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Une vie caractérisée par la générosité et le don de soi

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Critère Vitalité n°8

Lecture biblique: Romains 12.1-8

« Je vous invite donc, frères… » Donc. L’apôtre Paul a consacré les 11 premiers chapitres de sa lettre aux questions théologiques liées au salut : qui est sauvé, de quoi, comment, sur quels critères, pour combien de temps etc. Après avoir exposé les grandes lignes de l’évangile, bonne nouvelle d’un salut offert gracieusement à toute personne qui ose croire en Jésus-Christ, Paul s’attache à partir de maintenant à dégager les implications pratiques, concrètes, du salut que nous recevons en Jésus-Christ. Il affirme d’abord un principe très général, puis montre comment ce principe s’applique aux différents domaines de notre vie – en commençant par la vie communautaire, en église. Je vous propose de simplement suivre les étapes du texte qui nous exhortent à une vie généreuse, caractérisée par le don de soi.

1)   S’offrir à Dieu par gratitude

Commençons par le commencement : le principe général de la vie chrétienne (diapo). Paul nous appelle à nous offrir à Dieu, comme un sacrifice. Cette expression résonne de manière étrange à nos oreilles : s’agirait-il de se sacrifier pour Dieu ? Non, bien sûr. C’est le Christ qui s’est sacrifié pour nous !

Mais alors de quoi Paul parle-t-il ? Il utilise le vocabulaire du sacrifice parce que c’est l’élément religieux qui domine à son époque : quand on pense relation avec Dieu, foi, religion, on pense systématiquement sacrifice. Paul s’adresse donc aux Romains dans cette ligne de pensée : si la relation avec Dieu équivaut à des sacrifices d’animaux, quelle est la nouveauté que l’Evangile apporte ? La nouveauté, c’est qu’il est désormais inutile d’offrir quelque chose à Dieu pour demander pardon : le Christ a porté nos fautes et obtenu le pardon en notre faveur. Par contre, une forme de sacrifice, que nous oublions souvent, mais très présente dans l’A.T., c’est l’offrande, le sacrifice de reconnaissance, le cadeau que l’on offre à Dieu avec adoration et gratitude. Et ce type de « sacrifices » reste valable aujourd’hui : manifester notre amour à Dieu par un cadeau, par l’offrande.

Que faut-il offrir en cadeau ? Un beau mouton ? Un parfum de luxe ? Une voiture ? Bien plus et bien mieux : nous-mêmes ! Nous-mêmes, dans toutes nos dimensions : notre corps et notre esprit. Notre corps ne veut pas dire nos cellules, notre ADN, notre chair – il s’agit plutôt de ce qui est visible, concret, en relation avec l’extérieur. C’est nos mains, dans ce qu’elles font, nos yeux dans le regard qu’ils portent, nos pieds, avec les directions que nous empruntons, notre bouche et nos paroles, nos oreilles et l’attention que nous apportons aux autres. C’est la dimension concrète, ordinaire, triviale : voilà ce que Dieu désire comme cadeau, une vie quotidienne qui lui fasse honneur. C’est ça le culte authentique, dit Paul, un culte qui s’exprime de manière particulière dans nos rassemblements communautaires, mais qui doit surtout se vivre au quotidien, chaque jour, chaque heure : des gestes d’amour, des paroles vraies et justes, un regard bienveillant, voilà la meilleure manière d’exprimer à Dieu notre amour pour lui.

Sauf que notre manière de vivre ne vient pas de nulle part, mais de ce petit monde invisible où s’entremêlent les désirs, volontés, valeurs, convictions, doutes, pensées, qui vont déboucher sur des paroles et des actes concrets. Les fruits beaux et bons et sains que nous offrons à Dieu, demandent que les racines de l’arbre que nous sommes soient elles aussi belles, et bonnes, et saines. Mais si nous sommes honnêtes, nous reconnaissons que les racines de nos pensées, de nos sentiments, font rarement honneur à Dieu – à cause du mal qui nous corrompt de l’intérieur et nous influence de l’extérieur. D’où la nécessité de se tourner résolument vers Dieu pour qu’il nous libère peu à peu de ces mauvaises influences, qu’il nous renouvelle en profondeur afin que nous devenions capables de lui offrir le meilleur de nous-mêmes.

Jésus-Christ, Dieu devenu homme, s’est donné pour nous sauver – c’est la grâce, l’amour généreux de Dieu qui nous accueille sans que nous ne méritions quoi que ce soit. Notre réponse, c’est la gratitude : nous offrons à Dieu cette nouvelle vie qu’il nous a donnée, pour qu’il y fasse grandir ce qui est bon, agréable, et parfait.

2)   Appelés à nous bénir les uns les autres   

Dieu est généreux envers nous, et il nous appelle à être nous-mêmes généreux envers ceux qui nous entourent – dès la Création, Dieu nous veut pleins d’amour pour lui et pour les autres. Il est du coup très logique que Paul passe du principe général de la vie chrétienne – s’offrir à Dieu – à la vie communautaire – la générosité envers les autres. Un des aspects de notre vocation humaine, c’est de nous faire du bien les uns aux autres, de nous bénir les uns les autres (diapo). Dieu nous donne des ressources, des talents, des possibilités, des dons, pas seulement pour nous épanouir ou réaliser notre potentiel, mais aussi et surtout pour faire du bien aux autres.

Nous avons tous cette vocation à bénir les autres. Tous, nous recevons de Dieu de quoi aimer concrètement, bénir, ceux qui nous entourent. Comme dans un corps où chaque membre est utile aux autres, à l’échelle locale ou universelle, chacun a sa place et ses dons pour faire du bien à d’autres membres. C’est peut-être une qualité d’écoute,  qui conduira à faire des visites, prier, s’investir dans des aumôneries, encourager et conseiller ; c’est peut-être une facilité à tisser des liens, qui conduira à l’hospitalité, l’accueil, l’animation ; c’est peut-être des connaissances qui pousseront à enseigner – au culte, aux enfants, dans les groupes ; ce sont aussi des savoir-faire qui aideront l’église à fonctionner de manière très concrète – un culte sans sono, un local sale, ou des offrandes mal gérées, et la vie d’église s’enraye très vite ! Ce peut être aussi une disponibilité, une attention envers les autres, qui poussera à simplement rendre service par de petits gestes qui changent tout !

Tous nous avons quelque chose à donner aux autres – peut-être qu’on peut imaginer les dons de Dieu non pas uniquement comme des choses qu’il nous donne, mais comme des choses qu’il nous appelle à donner aux autres : de cette manière il nous implique, il nous rend partenaires de sa grâce et de sa générosité.

Parfois, on cumule des dons, parfois aussi on change ! Tout n’est pas figé ! Avec le temps, l’expérience, l’évolution de notre personnalité, nos ressources changent et nous pouvons servir les autres de manière différente…

De ce fait, une église saine, c’est une église qui accueille les différents dons et sait être patiente… Patiente pour aider chacun à discerner comment il peut servir – car la liste de nos ressources ne s’imprime pas magiquement lorsque nous devenons croyants ; patiente aussi pour tolérer les flottements inévitables dans ce discernement : en effet, pour discerner il faut parfois tester et parfois on se rend compte que tel rôle n’est vraiment pas fait pour nous ! D’ailleurs, même pour les services qui correspondent à nos dons, il faudra un temps d’apprentissage – ça paraît évident, mais notre peur de l’échec ou de déshonorer Dieu avec un service mal rendu nous fait parfois reculer et tout arrêter, alors qu’avec un peu de persévérance, les erreurs de débutant se seraient vite estompées !

Comment considérer ces dons, ces services, ces rôles ? Paul donne une recommandation qui peut surprendre : ne soyez pas prétentieux, mais tendez à une sage appréciation de vous-mêmes. Il s’agit de s’évaluer soi-même avec sagesse, à la mesure de la foi – ce qu’on peut comprendre par : à la mesure de l’évangile dans lequel nous croyons, qui dit que nous sommes tous également bénéficiaires de la même grâce de Dieu, égaux devant lui. Du coup, nos dons ne jouent pas sur notre valeur, comme si nous étions mieux les uns que les autres, mais nous sommes tous bénéficiaires de la même grâce qui va ensuite se manifester de différentes façons, toutes désirées et voulues par Dieu.

3)   Le don de soi : de multiples dons, une même consécration

Passons donc aux exemples de dons que Paul cite. Dans le N.T., plusieurs « listes » de dons apparaissent, mais sans se recouper exactement. Chacune a sa particularité sans être exhaustive. Ici, Paul se concentre sur la prophétie, prise de parole au nom de Dieu pour les gens aujourd’hui – sous la forme d’une révélation, ou simplement d’un conseil, parfois dans une présidence ou une prédication… C’est différent de l’enseignement, qui pourrait être le même partout et qui restitue les données bibliques ; différent aussi de l’encouragement qui ne révèle pas nécessairement quelque chose mais qui console, réconforte, ranime celui à qui nous parlons. Ce sont les dons de la parole ; Paul cite aussi et surtout les dons liés au service mutuel dans l’église : la libéralité financière, la prise de responsabilités, l’entraide…

Ces dons ont deux points communs. Le premier, c’est qu’ils demandent de la générosité, en particulier dans les deux biens qui sont précieux aujourd’hui : l’argent et le temps. Venir en aide à ceux qui se trouvent dans le besoin, soutenir les projets (parcours Alpha, activités des jeunes, musique…), demandent des ressources financières, mais aussi du temps ! Tout comme animer le culte, préparer les groupes d’enfants, venir en semaine faire le ménage, siéger au conseil ou se former pour mieux servir. Certains ont à cœur de partager leurs richesses, donnant de ce que Dieu leur a donné – et c’est une grâce ! D’autres auront du temps : je pense à nos retraités qui sont souvent bien actifs ! Mais aussi aux temps de repos forcé : grand âge, maladie, chômage… Ce temps subitement disponible peut momentanément permettre de s’investir – j’entendais un pasteur prier avec reconnaissance pour les personnes âgées qui ne se déplacent plus mais qui prient pour l’église, pour les jeunes : c’est une magnifique façon de bénir les autres !

L’autre point commun de ces dons, c’est la consécration, le sérieux et la joie. Peu importe le don ou le service, pourvu que ce soit d’une manière qui honore Dieu ! Si chacun contribue à l’ensemble du corps, il est essentiel que chaque membre, chaque cellule du corps, fonctionne bien. Dans ce domaine, ce qui nous motive, ce n’est pas l’appréciation d’autrui, mais la joie de Dieu lorsqu’il nous voit participer à ses projets bienfaisants.

Conclusion

La boucle est bouclée : l’évangile nous proclame l’amour de Dieu – notre réponse, c’est la gratitude, le don de nous-mêmes. La générosité est incontournable dans la vie chrétienne, parce que Dieu a été généreux envers nous. Sa générosité est notre raison d’être, la source et le modèle de notre vie nouvelle. Tous, nous sommes concernés par cet appel à la générosité : d’abord dans notre attitude d’amour et de patience, de bienveillance, ensuite par nos ressources (offrande de nos biens, de nos talents, de notre temps…), parce que Dieu nous rend – quel honneur ! – partenaires de son œuvre de bénédiction, partenaires de sa grâce.

Un culte édifiant et enthousiaste

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https://soundcloud.com/eel-toulouse/un-culte-difiant-et

Lecture biblique : Jean 4.19-24

Une des préoccupations de la femme Samaritaine, une fois avoir reconnu en Jésus un prophète (pas encore comme le Messie…), est la question du culte, de l’adoration. C’était un vrai désaccord entre les Juifs et les Samaritains : où fallait-il adorer Dieu ? Les Samaritains sont issus d’un mélange au VIIIe siècle avant Jésus-Christ entre des Israélites qui n’avaient pas été exilés au moment de l’invasion assyrienne et d’autres peuples ayant colonisé cette région. Ils ont gardé leur propre culte, qui perdure d’ailleurs jusqu’à aujourd’hui, et leur montagne sacré est le mont Garizim. Qui avait donc raison ? Fallait-il adorer Dieu sur le mont Garizim ou à Jérusalem ?

Bien que soulignant la prééminence de la tradition juive – « le salut vient des Juifs » – Jésus ouvre de nouvelles perspectives. Le moment est venue de se recentrer sur l’essentiel. Or l’essentiel, ce n’est pas le lieu mais la façon d’adorer Dieu. Peu importe que ce soit à Garizim ou à Jérusalem, en Samarie ou en Judée, dans un temple, une église, une maison ou ailleurs. Ce qui compte, c’est que ce soit une adoration « en esprit et en vérité. »
1. En esprit et en vérité

Quel est le sens de cette expression ?

Pour le mot « esprit », selon les versions françaises on peut trouver « Esprit » ou « esprit ». Il n’y a pas de majuscule ou de minuscule dans le texte grec original. Si on traduit « Esprit » alors c’est le Saint-Esprit. Si on traduit « esprit » alors c’est l’esprit du croyant.

Si on comprend « en Esprit » alors on souligne la nécessité de l’action du Saint-Esprit pour une vraie adoration. Si on comprend « en esprit », on souligne la préoccupation intérieure plus qu’extérieure. Le culte authentique est une affaire de cœur et non de lieu. Ou plus précisément, le lieu de l’adoration n’est pas le temple ou l’église mais l’esprit du croyant. Là, justement, où le Saint-Esprit agit. Et du coup, les deux options se rejoignent…

Quant à la « vérité », dans cette expression, que désigne-t-elle ? Une adoration en vérité pourrait être une adoration authentique et sincère. Une adoration qui n’est pas feinte ou superficielle mais qui prend racine dans le cœur, qui traduit dans les prières, les chants et les paroles dites, la réalité du cœur.

La version Parole de Vie traduit par une périphrase : « Comme le Fils l’a montré. », c’est-à-dire conformément à la vérité du Christ, à son exemple et selon ses enseignements. Du coup, d’une certaine façon, on rejoint aussi l’idée d’authenticité, dans la mesure où Jésus invite les croyants à purifier leur cœur pour porter du bon fruit, à la gloire de Dieu.

Le critère de Vitalité parle d’un culte édifiant et enthousiaste. A l’origine, en anglais, il est question de « Heartfelt worship » : une adoration sincère, qui vient du cœur. Ce qui compte dans un culte, c’est ce qui se passe à l’intérieur, ce qui vient de l’intérieur. L’extérieur n’a aucun intérêt s’il ne traduit pas une réalité intérieure. C’est bien une adoration en esprit et en vérité…

Du coup, osons nous poser la question : nos cultes du dimanche matin sont-ils vécus « en esprit et en vérité » ?
2. Les acteurs du culte

Tous les acteurs d’un culte sont concernés par cette question. Un culte sera vraiment édifiant et enthousiaste si tous ses acteurs le vivent en esprit et en vérité ! Or, il y a trois acteurs incontournables d’un culte.

a. Le SEIGNEUR

Le premier acteur d’un culte, c’est le Seigneur lui-même ! Ce n’est ni le lieu ni le moment qui compte mais la présence et l’action du Saint-Esprit.

Dans ce cas, on pourrait comprendre l’expression avec deux majuscules : « en Esprit et en Vérité ». L’Esprit fait référence au Saint-Esprit, et la Vérité au Christ ! L’adoration est toujours de l’ordre de la réponse à l’oeuvre de Dieu. Le but ultime de nos cultes ne doit pas être de passer un bon moment, d’être touchés ou transportés, ni même peut-être d’être édifié ou encouragé mais bel et bien de glorifier Dieu.

De plus, Dieu n’est pas que spectateur de notre adoration ! Il s’y implique, il la suscite et l’anime par son Esprit, il y répond par sa présence et sa bénédiction. Rien d’automatique ou de magique dans tout cela. Simplement, l’expression de la relation que le Seigneur entretient avec son Église, le Père avec ses enfants.

Sans la présence active du Seigneur, un culte n’est qu’une réunion comme une autre, où on chante et on parle ! C’est tout…

b. Les officiants

Ensuite, il y a ceux qui ont une responsabilité particulière dans le déroulement d’un culte. On pourrait les appeler les officiants. Et il ne faut pas penser ici seulement au président de culte et au prédicateur ! Il y a les musiciens, les techniciens, l’équipe d’accueil, de préparation de la Cène, etc. On pourrait même y ajouter ceux qui font le ménage et permettent ainsi au culte de se dérouler dans un temple propre. Bref, on parle de tous ceux qui se mettent au service de la communauté pour le bon déroulement d’un culte.

Pour ces acteurs aussi, il est important qu’ils agissent « en esprit et en vérité », autrement dit, avec un esprit de service authentique et un souci spirituel.

En effet, chacune de ces tâches, même les plus discrètes et les plus matérielles, sont des tâches spirituelles. Parce qu’elles permettent à l’Église de rendre un culte à Dieu. Parce qu’elles sont au service de la communauté. Le mot liturgie vient d’un terme grec qui signifie, étymologiquement, service public. Le mot étant utilisé dans la version grecque ancienne de l’Ancien Testament pour désigner le service au Temple, dans tous ses aspects.

Il y a aussi un danger, pour toutes ces tâches, de les exercer sans cet état d’esprit. Y compris les tâches les plus spirituelles en apparence : jouer d’un instrument ou chanter comme on le ferait dans sa salle de bain, bâcler la préparation d’une présidence de culte, préparer mécaniquement une prédication et la délivrer en ne comptant que sur ses talents oratoires. On n’est plus alors « en esprit et en vérité » !

c. L’assemblée

Enfin, dernier acteur incontournable d’un culte : l’assemblée. On pourrait aussi parler de l’Église. J’utilise le mot assemblée, qui a exactement la même signification mais qui souligne la dimension humaine. On ne parle pas de l’institution mais des gens, des croyants rassemblés. Et c’est bien une assemblée, pas seulement une audience, encore moins un public !

Un culte ne sera un culte « en esprit et en vérité » que si l’assemblée n’est pas seulement consommatrice mais actrice. Il faut une assemblée active et non passive. Active dans l’écoute, active dans la prière et le chant, active dans la communion. Quand on dirige un culte ou qu’on apporte une prédication, on sent si l’assemblée est active ou passive…

Or l’enjeu, ce n’est pas de faire plaisir au prédicateur pour qu’il se sente écouté mais bien d’être réceptif à l’action de Dieu par son Esprit !
3. Le test de l’envie

Avant de conclure, encore une question. Parler d’une adoration qui vient du cœur comme un signe de vitalité d’une Église peut paraître suspect à certains. N’est-ce pas donner trop d’importance à l’émotion, à la perception subjective ?

Ce n’est certes pas le seul critère mais pourquoi le laisser de côté ? Lorsque Jésus dit à la femme Samaritaine que le culte désormais doit se vivre « en esprit et en vérité », que l’essentiel se joue à l’intérieur, dans le cœur, il parle aussi de cette perception subjective.

Peut-être alors pouvons-nous, chacun, nous soumettre au test de l’envie…

– A la fin d’un culte, est-ce que vous avez envie de revenir la semaine suivante ?
– Est-ce que vous avez envie d’inviter vos amis intéressés ou en recherche à venir au culte ?
– Et le test peut-être le plus redoutable : le dimanche matin, quand le réveil sonne, est-ce que vous avez envie de vous lever pour aller au culte ?

Bien-sûr, cette envie, elle peut varier selon les circonstances de notre vie. Il y a des hauts et des bas. Inutile de se culpabiliser à l’excès. Mais si l’envie vous manque, au lieu de baisser les bras ou d’essayer d’aller voir ailleurs, pourquoi ne pas voir comment vous pourriez mieux vous impliquer, trouver un lieu de service, renouveler votre motivation ? Pourquoi ne pas prier pour tous ceux qui prennent part d’une manière ou d’une autre au déroulement du culte ?
Conclusion

Si nous fréquentons une Église, c’est que nous avons envie de vivre un culte édifiant et enthousiaste. Sinon, nous resterions au lit le dimanche matin !

Mais, avouons-le, nous n’avons pas forcément ce sentiment tous les dimanches… Mais à qui la faute ? En tout cas, un des acteurs du culte n’est jamais responsable, et c’est le premier d’entre eux : le Seigneur. Lui, il est toujours prêt à s’impliquer à fond, par son Esprit.

Ce sont les autres acteurs qui peuvent faire obstacle : les acteurs visibles ou les acteurs discrets, ceux qui sont debout sur l’estrade ou ceux qui sont assis sur les chaises. Car nous tous, nous sommes acteurs de nos cultes. Nous tous, nous sommes appelés par Jésus-Christ à adorer Dieu « en esprit et en vérité ».

Alors comment, chacun, accomplissons-nous notre part ?

A la rencontre de Dieu

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Lecture biblique: Jean 2.1-11

Pour un signe étonnant, c’en est un ! Et pas seulement parce que Jésus a transformé une grande quantité d’eau en vin, mais aussi parce que cette histoire de fête où l’on manque d’alcool est un drôle de début pour un Messie ! Revenons quelques instants à cette histoire, pour bien s’en imprégner.

Nous sommes à Cana, pas très loin de Nazareth, le village où a grandi Jésus. On célèbre un mariage, et comme le veut l’usage, les familles des mariés ont invité le maximum de gens, peut-être même le village entier, pour cette fête qui dure une semaine. Marie, la mère de Jésus, est déjà là, peut-être même  qu’elle aide un peu en cuisine ou à l’organisation du service. Jésus, qui est dans le coin, est lui aussi invité, accompagné de ses tout premiers élèves, les disciples.

La fête bat son plein, mais arrive le drame : plus de vin ! Un mariage sans vin, ça ne se fait pas… En ramenant à des proportions modernes bien plus modestes, c’est comme si vous invitiez 200 personnes au repas de mariage et que vous ne serviez que 20 parts… C’est la honte assurée ! Sauf que là, tout le village est aux premières loges pour constater le problème et en parler, parler, reparler pendant les 20 ans à venir – si ce n’est plus !

Marie se tourne vers Jésus pour lui confier la situation : derrière le constat – il n’y a plus de vin – se cache une demande, un appel à l’aide. Jésus saisit bien la demande cachée, mais ça le gêne. La traduction que j’ai lue dit « Mère », mais le sens du texte original est moins chaleureux : poli mais distant, on pourrait le rendre par « Madame ». « Madame, qu’est-ce que vous me voulez ? le moment n’est pas venu ».

On pourrait en rester là, et exposer ce pauvre couple au scandale ! Seulement, Jésus se laisse émouvoir par la situation. Et le miracle arrive : des serviteurs, à la demande de Jésus, remplissent six jarres d’au moins 100 litres chacune, vont voir le responsable de la soirée, qui n’est au courant de rien et déguste à l’aveugle l’eau transformée en vin. Surprise, ce vin-là est bien meilleur que le vin proposé en début de soirée… Tout est bien qui finit bien, la crise a été évitée, et Jésus et son entourage repartent presque inaperçus.

1)   De l’eau au vin : l’image de la grâce

Une des choses étonnantes, c’est que le miracle n’occupe pas la première place. En fait, Jésus n’a pas trop envie, le miracle est à peine décrit, juste ce qu’il faut pour qu’on sache qu’il a eu lieu, et presque personne n’en est témoin, à part les disciples, Marie et quelques serviteurs – comme si l’intérêt de cette histoire était ailleurs.

En fait, Jean qualifie cet événement de « signe » et non de miracle, marquant par là que l’important, c’est le sens de ce qui vient de se passer, la portée symbolique de ce que Jésus vient de faire : il annonce la grâce de Dieu.

Jésus s’est servi de 6 grosses jarres, des jarres destinées normalement aux ablutions rituelles pour se purifier, par exemple avant le repas. Ces jarres et l’eau qu’elles contiennent renvoient au système de purification de la religion juive, et si on veut aller plus loin, elles symbolisent tout le code religieux qui permet aux Juifs de vivre en accord avec Dieu : purifications, mais aussi offrandes, sacrifices, rituels etc. Jésus transforme l’eau de la purification en vin, symbole de fête, de joie, d’abondance (d’autant que 600 litres, ça fait quand même 800 bouteilles, de quoi combler plus que largement le manque de vin) ; ainsi, Jésus annonce une nouvelle manière de vivre avec Dieu – là c’est juste en germe, mais les enseignements qu’il donne ensuite vont expliciter ce message, cette bonne nouvelle, que Jésus apporte : réjouissez-vous, Dieu vous invite à partager sa vie, sa joie, son salut.

Comment est-il possible d’annoncer que Dieu, le Créateur, le Tout-puissant, le grand sage et le grand juge, nous invite à partager son intimité, nous offre son amour et sa bénédiction, alors que nous ne sommes pas vraiment exemplaires ? Pour approcher quelqu’un comme lui, il faudrait être irréprochable ! C’est le sens de toutes ces règles religieuses : tendre à l’irréprochabilité pour approcher celui qui est lumière pure, bien incarné, vérité et justice.

Ce qui nous permet d’approcher Dieu et de recevoir sa joie, c’est le fameux « moment » que Jésus évoque de manière mystérieuse. Son moment – dans d’autres traductions, l’heure – n’est pas encore venu. Ce qui permet de passer d’une vie de coupable essayant tant bien que mal de se racheter à une vie libre avec Dieu, débordante de son amour et de présence, c’est la Croix, la Croix qui se dessine déjà pour Jésus à la noce. En mourant sur la croix, après avoir vécu une vie irréprochable, Jésus assume en notre nom tous les reproches que nous méritons, toutes les transgressions qui nous rendent indignes de Dieu, pour que, si nous le croyons, si nous avons simplement foi, nous soyons déclarés justes, innocents, dignes de vivre avec ce Dieu si grand et merveilleux. Il nous permet ainsi de passer de l’eau au vin, de passer à une vie transfigurée, renouvelée, pétillante, une vie remplie de la joie de Dieu.

Marie n’avait sûrement pas compris la portée de ce qu’elle demandait : devenir bénéficiaire de l’amour débordant de Dieu a un prix, et ce prix, Jésus savait bien, lui, qu’il allait devoir le payer. En agissant malgré tout, comme pour tous les miracles et bienfaits à venir, Jésus agit par anticipation, rendant disponible une grâce que la Croix seule rend possible.

2)   Invités à la foi

Cette image des jarres remplies à ras bord nous suggère l’abondance de la vie avec Dieu, offerte à la foi. Et c’est justement ces questions de foi qui intéressent l’apôtre Jean, au moins autant que le miracle lui-même.

Jean prend le temps de s’arrêter sur le dialogue entre Jésus et sa mère, point de départ du miracle. Marie vient voir son fils, inquiète, et lui demande de l’aide. Sait-elle seulement ce qu’elle demande ? Il y a peut-être derrière sa démarche le souvenir de la naissance miraculeuse de Jésus, 30 ans plus tôt, la promesse de l’ange que cet enfant serait l’espoir, le sauveur du peuple… Peut-être l’invite-t-elle, en sa qualité de mère, à passer à la vitesse supérieure : « tu es le messie, vas-y, rends-toi utile ! » D’autant que Jésus vient de passer un cap, en recevant le baptême et en choisissant des disciples.

Seulement, Jésus résiste. Justement parce qu’il vient de se mettre au travail, il est sorti du cadre de l’autorité humaine : c’est auprès de son Père céleste, Dieu, qu’il veut puiser son inspiration, ses initiatives… La distance qu’il prend avec sa mère protège sa liberté d’action, inspirée par Dieu seul. Malgré tout, malgré cette rebuffade qui permet à Jésus de se dégager des attentes et de l’empiètement de sa mère pour s’affirmer pleinement, malgré tout, Jésus se laisse émouvoir par le besoin de ces mariés, par leur désarroi possible, et répond à sa manière à la demande de sa mère, donnant, nous l’avons vu, à son acte une portée bien plus grande que le simple réapprovisionnement en vin.

Marie est venue à Jésus avec son autorité de mère, avec ses attentes, ses besoins, ses hypothèses sur le rôle de son fils… Elle nous ressemble ! Certes, nous n’avons pas donné naissance à Jésus, mais nous allons nous aussi à la rencontre de Dieu souvent mus par un besoin, une question, un doute… et parfois nous imaginons d’avance la réponse que nous souhaitons : je suis malade, il me guérira s’il est Dieu ! je serai toujours heureuse… Si Dieu existe, il me montrera ceci ou cela, il permettra ceci ou cela…

Pourtant, dans le cas de Marie comme dans le nôtre, même si nous venons à Dieu avec nos questions et nos attentes, notre vision des choses, lorsque nous rencontrons Dieu il nous faut être prêts à nous laisser bouger, déplacer, réorienter, à changer de perspective, pour recevoir de lui ce que nous n’avions pas demandé, mais qui est notre véritable besoin. Le Christ est venu guérir, consoler, aider, encourager, enseigner – et bien plus ! bien plus profondément, il est venu nous offrir une relation nouvelle avec Dieu, racine d’une vie nouvelle, où tout est possible. Marie, entendant la voix de son sauveur dans le timbre de son fils, se réajuste et croit, acceptant de suivre le Christ là où il veut l’emmener.

Conclusion

Dans ce texte, il y a plusieurs personnages. Certains voient, d’autres non ; certains croient, d’autres non. Pour tous, le miracle a de quoi surprendre – même celui qui n’a rien vu est surpris : le vin est excellent !

En Christ, Dieu échappe à notre maîtrise, il nous surprend, nous étonne, et en même temps il nous rencontre au plus intime de notre vie. Par un autre biais, il vient nous toucher en plein cœur : là où nous suivons des règles ou des principes un peu poussiéreux, là où nous exprimons des attentes étroites, il nous fait la grâce d’une joie débordante, abondante, inépuisable. Par ce signe, Jésus annonce cette bonne nouvelle : Dieu nous aime, Dieu nous invite à partager sa vie, à entrer dans une relation neuve avec lui, pour nous renouveler et nous transfigurer, sans rien nous demander d’autre que la foi.

Entre la grâce et la gloire

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https://soundcloud.com/eel-toulouse/entre-la-gr-ce-et-la-gloire

Lecture biblique : Titre 2.11-14

L’épître à Tite est une lettre pastorale. L’apôtre Paul écrit à son collaborateur pour lui donner quelques conseils dans son travail : il est alors en Crête et aide la jeune communauté chrétienne de l’île à s’organiser. L’apôtre évoque les qualités requises pour un responsable, les dangers de certains enseignements pernicieux et il évoque aussi ce que Tite doit transmettre aux croyants. Ce ne sont pas d’ailleurs de grandes envolées théologiques mais des exhortations très pratiques qui concernent la vie de tous les jours.

Notre texte conclut une série d’exhortations adressées à différents types de population (les anciens et les jeunes dans l’Église, les esclaves envers leur maître). Le propos est plus général et théologique. Et il est centré sur la grâce : « elle s’est manifestée, la grâce de Dieu, source de salut pour tous les hommes. »

Le passage évoque la condition actuelle des chrétiens. Si j’ai choisi de le lire dans la version TOB, c’est qu’elle souligne bien le fait que cette condition des chrétiens est située entre deux « manifestations » ou « épiphanies » pour se référer aux termes grecs utilisés.

Le chrétien, aujourd’hui, se situe entre deux épiphanies : celle de la grâce de Dieu (v.12) et celle de la gloire de Dieu (v.13). Alors, entre la grâce et la gloire, que sommes-nous donc appelés à vivre aujourd’hui ?
Entre la grâce et la gloire

La manifestation de la grâce de Dieu a déjà eu lieu, dans la mort et la résurrection de Jésus-Christ. Celle de la gloire de Dieu est encore à venir, au jour de l’accomplissement de notre espérance. En d’autres termes, nous sommes sous la grâce mais pas encore dans la gloire. Nous avons la grâce pour fondement et la gloire pour horizon.

La grâce, c’est le don gratuit de Dieu en Jésus-Christ. Présentée dans notre texte comme étant source de salut pour tous les hommes, elle s’est manifestée dans le don de Jésus-Christ, qui s’est donné lui-même pour nous.

C’est un des fondamentaux de l’Évangile. Le salut est une grâce. Ce n’est pas un dû, ni une récompense, ni un privilège qui serait réservé à quelques-uns. C’est une grâce, un cadeau gratuit et immérité de la part de Dieu. Et il en est de même pour tous les hommes !

La gloire, c’est ce qui nous attend au jour du plein accomplissement du projet de Dieu. Parce que, c’est évident, nous n’y sommes pas encore… Pour chacun de nous, pour notre monde, pour l’humanité. Le mal, les injustices, la souffrance… tout cela est encore bien présent. Et l’espérance chrétienne est qu’un jour tout cela disparaîtra, la mort elle-même sera définitivement vaincue. Ça, c’est la gloire.

Entre la grâce et la gloire, nous vivons dans une tension. Entre ce que nous avons déjà reçu par grâce, et ce que nous recevrons dans la gloire. Entre ce que nous sommes déjà, par grâce, et ce que nous serons au dernier jour, dans la gloire.

On est sous la grâce mais pas encore dans la gloire. Grâce et gloire ne s’opposent pas. Elles se complètent. Nous avons besoin de l’une pour nous mettre en route et de l’autre pour continuer d’avancer.

Parce que la grâce est réelle, notre salut n’est pas qu’une affaire qui regarde notre avenir. Le salut commence aujourd’hui, dans une relation personnelle, dans la foi, avec le Christ vivant. Et cela change déjà notre vie aujourd’hui. Mais parce que la gloire est encore à venir, nous n’avons pas tout, tout de suite, ici et maintenant. Et toute théologie qui prétendrait que le chrétien devrait, s’il est fidèle, connaître la prospérité à tous égards est une théologie qui s’égare loin de l’Évangile de grâce.

Entre la grâce et la gloire, nous sommes appelés à vivre dans une tension féconde. Parce que nous sommes sous la grâce, nous pouvons connaître une vraie communion avec Dieu aujourd’hui. Parce que la gloire est encore à venir, nous avons une espérance qui nous permet de surmonter les épreuves dans l’attente des promesses merveilleuses que Dieu garde en réserve pour nous.
Avec modération

La question qui nous concerne donc, est de savoir comment nous sommes appelés à vivre dans cette tension entre la grâce et la gloire. L’apôtre Paul l’évoque dans notre texte en parlant de notre vie « dans le temps présent » (v.12). Voici ce qu’il nous en dit :

« (La grâce de Dieu) nous enseigne à renoncer à l’impiété et aux désirs de ce monde, pour que nous vivions dans le temps présent avec réserve, justice et piété »

On est quand même loin de la gloire ! Paul ne parle pas ici d’une vie glorieuse et puissante, fait d’exploits et de miracles. Il parle d’une vie de renoncement. Il fait l’éloge de la simplicité, de la modération.

Ça ne veut pas dire pour autant que c’est facile ! Il y a bien l’idée de renoncement… et Paul parle ici de renoncer à l’impiété et aux « désirs de ce monde ». Les mots mérites qu’on les expliquent. L’impiété, c’est le contraire de la piété. C’est-à-dire ce qui nous coupe de Dieu. Le « monde » dont il est question ici est péjoratif. C’est ce qui est terrestre, en opposition au céleste, la sphère de Dieu. « L’impiété et les désirs de ce monde », c’est tout ce qui nous éloigne de Dieu.

Nous avons tous, dans notre vie, des comportements, des pensées, des pratiques qui nous éloignent de Dieu. Des préoccupations qui viennent brouiller notre relation avec lui. Des pensées qui parasitent notre communion avec lui. Des pratiques qui nous mettent en contradiction avec ce que nous savons être conforme à la volonté de Dieu. Entre la grâce et la gloire, nous sommes appelés à y renoncer.

Mais il ne s’agit pas seulement de renoncer à certaines choses, il convient aussi d’en développer d’autres. Cette « vie dans le temps présent » est décrite par trois adverbes en grec, que la TOB traduit par « avec réserve, justice et piété. ».

La justice, c’est ce qu’il est juste et bon de dire et de faire. Ça touche à notre comportement dans le quotidien, notre relation à notre prochain. La piété, c’est ce qui concerne notre relation à Dieu. Aimer Dieu et aimer son prochain comme soi-même. Évidemment. C’est classique.

Le premier adverbe est plus étonnant. La TOB traduit « avec réserve », la Parole de Vie « raisonnable », la NBS « d’une manière pondérée ». Le mot évoque donc la modération. Pourquoi est-ce important ? Sans doute pour aller loin ! Si vous démarrez un marathon comme si vous couriez un 100 mètres, vous n’irez pas bien loin ! Or, la vie chrétienne « dans le temps présent » est une course d’obstacles de longue haleine, dans laquelle il convient de gérer son effort pour arriver jusqu’au bout.

Je trouve vraiment intéressant cet éloge de la modération. Elle entre en écho avec de nombreuse valeurs de l’Évangile : la maîtrise de soi, le contentement, la reconnaissance, la paix…

Et elle n’implique pas du tout la tiédeur ou la mollesse. Le verset 14 évoque en effet l’Église comme un peuple « plein d’ardeur pour les belles œuvres. » Il s’agit donc d’être ardemment modérés !

Bien-sûr, nous sommes appelés à être des hommes et des femmes de conviction, bouillants pour le Seigneur, zélés pour l’Évangile. Ça ne doit pas pour autant faire de nous des agités ou des illuminés ! La sagesse est dans la modération, dans l’équilibre. Car il s’agit d’être persévérant et pas seulement bling-bling !
Conclusion

Certes, la condition des chrétiens n’est pas toujours confortable, située dans un entre-deux qui peut être source de frustrations voire de souffrance. Pour autant, entre la grâce et la gloire, le chrétien est déjà au bénéfice du salut de Dieu et ce qui l’attend est plus grand encore.

Car la grâce a été manifestée dans la mort et la résurrection de Jésus-Christ. Et cette grâce, elle nous est donnée dès aujourd’hui et par elle, nous sommes en communion avec Dieu. La gloire n’est pas encore venue. C’est notre horizon, notre espérance. Mais les promesses qui lui sont liées sont extraordinaires… et elles sont pour l’éternité !

Alors, entre la grâce et la gloire, vivons pleinement dans le temps présent. Soyons ardemment modérés, à la fois bouillants pour le Seigneur, zélés pour l’Évangile, et sage et équilibré. Car il s’agit de tenir ferme, jusqu’au bout, dans le beau combat de la foi.

Objectif: suivre Jésus

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Lecture biblique: Luc 5.27-32

Qu’est-ce qu’être chrétien ? Une définition serait : suivre Jésus. Croire en lui et marcher dans ses pas, suivre ses valeurs et ses orientations. En ce tout début d’année, j’aimerais me joindre aux magazines qui nous conseillent de prendre de bonnes résolutions, non pas pour vous encourager à faire plus de sport, manger sainement ou lire davantage, mais, comme c’est un temps de bilan et de réorientation, pour vous encourager, nous encourager, à nous recentrer sur cet objectif : suivre le Christ. Et pour cela, j’aimerais revenir au début de l’évangile de Luc, qui raconte l’appel de Jésus à un de ses premiers disciples, Levi. Jésus vient de faire deux miracles, deux guérisons.

Lecture

Comme d’habitude, les initiatives de Jésus ne passent pas inaperçues. Jésus, qui commence à être connu, croise au péage un collecteur de taxes et l’appelle à le suivre. Les collecteurs de taxes étaient peu appréciés à son époque : souvent malhonnêtes, ils étaient au service du pouvoir romain, un pouvoir étranger et païen – ce qui leur attirait les foudres du peuple juif, qui les traitait de collabos. Pourtant, ce marginal, Jésus l’appelle à le suivre, tout comme il a guéri des marginaux, un lépreux, un paralytique, un peu plus tôt dans le texte. Levi répond avec enthousiasme, et ni une ni deux, il se lève, abandonne tout et le suit. L’autre nom de Levi, c’est Matthieu, l’un des 12 apôtres, celui qui a écrit un des 4 évangiles, un marginal devenu central.

Tout à sa joie, Levi organise une immense fête, un banquet, chez lui, et il invite ses amis, ses collègues, ses connaissances, des gens qui lui ressemblent. Jésus aussi est invité, avec ses disciples, et on imagine Levi raconter à ses invités son expérience, cette conviction qu’il a eue qu’il devait suivre Jésus, qu’il devait faire ce grand saut dans le vide pour aller avec lui – c’était le premier parcours alpha !

Voici qu’arrivent les chefs religieux, les pharisiens, scandalisés de voir Jésus – quand même un bon Juif – traîner avec ces gens-là. Courageux mais pas téméraires, ils demandent aux disciples (pas à Jésus lui-même) pourquoi ils se mettent à table avec ces pfff… ces gens peu fréquentables, ces pécheurs à la moralité discutable, sans foi ni loi. Vraiment, ça ne fait pas honneur à Dieu !

Qu’il ait entendu ou qu’on l’ait averti, Jésus vient leur répondre : « Ah vous vous croyez justes ! ah vous ne voulez pas vous salir avec des gens impurs ! Eh bien, pour moi, la guérison, c’est pour les malades, le pardon, c’est pour les coupables, et je leur apporte moi-même. Je suis venu appeler ceux qui se reconnaissent pécheurs, pour qu’ils changent de vie. »

Quelle intensité dans les actes et les paroles de Jésus ! On a là un concentré d’évangile, et je vous propose d’en extraire quelques principes actifs pour nous en ce début d’année, pour nous encourager à mieux suivre le Christ, à aller plus loin dans notre vie avec lui.

1)   Accueillir la bonne nouvelle du salut              

Premier principe actif : entendre (ou réentendre) la bonne nouvelle du salut. Levi est un exemple pour nous, l’exemple de celui qui a entendu l’appel et y a répondu avec tout son cœur. Dans sa réaction, il est entier : il se lève, abandonne tout, suit Jésus, invite tous ses amis pour leur présenter le Maître. On devine derrière ces actes radicaux la confiance, la joie, la reconnaissance.

Car Levi, depuis qu’il travaille aux impôts pour l’administration romaine, a bien vu les visages se durcir, les portes se fermer, les gens se détourner. Dans ce contexte, devant les regards chargés de jugement, est-ce qu’il a eu le courage d’aller encore au culte à la synagogue ? Peut-être qu’il s’est laissé influencer par ses collègues malhonnêtes. On ne sait pas comment il vivait avant de rencontrer Jésus, mais ce qui est sûr, c’est qu’il avait été repoussé dans les marges de la société. Et là, un maître spirituel, un guérisseur reconnu, l’appelle, lui ?! Il l’invite à le suivre ?!

Cette main tendue, Levi la saisit sans y réfléchir à deux fois ! S’ajoutent sûrement l’autorité et le charisme de l’envoyé de Dieu, qui donnent à Levi la conviction que là, avec Jésus, se trouve sa paix, sa joie, le sens de sa vie. Levi n’en sait pas plus – il ne sait pas que Jésus est le Fils de Dieu, qu’il va mourir à sa place, ressusciter, etc. – mais il entend, dans la voix du Christ, l’invitation de Dieu.

En contrepoint, nous avons les Pharisiens, campés sur leurs certitudes, sûrs de leur justesse théologique, de leur légitimité, de leur pureté. Les Pharisiens à la base ne sont pas des mauvais bougres : ils veulent simplement faire honneur à Dieu dans tous les domaines de leur vie, et pour cela ils ont réfléchi, et sont arrivés à beaucoup de principes et de règles, pour ne pas se compromettre, pour être le plus purs possibles, par déférence envers le grand Dieu saint, le Dieu juste qui déteste le mal. Seulement, les Pharisiens, obnubilés par leur plan de sainteté en 40 points, ont oublié qu’ils étaient pécheurs. Ils n’ont pas vu l’orgueil s’enraciner dans leur cœur, les rendre hautains et fermés, secs et durs. Se croyant debout et bien portants, beaucoup refusent la main que Dieu leur tend en Jésus.

C’est sûr que quand on fait ou qu’on a fait n’importe quoi, qu’on a vécu une vie lamentable, on se rend facilement compte qu’on a besoin d’aide. Ceux qui sont couverts de boutons ou qui ne peuvent plus marcher se rendent bien compte qu’ils ont besoin d’un médecin. C’est peut-être plus difficile pour ceux qui ont suivi un long fleuve tranquille : nés dans une famille équilibrée, héritiers de valeurs saines et constructives, ayant toujours connu Dieu et suivi plus ou moins son chemin, ils vont bien. Pourtant, que l’on soit un grand pécheur devant l’Eternel ou quelqu’un de bien, la vérité de l’Evangile c’est que nous sommes tous coupables devant Dieu, et que nous avons tous autant besoin de saisir la main du Christ. La vérité de l’Evangile, c’est que tous autant que nous sommes, nous étions détestables aux yeux de Dieu, par notre péché, par notre orgueil, mais que Dieu nous a aimés en Jésus-Christ, et qu’il a payé le prix fort pour faire de nous, chacun de nous, ses enfants.

Entendre ou réentendre la bonne nouvelle du salut, c’est donc saisir le pardon immérité de Dieu, la grâce immense de son amour, dont nous nous savons indignes au plus profond de nous. Dieu nous invite à être ses enfants ! Adolescents rebelles, addicts, entrepreneurs à succès, salariés sans histoire, anonymes inutiles à la société : peu importe, Dieu nous invite à être ses enfants !

2)   Devenir témoins de la grâce                           

Si on saisit vraiment, profondément, cette réalité de l’amour immérité de Dieu pour nous en Jésus-Christ, alors on ne peut que suivre le chemin de la grâce, devenir témoins de la grâce que nous reçue (diapo). Les Pharisiens, sûrs d’eux, sont prompts à mépriser ceux qui galèrent et ne suivent pas le code de sainteté à la lettre. A l’inverse, ceux qui se savent pécheurs pardonnés comprennent les autres pécheurs : « J’étais là ! Je m’en suis sortie, mais je sais combien la pente est glissante, combien le chemin paraît long. Garde espoir, mon frère, ma sœur, car si Dieu a pu me sortir de là, il peut le faire pour toi aussi. » Peu importe qu’on ait vécu le même problème ou pas ! Nous étions loin de Dieu, et Dieu nous a tendu la main.

Baigner dans l’amour de Dieu nous conduit à porter sur les autres un regard compréhensif et encourageant. C’est ce que fait Jésus ! Alors que lui, c’est le seul à n’avoir jamais été indigne de Dieu ! Mais parce qu’il est plongé dans l’amour de Dieu, sa perfection morale n’est pas l’occasion de juger ou de repousser, mais au contraire de partager le remède, d’encourager à saisir la main de Dieu pour une vie nouvelle, saine, sainte, juste, belle et bonne. Même lui, il refuse de juger – en tout cas, ceux qui sont conscients de leur péché, parce que les orgueilleux qui s’illusionnent, Jésus les secoue à plusieurs reprises.

Est-ce à dire qu’il faut tout tolérer, tout accepter ? Cautionner le mal ? Bien sûr que non ! Jésus nous montre qu’on peut être avec quelqu’un sans cautionner ses erreurs ou ses fautes. Il nous montre comment être témoins de l’amour de Dieu. Plus tard, dans un sermon qu’il donne sur une montagne, Jésus appelle ses disciples à faire une différence dans le monde, en étant comme du sel dans un monde dénaturé. C’est comme s’il nous appelait à être bleus dans un monde jaune. Si nous restons dans une petite bulle bleue, notre couleur ne fera aucune différence. Si nous allons chez les jaunes, mais que nous laissons leur couleur déteindre sur nous et nous rendre vert pâle, nous ne ferons pas de différence. Jésus nous appelle à rejoindre ceux qui ont besoin de son amour et sa justice, et à le faire en lui restant fidèles, en restant bien bleus dans un monde jaune.

Cela nous oblige à considérer la question de ce qui nous influence. Jésus fréquentait des pécheurs sans pécher lui-même : pourquoi ? Parce qu’il soignait sa relation avec Dieu, il cherchait l’influence de Dieu pour s’enraciner dans la justice, la vérité, la paix, l’amour. Il méditait les révélations de Dieu, il priait. Même avec des injustes ou des menteurs, même avec de mauvaises fréquentations, Jésus veillait à garder comme seule influence Dieu – et du coup c’est lui qui déteignait sur les autres et non pas le contraire. Rempli de l’Esprit de Dieu – qu’il nous a donné à nous aussi – ce qu’il vivait avec Dieu était contagieux – comme la joie contagieuse de Levi !

Je crois que ce texte nous invite à l’audace, l’audace d’aller rencontrer et fréquenter des gens différents, qui nous mettront peut-être mal à l’aise, pour partager avec eux le salut que nous, nous avons déjà reçu.

Mais si on veut aller plus loin, il faut dire que cette audace doit s’accompagner de patience et de bienveillance, parce que les pécheurs – les autres, mais nous aussi, vous connaissez la parabole de la paille et de la poutre – les pécheurs ne deviennent pas saints d’un claquement de doigt. Il y a ceux qui ont tout à apprendre, le b.a.ba de Dieu, et trois prédications ne suffiront pas. A l’autre bout, il y a ceux qui ont presque tout entendu, mais qui doivent persévérer pour laisser Dieu guérir en eux le mal qui ne se voit pas. Il y aura ceux qui cèdent à la tentation, ceux qui se retrouvent coincés peut-être par erreur, par immaturité, ceux qui mettront du temps à comprendre : avec tous, jeunes ou vieux chrétiens, nous sommes appelés à la patience et à l’encouragement, nous sommes appelés à être témoins de la grâce du Christ.

L’église est un lieu d’apprentissage, l’école de la vie avec Dieu, où nous nous mettons ensemble à l’écoute du Christ, où nous nous soutenons pour sortir des impasses de notre péché. Je crois qu’on ne devrait pas avoir de tabous dans l’église : le mal, commis ou subi, est terrible, mais aucun de nous n’en est indemne. Dieu nous a rassemblés pour que nous nous soutenions les uns les autres, que nous parlions de ce qui est difficile, de nos échecs, de nos défis, que nous célébrions nos progrès. Ecouter, conseiller, prier, chercher ensemble comment progresser, accueillir ensemble les réponses de Dieu : voilà la vocation de l’église ! Un lieu de dialogue, de conseils, de vérité, sans masques, un lieu d’apprentissage, un lieu de prière et d’humilité, un lieu saturé de grâce reçue et partagée.

Conclusion

L’église, notre église, est composée de gens infréquentables que le Christ a décidé de fréquenter. Nous sommes tous des coupables graciés, des pécheurs pardonnés – c’est cette vérité de la grâce qui, il y a 500 ans, a bouleversé un certain moine, Martin Luther, au point de se rebeller contre les responsables religieux de son époque. Comme lui, comme Levi, laissons-nous bouleverser par l’immense amour de Dieu, par l’offre gratuite du salut, laissons-le changer, chambouler notre vie, pour la 1e ou la 100e fois. Les racines bien plongées dans l’amour de Dieu, soyons témoins de sa grâce autour de nous, en dehors de l’église mais aussi dans l’église. Soyons témoins de la grâce de Dieu les uns envers les autres, encourageant chacun à aller plus loin dans la vie nouvelle où Jésus nous appelle, avec l’humilité des pécheurs pardonnés que nous sommes, conscients que notre maître, le Christ, peut faire germer la vie en toute situation, même la plus sombre, pour peu qu’on saisisse sa main.