que se trouve l’équilibre à rechercher. Regardons donc ce que les deux termes de la tension impliquent…

 

Des immigrés sur terre

“Vous qui êtes des immigrés” ! Les deux termes grecs utilisés au verset 11 désignaient les résidents étrangers dans un pays. Il est donc tout à fait légitime de traduire ici par ’immigré. On parle beaucoup d’immigrés et d’immigration aujourd’hui, certains voulant y voir la cause de tous les maux de notre société, désignant les immigrés comme les boucs émissaires d’aujourd’hui. Et malheureusement, ça ne risque pas de s’arranger avec l’approche de l’élection présidentielle l’année prochaine…

Eh bien c’est ce que nous sommes, nous croyants ! Nous sommes des immigrés sur cette terre.

L’idée derrière cette expression, ici comme dans d’autres passages du Nouveau Testament, c’est de dire que, en tant que croyants, notre patrie spirituelle, c’est le Royaume de Dieu. Et ça fait de nous, d’une certaine façon, des étrangers sur cette terre. Nous sommes citoyen des cieux et immigrés sur terre. C’est aussi ce que Jésus disait à ses disciples lorsqu’il affirmait qu’ils étaient dans le monde sans être du monde…

Or la situation d’un immigré n’est pas confortable. Quand vous êtes immigré dans un pays, quand vous venez d’une autre culture, que vous avez une autre couleur de peau, que vous parlez une autre langue… c’est beaucoup plus difficile de se faire sa place dans la société. Vous devez non seulement apprendre une nouvelle culture, une nouvelle langue, etc. mais vous devez aussi faire face à la méfiance, la suspicion, la discrimination, voire le racisme. Et vous devez alors en faire plus que les autres pour y arriver… C’est une réalité !

Quand on se place d’un point de vue spirituel, tous les croyants sont des immigrés sur cette terre. Nous ressentons bien un décalage culturel et spirituel, et nous avons parfois le sentiment d’être comme des étrangers. Nous nous exposons à l’incompréhension, la suspicion voire le rejet de ceux qui se méfient de nous ou ne nous comprennent pas. Et ce n’est pas nouveau… voyez ce que Pierre dit à ses lecteurs, en parlant de calomnies qui cherchent à nuire.

Soit dit en passant, ça veut sans doute dire aussi que lorsque vous êtes “immigrés deux fois”, en tant qu’étranger et en tant que croyant, c’est encore plus difficile… C’est pourquoi je me dis que nous avons beaucoup à apprendre de nos frères et soeurs chrétiens issus d’autres cultures et qui sont immigrés ici, en France…

En tout cas, si nous voulons, en tant que croyant, trouver notre place dans la société, il faut peut-être aussi faire plus d’effort que les autres. C’est un peu ce que Pierre dit au verset 12 : “Ayez une bonne conduite parmi les païens ; ainsi, même s’ils vous calomnient en vous traitant de malfaiteurs, ils seront obligés de reconnaître le bien que vous faites et de remercier Dieu le jour où il viendra.” En d’autres termes, si on vous calomnie, si on vous dénigre et vous accuse injustement… continuez d’avoir une conduite irréprochable.

Et il faut peut-être en faire plus que les autres… C’est pourquoi certains refusent de le faire ou se découragent. Et on tombe dans le communautarisme et le séparatisme spirituel. On reste entre croyants, on se coupe du monde, on ne s’implique plus dans la société.

Et c’est un problème parce que, certes, nous sommes immigrés sur cette terre, mais nous sommes aussi appelés à être des citoyens exemplaires.

 

Des citoyens exemplaires

Quelles exhortations Pierre adresse-t-il à ses lecteurs ?

  • Veiller sur soi-même : “tenez-vous à l’écart des penchants mauvais qui font la guerre à votre être.” (v.11)
  • Veiller à sa conduite devant les autres : “Ayez une bonne conduite parmi les païens ; ainsi, même s’ils vous calomnient en vous traitant de malfaiteurs, ils seront obligés de reconnaître le bien que vous faites” (v.12)
  • Respecter les autorités en place : “Soyez soumis, à cause du Seigneur, à toute autorité humaine” (v.13)

Veiller sur soi-même

Je trouve intéressant que Pierre commence par cette exhortation. Si vous voulez avoir une conduite irréprochable, commencez par veiller sur vous-mêmes. Il y a déjà une lutte intime et personnelle à mener, celle de ces “penchants mauvais” qui nous font la guerre. Les versions traditionnelles traduisent plus littéralement par “les désirs de la chair”.

Dans le langage théologique du Nouveau Testament, la chair est ce qui, en nous, est opposé à Dieu. La Bible parle aussi de ce qui est corrompu par le péché. En fait, c’est la part d’ombre que nous avons tous au fond de nous, ce sont les aspirations mauvaises, les envies néfastes, les désirs parfois destructeurs contre lesquels nous avons à lutter. Ils sont différents pour chacun de nous, mais ils sont bien présents d’une manière ou d’une autre. Nous savons que nous avons tous nos luttes intimes. Veiller sur soi-même, c’est mener ce combat, avec l’aide du Saint-Esprit qui agit en nous, pour nous restaurer.

Veiller à sa conduite devant les autres

Mais il y a aussi une autre lutte à mener, celle de notre conduite devant les autres, sur laquelle aussi nous devons veiller. Les païens dont Pierre parle, ce sont les non-croyants. Il s’agit d’avoir un comportement irréprochable devant eux. Ceci dit, Pierre avertit ses lecteurs : ça n’empêchera pas les critiques et les calomnies… Il ne faut pas se faire d’illusion. Mais il faut persévérer.

Pour le dire de façon un peu triviale, la meilleure façon de clouer le bec à nos détracteurs, c’est d’avoir une conduite irréprochable. Pierre n’invite pas à se rebeller, à se défendre, à contredire les calomnies mais à continuer de faire le bien, à persévérer dans une bonne conduite.

En tant que croyant, notre objectif n’est pas de défendre notre réputation ou notre honneur mais de glorifier le Seigneur par notre comportement.

Respecter les autorités en place

Enfin s’il s’agissait de veiller à notre conduite dans nos relations sociales, il s’agit aussi pour le croyant d’être un citoyen irréprochable, d’être soumis, de respecter les autorités humaines. Pierre les nomme explicitement : dans le contexte de ses destinataires, il s’agissait de l’empereur et des gouverneurs. Il s’agit donc, en l’occurrence, d’un régime autoritaire et imposé par la force, avec des valeurs assez éloignées des valeurs bibliques, y compris avec un statut quasi divin accordé à l’empereur.

Ça ne veut pas dire qu’un croyant doit toujours dire oui et amen, sans réfléchir, à tout ce que décident ses responsables politiques. On voit dans le livre des Actes que les apôtres refusent d’obéir aux autorités juives qui leur demandent d’arrêter d’enseigner au nom de Jésus. Dans certains cas, il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes.

Mais il s’agit bien de respecter les personnes en charge de l’autorité, de se soumettre aux règles politiques et sociales de la société dans laquelle on vit… en un mot : être un citoyen irréprochable. Cela implique, plus largement, de prendre notre part, de manière constructive, pour le bien commun. Ou comme le disait le prophète Jérémie aux exilés à Babylone : “Cherchez à rendre prospère la ville où le Seigneur vous a fait exiler, et priez-le pour elle, car votre prospérité dépend de la sienne.” (Jérémie 29.7)

 

Conclusion

Il s’agit donc pour nous d’assumer la condition inconfortable d’immigré tout en cherchant à être des citoyens irréprochables, d’être conscients du décalage qui existe mais de jouer pleinement le jeu de la recherche du bien commun. Voilà le défi auquel nous devons faire face en tant que croyant.

Est-ce plus difficile aujourd’hui qu’hier ? Je ne sais pas… Ça a toujours été difficile. Ça l’était déjà au temps de l’apôtre Pierre ! Mais c’est un impératif auquel on ne peut pas couper. Car si nous ne vivons pas cette tension comme nécessaire, comment allons-nous pouvoir être témoin de notre espérance auprès de nos contemporains ?

Des pierres vivantes !

Regarder la vidéo

1 Pierre 2.4-10
4 Approchez-vous du Seigneur, la pierre vivante rejetée par les êtres humains, mais choisie et précieuse aux yeux de Dieu. 5 Laissez-vous bâtir, vous aussi, comme des pierres vivantes, pour construire un temple spirituel. Vous y formerez une communauté de prêtres appartenant à Dieu, vous lui offrirez des sacrifices spirituels, qu’il accueillera avec bienveillance par Jésus Christ. 6 Car il dit dans l’Écriture :
« Voici que je place en Sion une pierre d’angle ;
je l’ai choisie, elle est précieuse,
et celui qui met sa foi en elle ne sera jamais déçu. »
7 Cette pierre est d’une grande valeur pour vous, les croyants ; mais pour les incroyants, comme le dit l’Écriture :
« La pierre que les bâtisseurs ont rejetée
est devenue la pierre d’angle. »
8 Et ailleurs, il est dit encore :
« C’est une pierre qui fait trébucher,
un rocher qui fait tomber. »
Ces personnes trébuchent parce qu’elles refusent d’obéir à la parole de Dieu, et c’est ce qui devait leur arriver.
9 Mais vous, vous êtes la lignée choisie, la communauté royale de prêtres, la nation qui appartient à Dieu, le peuple qu’il a fait sien. Il vous a appelés à passer de l’obscurité à son admirable lumière, afin que vous alliez annoncer ses œuvres magnifiques. 10 Autrefois, vous n’étiez pas un peuple, maintenant vous êtes peuple de Dieu ; autrefois, vous étiez privés de bonté, mais maintenant la bonté de Dieu vous a été accordée.

Ce passage est très marqué par l’Ancien Testament.

  • On y trouve trois citations enchaînées (deux du prophète Esaïe, une d’un Psaume)
  • On y fait référence au temple, aux prêtres et aux sacrifices
  • On y fait aussi référence au peuple élu

En un mot, Pierre revisite des concepts propres à l’Ancien Testament pour les appliquer, d’une manière spirituelle et imagée, à l’ensemble des croyants. En Jésus-Christ, le temple est alors spirituel, tout comme le peuple, au sein duquel tous sont prêtres.

Pierre parle dans ce passage de l’Eglise. Mais on perçoit bien que dans le Nouveau Testament, l’Eglise n’est pas un bâtiment. Elle est une communauté faite d’hommes et de femmes attachés au Christ. Si elle est un bâtiment, ce n’est que de façon imagée, comme métaphore. Et les pierres qui constituent ce bâtiment sont des pierres vivantes !

 

Des pierres vivantes : le miracle de l’Eglise

Cette image de la pierre vivante est au coeur de ce passage. Attribuée à la fois au Christ, en tant que pierre d’angle, et à l’ensemble des croyants, appelés à être eux-mêmes les pierres vivantes qui forment le temple spirituel. J’aimerais m’arrêter ce matin sur cette image, bien étrange quand on y pense !

Si vous prenez une pierre, une grosse pierre comme celle qu’on trouverait dans un mur. C’est lourd, ça ne bouge pas, ça ne grandit pas, ça ne parle pas… ça n’a rien de vivant ! Si vous prenez une plante, au moins, ça vit. Certes, vous n’allez pas entretenir une longue conversation avec elle mais elle va pousser, donner des fleurs. Par contre, il n’y a rien de moins vivant qu’une pierre !

C’est pourtant l’image que l’apôtre utilise. Des pierres vivantes…

Ca me fait penser à cette parole de Jean le baptiste, dans l’Evangile de Matthieu, qui interpelle les chefs religieux venant se faire baptiser :

Matthieu 3.8-9
Montrez par des actes que vous avez changé de vie et ne pensez pas qu’il suffit de dire en vous-mêmes : “Abraham est notre père !” Car je vous dis que Dieu peut utiliser les pierres que voici pour en faire des enfants d’Abraham !

Ou celles de Jésus, lors de son entrée triomphale à Jérusalem, qui dit aux Pharisiens qui veulent faire taire la foule qui l’acclame :

Luc 19.40
Jésus répondit : « Je vous le déclare, s’ils se taisent, les pierres crieront ! »

Dieu peut donc même rendre des pierres vivantes… Et c’est, d’une certaine façon, le miracle de l’Eglise. Je ne parle pas ici ni des édifices que nous construisons ni des institutions et des confessions que notre histoire a fait naître. Je parle de cette réalité spirituelle de l’Eglise de Jésus-Christ, qui dépasse toutes les institutions et les structures humaines. Cette Église qu’on qualifie d’universelle et qui unit mystérieusement tous les croyants où qu’ils se trouvent sur la surface de la terre, et qui les unit même, qu’ils soient vivants ici-bas ou morts, désormais auprès de Dieu. Un miracle où une communauté locale est une part certes infime mais bien réelle d’un édifice spirituel qui traverse les âges.

Si vous êtes croyants, alors vous êtes une pierre vivante faisant partie de cet édifice ! Vous êtes liés à LA pierre vivante du Christ, mort et ressuscité. Liés à toutes les pierres vivantes, de génération en génération, depuis le premier cercle des disciples de Jésus. C’est extraordinaire, non ?

Il y a beaucoup à redire sur les Églises en tant qu’institution humaine, avec leurs zones d’ombre, leurs failles, leurs imperfections, leurs dysfonctionnements parfois. Il ne faut pas se voiler la face… Mais l’Eglise, c’est aussi, et c’est même d’abord, l’oeuvre de Dieu, cet édifice spirituel qui traverse les âges. Malgré nos infidélités…

Si cet édifice spirituel qu’est l’Eglise traverse les âges, il transcende aussi largement nos réalités locales. Il s’agit toujours, pour nous, d’élargir notre regard. Nous devons lutter contre une vision étriquée de l’Eglise. Prenons conscience de l’ensemble de l’édifice spirituel. Refusons l’enfermement sur soi et le sectarisme qui nous fait croire que nous serions le seul édifice véritable.

Bref, tout en restant humble et lucide, gardons intacte notre capacité d’émerveillement devant cet édifice fait de pierres vivantes, animées par l’Esprit de Dieu, s’élevant à la gloire de Dieu !

 

Entretenir la vie… et le miracle

Comment faire pour maintenir ce miracle et pleinement le vivre ? Je propose deux éléments de réponse.

Nous approcher du Seigneur, la pierre vivante

En premier lieu, n’oublions pas l’exhortation qui ouvre notre passage : “Approchez-vous du Seigneur, la pierre vivante rejetée par les êtres humains, mais choisie et précieuse aux yeux de Dieu.” (v.4)

Une Église peut avoir les prédicateurs les plus éloquents, les musiciens et chanteurs les plus doués, l’assemblée la plus nombreuse, la confession de foi la plus orthodoxe, la liturgie la plus biblique, les locaux les plus somptueux… si la personne de Jésus-Christ n’est pas au centre, si ce n’est pas lui qui est la pierre d’angle, tout l’édifice est fragilisé.

C’est de lui que vient la vie. Ce n’est que parce qu’il est LA pierre vivante que nous pouvons être des pierres vivantes. Ça veut dire que tous les projets d’une Église et toutes ses stratégies n’ont un sens que s’ils sont nourris d’une relation, personnelle et communautaire, avec le Christ vivant. Il ne faut jamais perdre de vue cette perspective incontournable.

Le but ultime d’une Église, ce n’est pas de remplir ses chaises le dimanche et de faire exploser son budget. C’est de glorifier le Seigneur, de vivre et manifester l’amour de Dieu. Ou, pour utiliser la métaphore de notre passage : c’est d’offrir à Dieu des sacrifices spirituels qu’il accueillera avec bienveillance.

Laisser de la place pour la vie !

Si les pierres sont vivantes, ça veut dire qu’il ne faut pas imaginer des cailloux inertes, ou des pierres à jamais fixées dans un mur. Une pierre vivante ne va pas rester bien sagement à sa place sans bouger. La vie, c’est le mouvement !

Mais comme elle fait partie d’un édifice, si elle n’en fait qu’à sa tête, et surtout si toutes les pierres n’en font qu’à leur tête, l’édifice s’écroulera. Il s’agit d’être en mouvement mais avec les autres, de façon cohérente et coordonnée.

Tout le défi d’un édifice vivant, constitué de pierres vivantes, c’est d’avancer ensemble, de garder la tension féconde entre la vie et la cohésion. Si on veut tout contrôler, tout maîtriser, assurer une stabilité absolue… il n’y aura plus de mouvement, et plus de vie. Si on laisse chacun faire ce qu’il veut, et surtout si chacun ne se soucie que de soi-même, de ses propres attentes, ses besoins, ses envies, sans considérer ceux des autres… alors l’édifice va se désagréger et il n’y aura plus que des pierres dispersées.

 

Conclusion

Dans notre texte, l’apôtre Pierre nous invite à considérer l’Eglise comme un miracle, celui d’un édifice spirituel, édifié par Dieu, qui traverse les âges, et qui est formé de pierres vivantes. Qui sont ces pierres vivantes ? C’est vous et moi. Et ce sont tous ceux qui, ici ou ailleurs, reconnaissent en Jésus-Christ le Seigneur. Mesurons-nous vraiment quelle chance nous avons de faire partie de ce miracle ?

Mais ce miracle est fragile si les pierres vivantes que nous sommes se coupent de la source de notre vie, le Christ vivant ! Il est fragile si nous ne laissons pas la vie de Dieu agir à travers chacune et chacun, et si nous voulons la maîtriser ou la contraindre par notre étroitesse d’esprit.

Laissons la vie de Dieu faire de l’édifice que nous formons un temple à sa gloire, qui témoigne de la bonté de Dieu pour tous.

Une espérance vivante

Regarder le vidéo
1 Pierre 1.1-12
1 De la part de Pierre, apôtre de Jésus Christ.
À ceux que Dieu a choisis et qui vivent en immigrés, dispersés dans les provinces du Pont, de la Galatie, de la Cappadoce, de l’Asie et de la Bithynie. 2 Dieu, le Père, vous a choisis d’avance selon un projet qui est le sien ; il vous fait vivre pour Dieu, grâce à l’Esprit saint, pour que vous obéissiez à Jésus Christ et que vous soyez purifiés par le sang qu’il a versé.
Que la grâce et la paix vous soient données en abondance !
3 Bénissons Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ ! Dans sa grande bonté, il nous a fait naître à une vie nouvelle, en ressuscitant Jésus Christ d’entre les morts. C’est pour que nous ayons une espérance vivante, 4 en attendant l’héritage que Dieu réserve aux siens. Cet héritage ne peut être ni détruit ni sali et il ne peut pas perdre son éclat. Dieu vous le réserve dans les cieux, 5 à vous que sa puissance garde par la foi, en vue du salut prêt à être révélé au moment de la fin.
6 Débordez de joie, même s’il faut que, maintenant, vous soyez attristés pour un peu de temps par des épreuves de toute sorte. 7 L’or lui-même, qui pourrait être détruit, est pourtant éprouvé par le feu ; de même votre foi, beaucoup plus précieuse que l’or, est mise à l’épreuve afin de prouver sa valeur. C’est ainsi que vous recevrez louange, gloire et honneur quand Jésus Christ se révèlera. 8 Vous l’aimez, même sans l’avoir vu ; vous mettez votre foi en lui, même sans le voir encore ; c’est pourquoi vous débordez d’une joie inexprimable, déjà glorieuse, 9 car vous atteignez le but de votre foi : le salut de votre être !
10 Les prophètes ont fait des recherches et des études sérieuses au sujet de ce salut, et ils ont prophétisé à propos du don que Dieu avait préparé pour vous. 11 Ils s’efforçaient de découvrir à quelle époque, et à quelles circonstances, se rapportaient les indications données par l’Esprit du Christ ; car cet Esprit, présent en eux, annonçait d’avance les souffrances que le Christ devait subir et la gloire qui serait la sienne ensuite. 12 Dieu révéla aux prophètes que ce n’était pas pour eux-mêmes mais pour vous qu’ils assuraient ce service. Car ces choses vous ont été annoncées maintenant par les prédicateurs de la bonne nouvelle. Ils en ont parlé avec la puissance de l’Esprit saint envoyé des cieux ; les anges eux-mêmes désirent y plonger leur regard.
La première épître de Pierre est adressée à une communauté chrétienne dispersée en Asie Mineure. Les différentes régions mentionnées au début de la lettre évoquent probablement le parcours effectué par le porteur de la lettre qui allait sans doute d’Église en Église, lire une épître qui n’était pas liée à une communauté précise mais qui revêt un caractère assez général. C’est du coup un livre biblique propre à édifier et encourager les croyants, hier comme aujourd’hui. particulièrement quand ils vivent dans un contexte peu favorable, voire hostile. C’était visiblement le cas des premiers destinataires de cette épître.

Après les formules d’usage, l’épître entre dans le vif du sujet, dès le verset 3. Pierre commence par parler d’espérance. Et il le fait avec une formule propre à cette épître, en parlant d’une “espérance vivante”. C’est sur cette belle formule que je vous propose de nous arrêter ce matin.

Notre espérance est vivante parce qu’elle naît de la vie que Dieu communique.

Il y a d’abord une raison théologique pour que Pierre parle d’espérance vivante : elle est directement liée à la résurrection du Christ, et à la vie nouvelle qui en découle : “Dans sa grande bonté, il nous a fait naître à une vie nouvelle, en ressuscitant Jésus Christ d’entre les morts.” (v.3)

Notre espérance vivante trouve son origine dans la résurrection du Christ et elle prend racine dans la vie nouvelle à laquelle Dieu nous fait naître.

Notre espérance n’est pas seulement un espoir pour l’avenir, ou même une promesse pour l’au-delà. Elle trouve son origine dans un événement du passé, un fait historique : la résurrection du Christ d’entre les morts, que nous avons encore proclamée dimanche dernier à Pâques.

Cet événement est unique, inouï, inimaginable. C’est le triomphe de la vie sur la mort ! Un séisme dont l’onde de choc se répand jusqu’à aujourd’hui, et pour l’éternité. La vie de Dieu, plus forte que tout, est la source de notre espérance vivante. Mais sans la résurrection du Christ, quelle espérance pourrions-nous avoir ?

Cette même espérance prend racine en nous par la vie nouvelle à laquelle Dieu nous fait naître. Cette vie nouvelle survient lorsque l’onde de choc de la résurrection du Christ nous atteint. C’est une expérience propre à chacun. Elle est liée pour certains à un moment précis de leur vie, à une expérience particulière, si bien qu’ils peuvent la dater, parfois à l’heure ou à la minute près. Pour d’autres, elle est plus diffuse, liée à une période de leur vie, à une prise de conscience progressive.

Peu importe le temps de la gestation spirituelle, peu importe la façon dont cette vie de Dieu nous atteint… ce qui compte, c’est que la naissance ait lieu ! Et le signe qu’elle a bien eu lieu est la présence de cette espérance vivante qui nous anime.

Notre espérance est vivante parce qu’elle est en mouvement, elle nous met en marche vers une promesse à venir.

Si elle prend bien racine dans l’histoire de l’humanité et dans notre propre histoire personnelle, l’espérance vivante dont parle Pierre se conjugue aussi au futur. Elle nous met dans l’attente d’une promesse à venir. Pour l’exprimer, Pierre utilise ici une métaphore, celle de l’héritage que Dieu réserve aux siens : “Cet héritage ne peut être ni détruit ni sali et il ne peut pas perdre son éclat. Dieu vous le réserve dans les cieux, à vous que sa puissance garde par la foi, en vue du salut prêt à être révélé au moment de la fin.” (v.4)

Cette image de l’héritage est parlante :

  • Il y a d’abord la vie nouvelle par la résurrection du Christ qui, en quelque sorte, nous donne un nom nouveau, un nom inscrit sur le testament : désormais, grâce au Christ, nous avons droit à l’héritage !
  • Il y a ensuite la garantie que cet héritage restera intact, que rien ne peut l’atteindre. Il est en sécurité, il nous est réservé et jamais Dieu ne nous déshéritera !
  • Et puis, entre les deux, il y a l’affirmation de Dieu qui nous garde, aujourd’hui, par sa puissance (ce n’est pas rien !), jusqu’au jour où nous recevrons l’héritage.

Quel est donc cet héritage ? C’est le salut pleinement révélé le jour de la révélation du Christ, pleinement accompli dans le Royaume qui vient. Avouons-le, il y a encore une part de mystère pour nous. Comment imaginer ce qui nous attend dans l’éternité avec Dieu ? Alors pour souligner la valeur inestimable de ce salut, Pierre évoque les recherches et les études des prophètes désirant ardemment connaître les merveilles que Dieu prévoyait. Et il va jusqu’à dire que “les anges eux-mêmes désirent y plonger leur regard” (v.12) Pourtant, en matière de merveilles de Dieu, ils sont bien placés !

J’ai hâte, à mon tour, de découvrir cet héritage qui nous attend… Pas vous ?

Notre espérance est vivante parce qu’elle nous rejoint dans notre vie quotidienne.

Lorsque Pierre, dans notre texte, rattache l’espérance vivante dont il parle à la vie quotidienne des croyants, ça donne un cocktail étonnant, où se côtoient joie et épreuves. Mais il ne faut pas s’en étonner. Si tout allait toujours comme sur des roulettes, si nous ne connaissions ni épreuve, ni échec, ni souffrance, ni adversité… à quoi servirait l’espérance ? Et s’il n’y avait aucune occasion de joie dans la vie chrétienne, alors pourquoi espérer et croire ?

L’espérance chrétienne est ce qui permet la balance entre les joies et les épreuves de nos vies. C’est alors qu’elle est vivante, parce qu’elle imprègne notre vie, dans son quotidien.

Mais cette espérance est morte quand elle n’est que théorique, abstraite. Quand elle est, certes, confessée dans nos déclarations de foi et nos cantiques, mais qu’elle ne nous rejoint pas dans notre quotidien, dans les temps de joie comme d’épreuve.

Elle est vivante quand elle nous fait goûter les joies et les bonheurs de la vie comme un avant-goût de l’héritage que Dieu nous réserve. Elle est aussi vivante quand elle nous donne la persévérance de traverser l’épreuve, la force de surmonter l’adversité, la confiance face à l’inconnu.

Quand la vie de Dieu imprègne notre vie, alors notre espérance est vivante !

 

Conclusion

Comment ne pas parler du besoin d’espérance dans le contexte que nous connaissons depuis une année, avec la crise du Covid et son climat anxiogène, qui fait planer comme un parfum de fin du monde ?

Or, on a parfois l’impression que pour certains croyants, leur espérance, c’est la fin du monde. Ils ont l’air de se réjouir des catastrophes et des fléaux parce que c’est le signe que la fin est proche. Mais notre espérance, ce n’est pas la fin du monde ! C’est l’avènement d’un monde nouveau. C’est comme si nous disions que notre espérance c’était la mort… Non, c’est la résurrection !

Le Royaume de Dieu qui vient est déjà là, et nous sommes appelés à le manifester aujourd’hui, par notre amour, notre solidarité, notre bienveillance. C’est aussi cela avoir une espérance vivante. L’espérance n’est pas dans la résignation. Elle n’est pas non plus dans la peur et la suspicion.

Être porteur d’une espérance vivante, aujourd’hui, c’est manifester par notre vie que le meilleur est à venir, au-delà des incertitudes et des épreuves du moment, dans le Royaume de Dieu qui vient.