Archives mensuelles : novembre 2017

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Souvenez-vous…

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(Cette prédication a été donnée dans le cadre d’un culte spécial pour l’Eglise persécutée, proposé par l’ONG Portes Ouvertes)

Hébreux 10.32-34 (Parole de Vie)
32 Rappelez-vous ce qui s’est passé autrefois quand vous avez reçu la lumière de Dieu. Tout de suite après, vous avez beaucoup souffert et vous avez résisté en combattant durement. 33 Ou bien on vous a insultés et on vous a fait souffrir devant tout le monde, ou encore, vous avez soutenu ceux qu’on traitait de cette façon. 34 En effet, vous avez souffert avec ceux qui étaient en prison. Vous avez accepté avec joie qu’on vous arrache vos biens, parce que vous le saviez : vous possédiez une richesse plus grande et qui dure toujours.

Hébreux 13.3 (Colombe)
Souvenez-vous des prisonniers, comme si vous étiez en prison avec eux, et de ceux qui sont maltraités comme étant, vous aussi, dans un corps.
Dans ce dernier verset, la construction de la phrase est étonnante. Le parallélisme qu’on aurait pu attendre n’est pas respecté, sinon on aurait dû avoir : « Souvenez-vous des prisonniers, comme si vous étiez en prison avec eux, et de ceux qui sont maltraités, comme si vous étiez maltraités avec eux. » Mais la deuxième partie de la phrase dit autre chose : « (Souvenez-vous) de ceux qui sont maltraités comme étant, vous aussi, dans un corps. »

Du coup, il y a deux façons au moins de comprendre l’expression « comme étant dans un corps ». Et peut-être, d’ailleurs, ne faut-il pas trancher et accepter la double interprétation possible…

La première façon serait de le comprendre au premier degré. La phrase ferait référence au corps physique, fragile et susceptible de souffrir, de multiples façons. En se le rappelant, les destinataires de l’épître seraient aptes à comprendre ce que peuvent être les souffrances que les croyants maltraités peuvent ressentir dans leur corps.

Il pourrait même y avoir ici une référence au fait que certains des lecteurs de l’épître pouvaient se souvenir de maltraitance qu’ils avaient subies dans leur corps : « Rappelez-vous ce qui s’est passé autrefois quand vous avez reçu la lumière de Dieu. Tout de suite après, vous avez beaucoup souffert et vous avez résisté en combattant durement. » (Hb 10.32). La phrase deviendrait alors : « Souvenez-vous de ceux qui sont maltraités comme vous, un jour, vous avez été maltraité dans votre corps. »

La deuxième façon de comprendre l’expression de ce verset serait de comprendre le mot « corps » dans un sens spirituel. Il s’agirait non plus du corps physique mais du corps spirituel qu’est l’Eglise, corps du Christ. C’est une des images courantes de l’Eglise dans le Nouveau Testament. La phrase dirait alors : « Souvenez-vous de ceux qui sont maltraités puisque vous faites partie du même corps. » Ce qui conviendrait assez bien avec la première partie du verset.

Et on peut penser ici au long développement de cette métaphore dans la première lettre de Paul aux Corinthiens, notamment lorsqu’il dit : « Si une partie du corps souffre, toutes les autres parties souffrent avec elle. Si une partie est à l’honneur, toutes les autres partagent sa joie. » (1 Co 12.26).

On peut penser aussi aux paroles de Jésus dans l’évangile selon Matthieu lorsqu’il dit, en évoquant le moment du jugement, à ceux qui ont visité des malades ou des prisonniers : « Je vous le dis, c’est la vérité : chaque fois que vous avez fait cela à l’un de mes frères, à l’un des plus petits, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Mt 25.40). C’est aussi cela la réalité du corps du Christ ! Ce que l’on fait pour un membre du corps, on le fait pour le Christ, qui est la tête du corps.

Ainsi, peut-être faut-il ne pas choisir entre ces deux options et se dire que l’auteur de l’épître aux Hébreux a voulu jouer avec le double sens de l’expression « vous êtes dans un corps. »

Cette double compréhension pourrait même alors proposer une double optique dans la solidarité avec nos frères et sœurs persécutés.

Nous sommes appelés à nous souvenir d’eux parce que nous sommes comme eux, dans une même condition de fragilité où notre corps peut souffrir, de multiples façons, y compris à cause d’une opposition qui peut même, un jour, se transformer en persécution. Et souvenons-nous qu’il suffit de remonter de quelques siècles seulement pour voir des protestants persécutés en France, contraints au culte clandestin, à l’exil, mis en prison ou envoyés aux galères, à cause de leur foi…

Nous sommes aussi appelés à nous souvenir d’eux parce que nous faisons corps avec eux, parce que nous sommes membres du même corps du Christ. Et si un membre souffre, tout le corps souffre. Si un membre est persécuté, tout le corps est persécuté. Ce qui se passe pour les chrétiens en Syrie, en Irak, en Erythrée, en Iran, en Centrafrique… tout cela nous concerne en tant que famille spirituelle. Ce sont nos frères et nos sœurs qui sont persécutés à cause de leur foi.

Portes Ouvertes nous propose différentes façons d’exprimer notre solidarité avec nos frères et sœurs de l’Eglise persécutée aujourd’hui : informations, pétitions, courriers… Mais la première, et sans doute la plus importante façon d’exprimer notre solidarité, c’est la prière. Car la prière nous lie. Non seulement elle nous connecte à Dieu mais elle nous connecte aussi les uns aux autres, par delà les frontières et les cultures.

« Souvenez-vous des prisonniers, comme si vous étiez en prison avec eux, et de ceux qui sont maltraités comme étant, vous aussi, dans un corps. »

L’Eglise et la mission… de Dieu

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Quelle est la mission de l’Eglise ? Quand on pose cette question, les réponses sont multiples. Il y a ceux qui disent que c’est d’abord l’évangélisation, d’autres qui disent que c’est l’engagement social, voire d’autres choses encore…

En réalité, définir la mission de l’Eglise se révèle souvent une mission… impossible !

Et si, finalement, la question était mal posée ?

« Ce n’est pas tant que Dieu a une mission pour son Eglise dans le monde, mais plutôt que Dieu a une Eglise pour sa mission dans le monde. La mission n’a pas été faite pour l’Eglise ; c’est l’Eglise qui a été faite pour la mission. Pour la mission de Dieu. »  (Cité par Christopher J.H. Wright : La mission de Dieu, Excelsis, p.60)

Avant de parler de mission de l’Eglise, il faut comprendre la mission de Dieu. Une Eglise en mission, ce n’est pas une Eglise qui accomplit « sa » mission, c’est une Eglise qui entre dans la mission de Dieu.

Le Dieu qui nous est présenté dans la Bible, dès la première page, est un Dieu en mouvement, en action. Un Dieu en mission. La mission de Dieu en Genèse 1, c’était de créer un monde parfait et il ne s’est reposé que lorsque sa mission a été accomplie, lorsqu’il constata à la fin du 6e jour que ce qu’il avait fait n’était pas seulement bon comme les jours précédents mais très bon.

Mais le mal est apparu, le péché est venu abîmer la création très bonne de Dieu, il est venu défigurer l’humanité créée en image de Dieu. Dès lors, la mission de Dieu est de restaurer ce monde sous la domination du mal. C’est ce dont parle tout le reste de la Bible : la façon dont Dieu s’est impliqué dans l’histoire du monde pour le racheter. Avec comme point névralgique de cette mission de Dieu, la venue et l’oeuvre de Jésus-Christ. Et Dieu ne se reposera que lorsqu’il aura pleinement accompli la mission qu’il s’est choisie. Ce repos de Dieu est évoqué dans les dernières pages de la Bible, avec l’humanité réconciliée et un monde racheté, dans la nouvelle création.

Je vous propose donc de lire un des grands textes bibliques sur l’incarnation, centre névralgique de la mission de Dieu, et de le lire dans cette optique de comprendre la mission de Dieu dans laquelle nous sommes appelés à entrer…

Lecture biblique : Jean 1.1-18

1 Au commencement était la Parole. La Parole était avec Dieu et la Parole était Dieu. 2 Au commencement, la Parole était avec Dieu. 3 Par elle, Dieu a fait toutes choses et il n’a rien fait sans elle. 4 En elle, il y a la vie, et la vie est la lumière des êtres humains. 5 La lumière brille dans la nuit, mais la nuit ne l’a pas reçue.
6 Dieu a envoyé un homme qui s’appelait Jean. 7 Il est venu comme témoin pour être le témoin de la lumière, afin que tous croient par lui. 8 Il n’était pas la lumière, mais il était le témoin de la lumière.
9 La Parole est la vraie lumière. En venant dans le monde, elle éclaire tous les êtres humains.
10 La Parole était dans le monde, et Dieu a fait le monde par elle, mais le monde ne l’a pas reconnue. 11 La Parole est venue dans son peuple, mais les gens de son peuple ne l’ont pas reçue. 12 Pourtant certains l’ont reçue et ils croient en elle. À ceux-là, la Parole a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu. 13 Et ils sont devenus enfants de Dieu en naissant non par la volonté d’un homme et d’une femme, mais de Dieu.
14La Parole est devenue un homme, et il a habité parmi nous. Nous avons vu sa gloire. Cette gloire, il la reçoit du Père. C’est la gloire du Fils unique, plein d’amour et de vérité.
15  Jean est son témoin. Il affirme d’une voix forte : C’est de lui que j’ai parlé quand j’ai dit : « L’homme qui vient après moi est plus important que moi, parce qu’il existait déjà avant moi. »
16 Oui, nous avons tous reçu une part de sa richesse, nous avons tous été remplis de son amour, et de plus en plus. 17 Dieu nous a donné la loi par Moïse, mais l’amour et la vérité sont venus par Jésus-Christ. 18 Personne n’a jamais vu Dieu. Mais le Fils unique, qui est Dieu et qui vit auprès du Père, nous l’a fait connaître.

1. Une mission qui n’est pas la nôtre mais celle de Dieu

La mission de Dieu n’est pas la nôtre mais celle de Dieu. Elle remonte à la nuit des temps, à l’origine de l’univers !
Elle nous précède : « Au commencement était la Parole. »… « Par elle, Dieu a fait toutes choses et il n’a rien fait sans elle. »…
Et elle nous rejoint : « La Parole est devenue un homme, et il a habité parmi nous. » « nous avons tous reçu une part de sa richesse, nous avons tous été remplis de son amour, et de plus en plus. »

C’est le même Dieu qui a tout créé et qui est venu en Jésus-Christ. C’est, d’une certaine manière la même mission, ou disons plutôt les deux faces de la même mission : Dieu a tout créé et Dieu restaure tout ce qu’il a créé.

Alors élargissons notre regard ! Prenons conscience que l’Eglise, depuis 2000 ans et malgré ses imperfections et même ses fautes, est une part de la mission de Dieu. Et l’Eglise locale à laquelle j’appartiens est une toute petite part de cette Eglise universelle, elle-même une part de la mission de Dieu. Et moi je suis une part de l’Eglise locale à laquelle j’appartiens, qui est une petite part seulement de cette Eglise universelle, elle-même une part de la mission de Dieu.

Elargissons notre regard pour comprendre le privilège extraordinaire de faire humblement partie d’une mission si grande, celle de Dieu. Et cela doit nous déculpabiliser : cette mission, ce n’est pas la mienne, ni celle de mon Eglise. Elle ne repose pas sur nos épaules… C’est la mission de Dieu, celle qu’il accomplit pour une petite partie avec moi, avec nous.

La vision de l’Evangile est universelle, infinie et éternelle. Et notre vision de l’Evangile est souvent locale, limitée et ponctuelle. La mission de Dieu vient du fond des âges, elle a une dimension universelle et même cosmique (elle concerne l’univers entier). Ma vision de la mission de Dieu se limite souvent à ma vie, voire à mon Eglise, et se restreint à telle action d’évangélisation ou tel témoignage concret.

Alors oui, élargissons notre regard et ouvrons-nous à la mission de Dieu. Ca déculpabilise, ça libère, ça motive !

2. Une mission qui nous fait briller de la lumière de Dieu

Quelle rôle sommes-nous alors amenés à jouer dans cette mission de Dieu ? Car nous en avons bien un, celui que le Christ lui-même a confié à ses disciples, à la fin de l’évangile : « Comme le Père m’a envoyé, moi je vous envoie » (Jean 20.21)

Il y a dans ces paroles un passage de relais. La mission de Dieu s’accomplit pleinement en Christ. Désormais, c’est à travers ses disciples qu’il continuera de le faire. Ce qui est vrai de la mission de Dieu à travers le Christ doit être aussi vrai, d’une certaine façon, de la mission de Dieu à travers ses disciples, son Eglise… nous ! Mais ce doit être un peu à la manière de Jean-Baptiste dans notre texte. « Il n’était pas la lumière, mais il était le témoin de la lumière. »… « L’homme qui vient après moi, dit-il, est plus important que moi, parce qu’il existait déjà avant moi. »

La mission de Jean-Baptiste, c’était de s’effacer devant la lumière du Christ. Il doit en être de même pour nous. Nous sommes bien appelés à briller… mais on ne brille que de la lumière du Christ, pas de la nôtre !

Puiser à la source

Si vous voulez entrer dans la mission de Dieu, il faut que vous appreniez sans cesse à connaître Dieu. Il faut s’exposer à sa lumière pour pouvoir la refléter. Il faut avoir reçu de Dieu pour pouvoir donner autour de nous :

« Oui, nous avons tous reçu une part de sa richesse, nous avons tous été remplis de son amour, et de plus en plus. » (v.16)

Recevoir une part des richesses de Dieu, être rempli de son amour, vivre dans sa lumière. Voilà notre premier impératif. Vous avez beau avoir le miroir le plus beau et le plus efficace, si vous ne l’orientez pas dans la bonne direction, il ne reflétera rien… Pour briller de la lumière du Christ dans le monde, on a beau étudier des méthodes, élaborer des stratégies, confectionner des outils pertinents, apprendre la culture dans laquelle on vit… si on ne va pas se ressourcer sans cesse auprès du Seigneur, tout cela ne servira à rien !

Une lumière qui s’expose et ne se cache pas…

Dans le prologue de l’Evangile selon Jean, la Parole est venue pour être entendue, la lumière est venue pour éclairer et révéler :

« La Parole est devenu un homme. Et il a habité parmi nous. Nous avons vu sa gloire. Cette gloire, il la reçoit du Père. » (v.14)
« Personne n’a jamais vu Dieu. Mais le Fils unique, qui est Dieu et qui vit auprès du Père, nous l’a fait connaître. » (v.18)

C’est à nous maintenant de briller de la lumière du Christ. On pense forcément à cette fameuse parole de Jésus dans le Sermon sur la Montagne : « Quand on allume une lampe, ce n’est pas pour la mettre sous un seau ! Au contraire, on la met bien en haut, et elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison. » (Matthieu 5.15).

Or, briller, c’est s’exposer. Et s’exposer c’est parfois se mettre en difficulté voire en danger. On ne sait jamais comment les gens vont réagir à la lumière… Cacher la lumière sous un seau, la garder pour nous, bien au chaud, c’est beaucoup plus confortable… Mais c’est contraire à la mission de Dieu qui, elle, brille, rayonne, illumine. Alors, avons-nous vraiment le désir de rayonner ?

Une lumière qui s’offre à tous mais qui ne s’impose pas

Dernier aspect de la lumière du Christ dans le prologue de Jean, c’est qu’elle a brillé pour tous, même si beaucoup refusaient de la recevoir. Elle s’offre à tous mais elle ne s’impose pas.

« La Parole est la vraie lumière. En venant dans le monde, elle éclaire tous les êtres humains. » (v.9)
« La Parole est venue dans son peuple, mais les gens de son peuple ne l’ont pas reçue. » (v.11)

La lumière de l’Evangile est une lumière généreuse, qui ne choisit pas sa cible. Un peu comme la semence que jette le Semeur, dans la parabole, et qui tombe dans tous les terrains, même le moins hospitalier.

La lumière de l’Evangile n’est pas un rayon laser, un faisceau lumineux intense et concentré qui vise, stigmatise, agresse. C’est une lumière rayonnante et large, une lumière ouverte et accueillante. Voyez Jésus qui allait à la rencontre de tous ceux que les autres rejetaient ou jugeaient.

C’est très bien de briller. Mais de quelle lumière brillons-nous ?

Conclusion

Parler de la mission de Dieu, c’est parler de l’oeuvre de Dieu dans l’histoire, dans le monde, dans notre vie. C’est reconnaître que tout ce que nous sommes et ce que nous avons, c’est à lui que nous le devons.

Et c’est libérateur parce que le poids de la mission ne repose pas sur nos épaules. C’est l’oeuvre de Dieu ! Mais, par grâce, la mission de Dieu passe par nous, elle traverse nos vies, elle emporte nos Eglises.

Elle déborde nos schémas et nos a priori. Elle nous surprend. Laissons-nous éclairer par la lumière du Christ et découvrons quels reflets elle est appelée à prendre dans notre Eglise et dans chacune de nos vies ! C’est là notre mission.

 

L’église de nos rêves

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Depuis quelque temps, nous sommes en réflexion sur ce que nous voulons vivre en tant qu’église. Aujourd’hui, je vous propose de revenir aux origines, avec un texte qui parle des tout débuts de l’église, juste après la Pentecôte. Jésus est remonté au ciel, il a envoyé son Esprit sur ses disciples, et Pierre va prêcher à Jérusalem. Certains résistent, mais d’autres demandent : que faut-il faire, si on croit que ce Jésus est vraiment le Sauveur promis par Dieu ? Pierre répond : attachez-vous à lui. Et l’église prend son envol ce jour-là.

Lecture biblique: Actes 2.41-47

41 Ceux qui acceptent la parole de Pierre se font baptiser. Ce jour-là, à peu près 3 000 personnes s’ajoutent au groupe des croyants.

42 Régulièrement et fidèlement, les croyants écoutent l’enseignement des apôtres. Ils vivent comme des frères et des sœurs, ils partagent le pain et ils prient ensemble. 43 Les apôtres font beaucoup de choses extraordinaires et étonnantes, et les gens sont frappés de cela. 44 Tous les croyants sont unis et ils mettent en commun tout ce qu’ils ont. 45 Ils vendent leurs propriétés et leurs objets de valeur, ils partagent l’argent entre tous, et chacun reçoit ce qui lui est nécessaire. 46 Chaque jour, d’un seul cœur, ils se réunissent fidèlement dans le temple. Ils partagent le pain dans leurs maisons, ils mangent leur nourriture avec joie et avec un cœur simple. 47 Ils chantent la louange de Dieu, et tout le peuple les aime. Et chaque jour, le Seigneur ajoute à leur communauté ceux qui sont sauvés.

Waow, vous imaginez ?

  • Une croissance incroyable, avec 3000 conversions puis tous les jours de nouveaux croyants qui s’attachent à Jésus ;
  • Une intensité frappante : les croyants se voient chaque jour, ils continuent à ce moment-là d’aller au Temple mais ils se retrouvent aussi dans les maisons, pour prier, étudier, témoigner… D’un seul cœur, chaque jour, ils partagent tout ;
  • des miracles de toutes sortes dont le livre des Actes va donner des exemples ;
  • et puis, le respect & la faveur du peuple : les gens reconnaissent que Dieu est à l’œuvre dans cette communauté – c’est une église qui grandit, et qui a un impact fort sur son entourage !

Cette église des premiers temps, pour certains c’est l’église « idéale ». En même temps, elle nous paraît loin, et on est vite tenté de relativiser (c’est l’enthousiasme du début, ça n’a pas duré, et aujourd’hui on ne voit pas comment on pourrait vivre ainsi…) C’est un peu vrai ! Mais n’empêche, quand on lit ce texte, ça donne envie. Envie de vivre ça, même si on ne sait pas comment faire, même si on a l’impression d’un fossé infranchissable entre cette église et la nôtre, 2000 ans plus tard, même si on a peur ou qu’on n’y croit pas vraiment – au fond de nous, on a envie !

Envie d’être une église « intense », rayonnante, féconde, une église qui a de l’impact,

une église où Dieu agit de manière évidente, une église témoin du Christ ressuscité, une église remplie de vie et d’Esprit. On en a envie, non ? En tout cas, Dieu en a envie ! Dieu veut vivre ça avec nous !

Sans être le modèle unique, cette première église nous donne quelques clefs pour devenir un peu plus l’ église que nous rêvons d’être, que Dieu nous invite à être.

  • 4 piliers fondés sur le Christ

D’abord, l’église des lendemains de la Pentecôte repose sur 4 piliers, qu’on retrouve dans les autres églises du NT, dans les lettres des apôtres etc. : l’étude des enseignements de Jésus, les prières, les relations fraternelles et le service.

Les premiers chrétiens étaient des étudiants, désireux de mieux connaître Jésus – il n’y avait pas encore le NT : les apôtres simplement transmettaient leurs souvenirs. Nous ne sommes que quelques semaines après la résurrection de Jésus ! Les disciples de Jésus racontent : les discours, les miracles, les discussions, les rencontres… ce qu’ils ont consigné plus tard dans les Evangiles.

Ensuite, les prières : au Temple et à la maison. La prière, c’est multiforme : personnel/communautaire, formel/spontané, il y a aussi la cène (partage du pain en souvenir du dernier repas de Jésus avant la croix), la louange…  Il s’agit de ne pas seulement connaître Dieu, mais aussi de lui parler et de l’écouter, d’avoir une relation personnelle avec lui.

Il y a encore la chaleur des relations fraternelles : la joie, la convivialité (ils se retrouvent dans les maisons, pour des repas partagés…). L’amour, le partage, viennent prolonger l’amour de Jésus.

Et cet amour, il se manifeste concrètement, notamment par le service, l’entraide, le partage matériel : le geste accompagne la parole, l’action concrétise les émotions.

La Bible, la prière, les relations, le service : la foi en Jésus implique tout notre être. Pas seulement la prière ou la méditation, pas seulement l’âme, mais aussi l’intelligence, pour connaître ce Dieu qui nous sauve et nous conduit, mais aussi le cœur, dans l’amour pour Dieu et pour notre prochain, mais aussi le corps, dans l’action, le service concret. La foi en Jésus implique tout notre être : et ça se voit dans l’église des premiers temps. L’église, c’est plus que le culte, c’est un lieu, un réseau, dans lequel nous apprenons à vivre notre foi de tout notre être – avec notre âme, notre intelligence, notre cœur et notre corps.

  • Une implication sans réserve de tous

Dans cette première église, les croyants s’impliquent, tous, sans réserve.

L’unité qui règne entre eux ressort avec force : ils agissent d’un seul cœur, avec enthousiasme et joie. Dieu ne demande pas qu’on soit dans l’uniformité, mais qu’on avance ensemble, dans la même direction, comme une équipe soudée.

Cette unité se manifeste notamment par la générosité des croyants, sur le plan financier – certains vendent leurs propriétés pour que tous puissent avoir de quoi vivre – et sur le plan du temps – ils sont assidus, réguliers, présents. En un mot, ils investissent ! Ils investissent leur argent, leur temps, dans l’église – parce que ce qu’ils vivent avec Jésus est fondamental, premier, essentiel.

Alors bien sûr, la hauteur de leur investissement est remarquable, mais difficile à transposer aujourd’hui… Chacun a sa famille, sa vie privée, etc. Cela dit, le texte nous invite à reconsidérer notre implication. Est-ce que nous nous donnons les moyens d’une vie communautaire riche ? Est-ce que nous nous donnons les moyens d’une relation personnelle profonde avec Dieu ? Il n’est pas raisonnable de croire que la relation avec Dieu se construit avec des prières éparses ou que la connaissance de Dieu peut s’approfondir avec une demi-heure de prédication tous les 15 jours… C’est comme dans un couple : il faut nourrir la relation pour qu’elle se développe – un simple bonjour le dimanche matin ne suffit pas !

Ca ne veut pas dire pour autant qu’il faut passer toute votre vie à l’église ! Mais au quotidien, investir dans la relation avec Dieu, seul et avec les autres. C’est vrai, ça demande du temps, une certaine discipline, voire quelques sacrifices – des notions pas très en vogue ! – mais l’investissement personnel est une des clefs pour une vie grandiose avec Dieu.

  • L’action grandiose de Dieu.

Oui, une vie grandiose, rien que ça ! Mais c’est ça ce que le texte nous montre ! C’est ça que le texte nous invite à vivre ! Une église où arrivent des miracles, des guérisons, des choses incroyables, grandioses, signes que Dieu agit avec puissance !

Certes, c’était le début, et Dieu a mis le paquet. J’en conviens. Mais il y a encore des miracles aujourd’hui. Des patients dont la tumeur « disparaît », dont la guérison est incroyablement rapide au point d’intriguer les médecins, des addictions qui disparaissent d’un coup. Tout n’est pas miracle dans la vie avec Dieu, mais Dieu fait aussi, fait encore, des miracles !  il répond aux prières, il protège dans des situations difficiles, il dénoue, il oriente… Et puis quand quelqu’un s’attache à Jésus, se convertit : n’est-ce pas un miracle ? N’y-a-t-il pas là une guérison ? Une transformation ?

Quand Dieu agit, c’est un miracle ! C’est merveilleux, étonnant, bouleversant ! Une réconciliation, sa protection dans la difficulté, sa présence dans la détresse, la liberté qu’il donne face au mal ou aux tentations, la joie dans l’épreuve – ça ne rentre peut-être pas dans la catégorie « miracle avec effets spéciaux », mais ce sont des miracles, des signes que Dieu agit en nous, et autour de nous. Et ça c’est grandiose.

Notre part à nous, notre contribution à l’action grandiose de Dieu, dans notre vie, dans notre église, c’est d’investir dans l’ordinaire. L’apôtre Paul, par exemple, n’appelle jamais à cultiver le clinquant, l’extraordinaire : que la Parole du Christ habite parmi vous dans toute sa richesse (Col 3.16), priez sans cesse (Col 4.2), soyez unis, aimez-vous les uns les autres (Col 3.14). Persévérons dans l’ordinaire de la foi, dans la connaissance de Dieu par la Bible, la prière, les relations fraternelles, le service – et Dieu agira.

C’est comme dans la parabole du Semeur : pour que la graine prenne racine et porte du fruit, il faut une terre abreuvée, sans cailloux, sans mauvaises herbes, une terre labourée. Notre discipline ordinaire, c’est de labourer notre terre : labourer la terre de notre cœur, pour que la Parole et l’Esprit de Dieu y fassent germer de beaux fruits, labourer la terre de notre communauté, pour que l’action grandiose de Dieu ne rencontre pas d’obstacle.

Avant de conclure, j’aimerais donner un exemple concret, un témoignage de ce que notre église a vécu il y a quelques décennies. Avec le groupe Vitalité, on doit entre autres contacter les « anciens » de l’église, et voir ce qui, dans le passé, a favorisé ou freiné la croissance, le dynamisme de la communauté. Nous n’avons pas fini le travail, mais je peux quand même mentionner un élément. Dans les années 80s, après une période difficile, l’église a énormément grandi. Elle ne faisait rien de spécial – si, un élément ressort des témoignages : l’accueil. L’hospitalité. La chaleur des relations fraternelles, des échanges. La communion – et Dieu faisait de grandes choses.

Conclusion

Etre une Église remplie de vie & d’Esprit, témoin du Christ ressuscité, une église où Dieu agit de manière évidente… C’est le rêve que l’église d’Ac 2 nous invite à avoir.

Attention, on ne forcera pas Dieu à agir ! Mais l’église, c’est comme une voiture. Pour qu’elle roule, même à 300 km/h, il faut un moteur, des freins, une boîte de vitesse, une batterie, en bon état. Ca ne suffit pas, pourtant, il faut de l’essence ! Mais avec toute l’essence du monde, si le moteur ou la batterie est défaillant, la voiture n’ira pas très loin. Notre part, c’est de préparer au mieux le véhicule, de nous préparer au mieux, nous impliquer, nous disposer – Et Dieu agira comme il le désire. C’est Dieu qui fera de nous l’église, les hommes et les femmes dont il rêve, c’est lui qui agira, qui nous transformera, qui nous fera rayonner, mais nous pouvons lui préparer le chemin, en nous attachant à le connaître (Bible), à l’écouter (prière), à expérimenter l’amour dans la joie et le service.

Canevas Ac 2

Violence et grâce (Gn 4)

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Rivalité, jalousie, violence et meurtre… Voilà avec quoi je termine, aujourd’hui, notre série sur les débuts de la Bible, qui raconte les origines de l’humanité en termes imagés. La dernière fois, Vincent nous a parlé de la chute de l’homme et de la femme : cédant à la tentation du serpent, ils s’opposent à Dieu et se retrouvent hors du jardin d’Eden. Le mal a pénétré la condition humaine, tordu le monde, abîmé la relation avec Dieu – et avec l’autre. Dès la génération suivante, les enfants d’Adam et Eve vivent très concrètement les conséquences de cette déconnexion d’avec Dieu.

Juste une remarque : comme dans les chapitres précédents, la Bible décrit une période qui nous échappe, sans chercher à présenter les faits de manière exhaustive. Ne vous étonnez donc pas d’y voir des silences, des « trous », des informations manquantes : l’accent porte sur le sens, sur ce qui éclaire notre condition humaine.

Comme le texte progresse par épisodes, je vais lire en trois fois, et m’arrêter sur chaque partie.

  • Avant le meurtre
1 L’homme s’unit à Ève, sa femme. Elle devient enceinte et elle met au monde Caïn. Puis elle dit : « Avec l’aide du SEIGNEUR, j’ai donné la vie à un petit d’homme ! » 2 Elle met aussi au monde Abel, le frère de Caïn. Abel devient berger, et Caïn cultive la terre.
3 À la fin de l’année, Caïn apporte quelques récoltes du champ. Il les offre au SEIGNEUR. 
4 De son côté, Abel apporte les premiers agneaux de son troupeau. Et il offre au SEIGNEUR les meilleurs morceaux. Le SEIGNEUR reçoit avec plaisir Abel et son offrande. 
5 Mais il ne reçoit pas Caïn, ni son offrande. C’est pourquoi Caïn est très en colère. Son visage devient sombre de tristesse. 
6 Le SEIGNEUR dit à Caïn : « Tu es en colère et ton visage est triste. Pourquoi ? 7 Si tu agis bien, tu peux te remettre debout. Si tu n’agis pas bien, le péché est comme un animal couché à ta porte. Il t’attend en cachette, prêt à t’attraper. Mais toi, sois plus fort que lui. »

2 frères, 2 métiers, 2 offrandes. Caïn l’aîné, l’agriculteur, offre le fruit de sa récolte. Abel, le cadet, éleveur, offre des bêtes. Les offrandes sont liées au métier, elles expriment sûrement la reconnaissance pour la fertilité que Dieu a accordée à la terre et aux bêtes.

Pourtant, Dieu sème la zizanie entre les deux frères. C’est peu dire qu’il a une préférence : il refuse carrément l’offrande de Caïn, tandis qu’il accepte celle d’Abel. C’est vexant ! L’aîné est rejeté, alors que le petit frère passe devant aux yeux de Dieu. Et qu’on ne vienne pas dire que ce n’est pas personnel… C’est bien Caïn et son offrande que Dieu refuse, comme il a accepté Abel et son offrande. Évidemment, Caïn fait la tête : la colère, la tristesse, la honte ? l’envahissent.

A première vue, le choix paraît injuste, et donc Dieu aussi – pourtant le texte donne peut-être un indice qui explique l’attitude de Dieu. Le texte souligne qu’Abel apporte les premiers agneaux de son troupeau, et qu’il en offre les meilleurs morceaux. Caïn, lui, paraît beaucoup plus désinvolte : il offre des échantillons de sa récolte, mais pas spécialement les plus beaux ! Derrière le don, c’est l’attitude de cœur qui frappe : Abel donne ce qu’il a de meilleur, Caïn se garde le meilleur pour lui et fait un cadeau « moyen » à Dieu. C’est un signe de la place que Dieu a pour chacun : premier dans le cœur d’Abel, il passe en second aux yeux de Caïn. Caïn se prend lui-même pour son propre dieu, son propre chef, celui qui mérite les honneurs.

Dieu voit cela chez Caïn, et son refus sonne comme un avertissement, mais il ne se désintéresse pas de Caïn pour autant ! Au contraire, il le suit, ouvre le dialogue, lui donne une chance d’exprimer sa colère. Le texte va vite sur les faits, mais prend du temps pour montrer le dialogue initié par Dieu. Finalement, le choix, les raisons du choix… ce qui est fait est fait ! Ce n’est pas si important – ce qui compte, c’est comment on le vit, et comment on le vit avec Dieu.

Et quand Caïn se mure dans le silence, Dieu lui donne conseil : attention ! Même si l’on ne choisit pas les sentiments qui montent en nous, on peut choisir de se laisser influencer ou d’y résister. Les sentiments débouchent sur des actions, mais il n’y a pas de fatalité : on peut choisir de ne pas céder à la colère, la jalousie, l’amertume… Il y a des situations qui nous blessent, nous vexent, voire nous paraissent injustes (mauvaise appréciation au travail, tensions, rivalités familiales), Dieu nous offre une chance de sortir de l’engrenage en choisissant le bien. Quand nous nous retrouvons à notre désavantage, que ce soit légitime ou pas, finalement, l’important c’est comment nous allons réagir. Et même si on ne peut pas toujours rectifier la situation, on peut choisir de ne pas s’y enfermer.

  • Le meurtre & ses conséquences
8 Caïn dit à son frère Abel : « Sortons ! » Dehors, dans les champs, Caïn se jette sur son frère Abel et il le tue. 
9 Alors le SEIGNEUR dit à Caïn : « Où est ton frère Abel ? »
Caïn répond : « Je ne sais pas. Est-ce que je suis le gardien de mon frère ? » 
10 Le SEIGNEUR continue : « Qu’est-ce que tu as fait là ? J’entends la voix du sang de ton frère. Dans le sol, elle crie vers moi pour demander vengeance. 11 Le sol s’est ouvert pour recevoir le sang de ton frère que tu as tué. Eh bien, maintenant, ce sol te maudit. 12 Quand tu le cultiveras, il ne te donnera plus ses richesses. Tu iras toujours d’un endroit à un autre, et tu ne pourras jamais t’arrêter sur la terre. » 
13 Caïn dit au SEIGNEUR : « Ma punition est trop lourde à porter. 14 Aujourd’hui, tu me chasses de la bonne terre. Je vais être obligé de me cacher loin de toi. J’irai toujours d’un endroit à un autre, et je ne pourrai jamais m’arrêter sur la terre. Et celui qui me trouvera pourra me tuer. » 
15 Le SEIGNEUR répond à Caïn : « Mais non ! Si quelqu’un te tue, il faudra tuer sept personnes, pour que tu sois vengé. » Et le SEIGNEUR met une marque sur Caïn. Alors celui qui le rencontrera ne pourra pas le tuer.
16 Caïn part loin du SEIGNEUR. Il va habiter au pays de Nod, à l’est d’Éden.

Caïn s’endurcit et refuse le dialogue avec Dieu. Au lieu de maîtriser sa colère, il se laisse aveugler par la jalousie et tue son frère Abel, avec préméditation. Après la chute, Dieu avait averti les hommes qu’ils allaient devenir mortels – mais la première mort de l’humanité, ce n’est pas de vieillesse ! C’est un meurtre, volontaire, nourri de haine, un meurtre contre un frère, une mort caractérisée par le mal qui nous ronge. La rupture avec Dieu entraîne des ruptures multiples, notamment dans la famille : le prochain devient lointain, le frère/l’ami, un ennemi.

Encore une fois, Dieu suit Caïn ; encore une fois il le questionne, pas d’abord comme juge, mais comme conseiller : il invite au dialogue avant de prononcer son jugement (Dieu n’est pas caché derrière la porte à attendre que gens pèchent ou chutent/ surprendre & punir -> bien-veillant !). Mais à nouveau Caïn se ferme au dialogue, il prend Dieu pour un imbécile, refuse la main tendue – c’est là que le jugement tombe.

La dureté du jugement – Caïn privé de travail, de terre, de famille, exilé & errant – prouve à quel point Dieu est affecté par ce qui arrive aux hommes : le blasphème, ce n’est pas seulement l’insulte directe à Dieu ! Insulter un frère, tuer, voler, tromper, trahir… c’est aussi blasphémer !

La réaction de Caïn à sa sentence est presque drôle : « c’est trop dur ! » Oui, enfin, c’est un meurtre, quand même ! Caïn ne change pas, c’en est désespérant, il reste aveugle et immature. Et pourtant, Dieu ne s’énerve pas après lui, il répond même à ses « exigences » : voilà une protection, la promesse de veiller sur lui, de le venger 7 fois s’il était blessé. 7 fois : le chiffre de ce qui est complet – comme un rappel de l’amour de Dieu, complet. Oui, Caïn, malgré tout, malgré son immaturité, sa culpabilité, sa fermeture au dialogue et à Dieu, Caïn garde aux yeux de Dieu toute sa valeur d’enfant. Sans nier la culpabilité, sans excuser l’inexcusable, Dieu continue d’aimer le coupable – même quand celui-ci persiste à lui tourner le dos.

  • La descendance de Caïn & la naissance d’un autre frère, Seth
17 Caïn s’unit à sa femme. Elle devient enceinte et elle met au monde Hénok. Caïn se met à construire une ville. Il donne à cette ville le nom de son fils Hénok. 18 Hénok a un fils : Irad. Irad a un fils : Mehouyaël. Mehouyaël a un fils : Lémek. 19 Lémek prend deux femmes : la première s’appelle Ada, la deuxième s’appelle Silla. 20 Ada met au monde Yabal. C’est l’ancêtre de ceux qui habitent sous des tentes et élèvent des troupeaux. 21 Son frère s’appelle Youbal. C’est l’ancêtre de tous ceux qui jouent de la cithare et de la flûte. 22 Silla met au monde Toubal-Caïn. C’est le forgeron qui fabrique tous les outils en bronze et en fer. La sœur de Toubal-Caïn, c’est Naama.
23 Lémek dit à ses femmes :

« Ada et Silla, écoutez-moi ! Mes chères femmes, faites attention à ce que je vais dire. Si on me frappe, je tue un homme. Si on me blesse, je tue un enfant. 24 Pour venger Caïn, il faut tuer sept personnes. Pour me venger, il faudra en tuer 77. »

 

25 Adam s’unit encore à sa femme. Ève met au monde un fils. Elle l’appelle Seth, et elle dit : « Caïn a tué Abel, mais Dieu m’a donné un autre fils à sa place. » 26 Seth à son tour a un fils. Il l’appelle Énos. À ce moment-là, les gens commencent à prier Dieu en l’appelant SEIGNEUR.

Cette dernière partie présente deux descendances : celle de Caïn, et celle de Seth, fils n°3 qui remplace Abel dans el projet de Dieu.

En faisant naître Seth, Dieu reste fidèle à sa promesse : par la descendance d’Eve, un Sauveur viendra pour les hommes. Même si Abel est mort, le projet de salut de Dieu ne s’arrête pas pour autant – il crée un plan B. Ce qui nous paraîtrait fatal, au point d’enterrer le projet, ne détourne pas Dieu de ce qu’il veut faire au long cours – il crée, il recrée, des portes de sortie, des itinéraires bis, des passerelles, sans cesse, pour que le chemin continue ! Son amour pour nous est plus grand que les pires atrocités.

Mais la descendance de Caïn est elle aussi intéressante : on y trouve le bien et le mal, entremêlés. La culture, la technologie, la ville, l’élevage etc. – le progrès ! La culpabilité de Caïn ne disqualifie pas tout ce que lui ou ses descendants feront ! Le monde pécheur n’est pas entièrement noir : des étincelles y demeurent – protection de l’autre, amour du beau, développement… Des étincelles que Dieu accueille et valorise – l’espérance biblique, par exemple, n’est pas de retourner au jardin d’Eden, mais d’habiter la ville de Dieu. On aurait tort de croire que dans le monde déchu, tout est pourri, et qu’il faut tout jeter!

Mais en même temps, avec le progrès du bien, il y aussi progrès de la violence et du mal : Lémek en est un bon exemple. Polygame, alors qu’originellement Dieu choisit d’unir un homme et une femme, c’est aussi une brute, qui revendique avec vantardise l’héritage de Caïn – tuer pour une simple blessure, réclamer l’impunité. C’est l’escalade du mal : la revendication de Lémek (vengé 77 fois au lieu de 7) souligne l’emballement de la violence. Un simple acte de rupture avec Dieu a lancé tout un engrenage, en nous et autour de nous.

Avec l’apparence d’une histoire un peu imagée, la Bible offre ainsi une vision réaliste, nuancée, du monde et de l’homme. Dans le monde qui nous entoure, mais aussi dans notre être intérieur, rien n’est tout blanc ou tout noir. Même si le tableau est sombre, il reste de petites taches de couleur, insuffisantes pour nous sauver, mais signes que nous sommes encore images de Dieu.

Conclusion

Voilà un texte dur. Caïn annonce un avenir sombre pour l’humanité. On est si loin de la joie, de la générosité, de l’harmonie des premiers jours… Le décalage premier d’avec Dieu a entraîné des déchirures, pas seulement dans la relation avec Dieu, mais avec l’autre aussi. Pourtant, même dans ce texte difficile, des pointes d’espoir, des pointes de grâce demeurent car Dieu ne nous abandonne pas à notre triste sort, mais il continue de s’impliquer auprès des hommes, de leur parler, de leur indiquer un chemin. Bien plus, sur nous comme sur Caïn, il pose une marque, car nous sommes comme lui, pas meilleurs, même si ça ne se voit pas – Dieu pose sur nous la marque de son amour, la marque de son salut. Jésus meurt à notre place, à la croix il expie notre punition pour tout ce qui nous pollue : colère, haine, jalousie, crimes, égoïsme, blasphèmes, ruptures et déchirures, violence… Lorsque nous l’acceptons par la foi, Dieu nous considère innocents, il rétablit le dialogue avec nous, il nous transforme et nous guérit de l’intérieur, par son Esprit.

Alors même si le monde autour de nous paraît parfois bien sombre, en désespérons pas : Dieu veille et s’implique, il nous aime, coupables ET victimes, et il tend encore sa main aujourd’hui, pour nous sauver, du monde et de nous-mêmes.

 

Soli Deo Gloria

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Lecture biblique : Matthieu 23.1-12

Le grand compositeur allemand Jean-Sébastien Bach signait ses partitions avec les trois lettres SDG, et parfois avec l’expression latine en entier : Soli Deo Gloria. A Dieu seul la gloire. A travers ses exhortations, c’est un peu cette même signature que Jésus aimerait que nous fassions figurer sur la partition de nos vies : A Dieu seul la gloire ! Contrairement aux chefs religieux que Jésus critique ici…

Dans les versets qui nous intéressent, Jésus parle bien des chefs religieux mais ce n’est pas tellement à eux qu’il s’adresse. Il le fera à la suite de ces versets, dans une longue diatribe contre les maîtres de la loi et les pharisiens en leur disant à plusieurs reprises : « malheur à vous ! ».

Ici, c’est à la foule et à ses disciples qu’il parle. Ce qu’il dit concerne donc tout le monde… Et il prend les chefs religieux comme des contre-exemples à ne pas suivre. En un mot : « Faites ce qu’ils disent mais ne faites pas ce qu’ils font ! »

Au verset 8 : « Ne vous faites pas appeler « Rabbi ». En effet, vous avez un seul enseignant et vous êtes tous frères. » « Rabbi » est un mot araméen et c’est le titre qu’on donnait à ceux qui enseignaient, à un maître avec ses disciples. C’est un titre qu’on donne souvent à Jésus dans les évangiles.

Au verset 10 : « Ne vous faites pas non plus appeler « Maître ». En effet, vous avez un seul maître, le Christ. » Ici c’est bien un terme grec qui est utilisé et désigne un conducteur, un guide.

On pourrait donc, dans les deux cas, parler d’un maître, à la fois dans le sens d’enseignant et de conducteur spirituel. Et Jésus dit : attention, seul Dieu doit être votre maître.

Entre ces deux exhortations, il y a celle du verset 9, qui propose la perspective inverse, non pas celle de ceux qui veulent se faire appeler « maître » mais de ceux qui veulent se trouver des maîtres ou des « Pères » : « N’appelez personne sur la terre « Père » . En effet, vous avez un seul Père, celui qui est dans les cieux. »

Et puisque nous sommes tous frères, Jésus propose alors une autre voie, celle du service mutuel : « Le plus important parmi vous doit se mettre à votre service. Celui qui veut être au-dessus des autres recevra la dernière place. Et celui qui prend la dernière place sera mis au-dessus des autres. » (v.11-12)

De ces exhortations on peut faire ressortir trois principes complémentaires :
– N’avoir d’autre maître que Dieu
– Se reconnaître comme frères
– Se faire serviteur

Trois principes pour donner à Dieu seul la gloire…

N’avoir d’autre maître que Dieu

C’est le sens premier de cette triple exhortation. Ni se faire appeler maître ni appeler quelqu’un maître ici-bas. Ce n’est pas « Ni Dieu ni maître », c’est « Dieu seul maître ».

En réalité, cela rappelle une des grandes affirmations des Réformateurs du XVIe siècle : le sacerdoce universel des croyant. Autrement dit : nous sommes tous prêtres ! Il ne peut y avoir d’intermédiaire entre le croyant et Dieu, si ce n’est Jésus-Christ seul. Pas des clercs d’un côté et des laïcs de l’autre mais tous des prêtres… tous des frères.

Le problème c’est qu’il y a, dans l’Eglise comme dans toute institution ou toute communauté humaine, des fonctions et des responsabilités différentes qui peuvent mettre certains plus que d’autres en position d’autorité. Une position dangereuse ou la tentation de « se faire appeler » maître, guide, père… est là.

Lorsque Jésus fait cette mise en garde, il ne dit pas que personne ne doit être responsable ou enseignant. Il met en lumière le danger de se faire appeler « maître ». Le danger de la recherche du prestige d’être chef, directeur, président, responsable, pasteur… au risque d’éclipser l’autorité de Dieu. Nul homme ne doit, d’une façon ou d’une autre, prendre la place de Dieu. Dans l’Eglise en particulier, les responsables, quels qu’ils soient, doivent s’effacer derrière Celui qui les a appelé.

Mais Jésus dit aussi qu’il y a un autre danger. Il est pour ceux qui se cherchent des pères, des maîtres ici-bas. Il souligne alors le danger de mettre sa foi dans un homme ou une femme, même au service de Dieu, plutôt qu’en Dieu. Le danger existe, de s’attacher plus à un pasteur, un prédicateur, un enseignant qu’à Dieu. Et lorsque ce pasteur ou ce prédicateur s’en va, la foi vacille…

N’avoir d’autre maître que Dieu est un principe garant d’un service humble qui s’efface devant Dieu et d’une foi solide, ancrée en Dieu et non en l’homme.

Se reconnaître comme frères

L’affirmation de Jésus, « Vous êtes tous frères », est liée à la fois l’exhortation qui précède (vous avez tous un seul maître) et celle qui suit (vous avez un seul Père, qui est dans les cieux). Deux exhortations qui colorent différemment l’expression.

Si nous sommes frères parce qu’il y a un seul maître, alors nous sommes tous à égalité devant Dieu. Il n’y a pas des pères ou des mères et des frères ou des sœurs. Il n’y a que des frères et des sœurs. Nul ne peut se placer au-dessus de son frère, que ce soit à cause de son expérience, de sa connaissance ou même de son appel ! Nous sommes frères et sœurs parce que nous sommes tous disciples !

Si nous sommes frères et sœurs parce que nous avons un seul et même Père, qui est dans les cieux, alors nous sommes liés les uns aux autres, indépendamment de nos amitiés, nos « atomes crochus » ou non. Nous avons le même Père céleste : c’est Lui qui me dit qui est mon frère ou ma sœur, ce n’est pas moi qui décide…

Il est fondamental dans l’Eglise de se reconnaître comme frères et sœurs. Et il est fondamental de comprendre que ce qui fait de mon frère mon frère, c’est sa relation avec son Père céleste qui est aussi mon Père céleste. Ce n’est pas sa forme de piété, ou son appartenance à telle ou telle Eglise, ni même sa théologie . Et cela, je ne peux m’en rendre compte que si je vais à la rencontre des autres différents de moi, si je suis ouvert au dialogue et si je ne m’enferme pas dans mes a priori ou mes dogmatismes.

Se reconnaître comme frères, au-delà de nos différences, c’est glorifier notre Père commun, par le Christ qui nous unit !

Se faire serviteur

Vous êtes tous frères, vous avez un seul et même Père, un seul et même maître. Dès lors, en tant que frères et sœurs, c’est au service mutuel que vous êtes appelés. Dans le Nouveau Testament, le service est l’expression concrète de l’amour fraternel.

Le modèle du croyant, ce n’est pas le maître, c’est le serviteur. Tous les responsables, quels qu’ils soient, doivent s’en souvenir. Le « ministère » c’est le service, le « ministre » c’est le serviteur.

Notre Maître lui-même, Jésus-Christ, n’a-t-il pas montré le chemin en se faisant serviteur ? C’est toute la dynamique de l’incarnation : le Fils de Dieu qui quitte le ciel pour humblement venir sur terre, prenant la forme d’un serviteur. C’est tout le chemin du Calvaire, où le Christ a choisi de se mettre au service de nous, pécheurs, en acceptant l’humiliation jusqu’à la mort sur la croix, pour nous. Sa mort est son service ultime…

C’est pourquoi, Jésus dans ses paroles va au-delà de l’exhortation à ne pas appeler ni se faire appeler maître ici-bas, au-delà du fait d’être frères, égaux les uns envers les autres. Il s’agit d’aller plus loin et de se faire serviteur. Devant Dieu, nous sommes tous frères et sœurs. Devant notre frère ou notre sœur, nous sommes appelés à être des serviteurs.

Jésus le fait avec une formule qui exprime le renversement typique de l’Evangile : « Celui qui veut être au-dessus des autres recevra la dernière place. Et celui qui prend la dernière place sera mis au-dessus des autres. » (v.12).

Ici encore, nous avons à l’esprit l’exemple donné par le Christ. Car lui qui s’est humilié en tant que serviteur, jusqu’à la mort sur la croix, il est aussi ressuscité, élevé à la droite du Père. Comme l’apôtre Paul le dit dans son hymne de Philippiens 2.9-11 :

C’est pourquoi Dieu l’a souverainement élevé
et lui a accordé le nom qui est au-dessus de tout nom,
pour qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse
dans les cieux, sur la terre et sous la terre,
et que toute langue reconnaisse que Jésus-Christ est le Seigneur
à la gloire de Dieu, le Père.

Conclusion

N’avoir d’autre maître que Dieu, se reconnaître comme frères et sœurs, et se faire serviteur. Quel est le but ultime de ces trois principes sinon de glorifier Dieu seul ?

  • N’avoir d’autre maître que Dieu, c’est lui réserver l’obéissance, lui reconnaître son autorité absolue et bienveillante.
  • Se reconnaître comme frères et sœurs, c’est glorifier dans nos relations le Père céleste qui nous unit.
  • Se faire serviteur, c’est agir à l’image de Jésus-Christ, qui s’est fait serviteur jusqu’à donner sa vie pour nous.

Alors vivons-le ! Et la partition de nos vies portera bien cette mention : Soli Deo gloria… A Dieu seul soit la gloire !