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Christ est Roi ! Lorsque nous affirmons que Christ est notre roi, notre seigneur, nous disons bien que nous voulons le suivre…Pour l’apôtre Pierre, suivre le Christ, c’est se soumettre à son autorité, pour faire sa volonté.
Mais à quoi ça ressemble de faire la volonté du Christ dans une société souvent loin de notre idéal spirituel ? Pierre s’exprime à une époque où la société gréco-romaine est complètement païenne, injuste, déséquilibrée, avec un ordre social contraignant et peu équitable. Et Pierre donne 3 exemples de l’impact de la soumission au Christ, qui conduit globalement à respecter les structures sociales, à nous y soumettre, mais volontairement, en témoins du Christ et pas en petits pions sans caractère. Dans la vie citoyenne, Pierre nous appelle à être irréprochables ; dans la vie professionnelle, à rester intègres quoi qu’il en coûte, et maintenant… la soumission dans la vie de couple !
On entre ici sur un terrain miné : le sujet est délicat, et Pierre ne correspond pas au discours politiquement correct du 21e siècle.
Quelques mots de contexte avant de lire le passage. Dans l’antiquité, l’homme est le chef de famille, avec quasiment tous les droits. C’est lui le boss ! Il donne les orientations du foyer, prend quasiment toutes les décisions, et a autorité sur sa maisonnée (famille et domestiques). Ensuite ça dépend de l’homme, mais voilà son statut. Lorsqu’un homme se convertit, sa famille entière le suit dans l’église. Mais lorsqu’une femme se convertit, la famille ne suit pas forcément ! souvent, la femme se retrouve en porte-à-faux avec son époux, et cela peut introduire un énorme décalage avec son mari, d’autant plus difficile à vivre que la relation est très hiérarchique.
Lecture biblique : 1 Pierre 3.1-7
1 Vous, de même, femmes, soyez soumises à votre mari, afin que, même si quelques-uns refusent de croire à la Parole, ils soient gagnés, sans parole, par la conduite de leurs femmes, 2 en considérant votre conduite pure, respectueuse.
3 Que votre parure ne soit pas extérieure : cheveux tressés, bijoux d’or, toilettes élégantes ; 4 mais qu’elle soit la disposition cachée du cœur, parure incorruptible d’un esprit doux et paisible, qui est d’un grand prix devant Dieu.
5 C’est ainsi qu’autrefois se paraient les saintes femmes qui espéraient en Dieu, étant soumises à leurs maris : 6 telle Sara, qui obéissait à Abraham, l’appelant son seigneur, elle dont vous êtes devenues les filles en faisant le bien, et en ne vous laissant troubler par aucune crainte.
7 Vous les maris, de même, menez la vie commune en tenant compte de la nature plus délicate de vos femmes ; montrez-leur du respect, puisqu’elles doivent hériter avec vous la grâce de la vie, afin que rien n’entrave vos prières.
Respecter son conjoint
Les femmes
Lorsque Pierre commence à parler des facettes de la soumission au Christ, il rappelle que l’objectif, c’est de témoigner de notre vie avec Dieu, notamment par nos actions et notre comportement: Ayez une bonne conduite parmi les païens ; ainsi, même s’ils vous calomnient en vous traitant de malfaiteurs, ils seront obligés de reconnaître le bien que vous faites (1 Pierre 2.12).
Pour l’épouse, l’objectif est le même : rester témoin de ce qui est juste et bon, même avec un mari indifférent ou hostile à notre foi. On ne parle pas ici des cas où le conjoint (homme ou femme d’ailleurs) devient dangereux pour notre vie ! Mais d’un décalage spirituel. Même quand ce n’est pas possible de parler de sa foi, il est toujours possible de témoigner par nos actes et notre attitude – c’est la conduite « pure » et respectueuse : respectueuse envers son mari, oui, mais surtout respectueuse envers Dieu (c’est encore la « crainte » du Seigneur qui est évoquée ici).
Ce caractère vertueux place la croyante dans la lignée des femmes de foi qui apparaissent dans l’Ancien Testament. Pierre cite en particulier Sara, qui appelle Abraham son Seigneur (Gn 18.12) C’est la façon de parler de son mari à l’époque – autres temps, autres conventions: mesdames, vous n’êtes pas obligées d’appeler votre mari “Seigneur”!
Même si Sara avait du caractère et prenait des initiatives, elle a respecté et soutenu son mari dans leur grande aventure de foi. Et ce respect est d’une authentique beauté. Pierre ne dénonce pas vraiment la coquetterie quand il oppose la beauté cosmétique et la belle conduite: il souligne plutôt la valeur d’un comportement qui témoigne du Christ, plus précieux que l’or ou le diamant. Ca n’empêche pas de porter des bijoux ou de bien s’habiller, mais le plus beau n’est pas là.
C’est vrai que l’apparence peut devenir une obsession qui nous détourne de l’essentiel. La vraie beauté, ce n’est pas ce qui s’affiche sur Instagram avec une bonne posture, la bonne tenue ou le maquillage (d’ailleurs les hommes ne sont pas toujours épargnés par cette obsession des muscles, des tatouages, du style vestimentaire: la vanité n’a pas de genre!) – la vraie beauté, c’est la beauté du caractère.
J’hésite à parler de “beauté intérieure”, parce que le caractère se voit, concrètement, au quotidien, dans nos actes et notre attitude du lever au coucher. Jusque sur les traits du visage : une chipie se repère assez vite!
Cette beauté, c’est la douceur, la tranquillité, la force intérieure (“en ne vous laissant troubler par rien” v.6). Devant l’incompréhension ou la difficulté, même si on ne part pas, on peut vite tomber dans la récrimination, le reproche, la critique incessante, ou alors des petites vengeances passives-agressives, ou encore se fermer à l’autre pour se protéger. Mais au lieu des disputes et de la froideur, la douceur invite à chercher le bien de l’autre, à nous soucier de lui, à voir les choses de son point de vue, et à oser lâcher prise pour faciliter la vie de couple. C’est difficile, surtout quand nos efforts ne sont pas récompensés – d’où l’importance de s’enraciner dans la paix de Dieu, pour tenir avec force sur ce chemin de bienveillance et de respect. La douceur n’est pas de la mollesse, elle demande de la force de caractère pour aimer quoi qu’il en coûte.
Les hommes
Aux hommes, maintenant! Le croyant doit lui aussi respecter son épouse, en prenant notamment en compte sa fragilité. Cet argument peut nous faire tiquer aujourd’hui, car il renvoie à des stéréotypes un peu crispants. Cela dit, à l’époque, la femme est de toute façon en infériorité: dans une société où le travail manuel est à la base de l’économie, la musculature plus légère des femmes est considérée comme une faiblesse. Et puis, les femmes antiques ont de toute façon un statut inférieur au niveau social, juridique… C’est variable selon les milieux sociaux, mais une femme est généralement sous l’autorité d’un homme.
Mais sous ses aspects conservateurs, Pierre est en train de dire aux maris – et c’est ça le plus révolutionnaire! – que eux aussi ont des devoirs envers leur épouse, que eux aussi doivent faire des efforts dans leur comportement, et montrer du respect et de la bienveillance à leur moitié.
Quand un homme se convertit, la famille suit, donc Pierre n’évoque pas la question du décalage spirituel, il part du principe que le couple est converti. Et dans ce cadre-là, ils sont égaux devant Dieu, appelés au même héritage et à une vie de communion. Ce n’est pas parce que la société permet au mari de dominer sa femme qu’il doit le faire! Non! Disciple du Christ, lui aussi est appelé au respect et à la bonté.
C’est tellement important, que la vie de prière en dépend! Heureusement, Dieu nous écoute même quand on ne se conduit pas bien (sinon, on ne pourrait plus prier!). L’idée, derrière, je crois, c’est que la proximité avec Dieu se nourrit de nos efforts à devenir plus saints, dans nos relations horizontales. Aimer Dieu se nourrit de nos efforts à aimer l’autre. Et négliger son “plus proche prochain” (comme dit mon mari), c’est négliger sa vie avec Dieu.
Donc, que notre conjoint partage notre foi ou pas, dans tous les cas, au minimum, nous sommes appelés à témoigner par notre caractère et par notre attitude, en veillant à le respecter et à lui montrer de la bonté, en hommage au Christ.
Seul dans sa famille
Le focus de Pierre concerne la vie de couple, mais on peut facilement élargir à la vie de famille, en particulier lorsqu’il y a des tensions ou des décalages: des parents qui ne comprennent pas notre démarche, des enfants qui se sont éloignés de la foi, des petits-enfants indifférents, des frères et sœurs qui se moquent, des discussions à Noël qui sont à mille lieues de notre vie avec Dieu. Parfois, dans ces contextes-là, on ne peut pas ou plus parler de notre foi – et pour certains, c’est une tristesse, voire un échec. Mais nous pouvons toujours témoigner de Jésus, tout simplement parce que nous pouvons toujours nous efforcer de lui ressembler.
C’est exigeant, cela dit, parce que nos proches ont souvent le privilège (!) de voir la face cachée de notre personne: nos pics de colère, nos impatiences, nos jalousies, nos obstinations, nos intolérances, nos égoïsmes! etc.
C’est aussi en famille que les enjeux les plus sensibles ressortent: des conflits anciens, des vieux malentendus… ressembler au Christ dans ce contexte, c’est apprendre à rompre avec nos réflexes, nos mécanismes automatiques, avec notre historique. C’est affirmer: je suis une nouvelle créature, j’appartiens à Dieu, c’est sa vie qui coule en moi…
Et c’est une vraie bonne nouvelle, parce que c’est toujours possible : on peut être en difficulté dans sa vie de couple ou de famille/ incompris/ frustré, affaibli par l’âge, la maladie ou le handicap – Dieu parle à travers notre caractère et notre conduite. Dieu se révèle dans nos paroles, nos silences, notre douceur et notre tranquillité, notre respect de l’autre.
Sans accepter tout et n’importe quoi, respecter et aimer c’est viser ce qu’il y a de mieux pour l’autre, quitte à prendre sur nous pour rester tranquilles et bons. Notre choix est déterminant, même si le vrai travail de transformation, c’est Dieu qui le fait par son Esprit. Mais le Saint Esprit aura moins de liberté d’action si nous ne nous orientons pas résolument vers la sainteté et si nous ne prions pas Dieu de nous conformer à son Fils.
Finalement, chacun à sa façon est appelé à se mettre au service de l’autre, à s’investir du mieux possible dans la vie de couple ou de famille, à nourrir la confiance, le respect, l’amour, en signe de notre appartenance au Dieu d’amour. Et ça reste vrai, même quand il y a un décalage spirituel. La foi en Christ n’est pas un permis de saboter ou de négliger son mariage ou sa famille : comme en société ou au travail, le Christ nous invite à faire tous nos efforts pour lui ressembler, pour grandir en sainteté et en amour, même dans les situations inconfortables, même quand l’autre s’y oppose. C’est là que Dieu parle fort: quand la bonté que nous manifestons n’est pas naturelle, attendue, logique, mais qu’elle prend clairement sa source ailleurs.