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Au chapitre 2, la Genèse évoquait la création de l’homme et la femme, leur vie paisible et harmonieuse dans un jardin luxuriant. Et ça peut paraître bien éloigné de la réalité de notre condition humaine aujourd’hui, et du monde dans lequel nous vivons. Or, justement, le chapitre 3 va nous révéler pourquoi notre monde aujourd’hui n’est plus celui décrit au chapitre 2.
On en était resté, à la fin du chapitre précédent, à cette phrase qui laissait déjà planer le suspense, laissant entendre que quelque chose allait se passer : « L’homme et sa femme sont nus tous les deux. Mais ils n’ont pas honte l’un devant l’autre. » (Gn 2.25)
Dès le début du chapitre 3 apparaîtra un nouveau personnage avec la figure du serpent. Avec lui, le mal, qui nous est extérieur, nous devient intérieur. Il devient le péché, le mal en nous. Et en cela, ce récit qui nous rejoint, dans notre lutte quotidienne face au mal.
Comme le texte est un peu long, je propose d’en diviser la lecture en cinq parties, que je commenterai l’une après l’autre.
1 Parmi les bêtes sauvages que le SEIGNEUR Dieu a faites, le serpent est le plus rusé. Il demande à la femme : « Est-ce que Dieu vous a vraiment dit : “Ne mangez aucun fruit du jardin” ? » 2 La femme répond au serpent : « Nous pouvons manger les fruits du jardin.
3 Mais pour l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : “Ne mangez pas ses fruits et n’y touchez pas ! Sinon, vous mourrez.” » 4 Le serpent répond à la femme : « Pas du tout ! Vous ne mourrez pas ! 5 Mais Dieu le sait bien : le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront. Vous serez comme des dieux, vous pourrez savoir ce qui est bien ou mal. »
La suspicion
Lorsque le serpent apparaît, c’est pour mettre en doute la parole de Dieu. Ou plutôt pour instiller la suspicion dans le cœur de la femme. Quant à ce que Dieu a dit. Ou plus précisément, quant aux prétendues intentions cachées de Dieu… « Dieu ne vous a pas tout dit… »
Vous savez, comme dans les théories du complot : on nous cache la vérité ! Ce n’est pas nouveau… C’est ce que prétend le serpent. Si Dieu empêche l’homme et la femme de manger du fruit de la connaissance du bien et du mal, c’est parce qu’il ne veut pas qu’ils deviennent comme lui, des dieux. Il veut garder égoïstement ses privilèges. « Dieu vous ment ! »
Bien-sûr, il ne le dit pas comme ça… Il le fait avec plus de finesse. Il pose une question, innocemment… et il déforme légèrement le commandement de Dieu. Mais la graine est semée. La graine de la suspicion… Une graine terriblement efficace.
Dès le début, nous voyons que la source du péché, dans la Bible, n’est pas morale mais spirituelle. Elle n’est pas d’abord dans le fait de faire des choses mauvaises… elle trouve son origine dans la suspicion, dans la perte de confiance en Dieu.
Parler du péché, ce n’est pas avoir un discours moraliste, ou faire la liste de ce qu’il ne faut pas faire. C’est d’abord parler du refus de Dieu.
Du coup, pour lutter contre le mal dans notre vie, il ne s’agit pas de faire la liste des péchés qu’on commet et de battre sa coulpe. Il nous faut avant tout développer notre foi, notre confiance en Dieu. Autrement dit, pour quitter les ténèbres, n’essayez pas de les faire disparaître mais approchez-vous de la lumière !
6La femme se dit : les fruits de cet arbre sont beaux, ils doivent être bons. Ils donnent envie d’en manger pour savoir plus de choses. Elle prend un fruit de cet arbre et le mange. Elle en donne à son mari qui est avec elle, et il en mange aussi. 7Alors leurs yeux s’ouvrent. Maintenant, ils voient qu’ils sont nus. Ils attachent ensemble des feuilles d’arbre, et cela leur sert de pagne.
La tentation
Lorsque la suspicion a pris racine dans le cœur, c’est le regard qui change. La femme voit le fruit de l’arbre différemment. On a même l’impression qu’elle ne voit plus que ça ! Le fruit n’a pas changé… C’est le regard de l’homme et la femme qui a changé. La tentation devient source de convoitise. La frontière entre les deux est mince !
Lorsque l’homme et la femme avaient une pleine confiance en Dieu, le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal n’avait pas d’attrait particulier. Dieu leur avait dit de ne pas en manger. Soit. Il y a tous les autres fruits ! Ce n’est pas grave. Mais quand le serpent a réussi à instiller le doute et la suspicion, alors le regard change. Et le fruit jusqu’ici sans intérêt devient beau, attirant, appétissant… tentant !
Je n’ai certainement pas à vous faire un long discours sur la tentation… Nous en faisons tous l’expérience. Parfois douloureusement. Nous connaissons tous cette sensation désagréable de savoir pertinemment que penser, dire ou faire cela n’est pas bon… mais nous laisser quand même entraîner à le faire ! Nous connaissons tous ce passage de la tentation à la convoitise… et nous savons pertinemment qu’il est alors trop tard !
Vous avez beau lutter, quand le regard a changé, le doigt a été mis dans l’engrenage… Alors, comme l’homme et la femme, nos yeux s’ouvrent. Et nous avons honte de notre nudité. Nous connaissons la culpabilité.
Ah ! Si seulement nous n’avions pas écouté la voix de la suspicion, si seulement nous avions gardé toute confiance en Dieu !
8Le soir, un vent léger se met à souffler. Le SEIGNEUR Dieu se promène dans le jardin. L’homme et la femme l’entendent et ils se cachent devant lui, parmi les arbres du jardin. 9Le SEIGNEUR Dieu appelle l’homme. Il lui demande : « Où es-tu ? » 10L’homme répond : « Je t’ai entendu dans le jardin. J’ai eu peur parce que je suis nu. Alors, je me suis caché. » 11Le SEIGNEUR Dieu lui demande : « Qui t’a appris que tu étais nu ? Est-ce que tu as mangé le fruit que je t’avais interdit de manger ? » 12L’homme répond : « La femme que tu m’as donnée, c’est elle qui m’a donné ce fruit, et j’en ai mangé. » 13Le SEIGNEUR Dieu dit à la femme : « Qu’est-ce que tu as fait là ? » La femme répond : « Le serpent m’a trompée, et j’ai mangé du fruit. »
La division
Plus rien n’est comme avant. Quelque chose s’est brisé. Instantanément. L’homme et la femme se cachent l’un de l’autre. Et pire, ils ont désormais peur de Dieu. Pourtant, Dieu ne vient pas menaçant : il se promène dans le jardin, précédé d’une brise légère.
Mais l’homme et la femme ont peur. Ils n’ont pas peur de Dieu parce qu’ils lui ont désobéi. Ils ont peur « parce qu’ils sont nus ». La nudité devient un problème parce que l’innocence est perdue. Ils ne supportent plus d’être nus devant Dieu, à cause de leur conscience souillée.
Alors chacun essaye de sauver sa peau : « ce n’est pas de ma faute, c’est la femme… ou c’est le serpent… » Vous remarquerez d’ailleurs qu’il y a, indirectement, une accusation portée contre Dieu : « c’est la femme que tu m’as donnée… », « c’est le serpent… » dont il est dit dès le début du chapitre qu’il a été créé par Dieu !
Ici, on n’est plus dans le processus par lequel nous commettons le mal… Nous sommes face aux conséquences, immédiates, du péché. La division, la relation brisée, la honte, la peur, la fuite… Les conséquences du péché dans notre vie sont multiples et multiformes. Sources de souffrance, de malaise, de mal-être.
14Alors le SEIGNEUR Dieu dit au serpent :
« Puisque tu as fait cela, je te maudis :
parmi tous les animaux,
tu avanceras sur ton ventre
et tu mangeras de la poussière
tous les jours de ta vie.
15Voici ce que je décide :
la femme et toi,
vous deviendrez des ennemis.
Ceux qui naîtront d’elle et ceux qui naîtront de toi
deviendront des ennemis.
Ceux qui naîtront d’elle t’écraseront à la tête,
et toi, tu les blesseras au talon. »
16Ensuite, le SEIGNEUR dit à la femme :
« Je rendrai tes grossesses pénibles,
et c’est dans la souffrance
que tu mettras des enfants au monde.
Tu seras attirée par ton mari,
mais il sera ton maître. »
17Puis le SEIGNEUR dit à l’homme : « Tu as écouté ta femme et tu as mangé le fruit que je t’avais interdit de manger.
À cause de toi je maudis le sol.
Tu devras te fatiguer
tous les jours de ta vie
pour tirer ta nourriture de la terre.
18Le sol produira pour toi
des plantes épineuses de toutes sortes.
Tu devras manger
ce qui pousse dans les champs.
19Tu gagneras ta nourriture
en transpirant beaucoup,
jusqu’à ta mort.
À ce moment-là,
tu retourneras dans la terre
d’où tu viens.
Oui, tu es fait de poussière
et tu retourneras à la poussière. »
La malédiction
Après les conséquences immédiates du péché, nous trouvons dans ces paroles l’évocation d’autres conséquences, qui s’étendent bien au-delà de nous-mêmes. La malédiction du péché, c’est qu’il a des conséquences.
Le serpent est maudit : il mordra la poussière. Et il sera en guerre contre la descendance de la femme : il sera source d’hostilité. La femme connaîtra la souffrance jusque dans l’acte même de donner la vie ! L’homme verra la souffrance envahir son travail quotidien.
C’est en réalité les souffrances et les frustrations du quotidien qui sont décrits dans ces versets. C’est la réalité d’une vie, d’un monde, d’une humanité où règne le péché. Et ce sont bien des malédictions. Même s’il faut bien faire avec, il ne faut pas pour autant se résigner. Au nom de ces versets, on va refuser la péridurale parce qu’il faut souffrir en accouchant, on va justifier la soumission de la femme à son mari alors que la domination du mari sur sa femme est présentée comme une conséquence du péché ! On va justifier la pénibilité du travail… parce qu’il faut souffrir ! Non !
Mais retenons cette leçon de ces paroles : les conséquences du mal que je commets ne me concerne pas moi seulement… elles impactent mon entourage, mon prochain, mon environnement. La malédiction du péché, c’est qu’il a des conséquences, au-delà de moi-même.
20L’homme, Adam, donne à sa femme le nom d’Ève, c’est-à-dire « la Vivante ». En effet, elle est la mère de tous les vivants. 21Le SEIGNEUR Dieu fait des vêtements en peau d’animal pour l’homme et la femme, et il les habille de cette façon. 22Le SEIGNEUR Dieu se dit : « Eh bien, l’homme est devenu comme un dieu : il connaît ce qui est bien ou mal. Maintenant, il ne faut pas qu’il prenne aussi les fruits de l’arbre de la vie. S’il en mangeait, il vivrait pour toujours. » 23Alors le SEIGNEUR Dieu chasse l’homme du jardin d’Éden et il l’envoie cultiver la terre qui a servi à le faire. 24Après que le SEIGNEUR a chassé l’homme, il place des chérubins à l’est du jardin d’Éden. Avec une épée de feu qui tourne dans tous les sens, les chérubins gardent l’entrée du chemin qui conduit à l’arbre de la vie.
Vers la rédemption !
Alors que tout semble s’être effondré, que tout semble perdu, un espoir surgit à la fin de ce chapitre. D’abord par un acte de foi étonnant de la part de l’homme qui décide de donner un nom à sa femme et il l’appelle Eve. La vivante ! C’est vraiment étonnant, d’autant qu’il le fait immédiatement après que Dieu lui a dit : « Tu es poussière et tu retourneras à la poussière ! »
Et puis il y a l’attitude de Dieu à l’égard de l’homme et la femme. Il façonne pour eux des habits de peau en lieu et place de leur pagne improvisé. Il prend soin d’eux, en tenant compte de leur nouvelle condition et de leur honte d’être nus.
Certes, il les chasse du jardin d’Eden. Mais il semble que cela aussi est pour leur bien. Dieu reconnaît que l’homme est devenu comme un dieu… mais ce n’est pas une bonne nouvelle pour l’homme ! Car il n’est pas un dieu ! L’homme pourra avoir à nouveau accès à l’arbre de vie. Non pas comme un dieu mais comme une créature rachetée. Car on retrouve cet arbre dans l’Apocalypse, dans la vision de la nouvelle Jérusalem. Il est au milieu de la ville.
La réalité du péché est universelle, douloureusement universelle. Mais la bonté et la grâce de Dieu est toujours là pour nous rejoindre là où nous en sommes. Dieu prend soin de nous, même pécheurs. Il tient compte de notre condition et nous conduit sur un chemin d’espérance. Ce chapitre 3 aurait pu être la fin de l’histoire… il n’en est que le début. Parce que Dieu a un projet de salut pour l’humanité, qui s’accomplira en Jésus-Christ !
Et il nous rejoint aujourd’hui encore, dans notre lutte contre le mal en nous. Nous pouvons nous appuyer sur ses promesses et garder l’espérance. Il est fidèle, même lorsque nous sommes infidèle !