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Un seul Dieu pour tous

 

Psaume 96
1 Chantez en l’honneur du Seigneur un chant nouveau ;
gens du monde entier, chantez pour le Seigneur.
2 Chantez en l’honneur du Seigneur,
bénissez son nom !
Jour après jour annoncez qu’il est le sauveur.
3 Parlez de sa gloire à tous les êtres humains,
parmi tous les peuples, racontez ses merveilles.
4 Le Seigneur est grand et mérite qu’on l’acclame.
Il est plus redoutable que tous les dieux.
5 Tous les dieux des autres peuples sont des faux dieux,
alors que le Seigneur a fait les cieux.
6 Il rayonne de grandeur et de majesté,
son sanctuaire est rempli de puissance et de splendeur.
7 Familles de toute la terre, venez honorer le Seigneur
en proclamant sa gloire et sa puissance.
8 Venez proclamer sa gloire,
entrez dans les cours de son temple en apportant vos dons.
9 Courbez-vous jusqu’à terre devant le Seigneur,
quand il manifeste qu’il est Dieu,
tremblez devant lui, gens du monde entier.
10 Dites à toute la terre : « Le Seigneur est roi,
le monde est donc ferme, il reste inébranlable.
Il juge les peuples avec droiture. »
11 Que les cieux se réjouissent, que la terre crie de joie,
que la mer mugisse, et tout ce qu’elle contient !
12 Que la campagne soit en fête, et tout ce qui s’y trouve !
Que tous les arbres des forêts poussent des cris de joie
13 devant le Seigneur, car il vient,
il vient pour rendre la justice sur la terre.
Il jugera le monde avec justice,
il sera un arbitre sûr pour les peuples.
Ce qui m’a frappé, en relisant ce psaume, c’est la façon avec laquelle il affirme, avec force, la dimension universelle du Seigneur.

  • On y trouve un appel à la louange adressé à tous les peuples, aux gens du monde entier !
  • On y invite à proclamer la gloire de Dieu à tous les humains
  • La Création toute entière (et pas seulement les humains !) est associée à la louange
  • On dit même que le Seigneur, le Dieu dont parle ce Psaume, est le seul vrai Dieu. Les autres sont des faux dieux.

Mais peut-on encore dire cela aujourd’hui, sans être taxé d’intolérant ? Peut-on prétendre proclamer une bonne nouvelle universelle sans être arrogant ? N’est-ce pas problématique de dire que le Dieu de la Bible, celui qui s’est révélé à Abraham et sa descendance, le peuple d’Israël, qui s’est manifesté en Jésus-Christ, est le seul vrai Dieu ?

Il ne peut y avoir qu’un seul Dieu

L’affirmation monothéiste est, forcément, universelle. S’il n’y a qu’un seul Dieu, alors il est Dieu pour tout le monde !

On peut même aller plus loin : un Dieu qui ne serait pas unique, peut-il être encore Dieu ? Par définition, Dieu n’est-il pas l’être suprême, absolu ? Or s’il y en d’autres que lui, alors il n’est plus absolu. Ce n’est plus Dieu. C’est autre chose… Un être supérieur ? Peut-être… Mais alors qu’y a-t-il au-dessus de lui ?

Aujourd’hui, il est difficile d’entendre des affirmations absolues. Chacun a sa vérité, chacun se construit sa spiritualité, ses croyances et donc, son Dieu.

Mais soit il y a un seul Dieu, soit il n’y a pas de Dieu du tout. Il n’y a pas d’entre-deux possible. La réponse est forcément un absolu… à vous de choisir ! L’auteur de notre Psaume a choisi : il y a un seul Dieu. Tout vient de lui et tout dépend de lui. Et en plus, il nous aime !

Evidemment, c’est une affirmation de foi. Mais pourquoi serait-elle plus folle que d’affirmer qu’il n’y a pas de Dieu ? Ce qui est, aussi, une affirmation de foi ! Le Psaume focalise son regard sur l’oeuvre du Dieu Créateur. Ses oeuvres, ce sont celles qu’on voit quand on contemple la nature, belles, impressionnantes. A tel point que la nature elle-même participe à la louange universelle. Est-ce vraiment plus absurde de dire que tout cela est l’oeuvre de Dieu que de dire que ce n’est que l’effet du hasard, de coïncidences heureuses ?

Avec l’auteur du Psaume, je préfère choisir qu’il y a bien un Dieu, Créateur de toutes choses, et qu’il se soucie de nous. Si Dieu n’est pas unique et absolu, alors il n’y a aucune assurance ni aucune espérance possible. Tout ne serait qu’hypothétique. Car si Dieu n’est pas unique et absolu, qu’est-ce qui nous garantirait qu’il accomplira ses promesses ?

Le problème ce n’est pas Dieu mais les croyants

Le problème, ce n’est pas le Dieu unique. C’est ce que les croyants font de leur monothéisme. Dans l’histoire, jusqu’à aujourd’hui, la foi monothéiste a été utilisée comme prétexte à la haine et la violence. C’est bien là le problème…

S’il faut affirmer l’absolu de Dieu, il faut être conscient de nos limites dans notre compréhension de Dieu. Il ne faut pas confondre Dieu et notre perception de Dieu. Dieu est plus grand que notre théologie ! La théologie, c’est le discours sur Dieu. C’est ce que nous pensons et disons de lui. Et si Dieu pouvait être “enfermé” dans une théologie, cerné par un discours… il ne serait plus Dieu !

C’est terrible quand on limite Dieu aux bornes de notre intelligence, de notre foi ou même de notre théologie. Car nos théologies peuvent devenir des idoles. C’est le cas quand notre conception de Dieu est limitée à notre connaissance, à notre théologie. Elle devient une idole, une image figée de Dieu.

Le Dieu de la Bible se révèle avant tout au moyen d’un récit, dans l’histoire, pas à travers un dogme. Il se révèle par ses oeuvres, dans la nature qu’il a créée et qu’il maintient. Il se révèle dans l’histoire d’un peuple, issu d’un homme, Abraham. Il se révèle de manière ultime en Jésus-Christ, le Fils de Dieu devenu homme. Il rend ces récits vivants, pour nous, par l’oeuvre de son Esprit.

On ne peut pas réduire notre foi à notre confession de foi. Même si, évidemment, c’est important de réfléchir sa foi, de l’approfondir. Ma foi, c’est l’histoire de Dieu dans ma vie.

Les plus qui manquent à notre foi

Il y a un élan, un souffle, dans ce Psaume qui nous invite à considérer notre foi, à la soupeser… et à nous demander si nous n’avons pas tendance à la limiter, à l’enfermer dans des certitudes ou des habitudes. Finalement, est-ce que nous n’aurions pas besoin de quelques petits plus à notre foi ?

Un peu plus d’enthousiasme

Quel grand Dieu nous avons ! A force de routine dans la foi, avec une vie chrétienne bien rangée… on l’oublierait presque. L’enthousiasme d’un tel psaume devrait nous rejoindre.

Vous me direz qu’on ne peut pas décider d’être enthousiaste… Ce n’est pas faux. Mais on peut quand même mettre toutes les chances de notre côté pour le devenir. Et pour cela, qu’y a-t-il de mieux que la contemplation ? Est-ce que nous prenons le temps de la contemplation dans notre vie ? La contemplation de Dieu, dans ses oeuvres, dans le monde, dans notre vie et celle de ceux qui nous entourent ? Est-ce que nous prenons le temps de chercher à voir Dieu, à discerner sa main ? Est-ce que nous lui demandons d’ouvrir nos yeux pour le voir, d’ouvrir notre coeur pour le recevoir ?

Un peu plus d’humilité

Combien nous sommes petits devant ce Dieu si grand ! Et là aussi, l’expérience de la vie chrétienne peut nous jouer des tours, avec le risque, à la longue, de se croire du côté de ceux qui savent, de ceux qui ont compris, avec la tentation de se considérer comme quelqu’un qui, finalement, n’a plus grand chose à apprendre sur la foi, sur la vie et même sur Dieu.

Jésus n’a pas appelé des sachants, il a appelé des disciples, qui ont toujours besoin d’apprendre. J’aime cette prière de Jésus dans l’Evangile de Matthieu, où il s’exclame :

“O Père, Seigneur du ciel et de la terre, je te loue d’avoir révélé aux tout-petits ce que tu as caché aux sages et aux personnes instruites.” (Matthieu 11.25)

Le Royaume de Dieu n’est pas pour les sachants, il est pour ceux qui sont comme les petits enfants ! Si nous voulons que notre foi grandisse et s’épanouisse, il faut rester du côté des petits qui cherchent à apprendre.

Un peu plus de curiosité

J’en connais, forcément, trop peu sur ce Dieu unique et absolu ! Or, j’ai l’impression que souvent, on se contente d’un Dieu trop petit ! Un Dieu qui n’est pas à l’échelle de ce Dieu unique et universel décrit dans notre Psaume. On passe alors à côté de tant de choses simplement par manque de curiosité. On préfère rester en terrain connu, entre nous, en fréquentant les gens comme nous, qui pensent comme nous, qui prient comme nous, qui parlent comme nous… Je suis persuadé que le manque de curiosité appauvrit notre foi.

Croyez-vous que ce Dieu unique et universel ne puisse pas se révéler, d’une manière ou d’une autre, dans d’autres cultures, dans d’autres croyances ? Et que nous ne puissions en tirer un bénéfice pour notre foi aussi ?

Bien-sûr que nous reviendrons toujours au Christ, qui est pour nous la révélation ultime de Dieu. Mais pourquoi ne pas sortir aussi un peu des sentiers battus ? Oser aller voir chez les autres, oser faire preuve de curiosité…

Conclusion

Finalement, l’enthousiasme, l’humilité, la curiosité… ça ressemble à des qualités qu’on trouve facilement chez les enfants, les petits. Et nous sommes bien invités à être comme eux, si on veut entrer dans le Royaume de Dieu !

En fonction de votre personnalité, de votre cheminement personnel, ça pourrait être un peu plus l’un que l’autre… mais il me semble que nous avons tous besoin d’un peu des trois !

Et il le faut bien, si on veut approfondir et vivre notre foi en ce Dieu si grand, ce Dieu unique et universel !

Vous êtes le sel de la terre (4) Un sel qui se mélange

 
Dans le cadre de notre campagne de rentrée, nous poursuivons l’évocation des différentes propriétés du sel, en écho à la parole de Jésus dans le Sermon sur la Montagne : “Vous êtes le sel de la terre”. Après avoir parlé du sel qui donne du goût, puis du sel qui conserve, attachons-nous ce matin au sel qui se mélange. C’est bien une de ses propriétés. Si vous ajoutez du sel à un plat, il se mélange aux autres ingrédients. On ne voit plus le sel, et pourtant on sent bien sa présence (ou son absence) !

Appliqué à la métaphore de Jésus, on pourrait dire que si nous sommes sel de la terre, nous ne pouvons pas rester dans la salière ! La salière, ça peut être l’Église ou toute autre bulle que nous nous construisons pour notre confort personnel. Et si on sort de la salière, c’est pour se mélanger au monde. C’est seulement si on se mélange au monde qu’on pourra remplir les autres tâches du sel, selon ses propriétés, notamment donner du goût et conserver.

Pour réfléchir à cette propriété du sel qui se mélange, je vous propose de lire un extrait de la grande prière de Jésus pour ses disciples au chapitre 17 de l’Évangile selon Jean.

Jean 17.15-19
15 Je ne te prie pas de les retirer du monde, mais de les garder du Mauvais. 16 Ils n’appartiennent pas au monde, comme moi je n’appartiens pas au monde. 17 Fais qu’ils soient entièrement à toi, par le moyen de la vérité ; ta parole est la vérité. 18 Comme toi tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi je les ai envoyés dans le monde. 19 Je m’offre entièrement à toi pour eux, afin qu’eux aussi soient entièrement à toi.

Jésus, dans ces quelques versets, parle bien aussi du monde (l’équivalent de la terre dans la métaphore de Jésus) et de notre rapport au monde. Plus encore, il évoque bien l’idée d’un nécessaire mélange puisqu’il envoie ses disciples dans le monde et demande à Dieu de ne pas les en retirer !

Cette prière de Jésus fournit à notre concept de “sel qui se mélange” un fondement théologique et des principes pour sa mise en pratique.

Un fondement théologique

Le verset 18 peut être mentionné comme fondement théologique au “mélange” dans le monde : “Comme toi tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi je les ai envoyés dans le monde.“
Nous sommes envoyés dans le monde comme le Christ a été envoyé dans le monde par son Père. Et cette affirmation a plus d’implications qu’on pourrait le penser à la première lecture :

  • Il y a bien-sûr une dimension missiologique : le Christ nous envoie en mission dans le monde. Comment pourrions-nous répondre à cet appel en restant entre nous, sans nous “mélanger” au monde ?
  • Mais il y a aussi une dimension christologique. Il s’agit d’être envoyé comme le Christ a été envoyé. Or, comment le Fils est-il venu dans le monde ? En devenant homme ! L’incarnation, c’est un peu Dieu qui se mélange à l’humanité, au monde.
  • Il y a même une dimension trinitaire… Tout en devenant homme, le Fils est resté Dieu. Il est pleinement homme et pleinement Dieu. En devenant homme, le Fils n’a pas perdu sa pleine communion avec le Père.

Comprendre l’incarnation comme le modèle de notre présence au monde nous conduit nécessairement à comprendre cette dernière comme un mélange et non un retrait, un mélange qui ne se fait pas au détriment de notre communion avec Dieu.

Retenons donc cela de ce fondement théologique : nous sommes appelés par le Christ à nous mélanger au monde, comme lui, le Fils, s’est mélangé au monde en devenant homme.

Des principes pour la mise en pratique

J’aimerais souligner trois principes dans la mise en pratique de ce fondement théologique.

La tentation du retrait du monde

Il y a, tout d’abord, le verset 15 : “Je ne te prie pas de les retirer du monde, mais de les garder du Mauvais.” (v.15)

C’est assez surprenant que Jésus dise d’abord ce qu’il ne demande pas à son Père : “je ne te prie pas de les retirer du monde…” C’est bien que la tentation existe. Et peut-être est-ce même la solution de facilité. Pourquoi cette tentation du retrait du monde existe-t-elle ?

Il y a le décalage ressenti entre les valeurs du Royaume de Dieu et celles de notre monde. Ce n’est pas nouveau, même si les tensions ont évolué au fil des siècles. Et ce décalage n’est pas sans fondement. Jésus a bien dit que son Royaume n’était pas de ce monde. Et il a mis en garde contre la confusion des deux, avec son fameux “Il faut rendre à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu”. D’ailleurs, dans l’histoire, quand il y a eu confusion entre l’Eglise et le pouvoir politique, ça a donné lieu à de terribles dérives.

Du coup, à cause de ce décalage, il y a parfois la crainte de perdre ces valeurs du Royaume au contact du monde, la peur de la compromission. Alors, pour se protéger, on se retire du monde. Et on préfère la compagnie de ceux qui croient comme nous et qui pensent comme nous. C’est rassurant.

Mais ce n’est pas ce à quoi Jésus nous appelle. Voilà pourquoi il demande à son père de ne pas nous retirer du monde. Et n’oublions pas l’exemple que Jésus nous a laissé, et les reproches que les chefs religieux de l’époque lui faisaient de fréquenter des gens considérés comme infréquentables. On reprochait à Jésus de trop se mélanger, et même de se compromettre avec le monde…

Les limites du mélange

Refuser le retrait du monde, ce n’est pas pour autant s’y perdre sans discernement ! Il y a, bien-sûr, des limites.

On sait qu’il existe un écueil, celui de tellement se mélanger qu’on en perd notre identité, notre sel. Et finalement, on n’est plus du sel mais… du tofu. Le tofu, ça n’a pratiquement pas de goût. Ca prend le goût de la sauce dans lequel il baigne. C’est facile d’être “le tofu de la terre”… mais ça ne sert pas à grand chose.

Il y a bien un danger duquel il faut se méfier. Et ce danger, ce n’est pas le monde, c’est le Mauvais (ou le Malin). Car tout n’est pas bon dans notre monde, loin de là… Il faut indéniablement rester vigilant. Il y a des pratiques, des idéologies, des discours qui sont contraires à l’Evangile et au Royaume de Dieu. Et qui se rencontrent même parfois dans l’Eglise… Il s’agit de s’en préserver et même, s’il le faut, les dénoncer.

Mais Jésus insiste sur le fait que le moyen de s’en préserver, c’est d’être entièrement à Dieu. C’est de garder intact notre goût et notre saveur, de rester du sel qui puise sa saveur en Christ. Ne nous trompons pas : notre saveur ne vient pas de notre notre opposition au monde, elle vient de notre attachement à Dieu. Cet attachement peut évidemment nous conduire parfois à être en décalage, voire en opposition avec le monde dans lequel nous vivons. Mais ce qui nous préserve du Mauvais, c’est notre attachement à Dieu et à sa Parole. Pas notre retrait du monde…

La nécessité du mélange

Conscient de la tentation du retrait du monde et des limites du mélange, il faut aussi affirmer la nécessité du mélange. Il est strictement impossible de répondre à l’appel du Christ qui nous envoie dans le monde sans se mélanger au monde ! Pour nous y aider, je vous propose deux pistes concrètes.

Considérer que le Christ nous envoie sur nos lieux de vie

Il y a des lieux où on se mélange aux autres de façon obligée, comme l’école ou l’entreprise. Il y a d’autres lieux possibles, basés sur le volontariat, comme le milieu associatif. Dans tous les cas, il nous faut considérer nos lieux de vie, tous nos lieux de vie, qu’ils soient choisis ou obligés, comme les lieux où le Christ nous envoie. C’est là qu’il nous veut, c’est là qu’il nous attend. Il me semble que c’est une bonne façon de ne pas percevoir le mélange comme un danger mais comme une chance, celle d’y être des grains de sel utiles et qui font la différence. Notre prière, chaque jour, devait être : “Seigneur, comment pourrai-je être un grain de sel aujourd’hui, dans ma famille, à l’école, dans mon lieu de travail ou mon engagement associatif ?”

Prêter l’oreille à la voix du monde

La voix du monde, c’est ce que nos contemporains expriment, ce qu’ils pensent, ce qui les préoccupe et les anime, ce qui modèle leur pensée, ce qui les motive ou ce qui les révolte… Cette voix ne s’exprime pas seulement à travers les éditorialistes des chaînes d’information continue et les vidéos des influenceurs sur les réseaux sociaux. Loin de là. Elle s’exprime aussi à travers l’art et la culture. Il me paraît vraiment dommageable, pour un croyant, de s’enfermer dans une sous-culture chrétienne, avec sa musique, ses films, sa littérature… justement parce que si on s’y enferme, on se retire du monde ! Il nous faut, au contraire, développer une sensibilité à l’art et la culture d’aujourd’hui. On y accède plus facilement que jamais, à travers le cinéma, les séries, la littérature, la musique… toutes les formes d’art ! On n’est pas obligé d’aimer ce qu’on voit ou ce qu’on entend, mais on doit y prêter l’oreille. Comment se mélanger au monde si on n’entend pas sa voix, si on ne comprend pas son langage ?

Conclusion

“Vous êtes le sel de la terre !” Mais comment pourrions-nous l’être en restant dans notre salière ? Une des propriétés du sel est de se mélanger, et c’est aussi ce à quoi le Christ nous appelle dans le monde.

Le défi du mélange, c’est le défi d’un témoignage de l’Evangile culturellement pertinent aujourd’hui. C’est le défi d’une présence au coeur du monde, avec la saveur du Christ. C’est le défi d’être, chacun et chacune, disciple de Jésus-Christ au quotidien, sur nos lieux de vie, là où il nous envoie.

Le monde change. Le défi change. Mais l’appel reste le même : “Vous êtes le sel de la terre !”

Vous êtes le sel de la terre (2/5) – Un sel qui donne du goût

 

C’est aujourd’hui le deuxième dimanche de notre campagne de rentrée autour de la formule de Jésus : “ Vous êtes le sel de la terre.” Pendant cinq semaines, à partir de cette métaphore, nous déclinons les différentes propriétés du sel, en les appliquant à notre vie, dans une perspective spirituelle.

La première propriété du sel, c’est de donner du goût. Dans la métaphore de Jésus, un sel qui perd son goût ne sert plus à rien :

Matthieu 5.13
C’est vous qui êtes le sel du monde. Mais si le sel perd son goût, comment le rendre de nouveau salé ? Il n’est plus bon à rien ; on le jette dehors, et les gens le piétinent.

Ici, le plat qui a besoin de sel, c’est le monde. Et le sel, c’est nous ! C’est une vocation formulée sous la forme d’une affirmation : “vous êtes le sel de la terre”, vous êtes là pour donner du goût au monde… Mais comme l’a dit Florence la semaine dernière : “Le sel ce n’est pas nous, soyons humbles : c’est ce que Dieu fait en nous et à travers nous.”

On a beau parler de sel et de goût, il n’y a pas de recette toute faite pour être sel de la terre… Mais ce qui est sûr, c’est qu’avant de vouloir donner de la saveur au monde, à la vie des autres, il faut que ayons nous-mêmes une vie qui a du goût ! C’est en ayant une vie pleine de saveur que nous pourrons donner un peu de saveur autour de nous…

Il n’y a pas de recette toute faite, mais il y a quand mêmes quelques ingrédients indispensables. Et la Bible en mentionne quelques-uns. Comme par exemple dans le texte que je vous propose de lire aujourd’hui, tiré du prophète Michée.

Michée 6.6-8
6 « Avec quoi me présenter devant le Seigneur, lorsque je viens me prosterner devant le Dieu très-haut ? Faut-il que je lui offre en sacrifices complets des veaux d’un an ? 7 Le Seigneur désire-t-il des béliers innombrables, des flots intarissables d’huile ? Donnerai-je mon fils premier-né pour qu’il pardonne ma révolte et mon infidélité ? »
8 On t’a enseigné ce qui est bien, ce que le Seigneur exige de tout être humain : il demande seulement que tu respectes les droits des autres, que tu aimes agir avec bonté et que tu suives avec humilité le chemin que lui, ton Dieu, t’indique.

Les questions des versets 6 et 7 posent la problématique : finalement, qu’est-ce que Dieu attend de moi ? qu’est-ce qui est vraiment important à ses yeux ? On est dans le contexte de l’Ancienne Alliance, donc la piété s’exprime à travers les offrandes et les sacrifices, allant ici jusqu’à proposer d’offrir son fils premier-né ! On formulerait les choses différemment aujourd’hui, on parlerait de prière, de dévotion, d’engagement dans l’Eglise…

Mais est-ce vraiment dans le domaine de la piété, et exclusivement là, que Dieu m’attend ?

Le verset 8 montre que la perspective de Dieu est bien plus large. Il mentionne ce qu’on pourrait appeler trois ingrédients de base d’une vie qui a du goût.
Respecter les droits des autres
Aimer agir avec bonté
Suivre avec humilité le chemin que Dieu nous indique

Ce ne sont pas des ingrédients très compliqués en soi, ils sont à la portée de tous. Mais bien dosés, ils donnent de la saveur à notre vie… et à celle des autres.

Respecter les droits des autres

Les versions françaises traduisent souvent “respecter le droit” ou “pratiquer la justice”. Mais de quel droit s’agit-il sinon le droit des autres ? On ne peut pas “respecter le droit” sans respecter les droits des autres. On ne peut pas parler de droiture ou de justice sans prendre en considération les autres, sans respecter leurs droits et ce qu’ils sont. C’est bien la question du lien à notre prochain qui est posée ici.

Aimer agir avec bonté

J’aime beaucoup la formule ! Ce n’est pas seulement agir avec bonté, c’est aimer agir avec bonté. Autrement dit, ce n’est pas une bonté forcée, sous la contrainte, dont on se sent obligé : “il faut bien être bon puisqu’on est chrétien !” C’est une bonté libre et joyeuse, ancrée dans notre coeur, nos motivations profondes. Il s’agit donc, d’une certaine façon, du lien avec nous-mêmes, notre coeur.

Suivre avec humilité le chemin que Dieu indique

Littéralement il s’agit de “marcher humblement devant Dieu”. La marche désigne ici notre vie, notre comportement de tous les jours et j’aime bien la formulation proposée par la Nouvelle Bible en Français Courant. Suivre le chemin que Dieu nous indique, c’est avoir un comportement conforme à la volonté de Dieu. Et le faire humblement, devant Dieu, c’est le vivre dans la dépendance et la confiance en Dieu. C’est donc notre lien à Dieu, et ses conséquences dans notre vie quotidienne, qui est souligné ici.

Ces trois ingrédients interrogent donc notre lien à Dieu, à notre prochain et à nous-mêmes. Et la réflexion que cela m’inspire, c’est qu’une saveur équilibrée est une affaire de dosage.

Pour une saveur équilibrée

Une vie chrétienne a du goût quand elle est équilibrée dans sa saveur, harmonieuse dans dans son lien aux autres, à soi-même et à Dieu. Cela découle d’ailleurs immédiatement des deux commandements indissociables, les plus importants selon Jésus lui-même : “Tu aimeras le Seigneur ton Dieu… et tu aimeras ton prochain comme toi-même.” Dieu, les autres et moi-même.

Il y a dysfonctionnement, on pourrait dire que la saveur est déséquilibrée, lorsqu’un des trois ingrédients prend toute la place.

Une vie chrétienne centrée sur soi-même est évidemment déséquilibrée. Dans cette perspective, ce qui compte, c’est d’être bien, d’être libéré, d’être léger. Dieu devient mon coach personnel. La repentance et la sanctification sont remplacées par l’épanouissement et le bien-être. La Bible est un manuel de développement personnel. Bref, ce qui compte c’est moi ! Je ne vois pas comment une telle vie chrétienne va pouvoir être sel de la terre…

Une vie chrétienne centrée sur les autres exclusivement est aussi déséquilibrée. D’une part parce que ça peut être une fuite en avant, qui nous évite de nous poser les bonnes questions sur nous-mêmes et notre cheminement avec Dieu. Et d’autre part parce qu’elle oublie la deuxième partie du commandement : “Tu aimeras ton prochain comme toi-même !” Il peut y avoir une fausse humilité à se dénigrer et se dévaloriser. Ce n’est pas sain. D’autant que Dieu, lui, nous dit que nous avons de la valeur à ses yeux.

Même une vie chrétienne centrée sur Dieu uniquement n’est pas équilibrée non plus… J’ai conscience que ça peut paraître étonnant. Mais regardez notre texte. Les questions des versets 6-7 sont entièrement centrées sur Dieu : quelles offrandes, quels sacrifices lui apporter ? Et la réponse de Dieu, au verset 8, nous réoriente vers les autres ! Les chrétiens qui ne vivent que pour Dieu, dont toute la vie est prière et méditation de la Bible, dont la seule préoccupation c’est Dieu et lui seul… ces chrétiens oublient le deuxième commandement : “Tu aimeras ton prochain comme toi-même”. Notre consécration à Dieu ne doit pas être une fuite de notre prochain ! On ne peut pas aimer Dieu sans aimer notre prochain…

Saler… mais pas trop !

Une saveur équilibrée est une affaire de dosage aussi dans la façon de “saler” les autres, c’est-à-dire de leur donner du goût, de les influencer positivement.

Sans sel, un plat est sans saveur. Mais avec trop de sel il devient immangeable !

Si on veut agir avec bonté, suivre le chemin que Dieu nous indique, il faudra forcément se tourner vers les autres. C’est bien à cela que Dieu nous appelle. Nous avons une Bonne Nouvelle à vivre et à partager. Et je ne vois pas comment on pourrait aimer notre prochain sans chercher à le rejoindre…

Mais parfois on veut en faire trop… et plutôt que de donner du goût, on rend l’Evangile immangeable ! D’où l’importance de respecter les droits des autres. On ne peut pas s’ingérer dans la vie des autres, ou faire pression sur eux, même pour la bonne cause, même avec de bonnes intentions !

Saler oui… mais pas trop ! Tout est affaire de dosage. Les uns, timides ou réservés, devront peut-être se faire violence, et compter sur l’aide du Saint-Esprit, pour avoir le courage d’affirmer leur foi et partager l’Evangile. Les autres, enthousiastes ou extravertis, auront tout autant besoin du Saint-Esprit… mais pour les retenir et ne pas en faire trop !

Conclusion

Celui qui nous appelle à être sel de la terre est aussi celui qui en donne l’exemple parfait. En Jésus-Christ, le Fils de Dieu est devenu homme, simple et humble. Et c’est ainsi qu’il a influencé durablement le monde, à partir d’une poignée de disciples dont il s’est entouré. Il avait le courage de mettre les pieds dans le plat quand il le fallait mais il a donné l’exemple du service, jusqu’à la mort sur la croix, et de l’accueil de tous, en particulier les petits et ceux qu’on rejetait.

Il a donné l’exemple d’une vie à la saveur équilibrée, qui donne du goût à la vie de ceux qui le suivent. Il savait saler… mais pas trop ! Efforçons-nous d’être “sel de la terre” à son exemple !

Le berger et la brebis perdue

 

Est-ce que vous aimez qu’on vous raconte une histoire ?

J’ai une fille qui est maîtresse des écoles et qui a donc fait sa rentrée cette semaine. Cette année, elle va faire des remplacements mais elle est ravie parce qu’elle commence l’année avec une classe de maternelles. Et ce qui lui plaît en particulier, c’est qu’elle va pouvoir raconter plein d’histoires à ses élèves.

Mais les histoires, ce n’est pas seulement pour les enfants ! Moi qui suis cinéphile, j’aime me laisser embarquer par l’histoire qu’un film me raconte. Et si vous aimez lire, vous devez ressentir le même plaisir.

Jésus aussi aimait raconter des histoires dans son enseignement. Il partait d’une situation de la vie de tous les jours pour en tirer une leçon spirituelle. C’est ce qu’on appelle les paraboles. Je vous propose d’en lire une ce matin :

Matthieu 18.12-14
12 Qu’en pensez-vous ? Si quelqu’un possède cent moutons et que l’un d’eux s’égare, ne laisse-t-il pas les quatre-vingt-dix-neuf autres dans la montagne pour partir à la recherche de celui qui s’est égaré ? 13 Je vous l’affirme, s’il le retrouve, il ressent plus de joie pour ce mouton que pour les quatre-vingt-dix-neuf autres qui ne se sont pas égarés. 14 De même, votre Père qui est dans les cieux ne veut pas qu’un seul de ces petits se perde.

Dans cette parabole, il y a deux personnages principaux : un berger et un mouton. Le berger nous parle de Dieu. Le mouton nous parle de nous. On peut même dire, probablement, que la parabole parle d’abord du berger (cf. la conclusion au verset 14) et ensuite du mouton.

Mais je vous propose de commencer par le mouton… parce qu’il parle de nous !

Le mouton

Tout ce qu’on sait du mouton de l’histoire, c’est qu’il est perdu. On ne sait pas dans quelles circonstances il s’est égaré, ni si c’est de sa faute ou pas… Peu importe. Il est perdu.

On a tous connu, une fois ou l’autre, ce sentiment d’être perdu. Que ce soit en randonnée parce qu’on s’est écarté des chemins balisés, à la lecture d’un mode d’emploi dont on ne comprend rien, ou face à une tâche à accomplir dont on se sent incapable… Qui n’a pas dit, un jour : “là, je suis perdu !”

Plus subtile : parfois on est perdu sans le savoir, ou en étant même persuadé qu’on a la situation bien en main… et là c’est pire ! Parce qu’on s’obstine.

Ce que notre parabole veut nous dire, et ce que la Bible dit par ailleurs à plusieurs reprises, c’est que lorsque nous vivons sans Dieu, nous sommes perdus. Qu’on en soit conscient ou non. Ça ne veut pas dire pour autant qu’on est les pires des racailles, des voyous sans foi ni loi. On peut être des gens très bien sous tout rapport… et être perdus.

Une affirmation biblique fondamentale, c’est que l’être humain a été créé à l’image de Dieu. C’est une façon de dire que nous sommes faits pour être en relation avec notre Créateur. Sans ce lien à notre Créateur, nous sommes perdus.

Et le risque de se retrouver perdu, de s’égarer, de se perdre par rapport à soi-même, nous concerne tous, croyants ou non. Une des forces de la foi, c’est de se reconnaître perdu, c’est-à-dire ayant besoin de Dieu. Et cela, on peut aussi l’oublier en tant que chrétien, et vivre sa vie comme si Dieu n’était pas là, comme si, finalement, on pouvait se débrouiller tout seul. Ce n’est plus Dieu qui compte mais notre foi, notre appartenance religieuse, nos rites et nos habitudes…

Avoir la foi, c’est être conscient de notre besoin de Dieu dans notre vie. Et avoir une foi vivante, c’est se nourrir de Sa présence au quotidien.

Le berger

Venons-en maintenant au berger de la parabole. Il y a deux choses qui me frappent, dans cette histoire, à propos du berger : d’abord le fait que chaque mouton semble l’intéresser plus que le troupeau dans son ensemble, et ensuite sa joie communicative quand il retrouve le mouton perdu.

Il me semble que nous pouvons en tirer deux leçons sur Dieu :

  • Dieu n’aime pas seulement les humains en général, il se soucie de chacun en particulier.
  • Ce que Dieu nous offre, ce n’est pas seulement de retrouver le troupeau mais de partager sa joie.

Dieu est un berger qui connaît et qui se soucie de chaque mouton en particulier. Avec lui, ce n’est pas “une de perdue, dix de retrouvées”, c’est “une de perdue, une à retrouver !”. Dieu nous cherche ! Même si, aujourd’hui, nous ne nous soucions guère de lui, il cherche à rétablir la relation avec nous.

Dieu n’est pas spectateur de notre vie. Ce n’est pas un juge ou un arbitre qui compte le bons et les mauvais points. Il est acteur de notre vie, il nous cherche et veut prendre soin de nous. Le Dieu dont nous parle la Bible n’est pas un Dieu lointain et impersonnel, c’est un Dieu proche, aimant, et personnel. Il n’est pas seulement l’architecte qui a créé l’univers et ses lois avant de laisser le monde fonctionner tout seul, il est un berger qui aime et prend soin de ses brebis.

C’est aussi pourquoi le berger ne veut pas seulement nous faire “rentrer dans le rang” et réintégrer le troupeau. Dieu ne veut pas que nous soyons des moutons de Panurge, qui suivent le mouvement sans se poser de question, sans recul, sans esprit critique… et sans enthousiasme ! Il veut que nous partagions sa joie. Sa joie de nous avoir retrouvé… et notre joie de l’avoir trouvé !

Il est important d’apprendre à voir la vie chrétienne comme l’occasion de partager la joie de Dieu. Ça ne veut pas dire que tout sera toujours merveilleux, un chemin sans embûche, sans difficulté, sans épreuve… loin de là. Un chrétien n’est pas toujours gai et sautillant !

Mais connaître Dieu, à travers Jésus-Christ, comme un berger qui nous connaît, nous aime et prend soin de nous, n’est-ce pas la source d’une joie profonde, paisible dans l’épreuve et enthousiasmante d’espérance ?

Conclusion

Dieu se réjouit ce matin, il partage notre joie en ce dimanche où nous avons assisté à un baptême. Il est rempli de la joie du berger de la parabole.

Quel que soit notre cheminement personnel, il nous invite à croire que nous sommes perdus si nous perdons le contact avec Dieu. Et ça peut nous arriver à tous, y compris si nous sommes croyant de longue date.

Mais lorsque nous nous égarons, pour une raison ou pour une autre, Dieu nous cherche toujours. Sans relâche. Il ne s’en lasse jamais. C’est la conclusion de la parabole : “votre Père qui est dans les cieux ne veut pas qu’un seul de ces petits se perde.”

Ce Dieu-là mérite qu’on se laisse trouver par lui… et que nous partagions sa joie !

Le Retour du Roi

 

 

Nous arrivons ce matin au dernier volet d’une trilogie de prédications inspirée d’une trilogie… celle du Seigneur des Anneaux. Tolkien, l’auteur des romans, était croyant et sa foi transparaît de différentes manières dans son oeuvre.

Pour ceux qui n’auraient pas lu les livres ni vu les films, sachez seulement que l’intrigue du Seigneur des Anneaux se déroule dans un monde imaginaire, la Terre du Milieu, où de nombreuses créatures coexistent avec les humains, notamment les hobbits, un peuple pacifique. L’un d’eux, Frodon, hérite par son oncle d’un anneau magique qui est en réalité un instrument de pouvoir absolu convoité par Sauron, le Seigneur maléfique. La seule solution pour que ce dernier ne s’en empare pas est d’amener l’anneau là où il a été forgé pour le détruire. Mais cela implique de se rendre au coeur du Mordor, là où Sauron réside.

Le premier volet, La Communauté de l’Anneau, évoque la constitution de la communauté chargée de cette mission, une communauté qui va devoir apprendre à vivre ensemble et surmonter ses inimitiés ancestrales. Nous avions fait ici le parallèle avec ce que nous sommes appelés à vivre en tant qu’Église, nous-mêmes une communauté diverse qui doit apprendre à vivre ensemble pour accomplir la mission qui nous est confiée.

Le deuxième volet, Les Deux Tours, fait référence à l’alliance des deux tours du Mordor et d’Isengard, celle de Sauron et celle de Saroumane, le mage qui s’est laissé séduire par Sauron et s’est mis à son service. Ils représentent le mal absolu, en quête de pouvoir absolu. Et la communauté de l’Anneau dispersée devra y faire face et résister à leurs assauts. Nous avions alors fait le parallèle avec le combat que chacun est amené à vivre face au mal, pour tenir ferme dans la foi.

Le troisième volet s’intitule Le Retour du Roi. C’est le dénouement épique de la trilogie, alors que tout semble ne plus tenir qu’à un fil. Sauron lance toutes ses troupes dans la bataille et Frodon tente d’atteindre secrètement la montagne du Destin pour y détruire l’anneau. Le roi dont il est question, c’est celui du Gondor, qui doit régner sur un royaume unifié, et dont le retour est annoncé par des prophéties. Mais la menace de Sauron est de plus en plus pressante. Beaucoup ont perdu tout espoir, mais d’autres continuent la lutte, même si l’issue fatale peut sembler inéluctable… Tant que Frodon est en vie, il y a de l’espoir.

Vous percevez sans doute la couleur biblique que peuvent avoir ces éléments du Seigneur des Anneaux, nous qui attendons aussi le retour du Roi… ou plus précisément, comme le nomme l’Apocalypse, le retour du Roi des rois ! Il y a d’ailleurs plusieurs personnages de la trilogie qui ont, pour différentes raisons, une dimension christique : au moins Frodon, Aragorn et Gandalf…

Le troisième volet de la trilogie du Seigneur des Anneaux nous permet donc d’évoquer notre espérance. Et pour cela, je vous propose de lire deux courts textes bibliques, tirés du Nouveau Testament :

Romains 8.24-25
24 Car nous avons été sauvés, mais en espérance seulement. Si l’on voit ce que l’on espère, ce n’est plus de l’espérance : qui donc espérerait encore ce qu’il voit ? 25 Mais si nous espérons ce que nous ne voyons pas, nous l’attendons avec persévérance.

Hébreux 11.1
Mettre sa foi en Dieu, c’est être sûr de ce que l’on espère, c’est être convaincu de la réalité de ce que l’on ne voit pas.

Fondamentalement, l’espérance est indissociable de la foi. L’une comme l’autre “voient l’invisible”. On pourrait dire que la foi voit ce qui est invisible, et l’espérance voit ce qu’on ne voit pas encore.

  • Dieu, on ne le voit pas. Par définition, Dieu est invisible à nos yeux et il nous faut “les yeux de la foi” pour le voir agir dans notre vie, pour discerner sa présence à nos côtés dans les circonstances de notre quotidien.
  • Et l’espérance attend la réalisation des promesses de Dieu qui, par définition, ne sont pas encore accomplies.

La foi et l’espérance se manifestent toutes deux dans la confiance. Notre foi aujourd’hui nourrit et affermit notre espérance pour demain. Toutes deux sont fondées sur les promesses de Dieu.
“Nous avons été sauvés, mais en espérance seulement.”
“Mettre sa foi en Dieu, c’est être sûr de ce que l’on espère”

Soulignons enfin que la clé de notre foi et de notre espérance se trouve en Jésus-Christ :

  • En lui, Dieu est devenu homme et il s’est rendu visible à nos yeux.
  • Par sa résurrection et son ascension, nous attendons ce que nous ne voyons pas encore : son retour et notre propre résurrection.

Quelles leçons tirer pour nous de cette espérance ?

 

Garder espoir… toujours !

Nous pourrions résumer en deux mots l’impact de notre espérance sur nous: garder espoir !

On pourrait dire la même chose pour les héros du Seigneur des Anneaux, ils gardent l’espoir, jusqu’au bout. Au fil de l’histoire, l’horizon s’assombrit de plus en plus, la puissance de Sauron semble devoir l’emporter… Certains se sont découragé, d’autres se sont impatienté. Mais Frodon et ses compagnons font preuve de courage, de persévérance…. en un mot : d’espérance !

Et c’est une espérance qui peut même paraître une folie aux yeux de certains. Comment un simple hobbit, ce semi-homme, pourrait-il échapper à la vigilance de l’oeil de Sauron et parvenir au coeur de son repère pour jeter l’anneau dans le cratère du mont du Destin ?

L’espérance chrétienne aussi peut apparaître comme une folie aux yeux de certains… particulièrement peut-être lorsque le monde traverse un temps d’inquiétude généralisé, où l’avenir semble plus qu’incertain, comme c’est le cas aujourd’hui. Comment croire que Dieu reste maître de l’histoire, que son Royaume avance et que ses promesses de résurrection et de vie vaincront ? Comment croire que Dieu prendra soin de nous quand on est au coeur de l’épreuve ? Je crois que les plus belles démonstrations de foi et d’espérance ne sont pas forcément chez ceux qui triomphent de tous les obstacles mais bien souvent chez ceux qui font preuve de confiance et d’espoir, même au coeur de l’épreuve.

 

Attendre… en agissant !

Espérer, c’est s’attendre à Dieu, c’est attendre l’accomplissement de ses promesses. Mais cette attente n’est pas passive. Il s’agit d’attendre… en agissant.

C’est une mauvaise compréhension de l’espérance qui peut rendre les croyants résignés et passifs. Nous sommes, certes, dans l’attente de l’accomplissement des promesses de Dieu. Mais cette attente est active. La véritable espérance motive à l’action, parce que Dieu nous associe à l’oeuvre de son Royaume.

Dans le Seigneur des Anneaux, lorsque les différents compagnons sont dispersés, avec comme seul espoir que Frodon atteigne le mont du Destin pour détruire l’anneau, ils ne sont pas restés inactifs mais se sont battus. Et ce qu’ils faisaient était utile, d’une manière ou d’une autre, pour aider Frodon dans sa mission.

Quand les disciples assistent à l’ascension de Jésus, le livre des Actes nous dit qu’ils restent les yeux rivés vers le ciel. Des anges se montrent alors à eux et leur disent que Jésus va bien revenir comme il est parti mais qu’en attendant ils avaient du boulot : Jésus les avait envoyé comme témoins, jusqu’aux extrémités de la terre !

Il y a deux ennemis de l’espérance : le résignation et la nostalgie. Les deux nous rendent inactifs. Les deux nous mettent en retrait du monde. Les deux nous font abandonner notre mission de témoin du Christ vivant.

Si vous êtes résignés, sur vous-mêmes, sur les autres, sur le monde… Relisez les Béatitudes ! Elles nous invitent, certes parfois dans les pleurs et l’adversité, à avoir faim et soif de justice, à être plein de bonté, à être artisans de paix… C’est l’antidote de la résignation !

Quant à la nostalgie, c’est une espérance inversée. L’espérance chrétienne nous fait regarder avec confiance et espoir vers l’avenir, et pas avec nostalgie vers le passé. Le “c’était mieux avant” ne peut pas faire partie du discours du croyant… Notre espérance nous dit même que ça sera mieux demain, même si aujourd’hui c’est difficile. Car demain les promesses de Dieu s’accompliront.

 

Conclusion

Arrivé au terme de notre trilogie, le Seigneur des Anneaux nous a permis d’évoquer trois thématiques bibliques centrales pour le chrétien : la communauté, le résistance face au mal et l’espérance.

A vrai dire, les trois sont liées. En communauté, nous sommes plus forts pour résister au mal et nous nous encourageons dans notre espérance commune. Par ailleurs, notre espérance, c’est la victoire finale sur le mal, celle de la vie sur la mort. Et cette espérance, nous ne la gardons pas jalousement, comme si elle nous appartenait. Nous voulons la partager avec tous, parce qu’elle s’offre à tous.

Or, partager cette espérance, c’est partager le Christ. Car tout est centré sur lui :

  • Ce qui nous constitue en tant que communauté, c’est notre appartenance au Christ.
  • C’est au nom du Christ vivant que nous résistons au mal, comme lui a été tenté en tout sans jamais succomber à la tentation.
  • Enfin, notre espérance prend sa source dans la mort et la résurrection du Christ.

C’est lui, le Christ vivant, que nous voulons suivre et dont nous voulons être témoin !