Que ton règne vienne!

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https://soundcloud.com/eel-toulouse/que-ton-regne-vienne

Nous commençons aujourd’hui la période de l’Avent, qui nous mène jusqu’à Noël. Un des textes proposés pour aujourd’hui touche au thème de l’attente : certes, nous nous préparons à fêter Noël, le souvenir de la naissance de Jésus il y a 2000 ans, mais cette période est aussi l’occasion de nous rappeler qu’en tant que chrétiens, nous attendons aussi son retour, le retour du Christ ressuscité, qui a promis de venir mettre en place le royaume de Dieu.       Quand cela arrivera-t-il ? demandent les disciples. Jésus répond : « Peu importe quand, l’essentiel est de persévérer : ne vous découragez pas ». Il fait tout un discours qui annonce à la fois des événements proches (qui devaient arriver quelques années plus tard) et des événements lointains, que nous attendons encore : le retour du Seigneur. Le texte que nous allons lire arrive en conclusion du discours pour insister sur l’essentiel.

Lecture biblique: Marc 13.33-37

33 Faites attention ! Ne dormez pas. En effet, vous ne savez pas quand ce moment viendra. 
34 Pensez, par exemple, à un homme qui part en voyage. Il quitte sa maison et la confie à ses serviteurs. Il donne à chacun un travail à faire et il commande au gardien de la porte de rester éveillé. 
35 Restez donc éveillés ! En effet, vous ne savez pas quand le maître de la maison va venir. Ce sera peut-être le soir, ou au milieu de la nuit, ou quand le coq chante, ou le matin. 
36 S’il revient tout à coup, il ne faut pas qu’il vous trouve endormis. 
37 Ce que je vous dis, je le dis à tous : restez éveillés ! »

L’image qu’utilise Jésus se veut simple : attendre le retour du Seigneur, c’est comme un gardien de propriété qui ignore quand le maître doit revenir, et du coup reste éveillé pour pouvoir l’accueillir correctement. Puisqu’on ne sait pas, on attend – activement. On se tient prêt, on se concentre ! Les autres serviteurs sont eux aussi dans l’attente : ils ont un travail à faire, et il vaut mieux qu’il soit fait au moment où le maître reviendra !

  • La réalité du monde à venir

On divise souvent les gens en deux catégories: ceux qui voient le verre à moitié plein, et ceux qui voient le verre à moitié vide. A quelle catégorie appartenez-vous?

Quand on pense à la fin du monde, c’est un peu pareil. Il y a ceux qui voient le verre à moitié vide : les crises politiques, économiques, sociales, les catastrophes écologiques, les luttes spirituelles (p. ex. la persécution des chrétiens, comme on l’a vu dimanche dernier), les aberrations morales… L’inquiétude est légitime, et on peut vite se demander où cela nous mène, si l’humanité n’est pas en train de signer sa propre fin. Et face à ces difficultés, à ces impasses qui se multiplient, certains peuvent être tentés de se décourager. « Est-ce que le Maître va vraiment revenir ? Est-ce que c’est déjà la fin ? » avec peut-être mille questions qui surgissent alors : comment ça va se passer, etc. A ceux-là, Jésus répond : « peu importe quand la fin arrivera ou comment, faites ce que vous avez à faire, restez concentrés sur votre tâche, ne vous laissez pas détourner ou décourager par les difficultés qui vous entourent. »

Mais il y a aussi ceux qui voient le verre à moitié plein : mais non, ça va, l’humanité a déjà surmonté beaucoup d’épreuves et qui paraissent aussi dures qu’aujourd’hui (les invasions barbares, les guerres, les épidémies, l’Holocauste…). On trouvera bien une solution ! La fin n’est pas pour demain, rassurez-vous… Ce n’est pas seulement de l’optimisme, il y a peut-être aussi une part de routine, de nonchalance, qui repousse instinctivement l’échéance. « Le Maître reviendra, mais pas ce soir, enfin ! Peut-être demain, ou après-demain… » Le risque, c’est de nous laisser happer par le ronronnement du quotidien, de somnoler à moitié, en s’appuyant éventuellement sur le refus de spéculer : la fin viendra quand elle viendra (mais c’est très loin tout ça). Et à ceux-là aussi Jésus répond : « peu importe quand le Maître va venir ! Ne vous laissez pas entraîner sur les chemins de traverse, de détour en détour, au risque d’être bien loin du chemin quand le Maître reviendra. Restez concentrés sur votre route. »

Que nous penchions vers le verre à moitié vide ou à moitié plein, Jésus nous rappelle la réalité de son retour. Il rassure les inquiets, et il interpelle les détendus. On est tous concernés ! Devant cette réalité, il faut être prêt, en partant du principe que le Christ peut revenir dès aujourd’hui. Il y a un présupposé derrière, c’est que la « fin du monde », ce n’est pas la disparition pure et simple de notre monde, ni l’épuisement de notre univers qui pourrait s’annihiler, mais c’est la transformation de ce que nous connaissons, avec le retour du Maître qui revient dans sa maison. Dieu, qui vient instaurer son royaume. Jésus à ce stade ne va pas plus loin, mais l’espérance de son retour, aujourd’hui, ou demain, ou dans 3000 ans, anime les chrétiens depuis toujours. C’est même une donnée particulièrement présente dans le N.T. : se tenir prêt à accueillir le règne de Dieu.

  • Le regard fixé sur l’horizon

Alors, à quoi ça ressemble de rester éveillé ? d’attendre activement, avec détermination et concentration, le retour de Jésus ? Jésus ne le dit pas !

Dans le reste du discours, c’est garder l’esprit affûté : rester attaché au message de l’Evangile, sans se laisser perturber par d’autres discours ou par d’autres « messies ». C’est aussi persévérer dans l’épreuve : face à la difficulté, la souffrance, la persécution, tenir bon en gardant les yeux fixés sur la ligne d’arrivée. Dans d’autres passages, rester éveillé, c’est prier. On peut aussi penser que veiller, rester vigilant, c’est veiller à notre relation avec Dieu chaque jour (comme si c’était le dernier), ressaisir chaque jour en tant que chrétiens et en tant qu’Eglise la mission de Dieu dans laquelle nous sommes appelés à entrer (être témoins de ce que Dieu fait et va faire).

Au-delà de l’image de la veille et du sommeil, cette exhortation insistante de Jésus nous invite peut-être à redécouvrir aujourd’hui quelle est notre espérance, et son impact sur notre vie avec Dieu. A notre époque, l’espérance n’est plus un élément majeur de notre foi. On est souvent concentré sur la vie quotidienne, et le secours ou les conseils que Dieu peut nous apporter. Et c’est très légitime ! Sauf que la vie avec Dieu, c’est plus qu’une vie avec le meilleur coach du monde ! C’est une vie qui s’enracine dans l’assurance que le Christ est mort, a vaincu le mal, et est ressuscité – en anticipation d’un monde autre, juste, paisible, lumineux. C’est une vie qui tend vers l’accomplissement total de la promesse entrevue au matin de Pâques. Vivre avec Dieu, c’est lever la tête pour regarder l’horizon – et laisser l’horizon nous transformer, laisser les perspectives éternelles transformer nos objectifs, nos comportements, nos relations. C’est nous préparer au règne de Dieu.

Je vous donne juste un exemple : j’ai lu l’an dernier un excellent livre sur le mariage « Vous avez dit oui à quoi ? Et si Dieu avait imaginé le mariage pas seulement pour vous rendre heureux, mais aussi pour vous rendre saint ? » de Gary Thomas. Dans le mariage, nous avons souvent une perspective de quelques décennies, liée au plaisir, au bonheur, à l’intimité et à la confiance que nous pouvons vivre avec l’autre. Mais Gary Thomas pose le filtre de l’espérance sur la façon de vivre le couple : comment je peux, grâce à ma relation avec l’autre, devenir un peu plus celui/celle que je suis appelé à être pour l’éternité – et comment je peux l’aider lui à devenir un peu plus la merveilleuse personne qu’il est appelé à être pour l’éternité. Le mariage comme un chemin, ou une préparation, pas seulement vers le bonheur, mais aussi vers la vocation éternelle que Dieu nous donne. Ca change la perspective ! Chaque discussion, chaque décision ensemble, chaque dispute, devient, à la lumière de l’horizon, un lieu d’apprentissage de l’amour véritable, de la justice, de la vérité, de la paix – en un mot, de la sainteté.

Bien sûr, l’espérance a un impact dans toutes les situations de notre vie : la façon d’élever un enfant (avec quelle priorité : qu’il me réjouisse, qu’il fasse ce qui est bien vu dans la société, ou que Dieu le transforme peu à peu en la personne qu’il est appelé à être ?), le célibat, le travail, les relations familiales, les difficultés de la vie. Qu’attend Dieu de moi dans cette situation ? Comment je peux avancer avec lui, en apprendre davantage, me laisser transfigurer par l’Esprit de celui qui est ressuscité et qui veut, un jour, me ressusciter pour vivre dans la présence éternelle de Dieu ?

On peut vivre bien dans le présent, les pieds sur terre, mais les yeux fixés sur l’horizon – et la vision claire de là où nous allons aura forcément un impact sur notre façon d’avancer.

Alors c’est facile à dire, mais à faire… C’est sûrement une des raisons pour lesquelles Jésus insiste autant dans ce texte : restez éveillés ! gardez les yeux fixés sur le but ! Peut-être qu’une première étape sera de se rendre attentif, dans la lecture de la Bible, au poids de l’espérance qui nous est donnée, pour redécouvrir son impact. Peut-être qu’une deuxième étape, ce sera de prier : Seigneur, quelle est ma tâche aujourd’hui, dans cette situation ? Que ton règne vienne, un peu plus, dans ma vie, comme un signe de ce monde transformé que tu vas venir instaurer.

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