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Où est mon trésor ?

 

https://soundcloud.com/eel-toulouse/ou-est-mon-tresor

Matthieu 6.19-34
19« Ne cherchez pas à posséder beaucoup de richesses sur la terre. Là, les insectes et la rouille détruisent tout. Les voleurs entrent dans les maisons et ils volent. 20Mais cherchez à posséder beaucoup de richesses auprès de Dieu. Là, les insectes et la rouille ne détruisent rien, les voleurs n’entrent pas et ils ne peuvent pas voler. 21Oui, là où tu mets tes richesses, c’est là aussi que tu mettras ton cœur. »
22« Les yeux sont la lampe du corps. Donc, si tes yeux ne sont pas malades, ton corps tout entier est dans la lumière. 23Mais si tes yeux sont malades, ton corps tout entier est dans la nuit. Alors, si la lumière qui est en toi est comme la nuit, ta nuit est bien noire ! »
24« Personne ne peut servir deux maîtres. En effet, ou bien il détestera l’un et il aimera l’autre, ou bien il sera fidèle à l’un et il méprisera l’autre. Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l’argent ! »
25« C’est pourquoi je vous dis : ne vous faites pas de souci pour votre vie ni pour votre corps. Ne vous demandez pas : “Qu’est-ce que nous allons manger ? Avec quoi est-ce que nous allons nous habiller ? ” Oui, votre vie est plus importante que la nourriture, et votre corps est plus important que les vêtements. 26Regardez les oiseaux. Ils ne sèment pas, ils ne moissonnent pas. Ils ne mettent pas de récoltes dans les greniers. Et votre Père qui est dans les cieux les nourrit ! Vous valez beaucoup plus que les oiseaux !
27« Ce n’est pas en vous faisant du souci que vous pouvez ajouter un seul jour à votre vie ! 28Pourquoi alors vous faire du souci pour les vêtements ? Observez les fleurs des champs, regardez comment elles poussent. Elles ne filent pas et elles ne tissent pas. 29Pourtant, je vous le dis : même Salomon, avec toute sa richesse, n’a jamais eu de vêtements aussi beaux qu’une seule de ces fleurs. 30L’herbe est aujourd’hui dans les champs, et demain on la jettera au feu. Et pourtant, Dieu l’habille de vêtements magnifiques. Vous qui n’avez pas beaucoup de foi, vous pouvez être sûrs d’une chose : Dieu en fera au moins autant pour vous !
31« Ne soyez pas inquiets en vous demandant : “Qu’est-ce que nous allons manger ? Qu’est-ce que nous allons boire ? Avec quoi est-ce que nous allons nous habiller ? ” 32En effet, les gens qui ne connaissent pas Dieu cherchent tout cela sans arrêt. Vous avez besoin de toutes ces choses, et votre Père qui est dans les cieux le sait bien. 33Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et ce que Dieu demande. Il vous donnera tout le reste en plus.
34« Donc, ne vous faites pas de souci pour demain. Demain se fera du souci pour lui-même. La fatigue d’aujourd’hui suffit pour aujourd’hui ! »

Attention : sujet sensible !!! On a du mal à parler de l’argent en France… y compris dans les Églises ! Pourtant, Jésus n’hésitait pas à le faire, et de façon très directe. C’était même probablement un des sujets qu’il abordait le plus souvent. Pas étonnant, donc, qu’il en soit question dans le Sermon sur le Montagne.

Mais c’est compliqué d’aborder un tel sujet devant une assemblée aussi variée. Je ne connais pas votre bulletin de salaire ni votre patrimoine… et je ne veux pas les connaître ! Mais je sais qu’il y a parmi nous des personnes qui ont du mal à joindre les deux bouts, chaque mois, et que d’autres n’ont pas ce souci parce qu’ils vivent aisément. Peut-on parler de ce sujet de la même façon aux uns et aux autres ?

En réalité, dans les foules qui venaient écouter Jésus, il y avait aussi des pauvres et des riches, et ils ont entendu les mêmes paroles. Evidemment, elles s’entendent différemment pour ceux qui possèdent beaucoup que pour ceux qui n’ont presque rien… mais les mêmes paroles restent pertinentes pour tous.

Disons-le d’emblée : il ne s’agit ni d’être pauvre ni d’être riche pour plaire au Seigneur. La question n’est pas là… Jésus ne s’intéresse pas au fait d’être pauvre ou d’être riche, ni même aux richesses matérielles en elles-mêmes. Il s’intéresse au type de relation que nous entretenons avec elles.

En fait, il y a trois idées principales développées par Jésus, résumées en trois formules :
« Là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur. »
« Vous ne pouvez servir Dieu et l’argent (Mammon) »
« Ne vous souciez pas du lendemain… A chaque jour suffit sa peine. »

Trois formules qui invitent finalement à trois questions qui interrogent notre rapport aux richesses matérielles : Où est mon trésor ? Qui est mon maître ? Quels soucis occupent mon esprit ?

Où est mon trésor ?

Le trésor, en grec, c’est thesauros. Ca a donné en français le verbe thésauriser, c’est-à-dire accumuler, amasser de l’argent qu’on garde pour soi, pour se constituer un trésor. Jésus nous dit à propos de notre trésor : c’est là que se trouve notre cœur. Ce que nous amassons et gardons pour nous, nous parle de notre cœur…

Quand on est enfant, on a souvent une boîte à trésor, dans laquelle on cache des choses qui n’ont pas forcément une grande valeur marchande mais une forte valeur affective. Et quel drame si l’enfant perd sa boîte à trésor ! C’est comme s’il perd une partie de lui-même. Parce qu’il y a mis tout son cœur.

Où est ma boîte à trésor aujourd’hui ? Dans quelles richesses ai-je mis mon cœur ? Dans la Bible, le cœur, c’est le siège de ma vie intérieure. C’est là que se prennent mes choix, que se jouent mes aspirations et mes envies, que se décident mes priorités. Là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur… pour ton salut ou pour ta perte !

C’est un peu comme dans Bilbo le Hobbit, avec le trésor dont s’était emparé le terrible dragon Smaug et qui rend presque fou Thorin, le roi nain, lorsqu’il le récupère. Son cœur était dans ce trésor..

Les boîtes à trésor de notre enfance disparaissent quand nous devenons adultes (même si on les garde parfois, par nostalgie)… Mais cela ne signifie pas que nous n’avons plus, chacun, un trésor, dans lequel nous mettons notre cœur. Il est différent pour chacun mais peut très bien se retrouver dans un coffre-fort, sur un compte en banque, dans un garage ou une maison…

Où est mon trésor ? Si ce qui compte vraiment pour moi se trouve dans les richesses matérielles alors c’est là que se trouve mon cœur. Or toutes ces richesses, quelles qu’elles soient, peuvent être volées, ou détruites, ou se corrompre… Et puis, on ne les emmène pas avec nous dans la tombe !

Il s’agit donc d’amasser un trésor dans le ciel, c’est-à-dire auprès de Dieu. Or, ces richesses-là ne sont pas matérielles mais spirituelles. Et quand on parle du ciel, on ne parle pas seulement de demain. En Jésus-Christ, le Royaume des cieux s’est approché, le ciel est descendu sur la terre. Ce trésor céleste, c’est celui du salut, de la foi, l’espérance et l’amour. C’est le trésor de la présence de Dieu en nous par son Esprit. Celui de la communion fraternelle entre croyants. C’est le trésor du partage, de la grâce, du pardon donné et reçu. Ce trésor-là, nous pouvons l’amasser aujourd’hui en le partageant ! Et celui-là nous l’emporterons avec nous pour l’éternité.

Qui est mon maître ?

Au verset 24 Jésus dit : « Personne ne peut être l’esclave de deux maîtres. » Mais la métaphore est un peu particulière. Normalement, c’est le maître qui choisit son esclave. Ce dernier n’a rien à dire… Mais ici, c’est différent. Il semble bien que ce soit l’esclave qui choisisse son maître. Jésus évoque en effet l’éventualité qu’il ait deux maîtres, alors il aimerait l’un et détesterait l’autre… Il doit donc choisir !

Entre Dieu et l’argent il faut choisir. Mammon est une personnification de l’argent, qui élève les richesses au niveau d’un dieu. La formule est très forte ! Un dieu, un maître, c’est celui qui décide, celui auquel on obéit, que l’on suit, qui oriente nos décisions, nos choix de vie…

L’argent, les richesses matérielles, ont ce pouvoir ! Vous connaissez peut-être cette citation attribuée à John D. Rockefeller, un des hommes les plus riches du monde en son temps. Un jour on lui a demandé : « Combien d’argent faut-il pour en avoir assez ? » Et il a répondu : « Juste un petit peu plus ! »

On comprend, à travers les paroles de Jésus, que parler d’argent, dans l’Église ou dans la vie chrétienne, c’est très spirituel. Car les enjeux sont spirituels. C’est d’ailleurs peut-être aussi pour cela qu’on a du mal à en parler… Il faut bien-sûr être responsable et ne pas faire n’importe quoi avec ses biens. Nous sommes appelés, dans ce domaine comme dans tous les autres, à être de bons intendants… Mais dans une Église par exemple, est-ce qu’on va limiter nos activités, s’interdire tel ou tel projet important parce qu’on grignote les réserves ? Avec le conseil, nous préparons l’AG de l’Église, notamment le budget, et on est en plein dans ces réflexions ! De même, dans notre budget familial ou personnel, quelle part réservons-nous à l’Église, ou à l’oeuvre de Dieu, ou à la générosité en faveur de ceux qui en ont besoin ?

Ce sont des questions spirituelles ! Des questions qui disent non seulement quelque chose de notre cœur mais aussi du maître que nous avons choisi.

Quels soucis occupent mon esprit ?

La troisième question interroge nos soucis. Les soucis, c’est ce qui occupe notre esprit, ce qui nous préoccupe… Quand on a beaucoup de soucis, ça se voit sur notre visage. On n’est pas vraiment présent avec les autres mais absorbé dans nos pensées.

Quelle place les questions matérielles occupent-elles dans notre esprit ? Combien de fois dans la journée ou dans la semaine, pensez-vous à la situation de votre compte en banque, au prêt que vous venez de contracter, aux habits que vous devez acheter, à l’entretien de la voiture que vous devez prévoir, à ce que vous devez encore mettre de côté pour financer vos prochaines vacances ?…

Jésus nous invite à nous recentrer sur l’essentiel. Et la formule qu’il utilise est entré dans le langage courant, sans que les gens sachent, en général, que c’est Jésus qui l’a prononcée en premier : « à chaque jour suffit sa peine » ! Mais il ne s’agit pas seulement d’une invitation à se concentrer sur les difficultés du jour, sans se préoccuper du lendemain. C’est surtout une invitation à la confiance en Dieu pour demain, pour pouvoir nous concentrer sur notre peine, notre travail, notre responsabilité aujourd’hui.

Si on s’inquiète pour demain, on ne sera pas pleinement investi aujourd’hui. Or, il y a tant de choses à faire aujourd’hui. Tant d’amour à partager, tant de défis à relever, tant de rencontres à faire… Voilà les soucis qui doivent nous préoccuper en premier lieu.

Car il y a une autre exhortation que Jésus associe à toutes ces considérations à propos de nos soucis : « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et sa justice ! » (v.33) Voilà ce qui doit nous préoccuper en priorité. Or le Royaume de Dieu nous concerne aujourd’hui, il est à notre porte, dans notre cœur, dans le prochain qui croise notre route. Si je me préoccupe de mon lendemain, je risque de ne pas me préoccuper du Royaume de Dieu aujourd’hui…

Conclusion

Ces trois questions que nous laisse Jésus peuvent nous aider à évaluer notre dépendance envers les biens matériels : Où est mon trésor ? Qui est mon maître ? Quels soucis occupent mon esprit ?

Et il faut bien avouer qu’on est souvent plus dépendant des richesses matérielles qu’on veut bien le dire en tant que chrétiens… surtout dans nos pays occidentaux. Il est donc salutaire de nous poser régulièrement ces questions !

En nous invitant à amasser des trésors dans le ciel, Jésus nous invite à chercher d’abord le Royaume de Dieu. Un Royaume qui n’est pas pour demain seulement mais dès aujourd’hui, dans la rencontre avec Jésus-Christ, le Roi. Or, ce trésor, on l’accumule en le partageant, pas en le gardant pour soi.

Alors, où est votre trésor ?

Qu’est-ce que vous faites d’extraordinaire ?

 

https://soundcloud.com/eel-toulouse/quest-ce-que-vous-faites

Matthieu 5.38-48
38 « Vous avez appris qu’on a dit : “Œil pour œil et dent pour dent.” 39 Mais moi, je vous dis : si quelqu’un vous fait du mal, ne vous vengez pas. Au contraire, si quelqu’un te frappe sur la joue droite, tends-lui aussi l’autre joue. 40 Si quelqu’un veut te conduire au tribunal pour prendre ta chemise, laisse-lui aussi ton vêtement. 41 Si quelqu’un te force à faire un kilomètre à pied, fais-en deux avec lui. 42 Quand on te demande quelque chose, donne-le. Quand on veut t’emprunter quelque chose, ne tourne pas le dos. »
43 « Vous avez appris qu’on a dit : “Tu dois aimer ton prochain et détester ton ennemi.” 44  Mais moi, je vous dis : aimez vos ennemis. Priez pour ceux qui vous font souffrir. 45 Alors vous serez vraiment les enfants de votre Père qui est dans les cieux. En effet, il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons. Il fait tomber la pluie sur ceux qui se conduisent bien et sur ceux qui se conduisent mal. 46 Si vous aimez seulement ceux qui vous aiment, quelle récompense est-ce que Dieu va vous donner ? Même les employés des impôts font la même chose que vous ! 47 Et si vous saluez seulement vos frères et vos sœurs, qu’est-ce que vous faites d’extraordinaire ? Même les gens qui ne connaissent pas Dieu font la même chose que vous ! 48 Soyez donc parfaits, comme votre Père dans les cieux est parfait ! »

Rappelons-le, dans ce discours Jésus n’est pas en train de modifier ou de s’opposer aux commandements de l’ancienne alliance. Il l’a dit explicitement : jusqu’à la fin du monde, pas la moindre petite lettre de la Torah ne sera supprimée. S’il s’oppose à quelque chose, ce ne s’est pas au commandement mais à l’interprétation qui en était faite. En rappelant le sens profond des commandements qu’il cite, Jésus en propose une lecture ambitieuse.

D’ailleurs, une formule de Jésus, à la fin de notre passage, a attiré mon attention : « Qu’est-ce que vous faites d’extraordinaire ? » Jésus s’attend donc à ce que nous fassions des choses extraordinaires !

Mais moi je vous dis…

Ne vous vengez pas

Jésus évoque d’abord la fameuse loi du talion. Elle a souvent été mal comprise. On se dit : « œil pour œil, dent pour dent », c’est de la vengeance. Or, dans le contexte de l’AT, on peut penser au contraire que c’était une loi qui voulait stopper la spirale de la vengeance et donner un premier cadre pour la justice. Un œil pour un œil. Point final. Alors que la spirale de la vengeance, c’est deux yeux pour un œil, et une mâchoire pour une dent. Et ça ne s’arrête jamais !

Jésus, ici, a pourtant besoin de souligner l’esprit de cette loi. Il doit être plus explicite parce qu’elle était devenu une justification de la vengeance. Alors Jésus dit clairement : « si quelqu’un vous fait du mal, ne vous vengez pas. » Et il aurait pu s’arrêter là. C’est déjà pas mal…

Mais il va plus loin… Non seulement, il dit de ne pas se venger mais il ajoute : « Au contraire, si quelqu’un te frappe sur la joue droite, tends-lui aussi l’autre joue. » Faut-il prendre au pied de la lettre ce qu’il dit ici ? Pas vraiment… il utilise un langage hyperbolique : il force le trait pour faire ressortir la leçon. Mais quand même. Non seulement vous ne devez pas vous venger, mais en plus vous devez faire un pas vers celui qui vous agresse. Il s’agit de contre-attaquer… par l’amour !

Aimez vos ennemis

Le deuxième commandement évoqué par Jésus n’est pas dans la Loi de Moïse, du moins pas sous cette forme. « Tu dois aimer ton prochain », ça d’accord, c’est dans le Lévitique (Lv 19.18). Par contre, la deuxième partie, « tu dois détester ton ennemi » n’y est pas ! Sans doute comprenait-on ainsi les choses : les prochains, ce sont nos amis, ou au moins ceux qui ne nous veulent pas de mal. Et notre ennemi ne peut pas être notre prochain.

Mais Jésus veut tordre le cou à cette idée. Lorsqu’il dit : « Mais moi, je vous dis : aimez vos ennemis. », Jésus est tout simplement en train de redéfinir qui est notre prochain. Nous n’avons pas à trier entre les prochains que nous devons aimer et ceux que nous devons haïr parce qu’ils seraient nos ennemis. Pour Jésus, nos ennemis aussi sont nos prochains.

Cette question du prochain est discutée ailleurs dans les évangiles. Comme lorsqu’un chef religieux a demandé à Jésus, un jour, qui était notre prochain. Jésus avait répondu avec la parabole du Samaritain. Ici, il rappelle que notre prochain est celui qui croise notre route, même s’il est notre ennemi, même s’il nous veut du mal.

Faire des choses extraordinaires

« Qu’est-ce que vous faites d’extraordinaire ? » En entendant le discours de Jésus, on comprend qu’il ne s’attend pas ici à des miracles puissants, des guérisons surnaturelles, des actes éclatants. Non, il parle de refus de la vengeance, il parle d’amour du prochain. Il parle de l’extraordinaire qui vient se nicher dans l’ordinaire de notre quotidien. Mais le défi n’en est pas moins grand ! Car les exhortations de Jésus concernent nos relations les plus difficiles, non pas avec ceux qui nous font du bien ou nos amis, mais avec ceux qui nous font du mal, nos ennemis.

L’amour, la grâce, la bonté, la générosité, le pardon dont nous pouvons faire preuve dans notre quotidien peuvent être de l’ordre de l’extraordinaire !

A l’image du Père… et du Fils

La raison première pour laquelle Jésus nous appelle à agir ainsi, c’est l’exemple donné par Dieu lui-même :

« Alors vous serez vraiment les enfants de votre Père qui est dans les cieux. » (v.45)
« Soyez donc parfaits, comme votre Père dans les cieux est parfait ! » (v.48)

Et ce qui est intéressant, c’est que ce qui est dit de l’action de Dieu ici, c’est qu’il fait briller le soleil et fait pleuvoir sur les méchants et les justes. Bien-sûr, c’est une métaphore de la grâce de Dieu, qui ne fait pas d’acception de personnes. Mais cette grâce se manifeste dans des événements du quotidien, comme le soleil et la pluie. C’est bien dans notre quotidien que nous sommes appelés à faire des choses extraordinaires.

Et puis, en prenant un peu de recul, il y a évidemment l’exemple suprême de Jésus lui-même, qui a mis en pratique mieux que tout autre les principes qu’il enseigne dans ce discours. Il a refusé la vengeance et aimé ses ennemis. Il s’est laissé arrêter, juger et condamner, alors même qu’il était innocent. Et sur la croix il a prié pour ses ennemis en disant : « Père pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font ! »

En coupant court à la vengeance

Où est donc la tentation de la vengeance dans notre vie quotidienne ? Dans nos relations, il y a de multiples occasions de se sentir agressé ou attaqué, par une parole ou une attitude d’un collègue de travail, d’un voisin, etc… Et lorsque quelqu’un nous fait du mal, d’une manière ou d’une autre, on a souvent d’abord envie de lui faire mal en retour…

Dans la lignée des précédentes paroles de Jésus, le réflexe de vengeance commence dans nos pensées et nos paroles. Il commence avec la rancœur ou la frustration qu’on entretient. Il se manifeste dans des paroles blessantes ou moqueuses, pour répondre du tac au tac.

Et c’est là, avant de passer à l’acte, qu’il faut couper court au réflexe de la vengeance. Laisser s’envoler l’oiseau de la haine ou du ressentiment plutôt que de le laisser faire son nid dans notre cœur.

En contre-attaquant par l’amour

Mais cette fois Jésus va encore plus loin. Non seulement il s’agit de ne pas se venger, de ne pas haïr, de se retenir… mais il s’agit d’avoir un geste, une action en direction de l’ennemi. Prendre le contre-pied de la vengeance !

On ne vainc pas le mal par le mal mais par le bien. Ou comme l’a dit Martin Luther King : « Les ténèbres ne peuvent pas chasser les ténèbres, seule la lumière le peut. La haine ne peut pas chasser la haine, seul l’amour le peut. »

Les paroles de Jésus sont un appel à la non-violence, qui n’est pas seulement un refus de la violence mais le choix de la paix et du pardon. Comme Jésus ne nous demande pas seulement de refuser la vengeance et de ne pas haïr son ennemi, il nous demande de tendre l’autre joue, de donner notre vêtement, d’aimer nos ennemis, de prier pour ceux qui nous persécutent… Nous sommes toujours appelés à faire un pas décisif vers notre prochain, quel qu’il soit. Et ça peut paraître parfois une folie. Mais c’est la folie de l’amour

Conclusion

« Qu’est-ce que vous faites d’extraordinaire ? » C’est dans notre quotidien que se trouve la réponse à cette question. Dans nos pensées, nos paroles et nos actes. Et, c’est vrai, la barre est placée haute par Jésus. Il nous appelle à être des ouvriers d’amour et de paix. Ne pas seulement résister à la vengeance mais faire preuve de grâce et de pardon. Ne pas seulement résister à la haine de ceux qui nous font du mal mais à contre-attaquer par l’amour et la prière.

C’est ambitieux. C’est aussi le chemin que Jésus lui-même nous a montré. Et pour nous, ça ne sera possible que si l’Esprit de Dieu est à l’oeuvre au plus profond de nos cœurs et nous transforme à l’image du Christ.

Sel et lumière

https://soundcloud.com/eel-toulouse/sel-et-lumiere

 

Matthieu 5.13-16
13 « Vous êtes le sel de toute la terre. Mais quand le sel perd son goût, comment lui rendre son bon goût ? Il ne sert plus à rien. On le jette dehors et les gens marchent dessus.
14 « Vous êtes la lumière du monde. Quand une ville est construite sur une montagne, elle ne peut pas être cachée. 15 Et quand on allume une lampe, ce n’est pas pour la mettre sous un seau ! Au contraire, on la met bien en haut, et elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison. 16 De la même façon, votre lumière doit briller devant tout le monde. Alors les autres verront le bien que vous faites. Ils pourront chanter la gloire de votre Père qui est dans les cieux. »

Sel de la terre ! Lumière du monde ! Rien que ça… N’est-ce pas un peu « gonflé » de se prétendre sel de la terre et lumière du monde ? Certes, c’est Jésus qui le dit mais quand même ! Imaginez d’inscrire ça sur votre profil Facebook ou Twitter !!!

Oui mais… Jésus n’est pas en train de caresser ses disciples dans le sens du poil ! Il ne leur dit pas : « Vous êtes des gens formidables, la crème de la crème ! ». Il les met plutôt face à leurs responsabilités : il parle quand même d’un risque pour le sel d’être jeté dehors et foulé aux pieds ! Car il y a des dangers : que le sel perdre son goût et que la lumière soit cachée.

C’est sur ces dangers que j’aimerais me concentrer ce matin. Vous êtes sel de la terre… Mais ne perdez pas votre goût ! Vous êtes lumière du monde… mais ne cachez pas votre lumière !

Pour que le sel ne perde pas son goût

La version Parole de Vie traduit : « Si le sel perd son goût ». Littéralement c’est « si le sel devient stupide », on pourrait traduire inutile ou inefficace. Quant à la suite de la question, « Comment lui rendre son goût », littéralement c’est « comment sera-t-il salé ? »

Comment comprendre le sens de la métaphore ? Dans l’Antiquité, on avait de nombreux usages pour le sel mais il s’agit sans doute ici d’un usage domestique. Quand le sel de la métaphore devient inutile, il est jeté dehors. C’est dire que son utilité était à l’intérieur de la maison où il était en particulier utilisé pour conserver les aliments… et aussi pour leur donner du goût.

Par ailleurs, l’expression « être jeté dehors » évoque d’autres images bibliques associées au jugement. Dans les paraboles de Jésus, c’est le sort réservé à l’invité à la noce qui n’a pas revêtu l’habit de fête, ou au serviteur inutile qui n’a pas fait fructifier ses talents.

Il y a donc bien dans ces paroles de Jésus une mise en garde à ses disciples pour qu’ils ne soient pas des serviteurs inutiles. En effet, quand il leur dit qu’ils sont le sel de la terre, il leur dit qu’il sont utiles pour le monde. Et de fait, si on regarde l’histoire de l’humanité, on voit de nombreux chrétiens avoir été utiles pour le monde, en étant à l’origine de grandes avancées sociales, au nom de l’Evangile.
Mais on voit aussi que ça n’a pas toujours été le cas, malheureusement… Parfois, l’empreinte laissée par les chrétiens dans le monde a un goût amer…

Cette métaphore du sel est la plus forte des exhortations en faveur d’une présence réelle des chrétiens dans le monde. Alors qu’il y a toujours eu la tentation de se couper du monde. Aujourd’hui encore. Comment être sel de la terre en dehors du monde ?

Pour que le sel conserve les aliments , ou pour qu’il leur donne du goût, il faut qu’il se mélange aux aliments. Il ne suffit pas de poser une salière, même pleine à ras bord, sur la table pour donner du goût à votre plat ! Or parfois l’église est comme une salière hermétiquement fermée… Parce qu’on veut garder la pureté du sel intacte !!!

Comment être sel de la terre en dehors du monde ? Comment être utile à mon prochain si je ne vais pas à sa rencontre ?

Jésus a été utile auprès des petits, des délaissés, des exclus de la société de son époque. Utile comme un médecin pour des malades. Il s’est mélangé à eux, il accueillait ceux qui venaient à lui et les guérissait, il allait manger chez ceux qui l’invitaient, y compris les pécheurs et les gens de mauvaise réputation… Ses ennemis le lui a assez reproché !

En quoi suis-je utile aux autres ? Quel goût je diffuse autour de moi ? Quelle influence j’ai sur mon prochain ? Il ne s’agit pas forcément de révolutionner notre société… mais déjà d’avoir un impact positif sur notre entourage, nos amis. Apporter de la paix, de la joie, de l’espoir, du réconfort… c’est aussi cela être sel de la terre !

Pour que la lumière ne soit pas cachée

Si le danger pour le sel était de devenir insipide, inutile, le danger pour la lumière est qu’elle soit cachée. L’accent est sur les actes plus que les paroles, sur ce que les gens voient plutôt que ce qu’ils entendent :

« votre lumière doit briller devant tout le monde. Alors les autres verront le bien que vous faites. Ils pourront chanter la gloire de votre Père qui est dans les cieux. » (Mt 5.16)

J’ai souvent interprété ces paroles de Jésus comme une exhortation à vaincre nos timidités et nos peurs, pour laisser briller l’Evangile à travers notre vie. Et je pense que ça reste une lecture possible… Mais l’insistance de Jésus sur le fait de ne pas cacher la lumière me semble orienter vers une autre interprétation. Pourquoi cacherait-on une lumière si ce n’est parce qu’on n’a pas vraiment envie que cette lumière soit vue par tous ? Peut-être parce qu’on préfère cacher certains actes peu glorieux plutôt que de s’exposer.

Et cette compréhension se confirme quand on compare ces paroles aux versions de Marc et de Luc de cette métaphore :

Marc 4.21-22
Jésus leur dit encore : « Quand quelqu’un apporte une lampe, ce n’est pas pour la mettre sous un seau ou sous un lit ! Au contraire, il la place bien en haut. Tout ce qui est caché, on pourra le voir, tout ce qui est secret, cela paraîtra en pleine lumière. »

Ici, il y a bien une formule qui évoque le jugement, où chacun aura à rendre compte de ses actes, y compris ceux qu’il a voulu cacher… Il y a, dans notre vie, des lumières qu’on est prêt à laisser briller, et d’autres qu’on préfère cacher. La question que nous devons entendre est donc : de quel genre de lumière brillons-nous ?

Il ne s’agit pas d’être une lumière aveuglante, qui cherche à en mettre plein la vue : « Regardez comme je suis spirituel, comme je suis épanoui dans ma foi, comme je suis bon et généreux envers les autres… » Ailleurs dans le évangiles, c’est exactement l’attitude superficielle que Jésus dénonce chez les Pharisiens…

Ce n’est pas ainsi que le Christ, véritable lumière du monde, est venu. Il est venu, humblement, en serviteur. Certes, il a brillé un peu plus fort lorsqu’il accomplissait des miracles, plus fort encore le jour de sa résurrection. Mais la plupart du temps, sa lumière était douce et bienfaisante.

Matthieu 11.28-30
28 « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi je vous donnerai le repos. 29 Prenez sur vous mon joug et mettez-vous à mon école, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos de vos âmes. 30 Oui, mon joug est facile à porter et mon fardeau léger. »

Nous sommes lumière du monde si notre vie reflète la lumière du Christ. Si notre lumière n’attire pas le regard sur nous mais sur le Seigneur. Car, Jésus le souligne, l’objectif de cette lumière est que ceux qui la voient glorifient Dieu. Que notre lumière soit donc douce et humble, qu’elle rassure, qu’elle réchauffe, qu’elle apaise !

Conclusion

Il n’y a qu’une manière d’avoir une vie qui donne du goût, utile aux autres, et qui rayonne de la lumière du Christ. C’est de toujours nous rapprocher du Christ, nous exposer à sa lumière et la laisser nous remplir.

« Vous êtes le sel de la terre… Vous êtes la lumière du monde ». Alors ne devenez pas insipide ! N’ayez pas honte de votre lumière ! Ou, pour le dire plus simplement encore : Soyez utiles dans ce monde et que votre vie reflète l’amour de Dieu !

C’est ainsi que nous pourrons glorifier Dieu ici-bas… et encourager ceux qui ne connaissent pas encore cette lumière à la découvrir !

L’adoration des mages

 

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Matthieu 2.1-12
1 Jésus naît à Bethléem, en Judée, au moment où Hérode le Grand est roi. Alors, des sages viennent de l’est et arrivent à Jérusalem. 2 Ils demandent : « Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? Nous avons vu son étoile se lever à l’est, et nous sommes venus l’adorer. » 3 Quand le roi Hérode apprend cela, il est troublé, et tous les habitants de Jérusalem aussi. 4 Le roi réunit tous les chefs des prêtres de son peuple avec les maîtres de la loi. Il leur demande : « À quel endroit est-ce que le Messie doit naître ? » 5 Ils lui répondent : « Le Messie doit naître à Bethléem, en Judée. En effet, le prophète a écrit : 6 “Et toi, Bethléem, du pays de Juda, tu n’es sûrement pas la moins importante des villes de Juda. Oui, un chef va venir de chez toi, il sera le berger de mon peuple, Israël.” » 7 Alors Hérode fait appeler les sages en secret. Il leur demande : « À quel moment est-ce que l’étoile est apparue ? » 8 Ensuite il les envoie à Bethléem en disant : « Allez vous renseigner exactement sur l’enfant. Quand vous l’aurez trouvé, venez me prévenir, et moi aussi, j’irai l’adorer. » 9 Après ces paroles du roi, les sages se mettent en route. Ils aperçoivent l’étoile qu’ils ont vue à l’est. Ils sont remplis d’une très grande joie en la voyant. L’étoile avance devant eux. Elle arrive au-dessus de l’endroit où l’enfant se trouve, et elle s’arrête là. 11 Les sages entrent dans la maison, et ils voient l’enfant avec Marie, sa mère. Ils se mettent à genoux et adorent l’enfant. Ensuite, ils ouvrent leurs bagages et ils lui offrent des cadeaux : de l’or, de l’encens et de la myrrhe. 12 Après cela, Dieu les avertit dans un rêve de ne pas retourner chez Hérode. Alors ils prennent un autre chemin pour rentrer dans leur pays.
Voilà un épisode bien connu, représenté dans la traditionnelle crèche de Noël… dans laquelle d’ailleurs on mélange les récits de la Nativité de Matthieu et de Luc. Les bergers et les mages ne se sont jamais retrouvés en même temps auprès de Jésus… Chez Luc, ce sont les bergers qui viennent adorer l’enfant Jésus, le soir de Noël. Chez Matthieu, ce sont les mages, après un long périple depuis l’Orient, qui viennent adorer l’enfant Jésus. Et cela se déroule sans doute bien après la nuit de Noël. En effet, pus tard, lorsque Hérode, en colère, donnera l’ordre de tuer tous les enfants de deux ans ou moins, le texte biblique précise qu’il agit « d’après l’époque qu’il s’était fait préciser par les mages »… Même si les deux ans correspondaient au moment de l’apparition de l’étoile, qu’il faudrait alors compter le voyage et même si on peut imaginer que dans sa colère Hérode avait pris de la marge… on est bien plusieurs mois après la naissance de Jésus dans notre récit.

Chez Matthieu, pas de berger donc mais des mages d’Orient. Et d’autres personnages interviennent dans le récit : le roi Hérode et les chefs des prêtres. Je vous propose ce matin de nous arrêter sur ces différents personnages et voir en quoi leur attitude face à Jésus nous interpellent.

Hérode, le parano

Tout d’abord il y a Hérode, inquiet pour son pouvoir. Un vrai parano. Et dangereux, en plus ! Il suffit de voir la suite du récit… Et c’est bien conforme au portrait qu’en font les historiens : Hérode avait l’habitude de faire exécuter ceux qu’il considérait comme une menace, y compris trois de ses propres fils !

Pour l’instant, il mène sa petite enquête auprès des prêtres, il demande des précisions aux mages à propos de ce roi dont ils parlent. Et il élabore son plan : « Quand vous l’aurez trouvé, venez me prévenir, et moi aussi, j’irai l’adorer. » Tu parles…

Mais comment un petit enfant peut-il être une menace pour Hérode ? A la fin de sa vie, devant Pilate cette fois, Jésus dira que son Royaume n’est pas de ce monde. Ça pourrait être entendu comme l’affirmation d’une non-concurrence. Et de fait, le Nouveau Testament invite les croyants à être de bons citoyens…

Et pourtant, ce Royaume de Dieu, dont l’entrée est réservée à ceux qui sont comme des petits enfants, dans lequel l’amour pour Dieu et pour le prochain est la valeur suprême, ce Royaume est perçu comme une menace par ceux qui sont avides de pouvoir et veulent garder leur place.

Et dans l’histoire, les puissants se sont inquiétés du pouvoir de Jésus : les chefs religieux dans les évangiles se sont farouchement opposés à Jésus ; l’empire romain a persécuté les chrétiens dans le premier siècle de l’histoire de l’Eglise ; les régimes totalitaires dans l’histoire, jusqu’à aujourd’hui, persécutent encore les chrétiens.

C’est bien que ce Royaume, inauguré par Celui qui s’est fait petit enfant, dérange les puissants. Et que même si les chrétiens sont invités à être de bons citoyens, il y a forcément des situations où la fidélité à l’Evangile les place à contre-courant. Si bien que lorsque l’Eglise ne fait que se fondre dans la société où elle vit, en faisant le moins de vagues possible, en devenant presque transparente, joue-t-elle vraiment son rôle ?

Et ce n’est pas que face à des régimes totalitaires qu’il y a une voix à faire entendre, mais aussi, dans nos sociétés démocratiques, lorsque les plus fragiles sont oubliés, lorsque les réfugiés ne sont pas accueillis, lorsque les libertés sont bafouées, lorsque l’argent est roi… et l’on pourrait multiplier les exemples.

Des prêtres aveugles

Ensuite, il y a les chefs des prêtres. Au palais, ils sont des conseillers du roi. Il faut dire que c’était Hérode qui les nommait…

Quand il leur demande où le Messie doit naître, leur réponse est parfaite : A Bethléem, comme l’annonce la prophétie de Michée. Pas de problème, ils connaissent leur Bible ! Enfin, ils savent, intellectuellement, où doit naître le Messie. Mais quand ils voient arriver des personnages qui viennent de loin pour adorer le roi des Juifs qui vient de naître, eux, ils restent dans le palais d’Hérode…

Dans les Evangiles, les chefs religieux ne sont pas vraiment ménagés. Ce sont ceux à l’égard desquels Jésus a les paroles les plus dures. Ils représentent à la fois l’impasse d’une religion formelle et les dangers d’une religion où les responsables sont plus intéressés par l’exercice du pouvoir que l’obéissance à Dieu. Dans notre récit, le contraste entre leur connaissance des prophéties bibliques et l’absence d’impact dans leur vie est frappant ! Et cela doit forcément nous interpeller : quel écart y a-t-il entre la foi que nous professons et la manière dont elle impacte notre vie ?

Si, je l’espère, nous ne sommes pas aveugles spirituellement, avouons que nous sommes quand même un peu bigleux ! Notre « vue » spirituelle n’est pas toujours très perçante. On pourrait même se hasarder à des analogies… Spirituellement, on peut être myope, presbyte, astigmate ou hypermétrope !

  • Le myope, c’est celui qui ne voit clair que de près. Le nez dans sa Bible, il est capable de réciter tous les versets que vous voulez mais de là à voir au-delà du bout de son nez, c’est compliqué… Les myopes spirituels s’intéressent à leur propre vie spirituelle, leur foi, leur piété, leur épanouissement spirituel… mais très peu à leur prochain.
  • Le presbyte, à l’inverse, ne voit clair que de loin. C’est un peu l’histoire de la paille et de la poutre. On est capable de voir la paille dans l’oeil de son prochain, avec la distance, mais on est incapable de voir la poutre dans son propre œil… c’est trop près ! Les presbytes spirituels sont prompts à juger les autres et donneurs de leçons… mais jamais ils ne se remettent en question !
  • L’astigmate a une vision déformée, quelle que soit la distance. Il voit toujours les choses différemment des autres… et ce sont forcément les autres qui ont tort ! Il a souvent un réflexe de victimisation : il se dit incompris, mal-aimé, rejeté…
  • L’hypermétrope voit flou… et souffre de maux de tête. Spirituellement, il ne sait jamais où il en est. Il a tendance à se convertir 30 fois dans sa vie, se laisse emporter par les prédicateurs à la mode sur youtube, tantôt dans un sens tantôt dans l’autre… et ça finit par lui donner mal à la tête !

Bien-sûr, ces analogies ont leurs limites… Mais l’idée principale est bien que, spirituellement, nous avons tous besoin des lunettes du Saint-Esprit pour y voir clair. Nous sommes tous des bigleux !

Des mages « pas très catholiques »

Enfin, il y a les mages. Que sait-on d’eux ? Pas grand chose en réalité. C’est la tradition qui a finit par dire qu’ils étaient trois, que c’étaient des rois et on leur a même donné un nom ! Mais le texte biblique est bien plus sobre : ils viennent d’Orient. C’est vague… viennent-ils de Babylone, de Perse ? En tout cas, ça en fait clairement des païens. On sait aussi qu’ils ont scruté les étoiles et y ont vu le signe de la naissance du roi d’Israël. Ne me demandez pas comment ils ont fait ! Mais ce qui est sûr, c’est que ça fait d’eux des astrologues ! Ce n’est « pas très catholique » tout ça…

Si l’Evangile avait été écrit par un « bon chrétien », il aurait sans doute trouvé mieux, plus politiquement correct, pour venir adorer le Messie. Mais Dieu est allé chercher des païens venus d’Orient puisque les chefs religieux sont incapables de voir ce qui se passe devant leur nez…

Et il est allé les chercher sur leur terrain. Dans les étoiles ! Je ne suis pas en train de défendre l’astrologie, loin de là… Il faut juste se souvenir qu’au temps de Jésus, la distinction entre astrologie et astronomie n’existait pas vraiment… Dieu les a trouvé dans les étoiles… et il est allé cherché des hommes curieux, en recherche, prêts à entreprendre le voyage pour aller adorer le roi des Juifs !

Il y a d’autres cas dans la Bible où Dieu fait éclater les carcans et les a priori, en utilisant des hommes ou des femmes là où on ne s’y attend pas. Il y a par exemple Melchisédek qui vient de nulle part pour bénir Abraham, Job qui est exemplaire dans sa foi alors qu’il n’appartient pas au peuple d’Israël, plusieurs maximes du livre des Proverbes qui sont issues d’une sagesse en dehors du peuple d’Israël, le roi perse Cyrus que Dieu appelle son « oint » (celui qu’il a choisi, un titre messianique). Et dans les évangiles, on peut penser à plusieurs païens, comme la femme syro-phénicienne ou le centurion, dont Jésus dit que même en Israël il n’a pas trouvé d’aussi grande foi. Et puis il y a cet homme qui chasse les démons au nom de Jésus mais qui ne fait pas partie du cercle des disciples… et Jésus dit à ses disciples de ne pas l’empêcher !

Ne nous hâtons donc pas de dire comment Dieu parle et à qui il parle ou ne parle pas… Laissons-nous surprendre ! Et accueillons ceux que Dieu lui-même accueille…

Conclusion

Quelle galerie de personnages ! Un roi parano, des prêtres aveugles et des mages « pas très catholiques » ! Et au milieu de tous, l’enfant Jésus.

Chez Luc, l’adoration des bergers nous rappelait que Jésus-Christ est venu pour tous, y compris et surtout pour les humbles, les petits. Chez Matthieu, l’adoration des mages nous rappelle la dimension universelle de la venue de Jésus. La Bonne Nouvelle est pour tous et Dieu va à la rencontre de ceux qui le cherchent, où qu’ils soient, quels qu’ils soient. C’est une preuve d’aveuglement spirituel que de ne pas le voir…

C’est nous qui voulons mettre des barrières, des limites à Dieu. Mais l’apôtre Paul l’a dit avec force : « Il n’y a plus ni Juifs ni Grecs, ni esclaves ni libres, ni hommes ni femmes, car tous vous êtes un en Jésus-Christ. » (Galates 3.28)

Un nouvel espoir !

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Lecture biblique : Esaïe 40.1-11

1 Redonnez de l’espoir à mon peuple. Oui, redonnez-lui de l’espoir, dit votre Dieu. 2 Rendez courage à Jérusalem. Annoncez-lui à haute voix : « Les travaux forcés sont terminés pour toi, tu as fini de réparer ta faute, le SEIGNEUR t’a fait payer le prix total de tous tes péchés. » 3 Quelqu’un crie : « Dans le désert, ouvrez un chemin pour le SEIGNEUR. Dans ce lieu sec, faites une bonne route pour notre Dieu. 4 Remplissez de terre le creux des vallées, abaissez les montagnes et les collines. Changez en plaines toutes les pentes, et les hauteurs en vallée. 5 Alors la gloire du SEIGNEUR paraîtra, et tous les habitants de la terre la verront. Voilà l’ordre du SEIGNEUR. » 6 Quelqu’un me dit : « Crie ! » Je demande : « Qu’est-ce que je dois crier ? » Il répond : « Ceci : les êtres humains sont comme l’herbe, ils ne sont pas plus solides que les fleurs des champs. 7 Quand le souffle du SEIGNEUR passe sur elles, l’herbe sèche et la fleur tombe. — Oui, les êtres humains sont aussi fragiles que l’herbe. — 8 L’herbe sèche et la fleur tombe, mais la parole de notre Dieu tient toujours. » 9 Jérusalem, monte sur une haute montagne. Ville de Sion, crie de toutes tes forces. Toi qui apportes une bonne nouvelle, élève la voix, n’aie pas peur. Dis aux villes de Juda : « Voici votre Dieu ! 10 Voici le Seigneur DIEU. Il vient avec puissance. Il est assez fort pour gouverner. Il rapporte ce qu’il a gagné, il ramène la récompense de son travail. 11 Comme un berger, il garde son troupeau, il le rassemble d’un geste de la main, il porte les agneaux dans ses bras, il conduit doucement les brebis qui allaitent leurs petits. »
Nous sommes le 10 décembre. La date tant attendue approche ! Plus que quelques jours pour arriver au jour que tous, petits et grands, attendent depuis des semaines. Et tout le monde s’y prépare. On essaye de deviner ce que nous allons découvrir avec émerveillement ce jour-là… L’attente grandit. La tension est palpable. Enfin, nous allons bientôt savoir…

Je ne parle pas de Noël, je parle du nouvel épisode de Star Wars qui sort mercredi ! Qui sont les parents de Rey ? Luke est-il passé du côté obscure de la force ? Et qui est réellement Snoke, le nouveau grand méchant ?

Les mauvaises langues disent bien que la nouvelle trilogie ne fait que copier la première trilogie. Mais les mythes se répètent… l’histoire aussi ! Ce qui s’est passé il y a très longtemps, dans une lointaine galaxie, rappelle ce qui s’est passé il y a longtemps, dans un lointain pays en Palestine… et fait même écho à ce qui se passe aujourd’hui, chez nous.

Hier comme aujourd’hui, ne connaissons-nous pas un monde qui a perdu l’espoir, où de nouvelles formes de mal menacent, face à un avenir incertain voire bouché ? Et pourtant, hier comme aujourd’hui certains parlent de l’espoir fou d’un sauveur qui fera vaincre la lumière face aux ténèbres.

Et on n’est pas dans un film… Avec Esaïe, on est en Israël. Le prophète apparaît au VIIIe siècle avant Jésus-Christ alors que la menace assyrienne est aux portes du royaume d’Israël. Esaïe présente cette menace comme l’intervention de Dieu lui-même à l’égard de son peuple infidèle. Mais dans sa deuxième partie, qui commence avec le chapitre 40, le livre évoque un autre contexte, celui de l’invasion babylonienne au VIe siècle avant Jésus-Christ. Les Juifs ont été déporté à Babylone. Loin du pays que Dieu leur avait donné, loin du Temple où ils allaient rencontrer Dieu, les exilés sont dans le désespoir, avec la certitude que Dieu les a abandonné. Noir c’est noir, il n’y a plus d’espoir… Mais c’est dans ce contexte que Dieu va vouloir redonner de l’espoir à son peuple. Non, il ne l’a pas abandonné et il a encore des projets de libération pour lui. Et au cœur de ces chapitres 40-55, quatre poèmes commenceront à présenter un personnage mystérieux, le Serviteur du Seigneur, dans lequel le Nouveau Testament verra la figure du Messie, Jésus-Christ.

Notre texte de ce matin est un texte d’espérance, qui répondait aux besoins spirituelles des Juifs exilés à Babylone… mais qui répond aussi à nos besoins spirituels aujourd’hui. Je vous propose d’en souligner trois.

On a besoin d’espoir !

Un nouvel espoir. C’est désormais le titre du tout premier film de la saga Star Wars… L’espoir, c’est le premier besoin auquel notre texte répond : « Redonnez de l’espoir à mon peuple ! ». Un appel qui trouve un écho bienfaisant pour nous aujourd’hui, particulièrement en ce temps de l’Avent.

Les versions traditionnelles préfèrent traduire par « Consolez » ou « Réconfortez », et c’est bien le sens premier du verbe hébreux. Mais la consolation et le réconfort dont il s’agit s’expriment bien par un nouvel espoir dans le contexte du livre d’Esaïe. C’est bien en ouvrant des perspectives d’avenir que le Seigneur console son peuple. Le temps est venu de faire place au Seigneur et de l’accueillir comme un libérateur.

Dans ce temps de l’Avent, les paroles d’Esaïe trouvent leur écho dans le personnage de Jean-Baptiste, dont le ministère a été de préparer la venue du Christ, d’ouvrir ce chemin pour le Messie libérateur.

Aujourd’hui encore nous avons besoin d’espoir. Et le message de Noël est bien celui d’un espoir, toujours renouvelé. Le Fils de Dieu est venu, sa lumière brille dans notre obscurité. Face aux guerres et aux conflits, face au terrorisme et à la haine, face à la précarité et l’incertitude du lendemain, nous rappelons que le Fils de Dieu est venu naître dans une étable, pour nous éclairer de la lumière de Dieu, pour offrir sa vie pour nous, pour ressusciter victorieux.

Notre attente aujourd’hui, c’est qu’il vienne à nous par son Esprit pour nous relever, nous consoler, nous guider. Notre attente aujourd’hui, c’est qu’il revienne au jour fixé par Dieu, pour accomplir pleinement son Royaume et chasser définitivement jusqu’au dernier ennemi, la mort.

On a besoin d’espoir, et cet espoir se trouve en Jésus-Christ !

On a besoin de promesses fiables !

Des promesses, on en a entendu cette année, avec la campagne électorale… Sans se faire trop d’illusion sur leur fiabilité. Il y a bien un cynisme ambiant auquel nous cédons facilement. Nous n’arrivons arriver à croire aux promesses qu’on nous fait, échaudés que nous sommes par l’omniprésence de la langue de bois, les publicités mensongères ou les fake news…

Esaïe le dit : « les êtres humains sont comme l’herbe, ils ne sont pas plus solides que les fleurs des champs. Quand le souffle du SEIGNEUR passe sur elles, l’herbe sèche et la fleur tombe. — Oui, les êtres humains sont aussi fragiles que l’herbe… » (v.6b-7)

Oui les humains sont fragiles… et leurs promesses aussi ! Ce n’est pas sur un homme que tout notre espoir peut reposer. Même s’il s’agissait d’un Jedi… C’est un appui bien trop fragile. Mais comme le dit Esaïe : « L’herbe sèche et la fleur tombe, mais la parole de notre Dieu tient toujours. » (v.8)

A la fragilité de l’être humain, le prophète oppose la force de la parole de Dieu. Sa parole, ce sont ses promesses. Elles sont fiables et solides. Les Israélites l’avaient oublié, dans le désespoir de leur exil. Ils avaient oublié que le jugement de Dieu n’effaçait pas ses promesses irrévocables.

Nous pouvons penser parfois que nos erreurs, nos fautes, nous ferment les portes des promesses de Dieu. Elles peuvent, certes, nous éloigner de Dieu, provoquer en nous une sorte d’exil spirituel. Mais les promesses de Dieu demeurent.

« Si nous lui sommes infidèles,
lui demeure fidèle,
car il ne peut se renier lui-même. »
(2 Timothée 2.13)

Il est donc toujours temps de revenir à lui et de repartir à zéro. Toujours.

On a besoin de douceur !

La fin de notre texte est extraordinaire. Le prophète annonce la venue du Seigneur, en vainqueur, dans toute sa puissance… Et c’est un berger qui arrive, plein de douceur et de bienveillance !

« Voici le Seigneur DIEU. Il vient avec puissance. Il est assez fort pour gouverner. Il rapporte ce qu’il a gagné, il ramène la récompense de son travail. Comme un berger, il garde son troupeau, il le rassemble d’un geste de la main, il porte les agneaux dans ses bras, il conduit doucement les brebis qui allaitent leurs petits. » (v.10-11)

Dans la promesse d’Esaïe Dieu ne vient pas en inspirant la peur mais en inspirant la paix et la confiance. Comme il se révéla à Elie dans la souffle doux et subtil et non dans le feu et la tempête.

Comme le disait Yoda à Anakin Skywalker avant qu’il devienne Dark Vador, avec une sagesse aux accents bibliques : « La peur est le chemin vers le côté obscur : la peur mène à la colère, la colère mène à la haine, la haine mène à la souffrance. »

La peur, la colère, la haine, la souffrance… L’espérance d’Esaïe y répond. Le message de Noël y répond. En Jésus, Dieu ne vient pas en inspirant la peur mais la paix et la confiance. Le Fils de Dieu vient avec douceur. Alors même que le peuple attendait un libérateur guerrier, que Jean-Baptiste lui-même semblait annoncer un juge intraitable, c’est un petit enfant qui viendra. Un enfant qui, adulte, se comparera à un bon berger qui prend soin de ses brebis, qui est prêt même à donner sa vie pour elles.

On a besoin de douceur et de bienveillance. Alors même que ce ne sont pas vraiment des valeurs qui sont mises en avant dans notre société, beaucoup plus marquée par la compétition, la lutte, la réussite personnelle… des valeurs qui sont aussi souvent génératrices de peur : la peur d’échouer, d’être devancé.

Nous pouvons, au contraire, regarder l’avenir avec paix et confiance, parce que nous avons un Dieu tout-puissant qui porte sur nous un regard bienveillant et plein de douceur.

Conclusion

Mercredi, je serai au cinéma pour voir le nouveau Star Wars. J’ai réservé ma place depuis plusieurs semaines… Je suis impatient ! Mais, évidemment, ce n’est que du cinéma. Le véritable espoir dont nous avons besoin ne peut pas venir d’un homme, même s’il s’agissait d’un Jedi !

Ou plutôt, il ne peut pas venir d’un homme seulement… Car Jésus-Christ est bien un homme mais il est aussi le Fils de Dieu.

On a besoin d’espoir. On a besoin de promesses fiables. On a besoin de douceur. Tout cela on le trouve en Jésus-Christ. Il a vaincu la mort : sa résurrection est notre espoir le plus grand. Il est venu accomplir le projet de Dieu : il accomplit ses promesses. Il est devenu l’un des nôtres, humble serviteur, pour manifester la compassion de Dieu.