Archives mensuelles : mars 2018

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La vie de disciple n’est pas un long fleuve tranquille…

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https://soundcloud.com/eel-toulouse/la-vie-de-disciple-nest-pas-un

Matthieu 7.13-29
13« Entrez par la porte étroite. En effet, la porte qui ouvre sur la mort est large, et le chemin pour y aller est facile. Beaucoup de gens passent par là. 14Mais la porte qui ouvre sur la vie est étroite, et le chemin pour y aller est difficile. Ceux qui le trouvent ne sont pas nombreux. »
15« Faites attention aux faux prophètes ! Ils viennent à vous, habillés avec des peaux de moutons. Mais au-dedans, ce sont des loups féroces. 16Vous les reconnaîtrez en voyant ce qu’ils font. On ne cueille pas du raisin sur des cactus ! On ne cueille pas des figues sur des plantes piquantes ! 17Oui, un bon arbre produit de bons fruits, un arbre malade produit de mauvais fruits. 18Un bon arbre ne peut pas produire de mauvais fruits, et un arbre malade ne peut pas produire de bons fruits. 19Quand un arbre ne produit pas de bons fruits, on le coupe et on le jette dans le feu. 20Donc, vous reconnaîtrez les faux prophètes en voyant ce qu’ils font. »
21« Pour entrer dans le Royaume des cieux, il ne suffit pas de me dire : “Seigneur, Seigneur ! ” Il faut aussi faire la volonté de mon Père qui est dans les cieux. 22Quand je viendrai pour juger les gens, beaucoup me diront : “Seigneur, Seigneur, c’est en ton nom que nous avons parlé, c’est en ton nom que nous avons chassé les esprits mauvais ! C’est en ton nom que nous avons fait de nombreux miracles ! ” 23Alors je leur dirai : “Je ne vous ai jamais connus. Allez-vous-en loin de moi, vous qui faites le mal ! ” »
24« Celui qui écoute toutes ces paroles et m’obéit, celui-là ressemble à un sage. Le sage construit sa maison sur de la pierre. 25La pluie tombe, les rivières débordent, les vents soufflent et se jettent contre la maison. La maison ne tombe pas, parce qu’on a posé ses fondations sur de la pierre. 26Mais celui qui écoute mes paroles et ne fait pas ce que je dis, celui-là ressemble à quelqu’un de stupide. Celui qui est stupide construit sa maison sur le sable. 27La pluie tombe, les rivières débordent, les vents soufflent et frappent la maison. La maison tombe et elle est complètement détruite. »
28Quand Jésus a fini de dire toutes ces paroles, les foules sont très étonnées par sa façon d’enseigner. 29En effet, il ne fait pas comme les maîtres de la loi, mais il enseigne avec l’autorité que Dieu lui donne.
Jusqu’ici, on s’est bien rendu compte que les enseignements de Jésus rassemblés dans le Sermon sur la Montagne sont percutants, voire dérangeants, pour le moins exigeants. Mais là, ça se termine en feux d’artifice !

Au cas où on le croirait encore, la vie de disciples du Christ n’est pas une sinécure ! D’ailleurs, dans son enseignement, Jésus n’a jamais dit que la vie du chrétien serait facile, toujours agréable, sans embûche, sans épreuve, comme sur des roulettes ! Non, la vie de disciple de Jésus-Christ n’est pas un long fleuve tranquille… mais elle vaut vraiment la peine d’être vécue !

Emprunter le chemin étroit

Avec la double métaphore de la porte étroite et du chemin étroit, Jésus avertit que choisir de le suivre, ce n’est pas choisir le chemin de la facilité. Il ne suffit pas de suivre le mouvement, il faut emprunter le bon chemin. Or le chemin que Jésus nous propose est étroit et peu de gens l’empruntent. Autrement dit, si nous choisissons de suivre le Christ, ça va être difficile et nous serons minoritaires ! On ne pourra pas dire que Jésus ne nous a pas prévenu…

L’attrait du chemin large, c’est celui de la facilité. Non seulement parce qu’il est large mais aussi parce que c’est celui que la majorité emprunte. Et c’est toujours bien plus facile de suivre la foule que de se démarquer des autres. D’autant que la porte étroite dont parle Jésus, il faut la chercher pour l’emprunter. En effet, si Jésus exhorte à entrer par la porte étroite, il précise que « ceux qui la trouvent ne sont pas nombreux. »

Autrement dit, le chemin naturel, que tout le monde emprunte, c’est celui qui mène à la mort… Et il faut une vraie décision, ferme et assurée, pour chercher un autre chemin et trouver la porte qui y conduit. C’est ce que l’Evangile appelle la repentance, le changement radical de la foi, la décision de changer de chemin et de suivre le Christ.

Est-ce que vous voulez simplement faire comme tout le monde ? Ou êtes-vous prêts à vous démarquer et choisir le chemin qu’ouvre le Christ ? Même si c’est un chemin étroit, inconfortable, qui peut vous mettre en décalage par rapport aux autres… Je pense que c’est une question que nous avons toujours à nous poser, parce que l’attrait du chemin large demeure tout au long de notre vie.

Discerner les loups déguisés en agneaux

Le deuxième enseignement porte sur les faux prophètes, avec une mise en garde : faites attention car les apparences sont trompeuses : des loups féroces sont déguisés en agneaux innocents !

Il y a toujours eu, et il y a encore, des enseignants plus ou moins gourous et malveillants qui ont l’apparence de la sagesse et de l’humilité et cachent une soif de pouvoir. Ils utilisent les faiblesses, la crédulité des gens pour les manipuler, en usant d’un langage spirituel, parfois teinté de couleur chrétienne, saupoudré de paroles bibliques.

Comment les démasquer ? Ici, c’est la métaphore de l’arbre et de ses fruits que Jésus utilise : on reconnaît l’arbre à ses fruits ! Autrement dit, il ne faut pas en rester aux apparences, aux premières impressions mais examiner les choses avec sérieux, avec recul (il faut du temps pour que les fruits mûrissent)…

En fait, il s’agit de ne pas gober tout cru ce qu’on nous donne à entendre. Quand je vois tout ce qui circule sur les réseaux sociaux, ce que les gens partagent sans prendre de recul, sans aucun esprit critique… je suis atterré. Et c’est tout aussi valable pour les chrétiens que pour les autres. La mise en garde de Jésus résonne vraiment d’une manière particulière à l’heure d’Internet. Facebook, Youtube, ils sont souvent là les faux prophètes aujourd’hui !

Mais la vigilance doit être de mise en toutes circonstances. Y compris le dimanche matin à l’église ! Il ne s’agit pas de faire la chasse aux sorcière ! Mais de faire preuve de discernement…

Faire la volonté de Dieu

Le troisième enseignement de Jésus ici est peut-être le plus perturbant ! Il s’agit de faire la volonté de Dieu. Au début, on comprend bien : « Pour entrer dans le Royaume des cieux, il ne suffit pas de me dire : “Seigneur, Seigneur ! ” Il faut aussi faire la volonté de mon Père qui est dans les cieux. » OK, c’est normal : les belles paroles ne suffisent pas, il faut qu’elles se traduisent en actes.

Sauf que lorsqu’on lit la suite, ça se complique. Il y est quand même question de parler au nom de Jésus, de chasser des esprits mauvais en son nom et de faire des miracles en son nom. Ce ne sont pas que des paroles… Et Jésus leur dira : « Je ne vous ai jamais connus. Allez-vous-en loin de moi, vous qui faites le mal ! »

Cela signifie qu’on peut parler au nom de Jésus, chasser des esprits mauvais et accomplir des miracles en son nom… et ne pas faire la volonté de Dieu. On parlait d’apparences trompeuses avec les loups déguisés en agneaux, ici c’est encore plus flagrant ! Parce qu’ici, les fruits eux-mêmes sont trompeurs !

Les paroles spirituelles, les actes de puissance et les miracles ne sont pas suffisants, en eux-mêmes, pour attester de la fidélité à la volonté de Dieu. Parfois, la volonté de Dieu est dans le silence, parfois elle est dans l’épreuve et la faiblesse…

Bâtir sa maison sur le roc

Le Sermon sur la Montagne se termine avec une parabole. Elle évoque deux maisons, l’une construite par un fou, sur du sable. L’autre construite par un homme sage, sur le roc. Lorsque vient la tempête, la première maison s’écroule alors que l’autre reste debout. Or, qui est le sage de la parabole ? C’est celui qui écoute les paroles du Christ et les met en pratique. Et qui est le fou ? C’est celui qui écoute aussi les mêmes paroles mais ne les met pas en pratique.

Autrement dit, il ne suffit pas d’écouter (et donc, de connaître la parole de Dieu), il faut la mettre en pratique. Sinon, l’écoute et la connaissance ne servent à rien. Et la maison s’écroule…

Ce n’est pas un hasard si le Sermon sur la Montagne se termine avec cette parabole. Elle souligne finalement que ce qui est vraiment important, ce n’est pas seulement l’écoute ou la connaissance mais la mise en pratique. On peut trouver les discours de Jésus magnifiques ou interpellant, on peut connaître le message de l’Evangile, savoir par cœur des dizaines de versets bibliques… si on ne met pas en pratique ces paroles, si on ne laisse pas le Seigneur nous changer en profondeur à travers elle, ça ne sert à rien !

Cette dernière parabole nous le demande : ce que vous avez lu ou entendu des paroles de Jésus, comment changent-elles votre vie ? Car sinon, vous êtes en train de construire votre maison sur du sable…

Mais aussi saisir les promesses

On pourrait être un peu KO après ces quatre enseignements musclés, surtout quand on les enchaîne ! Mais si ces paroles nous secouent et nous interpellent, elles peuvent aussi nous encourager. Parce qu’elles contiennent aussi de belles promesses !

Tout d’abord, même si la porte et le chemin sont étroits, ils conduisent bien à la vie. Et au-delà du chemin, c’est bien la destination du chemin qui compte ! On ne choisit pas la difficulté parce qu’on aime la difficulté mais parce qu’on suit le Christ qui nous conduit jusqu’à Dieu. Et ce chemin existe, il nous est accessible !

Ensuite, même s’il le dit juste en passant, Jésus dit bien qu’il y a des bons arbres et qu’ils portent de bons fruits. Être un bon arbre, dans cette métaphore, c’est être attaché au Christ et recevoir notre vie de lui. Et dans ce cas, nous porterons du bon fruit.

Pour la troisième parole, c’est peut-être moins évident d’y trouver un côté positif. Mais elle sous-entend quand même qu’il est bien possible de faire la volonté de Dieu ! Mieux : il n’est pas forcément besoin d’accomplir des choses extraordinaires (comme les miracles évoqués par ceux que Jésus rejette) pour accomplir cette volonté ! Elle nous est finalement accessible, si nous restons attachés au Christ.

Enfin, n’oublions pas que la parabole des deux maisons promet également à ceux qui construisent leur maison sur le roc, en mettant en pratique les paroles du Seigneur, qu’ils tiendront debout face aux tempêtes !

Conclusion

La vie de disciples du Christ n’est pas un long fleuve tranquille… c’est un fleuve impétueux, qui emprunte parfois d’étroits canyons et connaît même des chutes. Mais c’est bien le fleuve qui conduit à l’océan du Royaume de Dieu. Alors ça vaut vraiment la peine !

Faire le bien et bien le faire (culte du SEL)

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https://soundcloud.com/eel-toulouse/faire-le-bien-sel

Le SEL propose pour la prédication deux extraits de la 1e lettre de Pierre aux églises. Ces textes donnent un cadre à notre action dans le monde qui nous entoure. Dans ce monde, on trouve le mal, le refus de Dieu, mais aussi une grande détresse, la souffrance, la pauvreté, au loin et au près. Même si la Bible ne parle pas directement d’action humanitaire, elle est pertinente pour comprendre comment, pourquoi et dans quel but nous pouvons agir dans un monde qui souffre.

Lectures bibliques

1 Pierre 1.1-21 De la part de Pierre, apôtre de Jésus-Christ. A ceux que Dieu a choisis et qui vivent en exilés, dispersés dans les provinces du Pont, de la Galatie, de la Cappadoce, de l’Asie et de la Bithynie. 2 Dieu, le Père, vous a choisis conformément au plan qu’il a établi d’avance ; il vous a mis à part, grâce à l’Esprit Saint, pour que vous obéissiez à Jésus-Christ et que vous soyez purifiés par son sang. Que la grâce et la paix vous soient accordées avec abondance.

1 Pierre 2.11-1211 Je vous le demande, mes chers amis, vous qui êtes étrangers et exilés sur la terre : gardez-vous des passions humaines qui font la guerre à votre être. 

12 Ayez une bonne conduite parmi les païens ; ainsi, même s’ils médisent de vous en vous traitant de malfaiteurs, ils seront obligés de reconnaître vos bonnes actions et de louer Dieu le jour où il viendra.

Oui, Dieu nous appelle à faire le bien ! Et à bien le faire ! C’est le slogan/ l’objectif du SEL, de ses partenaires locaux, et c’est aussi notre vocation à chacun telle que Pierre la décrit.

1)     Notre identité : étrangers et choisis

Commençons par le commencement : avant de parler de ce que nous sommes appelés à faire, Pierre parle de ce que nous sommes. Il parle de notre identité. Et pour cela, dès la salutation de sa lettre, il utilise 2 mots : étrangers dans la dispersion/ exilés, et choisis, choisis par Dieu.

Quelques uns d’entre nous ne sont pas originaires de France, par choix ou parfois pour des raisons dramatiques (certains ont fui la guerre ou la pauvreté) – sûrement que vous comprenez mieux ce que signifie cette identité d’étranger. Pour les autres, qui se sentent chez eux ici, c’est peut-être moins naturel.

Le chrétien est un étranger, parce que par la foi, nous appartenons au peuple de Dieu. Par la foi nous sommes enfants du Père céleste, citoyens d’un Royaume qui n’est pas de ce monde. La lettre aux Hébreux cite toute une liste de croyants qui attendaient quelque chose de plus, qui n’étaient pas totalement chez eux dans la terre promise, mais qui regardaient au ciel pour trouver leur vraie patrie. Pour nous c’est pareil : français, angolais, australiens, vénézuéliens, ukrainiens, anglais, togolais, égyptiens, hollandais, congolais, et j’en oublie – nous sommes avant tout chrétiens, avant tout citoyens d’un Royaume qui n’est pas de ce monde.

Pourquoi ? Parce que nous avons été choisis. Dieu a mis tout son être dans ce choix, dans cette identité qu’il nous donne. Dieu le Père nous a désirés comme enfants, bien avant notre naissance. Pour chaque personne qui lui tournait le dos et perdait le lien avec son Père, Dieu le Fils est devenu un homme pour effacer nos fautes et notre ingratitude. Il s’est sacrifié, il a donné sa vie pour que nous puissions retrouver notre identité d’enfants de Dieu en recevant le pardon. Et puis Dieu l’Esprit, qui nous fait vivre de l’intérieur, qui conduit dans la vérité et dans l’amour, dans la justice et dans la paix. L’Esprit qui nous consacre, nous équipe, nous envoie pour vivre comme Dieu dans le monde. Le chrétien, enfant de Dieu, est appelé au bien sur la base de l’œuvre du Christ qui pardonne nos péchés, qui nous libère du mal, et de l’œuvre de l’Esprit, qui nous renouvelle de l’intérieur pour nous rendre bons.

A cause de ce choix de Dieu, notre identité profonde n’est plus ce qu’on trouve sur la carte d’identité : nous sommes d’abord citoyens du Royaume de Dieu. Et ça a des conséquences, en tout cas ça devrait en avoir : est-ce que nous nous considérons vraiment comme des étrangers, en route vers notre vrai chez-nous ? Est-ce que nous voyageons léger ou est-ce que nous nous sommes installés ici-bas comme si nous étions déjà arrivés ? Quelles sont nos ambitions, nos priorités ? Qu’est-ce qui compte à nos yeux ?

Comment est-ce que nous consommons, par exemple ? Sur le sujet de la pauvreté, notre façon d’acheter, de jeter, de dépenser notre argent, est essentielle. Car dans tous ces petits actes du quotidien, nous disons quelque chose de nos priorités, de ce à quoi nous accordons de la valeur, de notre rapport au monde présent et au monde à venir. Au quotidien, nous montrons où est notre trésor, et donc où est notre cœur, comme le disait Jésus. Est-ce que mon ambition c’est d’avoir une plus grande télé, de faire un plus beau voyage, d’avoir une plus grande maison ? D’avoir un statut social, de vivre comme les autres ? Ou alors de donner du sens à ce que j’ai, de faire de ma vie un lieu de bénédiction pour moi et pour les autres ?

Dieu est généreux avec nous : il nous a tout donné en Christ. Et même, en Occident, nous avons, quelque soit notre niveau de vie, globalement beaucoup de chance par rapport aux ¾ de la population mondiale. Se reconnaître enfant de Dieu, c’est aussi vivre dans la reconnaissance pour la générosité, pour la bénédiction de Dieu. Mais se reconnaître étranger, c’est entrer à notre tour dans cette générosité, chacun à sa façon.

Aucun de nous n’est irréprochable là-dessus, bien sûr, mais le SEL nous invite à faire un pas de plus : qu’est-ce qui changerait dans notre vie (peut-être une chose) si nous nous considérions sérieusement comme étrangers sur cette terre, mais aussi comme choisis par Dieu, bénis par Dieu et appelés à faire le bien ? Qu’est-ce qui pourrait changer ?

2)     Notre mission : faire le bien au milieu du monde

A cause de notre identité en Christ, notre vocation c’est de faire le bien. Dieu nous a sauvés pour une vie bonne. Pierre donne deux pistes.

D’abord, s’abstenir du mal. Nous avons été pardonnés, libérés de l’engrenage du mal et de l’égoïsme, et nous sommes appelés à nous défaire des résidus du mal en nous. Dans le texte, c’est l’appel à « se garder des passions humaines qui font la guerre à notre être ». Ces passions, dans le sens négatif, ce sont nos tendances à nous prendre pour les maîtres de notre vie, comme si tout tournait autour de nous et de notre satisfaction. Des tendances qui, même si elles paraissent ordinaires, peuvent nous détruire et détruire les autres, tout simplement, parce qu’elles nous éloignent de Dieu, qui est la source du véritable amour et qui peut seul nous donner le bonheur.

Ces tendances existent au niveau individuel et social, dans la société. Dans l’Israël ancien, les notables exploitaient les membres de leur peuple pour garder leurs privilèges. Ils vendaient, affamaient des frères, ils mentaient, ils étaient hypocrites et injustes. Et Dieu leur a maintes fois reproché cette société de consommation effrénée qui justifiait l’esclavage. C’est encore le cas aujourd’hui : malgré tous nos progrès, quand nos appétits égoïstes sont le moteur de la société, derrière il y a des personnes qu’on méprise – peut-être pas chez nous, mais en Asie ? En Afrique ? Quand Dieu nous demande de rejeter le mal, ce n’est pas du moralisme, mais par amour pour les plus faibles.

Mais faire le bien, c’est plus que s’abstenir du mal. La justice, c’est plus que l’absence d’injustice. Dans le texte, la conduite que Dieu nous demande d’avoir, elle est bonne, mais l’adjectif utilisé dans l’original c’est « beau », une « belle » conduite. C’est quoi le beau ? C’est ce qui nous émerveille, nous réjouit, nous est agréable. Le bien et le beau vont ensemble : ce qui est décent, est aussi bon, est aussi beau, et réjouissant.

Quel bien que Dieu nous demande de faire ? Toute la Bible regorge d’exemples, mais les deux commandements que Jésus pointe résument notre vocation : aimer Dieu et aimer l’autre. Honorer Dieu et honorer notre prochain. Participer à la justice de Dieu et agir pour le bien de l’autre. L’action sociale, par exemple, vise à répondre aux dysfonctionnements de notre société en s’engageant auprès des plus fragiles, des plus pauvres. C’est une façon d’honorer même les plus petits – ça fait partie des belles œuvres que nous sommes appelées à accomplir.

3)     Notre but : agir pour rendre gloire à Dieu

« Faire le bien », dans une perspective biblique, est quelque chose de centré sur Dieu, c’est motivé par le désir de l’honorer. Cela s’oppose à une manière de « faire le bien » qui consiste à se mettre soi-même en avant quand on fait le bien. Mais cela nous éloigne aussi de pensées humanistes qui font de la philanthropie une valeur en elle-même, indépendamment de toute relation de l’être humain avec Dieu.

Les chrétiens ne sont pas les seuls à s’engager socialement, ou à faire de l’humanitaire. Mais ce qui est différent, c’est notre motivation. Nous n’agissons pas à cause d’une valeur, mais à cause d’une personne : Dieu, révélé en Christ. Une personne réelle, qui a réellement donné sa vie pour nous, par amour. Alors nous voulons regarder l’autre comme Dieu le regarde, l’aimer comme Dieu aime, prend soin de lui comme Dieu prend soin de nous. En plus de l’amour pour les autres, nous sommes motivés par l’amour et la justice de Dieu. Nous voulons être témoins de la puissance restauratrice de Dieu, pour que d’autres la découvrent. Nous voulons que Dieu puisse être reconnu comme la source de toute vie, de toute joie, de tout amour, et que chacun puisse en être rempli, par le Christ.

Des relations plus justes

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https://soundcloud.com/eel-toulouse/pour-un-regard-plus-juste

Des relations plus justes

Nous continuons dans notre parcours du sermon sur la montagne, ce panaché de discours de Jésus qui rassemble les bases de la vie chrétienne : le portrait du chrétien, sa mission, l’appel à la justice et à une spiritualité saine, et aujourd’hui son rapport aux autres.

Lecture biblique: Matthieu 7.1-12 (TOB)

1 « Ne vous posez pas en juge, afin de n’être pas jugés ; 2 car c’est de la façon dont vous jugez qu’on vous jugera, et c’est la mesure dont vous vous servez qui servira de mesure pour vous. 3 Qu’as-tu à regarder la paille qui est dans l’œil de ton frère ? Et la poutre qui est dans ton œil, tu ne la remarques pas ? 4 Ou bien, comment vas-tu dire à ton frère : “Attends ! que j’ôte la paille de ton œil” ? Seulement voilà : la poutre est dans ton œil ! 5 Homme au jugement perverti, ôte d’abord la poutre de ton œil, et alors tu verras clair pour ôter la paille de l’œil de ton frère.
6 « Ne donnez pas aux chiens ce qui est sacré, ne jetez pas vos perles aux porcs, de peur qu’ils ne les piétinent et que, se retournant, ils ne vous déchirent.
7 « Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira. 8 En effet, quiconque demande reçoit, qui cherche trouve, à qui frappe on ouvrira. 9 Ou encore, qui d’entre vous, si son fils lui demande du pain, lui donnera une pierre ? 10 Ou s’il demande un poisson, lui donnera-t-il un serpent ? 11 Si donc vous, qui êtes mauvais, savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est aux cieux donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui le lui demandent.
12 « Ainsi, tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le vous-mêmes pour eux : c’est la Loi et les Prophètes.
  • Un regard juste sur l’autre

Voilà une des phrases bien en vogue aujourd’hui : il ne faut pas juger ! Et c’est Jésus qui l’a dit ! Voilà une belle invitation à la tolérance et à la compassion envers l’autre. Ne jugez pas ! Et puis ça devient, au nom de l’amour : non il faut rien dire, faut pas juger, personne n’est parfait après tout… Et tout coule.

Mais qu’est-ce que Jésus entend par le fait de ne pas juger ? Lui il juge, des fois ! Il traite les gens d’hypocrites (notamment ceux qui jugent), d’insensés, de faux prophètes (ça c’est pour la prochaine fois) ou encore de chiens, de porcs (de bâtards ?). Bon, Jésus a un avantage sur nous : lui, il est irréprochable et il voit les choses bien plus clairement que nous. Mais quand même : ne pas juger, n’empêche pas d’appeler les choses par leur nom. Ce n’est pas tout excuser, ou appeler le mal « bien », ce n’est pas une tolérance douceâtre et molle : Jésus peut être intransigeant, p. ex. avec notre cupidité, notre orgueil, notre égoïsme, notre hypocrisie, notre jalousie, nos mensonges, nos tricheries, notre capacité à la débauche et au mal…

Non, ne pas juger ce n’est pas renoncer au bon sens ou au sens moral : c’est refuser de se poser en juge. De regarder l’autre du dessus, en supérieurs, comme si nous avions une autorité quelconque pour évaluer la vie de l’autre – comme si nous étions Dieu lui-même. Prêts à dégainer le jour où l’autre nous choque, nous scandalise : « quoi, il se dit chrétien, et il fait… ! (complétez avec ce qui vous choque) » Alors avec les meilleures intentions du monde, et un peu de condescendance, nous venons accuser ou triturer l’œil de celui qui nous a choqués.

Pourquoi c’est un problème de juger ? D’abord parce qu’on n’est pas Dieu, le juge parfait, mais qu’on est au même niveau que les autres – au rang des humains pécheurs, faibles, fautifs. Mais Jésus fait intervenir une deuxième raison : quand on juge, quand on s’offusque, bien souvent on est un peu hypocrite. Nous sommes facilement aveuglés sur notre propre compte, à trouver des excuses, des justifications, des circonstances atténuantes… « Une poutre dans mon œil ? Nooon, non, c’est juste une paille, et encore, une poussière ! Mais l’autre… tt tt tt, lui c’est grave ! »  Franchement, combien de fois la paille de l’autre me scandalise, me fait pousser des hauts cris, mais ma poutre ? Oh, je ne suis qu’humaine ! Ne nous posons pas en juges, ce n’est pas notre rôle, et en plus, nous ne sommes pas tout blancs ! Nous aussi, chacun, nous avons des poutres à enlever, des travers à corriger…

Ne soyons pas juges des autres, mais frères et sœurs. Au même niveau, embarqués ensemble avec Dieu. Être frères et sœurs ne signifie pas que tout soit acceptable – il est quand même question d’aider l’autre à enlever ce qui le gêne, ce qui l’empêche de voir clair pour avancer avec Dieu. Mais avant de nous improviser « spécialistes en extraction de paille », deux choses : 1) humilité – nous aussi nous avons de lourds bagages, donc pas de condescendance, 2) cohérence – commençons déjà à enlever notre propre poutre.

  • le regard du pécheur pardonné

Derrière tout ça, il y a ce que nous vivons avec Dieu. L’humilité, la cohérence, la bienveillance – ce ne sont pas juste des valeurs à la mode, telles qu’on peut les entendre en dehors de l’église : ce sont des valeurs qui s’enracinent dans l’Evangile, dans cette bonne nouvelle que Jésus nous annonce. Ces belles valeurs, elles s’appuient sur notre repentance. Nous sommes faillibles, et fautifs, devant Dieu. Nous choquons Dieu, nous le scandalisons – parfois même inconsciemment. Mais Dieu, le Créateur, le Maître suprême, lui qui a toute autorité pour nous juger en toute vérité et justice, lui-même a choisi de ne pas se poser en juge devant nous. Il est venu à côté de nous, comme un frère, en Jésus. Il est venu récolter nos pailles, nos poutres, il en a fait une croix et il est mort dessus, pour nous en délivrer. Notre humilité, elle commence quand nous sommes humbles et repentants devant Dieu.

La repentance – et la louange, la reconnaissance ! Ca va ensemble ! Si nous sommes honnêtes avec nous-mêmes, alors nous pouvons nous émerveiller de l’amour de Dieu pour nous, un amour généreux, patient, qui pardonne jour après jour.

Quand nous regardons l’autre, nous avons un détour à faire : regarder à Dieu. Nous rappeler qui Dieu est, et qui nous sommes devant lui, pécheurs pardonnés. Et ce n’est qu’en regardant à Dieu, le Dieu qui prend nos fautes en Jésus pour nous pardonner, que nous pourrons regarder l’autre de manière juste. Plaçons-nous sous le regard du Christ pour regarder l’autre avec humilité. Enracinons-nous dans l’accueil du Christ pour accueillir l’autre avec bienveillance. Écoutons pour nous-mêmes la patiente exigence du Christ, pour encourager l’autre, fraternellement, de côté, à aller plus loin avec Dieu. En fait c’est en regardant au Père qui a donné son Fils pour faire de nous ses enfants, que nous pourrons être des frères pour ceux qui nous entourent.

Donc faire aux autres ce qu’on aimerait qu’on nous fasse. Ce n’est pas juste ne pas faire ce qu’on ne veut pas subir, ne pas déranger pour ne pas être dérangé. Non, c’est offrir positivement à l’autre ce que nous aimerions recevoir : l’amour ? le respect ? la patience ? la compassion ? l’écoute ? le bénéfice du doute ? le soutien, l’entraide ?

Il y a un enjeu ici : soit nous appliquons aux autres la grille d’évaluation que Dieu nous applique en Christ – la grâce, soit Dieu nous appliquera la grille d’évaluation que nous avons appliquée sur les autres – le jugement. Il y a un choix à faire !

Je dois quand même parler des chiens & des porcs : c’est une parole violente ! Étonnante, même, vu l’appel à la générosité dans le regard sur l’autre. Mais être généreux ce n’est pas être naïf : il faut savoir reconnaître ceux qui s’endurcissent et rejettent à répétition compassion, pardon, encouragement. Bien sûr il faut les aimer, et persévérer dans cet amour, prier pour eux, mais il ne faut pas s’acharner à parler à ceux qui se bouchent les oreilles et nous tournent le dos, voire nous donnent des coups. Ca peut être quand nous témoignons – reconnaître un cœur endurci qui après moult conversations sur Jésus réagit avec toujours la même férocité ; ou bien dans nos relations – il y a des gens nocifs pour nous. Nous pouvons les aimer, prier pour eux, peut-être agir pour leur bien, mais les laisser nous détruire année après année n’est pas de l’amour.

En fait, quoi qu’il arrive, de près ou de loin, nous sommes appelés à donner ce que nous avons reçu de Dieu : amour, pardon, générosité.

  • prier avec confiance le Dieu de grâce

Dieu est généreux et il nous aime : c’est la base de notre foi, de notre joie, et même de nos relations. Et ce Dieu généreux, nous pouvons lui faire confiance. Et Jésus parle de la prière. Nous pouvons demander à Dieu ce dont nous avons besoin – ou envie. Simplement, comme un enfant à ses parents. Si nous, avec tous nos défauts et notre égoïsme, nous arrivons à prendre soin de nos petits, Dieu, qui est bon et parfait, Dieu qui nous aime du plus profond de ses entrailles, qui nous a désirés de toute éternité, qui a des projets, des rêves pour chacun de nous, lui qui s’est sacrifié pour nous en Jésus, ce Dieu-là ne répondra-t-il pas à nos prières avec une infinie bonté ? Osons ! Osons lui demander ! Osons, simplement, lui faire confiance !

Oui mais, on prie, on prie, et parfois il ne se passe rien ! Alors ? Dieu donne à celui qui demande ou pas ? Je pense qu’il y a deux types de demandes, et les deux ont leur place. Nous pouvons demander à Dieu ce qu’il veut expressément nous donner : sa joie, sa paix, une foi plus grande, le pardon (reçu et donné), la sagesse, la protection dans la difficulté et dans la tentation, les mots pour témoigner… Dieu répondra.

Et puis il y a d’autres prières, sur des sujets « neutres » comme le travail, la santé, le couple, la famille…  Là, même si nous pensons demander de bonnes choses, Dieu peut ne pas répondre comme on le voudrait. Soit que ce n’est pas très bon pour nous ou pour d’autres, soit que c’est bon mais pas maintenant, soit que c’est mieux pour nous de nous en passer : Dieu est le mieux placé pour faire le tri. Mais trier nos demandes, c’est le rôle de Dieu, prier, c’est le nôtre. Quoi que nous voulions, prions ! avec persévérance ! Et si Dieu ne répond pas pendant longtemps, alors demandons-lui de nous montrer ce que lui veut. Notre rôle c’est de demander – nous n’avons rien à perdre !

Conclusion

Dans nos relations avec les autres, et avec Dieu, nous avons besoin de retrouver notre juste place. Une place de témoin et de frère, de sœur, auprès de nos proches, une place d’enfant auprès du Père céleste. Une place où nous apprenons l’humilité, la reconnaissance, la générosité et la confiance. C’est simple ! Et pourtant si dur ! On a compris ce que Jésus nous dit, mais, est-ce qu’on le vit ? Demandons à Dieu de nous apprendre à vivre ces relations plus justes avec les autres, avec lui, avec nous-mêmes. Demandons-le simplement, avec confiance, et Dieu nous répondra.