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Ruth, la moabite (3)

https://soundcloud.com/eel-toulouse/ruth-la-moabite-3

Résumé des épisodes précédents

Exilée dans le pays de Moab, Noémi voit mourir son mari, Elimélek, et ses deux fils. En situation de précarité, elle choisit alors de rentrer dans son pays, en Juda, en permettant à ses belles-filles moabites de refaire leur vie dans leur pays.

Mais l’une d’elles, Ruth, témoigne de sa fidélité et refuse de la quitter. Elle choisit de l’accompagner, restant attachée à elle et à Dieu.

En Juda, Ruth décide d’aller glaner des épis dans un champ afin de se nourrir, elle et sa belle-mère. Or, il se trouve que le champ dans lequel elle va appartient à Booz, un proche parent. Mais Ruth ne le sait pas.

Pour Noémi, ce n’est pas un hasard. C’est le Seigneur qui l’a conduite jusqu’à ce champ. Dans sa providence, Dieu s’est ainsi montré fidèle !

Lecture biblique : Ruth 3
Explication

Ruth n’est pas Israélite. Elle ne connaît pas toutes les lois et coutumes en Israël. Noémi va donc prendre les choses en main pour mettre à profit la situation. Ruth, quant à elle, fait confiance à sa belle-mère.

En permettant à Ruth d’aller glaner des épis dans le champs de Booz, Dieu a lui-même préparé les circonstances qui permettront à Ruth de refaire sa vie. Noémi saisit donc l’occasion qui se présente pour se montrer à son tour fidèle à Ruth et lui assurer un avenir heureux.

Elle donne donc ses instructions à sa belle-fille pour que celle-ci fasse comprendre à Booz qu’elle était prête à envisager de se marier. Mais les choses doivent se faire dans la discrétion et avec prudence. Le geste d’écarter la couverture et de se coucher au pied du proche parent, était suffisamment explicite. Surtout avec les paroles que Ruth dit à Booz lorsqu’il la surprend au milieu de la nuit : « C’est moi, Ruth. Protège-moi. En effet, tu es un proche parent et tu as la responsabilité de prendre soin de moi. »

Et, visiblement, il n’en espérait pas tant ! Il n’hésite pas une seconde… mais il veut faire les choses dans les règles. Il y a un autre parent, plus proche que lui d’Elimélek. C’est lui qui a la priorité. Il doit d’abord voir avec lui. Lorsque Ruth raconte à Noémi ce qui s’est passé, sa réponse est pleine de confiance. Elle n’a aucun doute sur le fait que Booz fera tout pour faire aboutir sa démarche : « Cet homme-là ne sera pas satisfait s’il ne règle pas cette affaire aujourd’hui. »

Application

Au cœur de ce chapitre, il y a l’application d’un commandement biblique sur la solidarité familiale en cas de veuvage. On pense en particulier au texte de Deutéronome 25.5-10, qu’il est intéressant de citer :

Moïse dit : Supposons ceci : Deux frères habitent ensemble, et l’un d’eux meurt sans avoir de fils. Sa veuve ne doit pas se remarier avec quelqu’un d’extérieur à la famille. Son beau-frère doit accomplir son devoir de beau-frère : il la prendra pour femme et il s’unira à elle. Alors on considérera le premier garçon qu’elle mettra au monde comme le fils de l’homme qui est mort. Ainsi, son nom continuera d’être porté en Israël. Si un homme ne veut pas prendre sa belle-sœur pour femme, cette femme se rendra au tribunal, devant les anciens. Elle dira : « Mon beau-frère ne veut pas accomplir envers moi son devoir de beau-frère. Il refuse de donner à son frère un fils qui continue de porter son nom en Israël. » Les anciens de la ville feront venir cet homme et ils parleront avec lui. S’il continue à refuser de prendre pour femme la veuve de son frère, celle-ci s’avancera vers lui devant les anciens. Elle lui enlèvera la sandale de son pied, elle lui crachera au visage et dira : « Voilà ce qu’on fait à un homme qui refuse de donner un fils à son frère ! » Ensuite, en Israël, on appellera la famille de cet homme « la famille de l’homme au pied nu ».

On peut relever deux éléments de surprise dans notre épisode :

  • Ce n’est pas Booz mais Noémi qui prend les choses en main pour accomplir ce commandement.
  • L’application du commandement est plus large et moins contraignant que dans le Deutéronome.

Noémi prend les choses en main

Le livre de Ruth a un petit côté féministe ! Ce sont les femmes qui montrent l’exemple et qui prennent les choses en main. Ruth l’a fait en faveur de sa belle-mère, Noémi lui rend ici la pareil.

Noémi n’a pas l’intention d’attendre que Booz se décide tout seul à exercer son devoir de solidarité familiale. Elle va forcer le destin et donner un petit coup de pouce à Booz, en mettant au point une stratégie. C’est la pichenette qui était nécessaire pour que Booz se lance.

D’ailleurs, il ne faudrait pas jeter la pierre trop vite à Booz. Une fois lancé, il s’empressera de régler l’affaire. Et on peut discerner au moins deux raisons pour lesquelles il n’a pas pris l’initiative dans cette affaire :
1° Booz était plus âgé que Ruth et ne voulait pas s’imposer à elle : « Que le SEIGNEUR te bénisse ! Tu n’as pas cherché l’amour des jeunes gens, riches ou pauvres. » (v.10)
2° Il n’était pas prioritaire pour exercer le devoir de rachat. Il y avait un autre parent, plus proche que lui d’Elimélek (v.12)

Il est intéressant de noter ce respect de la loi et des coutumes mais aussi ce respect de la personne de Ruth. Nous sommes dans un contexte culturel très patriarcal où le respect des femmes n’était pas forcément la préoccupation première… Booz est un homme de bien.

Enfin, je ne crois pas du tout qu’on soit en présence d’un mariage sous la contrainte pour Booz et Ruth. La façon dont les choses se passent laisse entendre qu’ils étaient sans doute consentants. Certes, ce n’est pas explicite… Mais les paroles de Ruth lorsqu’elle évoque Booz à sa belle-mère, le traitement de faveur que Booz accorde dès le début à Ruth et l’empressement avec lequel il règle cette affaire, tout laisse entendre qu’il s’agit de bien plus qu’un « mariage arrangé » !

Une application plus large et moins contraignante

L’application de la loi du Deutéronome révèle aussi quelques surprises. L’idée principale de ce commandement est que lorsqu’un homme mourait sans enfant, son frère devait prendre sa veuve pour femme, et le premier garçon qui naîtrait serait considéré comme l’enfant du mari décédé, pour perpétuer son nom. Si le beau-frère refuse d’exercer ce devoir, il s’exposait à une humiliation publique.

Le ton du texte du Deutéronome est tout de même assez différent de l’impression qui se dégage de l’histoire de Ruth. Le texte de loi est froid et tranchant. Le récit de Ruth présente le devoir de rachat de façon moins contraignante et plus large. Moins contraignante parce que l’autre proche parent refusera de l’exercer (chapitre 4) sans contrainte ni humiliation. D’autre part, Deutéronome 25 ne parle que du devoir du beau-frère d’une femme veuve. Ni Booz ni l’autre parent proche ne semblent être frères d’Elimélek. Sans compter que, strictement, ce n’est pas vraiment Ruth qui était concernée mais Noémi !

Bref, on n’est pas dans une application stricte et froide de la loi mais on comprend l’esprit de la loi. Ici, c’est la nécessaire solidarité familiale, le secours des veuves qui se retrouvent dans une situation précaire. Et Booz, qui est un homme de bien, est prêt à exercer ce droit et aller ainsi encore plus loin que la générosité dont il a déjà fait preuve jusqu’ici.

Bel exemple de la juste attitude face aux textes de loi dans la Bible. Il ne suffit pas de les appliquer à la lettre pour leur être fidèle. Il s’agit d’en comprendre l’intention profonde. Les contextes changent, les coutumes évoluent… la façon d’appliquer les commandements doit aussi évoluer. Aujourd’hui, à plus forte raison, il ne suffit pas de se référer à un commandement de l’Ancien Testament pour se faire une opinion définitive sur tel ou telle pratique, de citer un verset biblique pour répondre à telle ou telle question d’éthique.

C’est bien l’intention globale de Dieu, qui ressort d’une compréhension de l’ensemble de la Bible, que nous devons rechercher. Pas des solutions toutes faites et des raccourcis simplistes.
Conclusion

L’histoire n’est pas finie. On attend encore son dénouement, dans l’ultime chapitre. Mais on semble bien s’acheminer vers un « happy end », ce qui est inespéré quand on considère le début de l’histoire. La fidélité de Dieu est grande… et elle passe aussi par la fidélité des hommes et des femmes. Celle de Ruth, de Noémi et de Booz. Tout trois fidèles et solidaires.

La fidélité engendre la fidélité. La solidarité entraîne la solidarité. Et c’est Dieu lui-même qui en donne l’exemple. Lui qui s’est montré fidèle à son plan de salut pour l’humanité qu’il a créée. Lui qui s’est monté solidaire en Jésus-Christ, partageant notre condition jusqu’à la mort sur la croix. C’est là le cœur du message biblique, que nous ne devons jamais réduire à une morale ou une liste de commandements à respecter.

Soyons donc fidèles et solidaires, à la suite de Ruth, Noémi et Booz, à l’image du Dieu fidèle et solidaire, manifesté pleinement en Jésus-Christ.

Ruth, la moabite (2)

https://soundcloud.com/eel-toulouse/ruth-la-moabite-2

Résumé de l’épisode précédent

A la mort d’Elimelek, son mari, et de ses deux fils, Noémi se retrouve seule avec ses belles-filles, Orpa et Ruth. Elle avait quitté Israël qui traversait une période de famine et s’était réfugiée en Moab où ses fils avaient trouvé des filles du pays pour se marier.

Veuve, sans enfant, en terre étrangère, Noémi se retrouve en situation de grande précarité. Quand elle entend que les récoltes ont repris en Israël, elle décide d’y retourner, proposant à ses belles-filles de rester et refaire leur vie. Mais Ruth s’y refuse et choisi de rester fidèle à sa belle-mère et à son Dieu : « Là où tu iras, j’irai. Là où tu habiteras, j’habiterai. Ton peuple sera mon peuple, et ton Dieu sera mon Dieu. »

Noémi retourne donc dans son pays mais le cœur n’y est pas : elle ne comprend pas pourquoi Dieu l’a ainsi frappé par cette épreuve : « Ne m’appelez pas Noémi, la femme heureuse. Appelez-moi Mara, la femme amère, car le Tout-Puissant a rendu ma vie très amère. »

Noémi et Ruth arrivent en Israël au moment de la récolte de l’orge…

Lecture biblique : Ruth 2

Commentaire

« Je le vois, le SEIGNEUR continue à nous montrer sa bonté. Il est bon pour nous les vivants, comme il est bon pour les morts. Qu’il bénisse cet homme ! Booz est un homme de notre famille proche. Il est l’un de ceux qui ont la responsabilité de prendre soin de nous. » (v.20)

La fin de ce chapitre contraste avec la fin du précédent. Noémi était alors au fond du trou, se lamentant de l’épreuve que le Seigneur lui avait envoyé. Ici, elle se réjouit au contraire de la bonté de Dieu envers elle. L’histoire est en train de basculer.

Ruth ne savait pas que le champ dans lequel elle allait glaner des épis était celui de Booz, un parent d’Elimélek. C’est Noémi qui le lui apprend. Que Ruth ait trouvé un propriétaire aussi généreux lui laissant glaner autant d’épis est une chance. Mais qu’en plus il s’agisse de Booz, un proche parent d’Elimélek qui pourrait exercer son droit de rachat pour leur venir en aide, ça ne pouvait être un hasard…

Il faut noter que cet épisode illustre une loi sociale intéressante ayant cours alors en Israël. Il s’agit de la loi sur le glanage. Les propriétaires devaient laisser des épis à glaner dans leurs champs et des grappes à cueillir dans leurs vignes, pour que ceux qui n’avaient pas de terre, les démunis, les immigrés, puissent trouver à manger (cf. Lévitique 19.9-10). Une sorte de « Restos du coeur » de l’époque !

A la fin du chapitre, Noémi évoque aussi une autre loi, liée à la responsabilité familiale en cas de veuvage. La façon dont Booz exercera ce droit sera développé aux chapitres 3 et 4. Nous le verrons donc dans les prochains épisodes…

Application

Avec le premier chapitre, nous avons parlé de la fidélité de Ruth. Ici, c’est de la fidélité de Dieu qu’il faut parler. Nous pouvons le faire à la suite de Noémi, dont le désespoir s’est changé en espoir et en reconnaissance :

« Je le vois, le SEIGNEUR continue à nous montrer sa bonté. Il est bon pour nous les vivants, comme il est bon pour les morts. Qu’il bénisse cet homme ! Booz est un homme de notre famille proche. Il est l’un de ceux qui ont la responsabilité de prendre soin de nous. » (v.20)

1° Au cœur de l’épreuve, il est difficile de discerner la fidélité de Dieu

La tête dans le sac, on est incapable de prendre du recul. Dieu semble absent de l’épreuve. Pour Noémi, c’est grâce à Ruth et sa détermination qu’elle finit par reconnaître la fidélité de Dieu. Elle a eu besoin de la fidélité de sa belle-fille pour discerner la fidélité de Dieu.

Si nous voulons aider ceux qui traversent des épreuves, il ne faut certainement pas leur « faire la leçon », les inviter coûte que coûte à croire en la bonté de Dieu à coup de versets bibliques. Sans doute est-ce mieux de se montrer solidaire, concrètement, d’être présent à leur côté, prenant parfois les choses en main pour les aider et les accompagner. Se montrer soi-même fidèle et confiant.

2° Dieu exerce sa fidélité par sa providence

Parler de providence, c’est parler d’une action discrète de Dieu, dans la banalité du quotidien. Ce ne sont pas des actions éclatantes et spectaculaires mais une présence au cœur de l’Histoire… et de nos histoires.

Cette présence discrète explique pourquoi il faut souvent du recul pour la discerner. Et de la foi aussi. Parce qu’on pourra toujours parler de coïncidence et de hasard. Si Ruth a glané des épis dans le champs de Booz, c’est soit un coup de bol, soit un indice de la providence divine. Et nous pourrions sans doute multiplier les exemples dans nos vies. A nous de choisir !

3° Être confiant dans la fidélité de Dieu, c’est aussi prendre des initiatives.

Noémi a pris l’initiative de rentrer en Israël. Ruth a pris les choses en main en accompagnant sa belle-mère et en allant glaner des épis. Elle n’a pas attendu que tout tombe du ciel…

La foi et la confiance ne doivent pas être des oreillers de paresse ! Dieu honore nos initiatives en s’y inscrivant dans sa providence. Bien-sûr, toutes nos initiatives ne sont pas forcément bonnes. On fait parfois de mauvais choix… Mais Dieu est suffisamment puissant et fidèle pour les corriger au besoin, dans sa providence.

La foi ce n’est pas : « Seigneur, j’attends que tu agisses, que tu me parles, que tu me montres… et après j’irai ». C’est plutôt : « Seigneur, accompagne-moi dans mes choix, conduis-moi dans mes initiatives, guide-moi sur ton chemin. »

Le Seigneur ne répond pas à tous les caprices de ceux qui restent assis et attendent que tout leur tombe du ciel. Il accompagne ceux qui marchent.

Conclusion

Si comme Ruth et Noémi nous voulons voir la fidélité de Dieu dans notre vie :
Soutenons-nous les uns les autres. On discerne mieux la fidélité de Dieu ensemble que chacun pour soi.
Ouvrons les yeux de la foi, choisissons la confiance dans la providence divine.
Mettons-nous en marche, prenons le risque de faire des choix et croyons que Dieu s’y inscrira dans sa providence, au besoin en les corrigeant.

Ruth, la moabite (1)

https://soundcloud.com/eel-toulouse/ruth-la-moabite-1

Pour ce mois d’août, je vous propose un petit feuilleton de l’été. Une saga familiale en quatre épisodes, une belle histoire d’amour et de fidélité dont l’héroïne se prénomme Ruth.

Nous sommes au XIIe ou XIe siècle avant Jésus-Christ, au temps des Juges en Israël. Une période troublée, marquée par les conflits, le désordre et la violence. Mais notre histoire ne commence pas en Israël mais à Moab, un peuple voisin souvent en conflit avec Israël, y compris au temps des Juges.

La belle histoire de Ruth, la moabite, offre un saisissant contraste avec ce contexte sombre.

Lecture biblique : Ruth 1

« Là où tu iras, j’irai. Là où tu habiteras, j’habiterai. Ton peuple sera mon peuple, et ton Dieu sera mon Dieu. » (v.16)
Commentaire

Noémi est âgée au moment où elle se retrouve seule, sans mari ni enfant, tous décédés. Il est trop tard pour elle d’avoir d’autres enfants et donc de trouver un nouveau mari. Exilée à Moab, elle décide de rentrer en Israël où elle trouvera peut-être du secours. Le veuvage est difficile à vivre dans le contexte culturel de cette époque, surtout dans un pays étranger, loin des siens.

Mais ses belles-filles, elles, sont encore jeunes. Il est encore temps pour elle de trouver un mari et de refaire leur vie. Noémi les y encourage et c’est bien la décision prise par Orpa. Il faut se garder de porter un jugement hâtif sur elle. Elle aimait aussi sa belle-mère. On voit que cela lui coûte de la quitter. Mais sa décision est légitime et parfaitement compréhensible.

En réalité, c’est la décision de Ruth qui est étonnante. Choisir de rester malgré tout avec sa belle-mère, envers qui elle n’avait aucune obligation, est une marque remarquable de fidélité. Elle avait sans doute compris la situation précaire dans laquelle se trouvait Noémi et qu’elle pouvait lui venir en aide en l’accompagnant. La suite lui donnera raison…

La fidélité de Ruth est d’ailleurs sans doute bien plus qu’un simple attachement à sa belle-mère : « Ton Dieu sera mon Dieu », dit-elle. Il y a aussi dans sa démarche une dimension de foi. Elle choisit Noémi mais elle choisit aussi le Dieu de Noémi. A son attachement à sa belle-mère s’ajoute une adhésion de cœur à son Dieu.

Dans la tradition juive, Ruth est considérée comme un modèle des femmes prosélytes, les non-juives qui épousent la foi juive. Dans l’histoire de Ruth, le choix de la foi n’entre pas en conflit avec le choix du cœur. La fidélité à Dieu va de paire avec la fidélité à ceux qu’on aime.
Application

Dès le premier épisode de cette histoire, Ruth nous offre un remarquable exemple de fidélité et de foi.

On l’a dit, la fidélité de Ruth n’allait pas de soi. Elle lui a coûté : elle a dû quitter son pays… Une décision qui rappelle celle d’Abraham en réponse à l’appel de Dieu, lui demandant de quitter son pays pour aller là où il le conduirait. Pour Ruth, pas d’appel, pas de voix intérieure, mais une volonté ferme de se montrer fidèle à sa belle-mère et de s’attacher à Dieu. Comme pour Abraham, c’est une démarche de foi !

Une démarche de foi qui coûte. On peut d’ailleurs se demander si toute fidélité n’implique pas un renoncement… C’est facile d’être fidèle quand tout va bien ! Quand tout roule comme sur des roulettes, on est tous fidèles ! Ça l’est beaucoup moins dans l’épreuve, quand nos projets tombent à l’eau ou quand les événements semblent se liguer contre nous. Là, c’est difficile d’être fidèle. Ça coûte. Être fidèle peut impliquer de renoncer à certains conforts, à certaines ambitions personnelles.

L’exemple suprême est ici encore Jésus-Christ. Renonçant à la gloire céleste, il est devenu l’un des nôtres en venant sur terre, humblement. Par fidélité à l’appel de son Père. Par fidélité à son amour pour l’humanité. Une fidélité qui l’a conduit jusqu’à la mort sur la croix !

Et si notre foi se mesurait à la qualité de notre fidélité ? Notre fidélité à Dieu, bien-sûr ! Mais pas seulement… Ne se mesure-t-elle pas aussi à notre fidélité dans nos relations, dans nos projets et nos engagements ? C’est finalement une variante du double commandement majeur d’aimer Dieu ET d’aimer son prochain. La fidélité, elle est à Dieu et à notre prochain envers lequel nous nous sommes engagés, ou elle n’est pas ! Comment pourrais-je prétendre être fidèle à Dieu si je ne suis pas fidèle à mon conjoint, à mes amis, à mes paroles ou mes engagements ?
Conclusion

Ruth, la moabite, nous montre la voie d’une foi concrète, qui s’exprime dans le quotidien par sa fidélité remarquable à sa belle-mère. Comment, concrètement, notre fidélité s’exprime-t-elle ? Comment notre foi, notre fidélité à Dieu, se manifeste-t-elle dans notre fidélité de tous les jours ? Sommes-nous fidèles envers nos frères, nos amis nos prochains ?

Il faut le rappeler : c’est bien à la fidélité, y compris dans les « peu de choses » du quotidien, que Dieu nous invite, comme le dit le maître de la parabole des talents à son serviteur : « C’est bien, bon et fidèle serviteur, tu as été fidèle en peu de choses, je t’établirai sur beaucoup ; entre dans la joie de ton maître.» (Mt 25.21)

Le Royaume de Dieu : l’oeuvre de Dieu en nous

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Qu’est-ce que le Royaume de Dieu ? Cette expression, qui peut paraître mystérieuse, est très présente dans les Évangiles. C’est même un des sujets de prédilection de Jésus.

En général, Jésus en parle de façon imagée, à l’aide de paraboles et de métaphores. Mais ce n’est pas pour évoquer une sorte d’utopie, un rêve d’or à venir, un paradis qui émergerait à la fin des temps. Il en parle comme d’une réalité qui est déjà là, toute proche de nous.

En fait, ce n’est pas très compliqué : le Royaume de Dieu, c’est là où Dieu règne. Autrement dit, concrètement pour nous, parler du Royaume de Dieu, c’est parler de l’œuvre de Dieu dans notre vie.

Dans ces deux images tirées de la nature, il y a au moins deux aspects du Royaume de Dieu qui sont révélés : il grandit de façon mystérieuse et étonnante, et il commence toujours tout petit.

Il grandit de façon mystérieuse

C’est en particulier la première métaphore qui le dit. L’homme sème des graines dans son champ… et ensuite il dort. Et tout le processus de croissance se déroule sans son intervention. Il ne s’en soucie même pas. Les graines poussent, mais l’homme ne sait pas comment ! Et finalement arrive le moment de la récolte.

Le mystère, dans la deuxième métaphore, est principalement dans le contraste entre la toute petite graine et le véritable arbre à la fin du processus.

Qui peut comprendre, expliquer, l’oeuvre de Dieu dans une vie ? Personne… On ne peut que constater qu’une graine a été semée et qu’elle finit par pousser. Pas au même rythme pour tout le monde, pas forcément avec les mêmes fruits… Mais elle pousse. C’est l’œuvre de Dieu.

La question est : sommes-nous prêts à nous ouvrir à l’œuvre de Dieu en nous ? Il n’est pas question ici d’embrigadement dans une religion, de contraintes dans telle ou telle pratique, telle ou telle croyance…. Il est question de relation avec Dieu. Il est question d’un Dieu vivant qui se propose de faire éclore dans nos vies le fruit de son œuvre.

Et si le Royaume de Dieu grandit de façon mystérieuse et inattendue dans nos vies, c’est bien parce que Dieu ne veut pas nous formater tous sur le même modèle mais cheminer avec nous, tels que nous sommes, de façon personnelle.

Il commence tout petit

Cet autre aspect, bien que présent dans la première métaphore, est surtout souligné dans la seconde. Une graine de moutarde, c’est vraiment tout petit. Et la plante issue de cette graine est un véritable arbuste. A tel point que les oiseaux peuvent s’y abriter pour faire leur nid.

Si le Royaume de Dieu commence tout petit et peut finalement se révéler très grand, alors nous ne devons pas négliger les petits commencements. Ils peuvent être promesses de beaux et grands fruits. L’oeuvre de Dieu dans nos vies est faite de petits commencements.

Le Royaume de Dieu commence tout petit. Peut-être par une prière maladroite adressée à Dieu, peut-être par une lecture laborieuse de la Bible, peut-être par une entrée hésitante dans une église… Ne négligeons pas ces petits commencements. Ils sont comme ces toutes petites graines de moutarde qui, un jour, donneront peut-être une grande et belle plante.

Ces petites décisions que l’on peut prendre tout au long de notre cheminement spirituel ont de l’importance aux yeux de Dieu. Il les honore.

Le baptême aussi, c’est un petit commencement. Juste un commencement, pas un aboutissement. Mais un petit commencement qui est important dans un cheminement spirituel. Parce qu’il pose un signe de la présence, dans votre vie, du Royaume de Dieu.

A l’image de son Roi

En réalité, le Royaume de Dieu est à l’image de son Roi : Jésus-Christ.

Lui-même a commencé tout petit, humblement né dans une étable, au sein d’une famille modeste. Il a grandi et est apparu finalement comme un arbre extraordinaire à l’ombre duquel se reposer. Car de la petite graine de l’enfant de Bethléem, c’est le Fils de Dieu devenu homme qui s’est manifesté au monde. Plus grand encore que ce qu’on pouvait imaginer : il est mort et ressuscité !

Voilà qui est, encore, mystérieux. Mais qui est aussi une formidable promesse si nous nous ouvrons à l’oeuvre de Dieu aujourd’hui. C’est le Christ vivant qui sera à l’oeuvre en nous, par son Esprit.

Conclusion

Alors qu’est-ce que le Royaume de Dieu ? Chacun de vous peut donner une réponse personnelle à cette question. Car le Royaume de Dieu, c’est son œuvre dans votre vie.

Cette œuvre, peut-être n’en est-elle encore pour vous qu’au stade d’une graine semée. Peut-être quelques pousses ou quelques fruits se manifestent déjà. Ou peut-être êtes-vous un bel arbre portant de beaux fruits. Quoi qu’il en soit, c’est l’oeuvre de Dieu en vous. C’est son Royaume qui se manifeste déjà. A nous de le vivre !

Retroussons-nous les manches !

https://soundcloud.com/eel-toulouse/retroussons-nous-les-manches

Les premières paroles de ce texte sont dures pour les chrétiens de Corinthe, que Paul appelle des chrétiens faibles, des bébés dans la foi, à qui il n’a pas pu parler comme à des chrétiens matures. La preuve de cette immaturité se trouve dans les jalousies et les disputes qui caractérisent leur vie d’Église. J’ai peur qu’aujourd’hui encore, l’apôtre considérerait pas mal d’Églises comme immatures sur ce plan…

Ceci dit, ce qu’il dit ensuite de l’Église, bien que partant de son cas personnel et de la situation propre de l’Église de Corinthe, dit bien quelque chose d’universel à propos de l’Église, et même des Églises en général. Il le développe à partir de deux images qui se télescopent : l’Église est le champ et la maison de Dieu.

C’est Son champ et Sa maison !

L’Église, c’est le champ de Dieu. C’est lui le propriétaire du champ. Personne d’autre ne peut s’en prétendre propriétaire ! C’est Sa maison, celle où il se manifeste mais surtout celle qui lui appartient. On ne parle pas bien-sûr des quatre murs d’une Église mais de la communauté. En allant dans une Église, dans une communauté chrétienne, on vient chez Lui.

L’Église est le champ de Dieu, Sa maison. Et pourtant, si souvent elle est le lieu de jeux de pouvoir. Malheureusement… C’était flagrants à Corinthe mais c’est loin d’être un cas isolé ! Il y a toujours le danger de s’approprier « son » Église, en particulier pour le pasteur, le conseil ou les membres fondateurs… Mais dans une Église, on n’y travaille pas pour nous-mêmes, mais pour Dieu. C’est son Église, pas la nôtre… C’est ce qui fait de cette maison un temple de Dieu (cf. v.16).

Évidemment, dire de l’Église qu’elle est le temple de Dieu ne doit pas nous conduire à idéaliser les Églises. Loin de là. Si l’Église est le projet de Dieu, elle est aussi, par nature, humaine. Elle est donc imparfaite. Mais parce qu’elle est le projet de Dieu, il y a une lourde responsabilité pour celui qui détruit l’Église, qui y est source de division. Paul le rappelle ici : celui qui agit ainsi détruit le temple de Dieu.

Au contraire, les deux images utilisées par Paul permettent de souligner que nous avons une responsabilité dans la construction de l’Église. Car si elle est le champ de Dieu, il n’y poussera rien si on y sème rien. Et si elle est la maison de Dieu, elle en restera à ses fondations, certes solides, mais sans mur si nous n’y construisons rien dessus.

Planter, arroser… et laisser croître.

De son expérience, Paul tire une leçon générale. Il a planté, Apollos a arrosé, et c’est Dieu qui fait croître. Planter, c’est ensemencer le champ avec l’Évangile. C’était le travail d’apôtre de Paul, fondateur d’Églises dans tout l’empire romain. Arroser, c’était le travail d’enseignant d’Apollos, pour édifier et affermir les chrétiens. Mais dans tous les cas, c’est Dieu qui fait croître. C’est lui qui rend efficace le témoignage de Paul et l’enseignement d’Apollos. C’est son œuvre dans les cœurs qui est décisive.

Retenons de cette double responsabilité de planter et arroser, la nécessité d’une complémentarité. Une Église n’est jamais l’oeuvre d’un seul homme, elle est le projet de Dieu vécu communautairement, dans la complémentarité des dons et des ministères. Retenons aussi que pour le développement d’une Église, il y a une question de timing, d’action adaptée au besoin du moment. Il ne sert à rien d’arroser si on n’a pas planté avant !

Il s’agit donc pour nous de planter, d’arroser… et de laisser croître. Laisser Dieu agir. Le problème arrive quand les chrétiens débordent leur responsabilité, en cherchant à faire croître eux-même l’Église ! En appliquant simplement des méthodes ou en utilisant des techniques. L’Église devient alors une entreprise à faire prospérer… mais elle n’est plus le champ de Dieu.

Laisser croître n’est pas si facile que ça. Parce que le champ de Dieu ne pousse pas toujours comme on s’y attend ! Laisser croître, c’est se laisser surprendre par Dieu et accueillir le fruit qu’il fait pousser, pas forcément celui qu’on voudrait voir apparaître. Parfois dans le champ de l’Église on peut couper ce qu’on pense être de mauvaises herbes et on se prive alors de fruits surprenants ! Ces « mauvaises herbes » sont peut-être des projets inattendus ou des personnalités atypiques, et on leur coupe l’herbe sous les pieds, parce qu’on n’a jamais fait ça !

Il y a des sécateurs très efficaces dans le champ de l’Église, qui coupent très facilement des projets ou des personnes qui auraient pourtant pu donner de bons fruits. Ces sécateurs qu’on appelle « traditions », « structures », « culture » ou même parfois avec des noms plus longs du genre « on-ne-peut-pas-faire-ça-dans-une-église » ou « un-bon-chrétien-ne peut-pas », voire même « Dieu-m’a-dit-que » ou « la-Bible-dit-que » !

Pour qu’une Église se développe, on a sans doute plus besoin d’arrosoirs que de sécateurs. Des arrosoirs qui édifient, qui encouragent, qui prient, qui soutiennent, qui font confiance. Et moins de sécateurs qui découragent, qui refusent, qui interdisent, qui se méfient…

Construire sur les fondations avec ses propres matériaux

L’Église, c’est aussi la maison de Dieu. Mais si on y regarde de plus près, on se rend compte que dans la métaphore développée par Paul, il s’agit plus d’une maison en construction que d’un édifice déjà bâti. Dieu est le propriétaire du chantier. Les fondations ont déjà été posées, il s’agit maintenant de construire sur elles.

Les fondations, c’est Jésus-Christ. Et Paul précise bien qu’on ne doit pas en chercher d’autre. Jésus-Christ est le seul fondement de l’Église. On pense ici bien-sûr en premier lieu à son œuvre accomplie pour nous. L’Église se fonde sur la mort et la résurrection de Jésus-Christ, sans lesquelles il n’y aurait pas d’Église.

Mais il faut aller plus loin. Avoir Jésus-Christ comme fondations sur lesquelles construire, c’est affirmer le lien vital et indispensable avec le Christ vivant, aujourd’hui. Une Église, pour se construire, doit entretenir le lien d’intimité avec le Christ. Et le faire de façon communautaire : vivre ensemble la relation avec le Christ vivant.

L’Église, toute Église, est donc en chantier. Elle se construit. On ne touche pas aux fondations ! Mais on peut ajouter de nouveaux étages, on peut aussi abattre des cloisons, on peut percer des portes et des fenêtres, on peut aménager l’intérieur… C’est cela une Église vivante. Une Église qui ne se fige pas dans un projet mais qui évolue, qui retravaille ses plans.

Et l’Église se construit. Chacun y participe, avec ses propres matériaux : « On peut construire sur ces fondations avec de l’or, de l’argent, des pierres précieuses, du bois, du foin ou de la paille » (v.12) Il y a bien ici le reflet de la diversité qui fait la particularité de l’Église : chacun peut apporter sa pierre à l’édifice. Certes, les matériaux évoqués par Paul sont plus ou moins nobles, et plus ou moins résistants au feu, solides ou fragiles. L’Église, toute Église, est faite aussi de ces failles, de ces fragilités. L’important, c’est de construire ensemble !

D’autant que l’épreuve du feu dont parle Paul, au moment du bilan, ne détruira pas forcément les œuvres qu’on imagine. La vraie valeur de l’apport des uns et des autres ne se mesure pas toujours tout de suite, il faut se méfier des apparences !

Conclusion

L’Église, c’est le projet de Dieu qu’il réalise avec les hommes et les femmes qui lui appartiennent. C’est Son champ et Sa maison. Il est à l’initiative du projet, il en est l’artisan incontournable, le fondement unique. Mais il ne mènera pas ce projet sans nous. C’est Lui qui fait croître… mais pas sans que nous semions et que nous arrosions. C’est Lui, en Jésus-Christ, qui en est les fondations, mais c’est nous qui sommes les matériaux de construction pour édifier le temple de Dieu.

En tant que champ, nous sommes appelés à être les témoins de l’oeuvre de Dieu en nous, qui nous fait croître par sa grâce. En tant que maison, nous sommes appelés à nous édifier à la gloire de Celui qui, en Jésus-Christ, est mort et ressuscité pour nous. Quelle belle vocation ! Quel privilège ! Quelle formidable invitation à laquelle nous sommes tous appelés à répondre !

Alors retroussons-nous les manches ! Il y a du travail dans le champ et sur le chantier de l’Église !