Est-ce que vous connaissez le mot « Evangile » ? que signifie-t-il, à votre avis ? littéralement, « bonne nouvelle » ; un des quatre évangiles, un des quatre livres qui racontent la vie de Jésus, qui est une bonne nouvelle pour nous ; le message qui concerne Jésus et qui résume la foi chrétienne…
Parmi ceux qui ont écrit un évangile (biographie de Jésus), il n’y a que Marc qui utilise ce mot, et il lui donne une place particulière.
Lecture biblique: Marc 1.1, 14-15
1 Commencement de la bonne nouvelle [évangile] de Jésus, Christ, Fils de Dieu.
[arrive le prophète Jean, le baptiste, qui prêche la venue du Messie et invite à se préparer en mettant de l’ordre dans sa vie pour l’accueillir. Jésus arrive à son tour, il reçoit le baptême de Jean]
14 Après que Jean eut été mis en prison, Jésus se rendit en Galilée ; il y proclamait la bonne nouvelle [évangile] de Dieu.
15 « Le moment favorable est venu, disait-il, et le règne de Dieu est tout proche ! Changez de vie et croyez à la bonne nouvelle [évangile] ! »
Marc donne le ton de l’usage du mot évangile : au v.1, c’est un peu le titre de son livre, qui résume ce qu’il va nous dire au sujet de Jésus : c’est le Fils de Dieu, celui qui va montrer par sa sagesse, sa puissance et sa compassion, qu’il est bien plus qu’un homme. Plus loin, le mot vient résumer le message de Jésus lui-même, sa prédication. Nous en aurons plein d’exemples par la suite, mais la Bonne Nouvelle, c’est ce que Jésus vient annoncer dans sa région. Nous sommes ici au tout début du ministère de Jésus.
Le règne de Dieu au cœur du message
Or, qu’est-ce qui est au cœur du message de Jésus ? La venue du règne de Dieu. C’est vraiment ainsi que vous définiriez l’Evangile ? En mettant l’accent sur le Royaume de Dieu ? Spontanément, on parlerait plutôt de salut, d’incarnation, de pardon, d’amour… Mais Jésus, celui qui accède au trône divin le jour de l’Ascension, le Roi, Jésus annonce dès le début le Royaume de Dieu.
Et pour lui, c’est une excellente nouvelle !! mais… qu’est-ce que ça veut dire ? Nulle part, nous n’avons la définition. Comme quelqu’un qui viendrait vous voir avec un immense sourire : « ça y est, on l’a ! » Super !! mais quoi ? On sent qu’il faut se réjouir, mais… de quoi, exactement ? ils ont quoi ? les clefs de leur nouvel appartement mieux placé, la réponse à une demande de formation, le cadeau pour la fête des mères, le DJ pour le mariage ?… En fonction du contenu, vous ajustez votre réponse ! Et ça peut être gênant quand on ne sait pas de quoi l’autre se réjouit.
Alors, le règne, c’est quoi ? c’est l’activité du roi : il règne. En général, en histoire-géo, on parlera du règne de Louis IX p. ex. (1226-1270) : les dates correspondent à la période où il est en charge, où c’est lui le roi, lui qui a autorité. Du coup, le règne implique aussi un royaume, un lieu, des personnes, sur qui ce roi a autorité, et dans la bouche de Jésus, on peut comprendre à la fois règne et royaume.
Il y a quelque chose de temporel dans l’annonce de Jésus : le règne de Dieu va bientôt commencer. Sauf que… Dieu est déjà roi ! à la création, à l’époque d’Abraham, à l’époque de Jésus et à notre époque ! ce n’est pas comme s’il y avait d’autres dieux, d’autres créateurs en rivalité avec lui pour monter sur le trône : personne ne vient avant ou après Dieu !
Alors au temporel, il faut ajouter du géographique : son règne existe, quelque part, mais les frontières bougent, et l’étendue du royaume de Dieu est en train de changer. Dans la géopolitique spirituelle, à l’époque de Jésus, on a une espèce de statu quo : les humains ont opté depuis des millénaires pour le séparatisme, et ils se sont exclus du royaume de Dieu. Ils s’auto-gouvernent, avec des conséquences merveilleuses comme l’harmonie entre les peuples, la paix entre les personnes, la justice et l’équité, la vérité et l’honnêteté, l’amour et la compassion, la générosité… Ah non pardon, je me suis trompée ! Ca, c’est quand Dieu règne !
Depuis le coup d’état humain, la gouvernance a changé, et on est plutôt confronté à l’insécurité, à la violence, aux inégalités, à la cupidité – peu importe l’endroit du monde. Qui est roi dans notre monde séparatiste ? L’être humain, avec ses grandeurs et ses décadences… mais pas seulement ! A notre insu, nous avons donné le pouvoir à des êtres mal intentionnés, à l’adversaire de Dieu, au rebelle qui ne supportait pas l’autorité de Dieu et qui préfère le chaos à l’harmonie – celui qui qu’on appelle Satan, l’accusateur, l’adversaire. Il nous flatte en persiflant : « oui, oui, vous êtes maître de votre vie », alors qu’en douce, il fait ses petites affaires et il compte les pertes.
Jésus se met à parcourir le pays avec ce message : les lignes bougent… le roi légitime arrive pour rétablir un règne pacifique et juste. Et le déclic, le moment clef, c’est la venue de Jésus lui-même : même s’il n’en parle pas encore, c’est lui, Jésus, Fils de Dieu devenu homme, Roi divin, c’est lui qui fait bouger les lignes. Il vient là en ambassadeur, en diplomate, pour annoncer le changement de régime, et conduire les négociations. Avec qui ?
Du côté des négociations, Jésus ne prendra pas la peine de parler avec les dirigeants humains, avec l’Empereur ou même avec le gouverneur romain. Non, Jésus sait très bien que puissants ou faibles, nous sommes tous manipulés d’une manière ou d’une autre en coulisse. Non, il négocie directement avec Satan ! Je ne sais pas trop comment ça s’est passé, la géopolitique spirituelle dépasse notre niveau de connaissance, mais ce que je sais, c’est que l’ambassadeur Jésus a été prêt à payer le prix fort pour que le changement de régime se fasse avec le moins de dommages collatéraux possibles. Il a négocié notre réintégration dans le royaume de Dieu, comme un transfert de population, en mettant sur la table sa vie, sa justice, sa perfection et sa puissance, et il est mort. Sauf que sa vie et sa justice étaient plus que suffisantes pour couvrir le coût de notre rançon, et il est ressuscité : Satan, et son système basé sur la destruction, la perversion, et la mort, est en train de s’écrouler.
Et en parallèle, il y a l’annonce politique du changement de règne, et elle, Jésus la destine à tous, aux hommes, aux femmes, aux enfants : c’est un fait, les lignes bougent. Qu’est-ce qu’on choisit ? On reste du côté séparatiste ou on se rallie au Roi qui arrive ?
Une annonce solennelle
Le mot évangile, « bonne nouvelle », a un sens particulier à l’époque de Jésus, c’est un mot assez solennel. Un peu comme un faire-part. Et un faire-part peut avoir un double sens : un faire-part de naissance vous annonce que la famille a changé, qu’il y a un avant et un après. Un faire-part de mariage vous prévient d’un événement heureux à venir… Dans la bouche de Jésus, l’Evangile est un double faire-part : Dieu a pris les choses en main, le déclic est passé… et le royaume arrive, de façon inexorable.
C’est en cours, ça a déjà commencé – et c’est une excellente nouvelle ! Le changement commence avec la venue de Jésus, la victoire est scellée à sa mort et à sa résurrection, et le signe de sa victoire, c’est qu’il prend place à la droite de Dieu, Jésus ressuscité, Jésus roi. Ce n’est pas encore complètement visible, l’Adversaire déchu fait encore des siennes, espérant utiliser la technique de la terre brûlée, mais le roi a remporté la victoire, et son règne approche.
L’Ascension est cruciale pour nous, pas parce que c’est un long week-end ! mais parce que ce moment nous rappelle que le règne de Dieu est en marche, de façon inexorable. le message de Jésus dépasse la dimension individuelle de notre salut et de notre relation personnelle avec Dieu : il y a une dimension globale, mondiale, cosmique car Dieu veut rétablir l’harmonie dans ce monde, voir la justice triompher, la vie s’épanouir, la joie éclater.
Une décision à prendre
Vous êtes dans la salle d’attente de la gare Matabiau, il est 10h du matin, et vous attendez le train pour Bordeaux. Une annonce passe dans les enceintes (« le train en direction de Bordeaux Saint-Jean est arrivé en voie 4. Il partira voie 4, à 10h23 »). Dans cette annonce, il y a une question : votre train est là, vous faites quoi ?
Jésus fait la même annonce : le royaume est en route… Alors, vous faites quoi ? Vous rejoignez l’aventure ? Ah vous n’avez pas de billet, et pas assez sur vous pour en acheter ? C’est pas grave, Jésus vous l’offre ! Il paye votre place.
Changez de vie et croyez ! Montez dans le train ! rejoignez le royaume… En annonçant que les lignes bougent, Jésus nous interpelle : il faut prendre une décision. Il faut se positionner. Un changement de régime est en cours, on ne peut pas rester neutre, il faut choisir. A la différence de la géopolitique humaine, Jésus ne demande pas de prendre les armes… Il demande plutôt de baisser les armes ! de laisser de côté le séparatisme et ses illusions, ses mensonges, ses décadences, pour faire allégeance au vrai Roi, le roi de justice et de paix. La foi, ce n’est pas seulement une ouverture au monde spirituel… une connexion à un Être supérieur… C’est un positionnement, un acte politique, une appartenance : le Roi légitime arrive, et je le rejoins. Je fais un choix.
En faisant cet acte d’allégeance aujourd’hui, alors que la victoire est proclamée sans que la passation de pouvoir ait été officielle, nous vivons déjà un peu de ce règne de Dieu : connectés à lui, nous recevons sa paix et son pardon, son amour et ses paroles de vérité. Nous goûtons à son royaume, à sa liberté, à sa bonté. Nous sommes citoyens du Royaume de Dieu, même si nous habitons encore ici ou là.
Et cela, nous l’expérimentons personnellement, dans la proximité avec Dieu, et ensemble, en église, en communautés rassemblées comme des avant-postes avant-gardistes du Règne de Dieu qui vient, où nous apprenons ensemble à quoi ressemble la vie avec Dieu, où nous nous soutenons ensemble pour expérimenter les projets innovants de Dieu – des projets d’amour et de vérité qui se concrétisent entre nous, et sur le terrain de notre vie quotidienne…
Alors l’apprentissage est long, pour apprendre la langue, la culture, les us et coutumes du Royaume de Dieu, d’autant que comme toute différence géopolitique, nos choix peuvent vite créer des incompréhensions, des écarts, des tensions… Mais ça en vaut la peine ! Vous préférez quoi, les ruines d’un royaume de mensonge et de violence, ou les frémissements de la justice et de la paix ?
Jésus est Roi, à la droite du Père. Son règne arrive, inexorablement – le message résonne avec autant d’urgence qu’à son époque : à qui rendrons-nous allégeance ? Au roi puissant, aimant, juste et libérateur, ou à l’imposteur qui agite la bannière de l’autonomie pour mieux nous manipuler ?
Jésus nous invite à rejoindre l’aventure… à monter dans le train… Où vous situez-vous ? dans la salle d’attente de la gare, ou sur le quai, ou dans un mauvais train, ou sur le marche-pied, hésitant, ou installés dans le bon train, endormis ou réveillés… L’annonce résonne : que choisissez-vous ?