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L’entrée du roi

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Marc 11.1-10
1 Quand ils approchent de Jérusalem, près des villages de Bethfagé et de Béthanie, ils arrivent vers le mont des Oliviers. Jésus envoie deux de ses disciples. Il leur dit : 2 « Allez au village qui est devant vous. Dès que vous y entrerez, vous trouverez un petit âne attaché, sur lequel personne ne s’est encore assis. Détachez-le et amenez-le-moi. 3 Si quelqu’un vous demande : “Pourquoi faites-vous cela ?”, dites-lui : “Le Seigneur en a besoin, mais il le renverra ici sans tarder.” »
4 Ils partirent et trouvèrent un petit âne dehors, dans la rue, attaché à la porte d’une maison. Ils le détachèrent. 5 Des gens qui se trouvaient là leur demandèrent : « Que faites-vous ? pourquoi détachez-vous cet ânon ? » 6 Ils leur répondirent ce que Jésus avait dit, et on les laissa aller. 7 Ils amenèrent l’ânon à Jésus ; ils posèrent leurs manteaux sur l’animal, et Jésus s’assit dessus. 8 Beaucoup de gens étendirent leurs manteaux sur le chemin, et d’autres y mirent des branches vertes qu’ils avaient coupées dans la campagne. 9 Ceux qui marchaient devant Jésus et ceux qui le suivaient criaient : « Hosanna ! Que Dieu bénisse celui qui vient au nom du Seigneur ! 10 Que Dieu bénisse le règne qui vient, le règne de David notre père ! Hosanna au plus haut des cieux ! » 11 Jésus entra à Jérusalem dans le temple. Après avoir tout regardé autour de lui, il partit pour Béthanie avec les douze disciples, car il était déjà tard.
L’entrée de Jésus à Jérusalem est spectaculaire, et ce n’est pas le fruit du hasard. On se rend compte que Jésus s’arrange pour que les choses se passent de cette façon. En réalité, on peut dire qu’il met en scène son entrée. D’autant qu’il n’entre pas à Jérusalem pour y séjourner. La fin du texte nous le dit : il entre dans la ville, va dans le temple, il observe… et il repart pour Béthanie avec ses disciples.

Ce n’est pas la première fois que Jésus entre à Jérusalem… et les autres fois, ça ne s’est pas passé comme ça ! Mais là, c’est spécial. Il sait que son ministère touche à sa fin, il sait que ce qu’il a annoncé à plusieurs reprises à ses disciples va bientôt arriver : il va être livré, condamné, et il va être mis à mort.

Alors il veut que cette entrée dans Jérusalem soit différente. La mise en scène est minutieusement préparée ! Il envoie deux de ses disciples chercher un âne pour qu’il puisse entrer dans la ville assis dessus. Et il est acclamé par la foule. Est-ce spontané ou est-ce que Jésus a demandé à ses disciples d’initier le mouvement ? Soit en criant eux-mêmes Hosanna, soit en mettant des vêtements ou des branches sur le chemin… Allez savoir !

En tout cas, rien n’est laissé au hasard. Jésus soigne son entrée à Jérusalem, pour lui donner du sens. Il fait en sorte que tout se passe comme le prophète Zacharie l’avait annoncé :

Zacharie 9.9
9 Éclate de joie, Jérusalem ! Crie de bonheur, ville de Sion ! Regarde, ton roi vient à toi, juste et victorieux, humble et monté sur un âne, sur un ânon, le petit d’une ânesse.

Cette mise en scène de Jésus lors de son entrée à Jérusalem s’apparente à un geste prophétique comme on en rencontre chez plusieurs prophètes de l’Ancien Testament. Le spécialiste, c’était Jérémie : devant tout le monde, il a porté un ceinture de lin pourrie, brisé une cruche, porté sur ses épaules un joug fait de bois et de cordes… Jésus, lui, entre à Jérusalem sur le dos d’un ânon…

Le lendemain, il entrera à nouveau à Jérusalem… mais avec un tout autre état d’esprit. Il ira au temple et se mettra en colère, en chassant les vendeurs du temple ! Ce sera, d’une certaine façon, une autre mise en scène (rappelez-vous qu’il est allé au temple et qu’il avait tout observé la veille), un autre coup d’éclat.

Et quelques jours plus tard, la foule criera bien autre chose que des Hosanna ! Ils diront à Pilate : “Crucifie-le !”

Mais pour l’instant, c’est le moment de l’entrée triomphale. L’entrée du roi à Jérusalem.

L’entrée du roi

Quel roi Jésus est-il lors de son entrée à Jérusalem ? Un roi pacifique et humble.

Un âne n’est pas une monture indigne d’un roi… mais c’est une monture pour lui en temps de paix. On ne va pas au combat sur un âne mais sur un cheval ! Jésus n’entre pas à Jérusalem comme un roi conquérant et guerrier accompagné de toute son armée. Il entre comme un roi de paix, sur le dos d’un âne, accompagné de quelques disciples.

Ce roi de paix est aussi un roi humble. Zacharie l’annonçait explicitement : le roi vient, “humble et monté sur un âne, sur un ânon, le petit d’une ânesse.” Ce n’est même pas un âne, c’est un ânon. Et si la foule l’acclame, les compagnons qui marchent avec lui sont, pour la plupart, d’humble condition. Plusieurs sont de simples pêcheurs. Ce ne sont ni des guerriers puissants ni des notables respectés.

Quelques jours plus tard, le roi humble sera même le roi humilié… il sera couronné d’épines, on se moquera de lui. Quel contraste avec les acclamations de la foule ! Jésus sait ce qui l’attend… il ne se fait pas d’illusion sur l’accueil triomphal qu’il reçoit. Au milieu des acclamations de la foule, l’entrée de Jésus a dû être aussi douloureuse pour lui, sachant ce qui l’attendait.

Marc 15.16-20
16 Les soldats emmenèrent Jésus dans le prétoire, l’intérieur du palais du gouverneur, et ils appellent toute la troupe. 17 Ils l’habillent d’un manteau de pourpre, et posent sur sa tête une couronne tressée avec des branches épineuses. 18 Puis ils se mirent à le saluer en lui disant : « Salut, roi des Juifs ! » 19 Ils le frappaient sur la tête avec un roseau, crachaient sur lui et se mettaient à genoux pour se prosterner devant lui. 20 Quand ils se furent bien moqués de lui, ils lui enlevèrent le manteau de pourpre et lui remirent ses vêtements.

Avant son humiliation, il fallait bien que Jésus entre à Jérusalem, acclamé comme un roi. Car c’est bien ce qu’il est. Mais un roi pas comme les autres. Un roi qui se fait serviteur, qui accepte d’être humilié, de souffrir, et de mourir, par amour pour nous.

La couronne qu’on lui accordera, c’est une couronne d’épines. Son trône, une croix sur lequel on le clouera. A la place du respect qui lui est dû, il recevra les moqueries et les humiliations.

Quel roi Jésus est-il pour moi ?

Le récit des Rameaux, c’est la proclamation de Jésus comme roi. Mais c’est une proclamation paradoxale, d’une part avec l’accueil qui lui est réservé, surtout quand on connaît la suite de l’histoire, mais aussi par la figure du roi que Jésus incarne. Un roi pas comme les autres.

Alors quel roi Jésus est-il pour moi ? Et quel accueil est-ce que je lui réserve dans ma vie ?

La perception de la figure du roi est un peu compliquée en France… On leur a quand même coupé la tête à la Révolution… mais ça ne nous a pas empêché d’avoir, quelques années après, un empereur. Et puis aujourd’hui, certains n’hésitent pas à dire qu’avec notre régime présidentiel fort, le chef d’Etat a un statut quasi monarchique. Bref, la figure du roi en France, c’est compliqué…

Or c’est quand même une figure centrale dans la Bible. Et quand on parle du projet de Dieu pour le monde, on parle bien de Royaume de Dieu.

Dans l’Evangile de Jean, devant Pilate, Jésus assume être roi… mais pas à la manière de notre monde :

Jean 18.36
Jésus répondit : « Mon règne n’appartient pas à ce monde ; si mon règne appartenait à ce monde, mes serviteurs combattraient pour que je ne sois pas livré aux autorités juives. Mais non, mon règne n’est pas d’ici. »

Le roi, c’est celui qui a une autorité suprême. Si c’est un roi despotique et tyrannique, c’est terrible. Mais si c’est un roi pacifique et humble, à l’image de Jésus, alors c’est différent ! Et si, en plus, ce roi choisit de se faire serviteur, ça change tout !

Jésus-Christ est roi… mais pas à la manière de notre monde. Il est roi parce qu’il est le Messie, celui qui est choisi par Dieu. Plus encore, il est le Fils de Dieu. Et s’il est mon roi, alors il a l’autorité suprême sur ma vie !

Mais est-ce que nous en avons vraiment toujours conscience ? Le revirement de la foule qui acclamait Jésus à son entrée à Jérusalem doit nous mettre en garde. Nos chants et nos acclamations courent aussi le risque de la superficialité, de la routine, de l’habitude qui a perdu son sens. Nous pouvons proclamer Jésus comme roi, le chanter le dimanche matin au culte… mais comment cela se concrétise au quotidien ? Que reste-t-il de nos “Hosanna !” du dimanche le lendemain et tous les jours de la semaine ?

Comment Jésus est-il mon roi quand je réfléchis à mes projets, à ma vie familiale et personnelle, à ma carrière professionnelle, à la gestion de mon temps, de mon argent ? La question mérite d’être posée, car Le Christ ne peut être mon roi seulement dans les cantiques que je chante le dimanche. Il n’est vraiment mon roi que s’il l’est tous les jours et dans tous les domaines de ma vie…

Et parce que Jésus n’est pas un roi tyrannique, nous n’avons pas à nous inquiéter. Au contraire, son règne dans notre vie est un règne bienfaisant, un règne d’amour et de paix, de bienveillance et de grâce. Il est, comme l’annonce le prophète Zacharie, un roi juste et humble.

Nous n’avons pas à le redouter… mais à l’accueillir, dans l’espérance et la joie. Hosanna ! Viens, Seigneur, sauve ! Hosanna !

Libérer la parole

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Il y a parfois des sujets dans l’actualité qui nous touchent, nous interpellent ou nous scandalisent. Il y en a un qui a fait la une, alors même que la crise du Covid occupe presque toute la place médiatique. Vous en avez forcément entendu parler. Je pense à ces accusations d’inceste ou de violence sexuelle contre des personnes publiques parfois très connues.

La parole se libère depuis quelque temps, et c’est heureux, autour des questions de violences sexuelles et conjugales. On pourrait se dire, peut-être, que les temps changent…

Vous avez peut-être vu ces vidéos d’archives qui refont surface, pas si anciennes que cela, puisqu’elles datent des années 70 ou 80. Il y a par exemple ce micro-trottoir ou des hommes répondaient à une journaliste qui leur demandaient s’il leur arrivait de battre leur femme. Et certains disaient, devant la caméra, que ça leur arrivait… quand leur femme le méritait ! Ou cette vidéo d’une grande émission de télévision des années 80, autour de l’inceste, où un médecin disait que dans bon nombre d’incestes il y a quand même beaucoup de romantisme et de tendresse…

Voir ces images et entendre de telles affirmations aujourd’hui fait vraiment froid dans le dos… Il serait évidemment impossible de tourner de telles vidéos aujourd’hui. Mais le drame des violences sexuelles et conjugales a-t-il pour autant cessé ? Certainement pas !

La parole se libère, certes, notamment sur les réseaux sociaux avec différents hashtags, et les témoignages se multiplient, y compris dans des ouvrages publiés. Mais ça dérange, parce que le problème est toujours là…

Il y a aujourd’hui des scandales qui éclatent dans tous les milieux, y compris dans des Églises évangéliques… Encore très récemment, vous avez peut-être entendu ces révélations terribles et accablantes sur un célèbre pasteur et apologète américain, décédé l’année dernière, qui dissimulait un comportement de prédateur sexuel. Vous me direz peut-être que ça ne se voit pas trop en France, dans nos Églises… mais ne nous faisons pas d’illusion, j’ai peine à croire qu’on en soit complètement indemne.

Car tous les milieux sont touchés ! D’après une enquête récente, 1 français sur 10 dit avoir été victime de violence sexuelle durant son enfance !

Aujourd’hui en France, une femme meurt tous les 2 jours et demi sous les coups de son conjoint. Et la situation ne s’est pas améliorée pendant la crise sanitaire. Les signalements pour violence conjugale ont augmenté de 40% pendant le premier confinement, et de 60% pendant le deuxième…

Dans l’écrasante majorité des cas, les victimes de ces violences, sous toutes leurs formes, sont des femmes ou des enfants. Et les auteurs de ces violences, à une écrasante majorité, sont des hommes. Le problème est encore bien là… malheureusement.

Non seulement on ne peut pas rester insensible à ces drames mais nous devons être conscients qu’ils touchent aussi nos milieux. Nous avons forcément parmi nous, et autour de nous, des personnes qui ont été ou sont victimes de telles violences.

N’avons-nous pas quelque chose à dire en tant que chrétiens ? Qu’est-ce que la Bible nous dit sur ces questions ? Pour y réfléchir, je vous propose de lire une partie d’un récit que l’on trouve dans l’Evangile selon Jean, celui de la rencontre de Jésus avec la femme Samaritaine.

Voici le contexte. Jésus s’était rendu en Galilée. Alors qu’il était seul, ses disciples étant allé en ville pour acheter des provisions, Jésus rencontre une femme, seule elle aussi, venue chercher de l’eau à un puits, en plein milieu de la journée. Jésus engage alors un dialogue avec elle, et lui demande de puiser de l’eau pour lui. C’était déjà surprenant, étant donné l’inimitié qu’il y avait entre les Juifs et les Samaritains. Mais Jésus en profite pour parler d’une autre eau, spirituelle celle-là, dont tous, Juifs, Samaritains ou n’importe qui d’autre ont réellement besoin. Lisons la suite du récit, à partir du verset 13, dans le chapitre 4 de l’Évangile selon Jean :

Jean 4.13-30

13 Jésus lui répondit : « Toute personne qui boit de cette eau aura encore soif ; 14 mais celui qui boira de l’eau que je lui donnerai n’aura plus jamais soif : l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau qui jaillira jusque dans la vie éternelle. »
15 La femme lui dit : « Seigneur, donne-moi cette eau, pour que je n’aie plus soif et que je n’aie plus besoin de venir puiser de l’eau ici. »
16 Jésus lui dit : « Va, appelle ton mari et reviens ici. »
17 La femme lui répondit : « Je n’ai pas de mari. »
Et Jésus ajouta : « Tu as raison de dire que tu n’as pas de mari ; 18 car tu as eu cinq maris, et l’homme avec lequel tu vis maintenant n’est pas ton mari. Tu as donc dit vrai. »
19 « Seigneur, lui dit la femme, je vois que tu es un prophète. 20 Nos ancêtres samaritains ont adoré Dieu sur cette montagne, mais vous, les Juifs, vous dites que l’endroit où l’on doit adorer Dieu est à Jérusalem. »
21 « Crois-moi, continua Jésus, l’heure vient où vous n’adorerez le Père ni sur cette montagne, ni à Jérusalem. 22 Vous, vous adorez Dieu sans le connaître ; nous, nous l’adorons et nous le connaissons, car le salut vient des Juifs. 23 Mais l’heure vient, et elle est même déjà là, où les vrais adorateurs adoreront le Père par l’Esprit qui conduit à la vérité ; car ce sont de tels adorateurs que le Père recherche. 24 Dieu est Esprit, et il faut que ceux qui l’adorent le fassent par l’Esprit qui conduit à la vérité. »
25 La femme lui dit : « Je sais que le Messie, c’est-à-dire le Christ, va venir. Quand il viendra, il nous enseignera toutes choses. »
26 Jésus lui répondit : « Je le suis, moi qui te parle. »
27 À ce moment-là, les disciples de Jésus revinrent ; et ils s’étonnèrent de le voir parler avec une femme. Pourtant aucun d’eux ne lui demanda : « Que lui veux-tu ? » ou : « Pourquoi parles-tu avec elle ? »
28 Alors la femme laissa sa jarre et retourna en ville, où elle dit aux gens : 29 « Venez voir un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait ! Ne serait-il pas le Christ ? » 30 Ils sortirent donc de la ville et vinrent à la rencontre de Jésus.

Vous me demanderez peut-être : mais quel est le rapport entre ce récit et la question des violences sexuelles et conjugales ? Le lien, je le vois dans le dialogue initié par Jésus, qui permet une libération de la parole pour une femme en souffrance. Regardons cela plus en détail…

Changer de regard

Quel regard portez-vous sur cette femme lorsque vous entendez Jésus lui dire qu’elle a eu 5 maris et que l’homme avec lequel elle vit n’est pas son mari ? En “bon évangélique”, on pourrait avoir tendance à porter un regard accusateur sur elle. Eh oui, qu’est-ce qu’elle a bien pu faire pour avoir 5 maris successifs ? Et qu’est-ce que c’est que cette relation avec cet homme qui n’est pas son mari ? Ce n’est pas clair…

Mais pensez-vous vraiment qu’elle a choisi d’avoir eu 5 maris ? A l’époque, comment est-ce que ça se passait ? Qui avait tout pouvoir dans un couple pour répudier son conjoint, pour tout et n’importe quoi ? Les hommes, évidemment ! Les femmes, elles, ne pouvaient pas répudier leur mari…

Dans quelles conditions les choses se sont passées pour elle ? On ne le sait pas. On ne connaît pas son histoire. Jésus, lui, visiblement, connaissait son histoire. Et il ne la juge pas. Voyez-vous la moindre parole de jugement de la part de Jésus sur cette femme ?

Ca me rappelle un autre récit de l’Evangile selon Jean, le récit dit de la femme adultère. Mais elle n’était pas toute seule à être adultère, que je sache ! Ceci dit, on ne parle que d’elle… On ne dit rien de l’homme qui était au moins aussi coupable qu’elle ! Lui, la foule ne cherchait pas à le lapider. Et qu’est-ce que Jésus dit à la fin à cette femme ? Certes, il lui dit de ne plus pécher… mais il lui dit aussi “Moi non plus, je ne te condamne pas !”

Tout cela me fait un peu penser à ces arguments scandaleux qu’on entend encore parfois, à propos d’une femme violentée qui l’a peut-être un peu cherché, ou d’une femme violée qui aurait quand même dû faire attention à sa manière de s’habiller !

Et si nous changions notre regard sur la femme Samaritaine… à partir du regard que Jésus porte sur elle ?

Jésus connaît notre histoire

Revenons donc à ce dialogue entre Jésus et la femme Samaritaine. Pourquoi Jésus lui demande-t-il d’aller chercher son mari, d’autant que, visiblement, il connaît très bien son histoire ? Il sait parfaitement qu’elle vit avec un homme qui n’est pas son mari…

D’ailleurs, on peut s’interroger sur l’intention de Jésus. Vous remarquerez que la femme ne va finalement jamais chercher son “mari” ou l’homme avec qui elle vit. Et Jésus ne s’en soucie plus, il ne le lui redemande pas après leur dialogue. Donc, ce n’était pas vraiment la question…

Et si ce que Jésus dit à cette femme était là plutôt pour lui montrer qu’il connaît, justement, son histoire. Et qu’il connaît sa souffrance, sa honte, sa véritable soif.

Quand la femme dit à Jésus qu’elle n’a pas de mari, est-ce qu’elle joue sur les mots ? Est-ce qu’elle essaie de dissimuler à Jésus la réalité de sa situation ? Ou exprime-t-elle une souffrance, un constat d’échec ou de honte après ses 5 mariages successifs et sa situation actuelle compliquée ?…

Certes, en théorie, elle pourrait avoir été veuve 5 fois par exemple, et ça serait déjà une source de souffrance ! Mais ce qui est le plus probable, vu le contexte de l’époque, c’est qu’elle ait été répudiée 5 fois, et ça pouvait être pour n’importe quelle raison, même futile. Vous croyez que, si elle avait été volage et frivole, dans un village où tout se sait, elle aurait trouvé facilement des maris ? Il est tout à fait possible qu’elle ait été trimballée d’un mari à un autre… Et qui sait, l’homme avec qui elle vit l’accueille peut-être en secret, bien plus bienveillant envers elle que ses 5 maris successifs ?

Alors, certes, j’extrapole, on n’en sait rien parce que le texte ne nous en dit rien. Nous ne connaissons pas l’histoire de cette femme… Et c’est justement pourquoi nous ne pouvons porter de jugement sur elle. Jésus, lui, connaît son histoire. Et il ne la juge pas…

Une parole libérée

On ne connaît pas l’histoire de cette femme Samaritaine, mais on se rend bien compte qu’elle ne va pas bien. Pourquoi aller chercher de l’eau à midi, sinon pour être seule et ne croiser personne ?

Cette femme est peut-être bien un exemple d’une femme qui souffre en silence et qui cache sa souffrance. Elle porte avec elle le poids du silence et de la honte, des non-dits et des secrets qu’on cache. Mais Jésus y est sensible et veut lui apporter la consolation et l’espérance. Jésus permet, ici, une sorte de libération de la parole…

Car le dialogue que cette femme a avec Jésus montre qu’elle a une soif spirituelle évidente. Voyez sa réponse à Jésus : « Seigneur, donne-moi cette eau, pour que je n’aie plus soif et que je n’aie plus besoin de venir puiser de l’eau ici. »

Est-ce qu’elle n’a pas compris que Jésus parle d’une eau spirituelle ? Peut-être… Mais peut-être aussi qu’elle a compris que si elle découvre cette eau dont parle Jésus, une eau qui donne la vie éternelle, elle sera libérée, elle n’aura plus besoin de se cacher.

Et d’ailleurs, que se passe-t-il à la fin du récit (v.28-29) ? Elle laisse sa jarre et retourne en ville. Elle n’a plus besoin d’aller puiser l’eau au puits. Et elle ne se cache plus, elle va à la rencontre des habitants du village. Sa peur, sa honte n’est plus : “Venez voir un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait !”

Sa parole est libérée. Elle est, elle-même, libre comme elle ne l’a jamais été !

 

Conclusion

C’est vrai, je me suis permis quelques extrapolations face à ce récit… Mais le plus important, c’est l’attitude de Jésus envers cette femme Samaritaine. Sa compassion, son regard sans jugement
Le plus important, c’est aussi le chemin parcouru par cette femme. N’est-il pas évident qu’elle n’est pas la même au début et à la fin du récit ? Ne voit-on pas qu’elle est libérée d’un poids lié à des souffrances accumulées au cours de son histoire ?

Aujourd’hui encore, il y a beaucoup de femmes qui portent un lourd secret, qui souffrent en silence, à cause de blessures, de souffrances endurées. Elles ne parlent pas. Comme pour la femme Samaritaine, on ne connaît pas forcément leur histoire. Mais Jésus, lui, la connaît.

Elles ont besoin d’écoute, d’être prise en considération, de ne pas être cataloguée ou jugée.

Tous, hommes ou femmes, vous avez peut-être vos blessures, vos souffrances, le poids d’une histoire douloureuse. L’eau que Jésus vous offre est une eau bienfaisante. Déposez votre jarre, allez à la source de la grâce et de la bonté de Dieu, brisez le silence, soyez restaurés !

Apprendre à écouter Dieu

Voir la vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=UuCsUzCb1Eo

Il y a une excellente série qui passe en ce moment sur Arte. Elle s’appelle “En thérapie”. C’est l’adaptation française d’une série israélienne, déjà adaptée dans plusieurs pays. Chaque épisode est une séance de psychothérapie, du lundi au jeudi, avec les mêmes patients, de semaine en semaine. Et le vendredi, c’est le psychanalyste lui-même qui rencontre son analyste. C’est passionnant !

Il y a presque un petit côté enquête, au fil des séances. Alors que se dévoilent petit à petit le passé et les traumatismes des patients, on comprend comment ils peuvent expliquer leurs souffrances et leurs problèmes d’aujourd’hui. Et on voit l’impact que cela a aussi sur le psychothérapeute lui-même. Mais en réalité, au-delà de la psychothérapie, il s’agit plus largement d’une série sur la vertu de l’écoute et de la parole. C’est grâce à l’écoute du psy que les patients peuvent parler et avancer.

La question que j’aimerais nous poser ce matin est : Est-ce que nous savons écouter ? La question se pose, évidemment, dans nos relations les uns aux autres. Dans un couple, dans une relation d’amitié, l’écoute est essentielle. Mais dans notre foi, notre relation à Dieu, l’écoute est aussi essentielle.

Mais est-ce que nous savons écouter Dieu ?

Pour nous aider à répondre à cette question, je vous propose de lire un récit dans le Premier livre de Samuel. Anne, une femme déjà d’un certain âge, n’arrivait pas à avoir d’enfant… Désespérée, elle a prié et demandé à Dieu de lui accorder un enfant, et elle s’engage alors, si Dieu l’exauce, à donner cet enfant au Seigneur. Après que Dieu ait exaucé sa prière, Anne a emmené Samuel, son fils, au sanctuaire, auprès du prêtre Héli.

Dieu avait un projet spécial pour cet enfant, il voulait faire de lui son prophète, un prophète qui aura une grande importance dans la suite de l’histoire d’Israël. Et c’est alors qu’il était encore enfant que le Seigneur a appelé Samuel. Voici le récit de sa vocation.

1 Samuel 3.1-9
1 Le jeune Samuel servait le Seigneur, sous la surveillance d’Héli.
En ce temps-là, il était rare que le Seigneur parle directement à un être humain ou qu’il lui accorde une vision.
2 Une nuit, le prêtre Héli, qui était devenu presque aveugle, dormait à sa place habituelle. 3 Samuel aussi dormait. Il était dans le sanctuaire du Seigneur, près du coffre de l’alliance. Avant l’aube, alors que la lampe du sanctuaire brûlait encore, 4 le Seigneur appela Samuel. Celui-ci répondit : « Oui, maître ! », 5 puis il accourut auprès d’Héli et lui dit : « Tu m’as appelé ; me voici ! » – « Je ne t’ai pas appelé, dit Héli ; retourne te coucher. » Samuel alla se recoucher.
6 Une seconde fois le Seigneur appela : « Samuel ! » L’enfant se leva et revint dire à Héli : « Tu m’as appelé ; me voici ! » – « Non, mon enfant ! répondit Héli, je ne t’ai pas appelé ; retourne te coucher. » 7 Samuel ne connaissait pas encore personnellement le Seigneur, car celui-ci ne lui avait jamais parlé directement jusqu’alors.
8 Pour la troisième fois, le Seigneur appela : « Samuel ! » Samuel se leva, revint trouver Héli et lui dit : « Tu m’as appelé ; me voici ! » Cette fois, Héli comprit que c’était le Seigneur qui appelait l’enfant. 9 Il lui dit alors : « Va te recoucher. Et si on t’appelle de nouveau, tu répondras : “Parle, Seigneur, ton serviteur écoute !” » Samuel alla donc se recoucher à sa place.
C’est un récit de vocation particulier, pour un personnage particulier, choisi par Dieu pour un ministère particulier. Il ne s’agit pas de “sauter” dans le texte et de nous l’approprier trop vite. Ni vous ni moi ne sommes prophète comme l’a été Samuel. Il ne s’agit pas de s’attendre à vivre la même chose que lui.

Pour autant, il y a bien des leçons à tirer pour nous d’un tel texte. Il ne nous est pas donné seulement à titre informatif. Le Dieu qui a appelé Samuel à devenir prophète et le même qui nous appelle à le suivre aujourd’hui. Et il est le même à appeler certaines personnes à un ministère particulier. C’est le même Dieu qui, par son Esprit, nous conduit et nous inspire, nous met à coeur des projets et des convictions, nous appelle à le servir et à servir notre prochain. Jésus n’a-t-il pas promis à ses disciples : “l’Esprit saint que le Père enverra en mon nom, vous enseignera toutes choses et vous rappellera tout ce que je vous ai dit.” (Jn 14.26) ?

Dieu nous parle aujourd’hui encore… si nous savons l’écouter. Mais est-ce que nous savons écouter ?

Dieu parle mais on ne reconnaît pas toujours sa voix

C’est étonnant comme, par trois fois, le jeune Samuel entend Dieu l’appeler mais il pense que c’est Héli qui l’appelle. Et Héli ne comprend pas non plus ce qui se passe. “Va te recoucher… tu as rêvé !”

Autrement dit, Dieu appelle Samuel mais Samuel ne se rend pas compte que c’est Dieu qui lui parle. Et je suis persuadé que nous vivons parfois la même chose. Peut-être même plus souvent qu’on ne le croit… Dieu nous parle mais nous ne nous en rendons pas compte !

Ca ne se passe peut-être pas comme pour Samuel, par une voix qui nous sort de notre sommeil. Mais Dieu est peut-être en train de nous parler par la voix d’un ami, par une circonstance qu’il a permise, par un texte que nous lisons. Dieu nous parle et nous, nous pensons que c’est juste un ami qui nous casse les pieds, c’est juste un hasard ou un concours de circonstance dans notre vie, c’est juste un texte lu et relu qu’on connaît déjà…

C’est la première leçon qu’on peut retirer de cet épisode de Samuel : Dieu peut nous parler sans que nous nous en rendions compte. Il nous parle mais on ne reconnaît pas sa voix. On l’entend mais on croit que c’est quelqu’un d’autre.

Dieu parle à ceux qui l’écoutent

C’est finalement Héli qui débloque la situation. Il finit par comprendre que c’est Dieu qui parle à Samuel. Il lui dit alors ce qu’il doit répondre. Et ça fonctionne. La suite du récit, que nous n’avons pas lu, montre comment Dieu va révéler ses plans à Samuel, et que ça ne sera d’ailleurs pas vraiment positif pour Héli et sa famille ! Retenons simplement ici que Héli explique à Samuel comment faire et lui apprend comment entendre la voix du Seigneur.

La réponse d’Héli peut sembler un peu simpliste au premier abord. Evidemment, il ne s’agit pas d’une formule magique qui nous garantit d’entendre Dieu nous parler. Ça se saurait ! Si vous essayez cette nuit, dans votre lit, de dire “Parle Seigneur, ton serviteur écoute” en pensant qu’une voix va raisonner du ciel et que c’est Dieu qui vous parlera, je ne vous garantis pas le résultat !

En fait, il me semble que la réponse d’Héli souligne la nécessaire disponibilité de notre part : “Parle, Seigneur, ton serviteur écoute.”. Dieu parle à ceux qui l’écoutent… Pour entendre Dieu, il faut se mettre à son écoute, être prêt à l’entendre. Il faut croire qu’il veut nous parler.

L’écoute de Dieu, c’est une posture, pas une technique. Bien-sûr qu’il peut y avoir, dans notre vie, des moments d’écoute de Dieu particulière, lors de retraites spirituelles par exemple. On peut aussi s’aménager des temps d’écoute spécifiques dans nos journées, pour faire silence. Mais ce n’est pas à nous de dire à Dieu quand il doit nous parler. Et si nous voulons l’entendre et reconnaître sa voix, il s’agit de rester dans une posture d’écoute, en toutes circonstances.

C’est une posture qui part du principe que Dieu est présent à nos côtés, dans toutes les circonstances de notre vie. Et que c’est lui qui prend l’initiative de nous parler.

Ecouter Dieu, ça s’apprend !

Samuel était un prophète. Toute sa vie, il devra écouter le Seigneur et parler en son nom. Il a dû apprendre à écouter Dieu et ça a commencé cette nuit-là, lors de son appel. C’est une vocation particulière. Mais, dans une certaine mesure, nous sommes tous appelés à écouter Dieu. Mais ce n’est pas toujours évident. Et ça s’apprend.

On peut même dire que c’est un des fruits de la maturité chrétienne. Apprendre à discerner la présence de Dieu dans notre vie, à entendre sa voix dans les sons de notre quotidien, tout cela s’affine avec notre expérience de la vie chrétienne. Alors que l’ouïe baisse avec l’âge, l’écoute spirituelle, au contraire, s’affine avec l’expérience. C’est un peu la dynamique que l’apôtre Paul évoque quand il dit aux Corinthiens :

“Même si notre être physique se détruit peu à peu, notre être spirituel se renouvelle de jour en jour.” (1 Corinthiens 4.16 – NFC)

On pourrait dire : même si notre ouïe baisse, notre oreille spirituelle se renouvelle de jour en jour. Et c’est vrai. C’est une des leçons principale que je découvre, y compris dans l’exercice de mon ministère, avec les années d’expérience : l’essentiel, c’est l’écoute de Dieu.

Il ne s’agit pas de surinterpréter tout ce qui se passe, tout ce qu’on voit et qu’on entend. Mais il s’agit d’être attentif et convaincu que Dieu veut nous parler, à chacun, et de multiples manières. Le Seigneur ne nous parle pas toujours quand on s’y attend ni comme on s’y attend. Parfois on prend un temps d’écoute spécifique et de prière… et il ne nous parle pas. Parfois, c’est dans le feu de l’action, en plein milieu d’une activité, alors qu’on n’y pense même plus, qu’on perçoit, derrière une parole entendue, la voix de Dieu, ou derrière un événement qui survient, la main de Dieu. Comme une conviction, une certitude : Dieu est en train de me parler.

Conclusion

Dieu nous est tout proche, il fait sa demeure en nous, par son Esprit. Il n’y a pas d’intimité plus profonde.

C’est bien là l’enjeu de l’écoute de Dieu, notre intimité avec lui. L’approfondissement de l’une ne va pas sans l’autre. Voilà pourquoi l’apprentissage de l’écoute de Dieu est essentiel pour le croyant. C’est un peu comme dans un couple, ou dans une amitié très forte, on n’a pas besoin que l’autre parle pour comprendre ce qu’il veut nous dire. Un regard, un geste, un silence même suffisent… Parce qu’il y a une complicité, une intimité profonde.

C’est un peu la même chose avec le Seigneur. Plus nous serons proches de lui, plus nous entendrons sa voix dans notre vie.

Une Bonne Nouvelle !

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Cette semaine, dans le quotidien La Croix, est sorti un dossier intitulé “La galaxie des évangéliques en France”. Et c’est plutôt un bon dossier, honnête, loin des caricatures et des clichés qu’on entend bien trop souvent sur les évangéliques, dans les médias en général, et jusque chez certains responsables politiques.

On dit et on entend tout et n’importe quoi sur les évangéliques. Ou plutôt sur les “évangélistes” comme on en parle souvent abusivement… Faut-il le rappeler : il y a quatre évangélistes (Matthieu, Marc, Luc et Jean) et 600 000 protestants évangéliques en France, plus de 600 millions dans le monde. Mais nous appeler “évangélistes”, ça permet de faire rimer le terme avec intégriste, islamiste, populiste, complotiste, tous des mots en -iste qui font peur.

C’est vrai qu’on a souffert depuis quatre ans d’un certain évangélisme politique en provenance des Etats-Unis qui ne nous a pas aidé dans notre image médiatique… C’est vrai aussi qu’il peut y avoir, y compris en France, des discours ou des pratiques regrettables voire condamnables dans certaines Églises évangéliques. Mais d’une manière générale, les évangéliques en France sont des gens comme les autres, respectueux des principes de la République, attachés à la liberté de conscience puisqu’ils insistent sur l’importance d’une foi personnelle et libre, et qui prient même régulièrement pour les responsables politiques en place, comme la Bible les y invitent. Franchement, il n’y a pas de quoi avoir peur de nous !

On peut être agacé par cette image faussée, par ces clichés… mais qu’on le veuille ou non, il y a des mots qui sont piégés. Ça ne veut pas dire qu’il faut y renoncer. Mais il faut sans doute être vigilant, et exemplaire, pour redorer le blason médiatique des évangéliques.

Et justement, pour cela, il s’agit de s’attacher à l’essentiel, qui n’est pas l’étiquette évangélique mais bel et bien l’Évangile dont nous nous réclamons. Mais le mot Évangile lui-même n’est-il pas, aussi, un mot mal compris, y compris chez les chrétiens, y compris même chez les évangéliques ?

Est-ce qu’on n’a pas tendance à oublier que le mot français, Evangile, n’est qu’une transcription du terme grec euangelos qui se traduit très facilement en français. Ça veut dire “bonne nouvelle”. L’Evangile, c’est la Bonne Nouvelle qui se rapporte à Jésus-Christ. Je trouve, d’ailleurs, qu’il vaudrait mieux utiliser le moins possible le mot “Evangile” pour le remplacer par l’expression qui lui correspond en français : “Bonne Nouvelle”.

Mais en quoi est-ce une bonne nouvelle ? Et comment est-ce que ça peut l’être pour nous, et pour les autres ?

Pour répondre à cette question, je vous propose de lire un très court texte tiré de l’Evangile (la Bonne Nouvelle !) selon Marc qui, comme à son habitude, dit en très peu de mots ce qui est l’essentiel.

Marc 1.14-15
14 Après que Jean eut été mis en prison, Jésus se rendit en Galilée ; il y proclamait la bonne nouvelle de Dieu. 15 « Le moment favorable est venu, disait-il, et le règne de Dieu est tout proche ! Changez de vie et croyez à la bonne nouvelle ! »

La Bonne Nouvelle…

C’est Jésus !

La première chose que Jésus dit est : “Le moment favorable est venu”. Les versions plus anciennes traduisent, plus littéralement : “le temps est accompli”. Mais le temps dont il est question ici, ce n’est pas le temps qui s’écoule (le grec chronos), c’est l’instant T, le moment favorable (le grec kairos).

La Bonne Nouvelle, c’est qu’avec Jésus, l’instant T de l’histoire de l’humanité est arrivé. C’est le moment de l’accomplissement de la promesse de Dieu. Si bien qu’on pourrait presque dire, pour aller vraiment à l’essentiel, que la Bonne Nouvelle, c’est Jésus ! C’est Dieu qui devient homme. C’est sa vie, son exemple, son enseignement, sa mort et sa résurrection.

C’est que le Royaume de Dieu est là

Quelle bonne nouvelle Jésus proclamait-il ? Elle commence par cette affirmation : “Le règne de Dieu est tout proche !” On pourrait même traduire : “Le Royaume (ou le règne) de Dieu est là !”

Or, le Royaume de Dieu, c’est là où Dieu règne, là où sa présence se manifeste. Et la Bonne Nouvelle, c’est que nous n’avons pas à attendre l’au-delà pour vivre dans la présence de Dieu. Ce n’est pas pour demain seulement, c’est pour aujourd’hui. La vie éternelle, ce n’est pas que la vie après la mort, c’est la vie avec Dieu, dès aujourd’hui.

La Bonne Nouvelle, c’est que le Royaume de Dieu peut faire irruption dans votre vie, là, tout de suite !

C’est que le changement est possible

Comment l’accueillir ? Jésus le dit : “Changez de vie et croyez à la bonne nouvelle !” C’est le fameux verbe traduit anciennement par “repentez-vous” mais qui signifie plus largement un changement radical, un changement de pensée, de compréhension, un changement de vie. Et c’est un changement rendu possible par la foi.

Ce que dit Jésus, c’est que le changement est possible. Si on croit à cette Bonne Nouvelle, si on fait confiance à Dieu, si on ose l’aventure de la foi, le changement est possible. Et ça c’est une bonne nouvelle !

Le Royaume de Dieu est devenu tellement proche qu’il s’installe en nous. Dieu veut faire sa demeure dans notre vie. Et là où Dieu s’installe, tout change !

 

Une Nouvelle toujours bonne ?

C’est une Bonne Nouvelle pour tous, elle s’offre à tous. Mais elle risque, si nous n’y prenons pas garde, de perdre de sa saveur pour nous et pour les autres. Il y a un risque que la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ cesse d’être une bonne nouvelle.

La Bonne Nouvelle n’en est plus une quand, au lieu de présenter une personne, elle présente un code de morale ou un corpus théologique. La Bonne Nouvelle, ce n’est pas qu’on puisse adhérer à une religion mais qu’on puisse rencontrer par la foi le Christ vivant. Pour Jésus, croire à la Bonne Nouvelle, c’est changer de vie, pas changer de croyance ou de religion.

La Bonne Nouvelle n’en est plus une quand elle n’est qu’une promesse pour demain, un ticket pour le Paradis, un passeport pour l’au-delà. Le Royaume de Dieu est là, tout proche. Maintenant. Dieu est présent dans notre vie, pour peu qu’on apprenne à ouvrir les yeux.

La Bonne Nouvelle n’en est plus une quand elle est réduite à des valeurs et des principes. La Bonne Nouvelle concerne notre vie quotidienne, nos préoccupations, nos luttes, nos épreuves mais aussi nos joies, nos découvertes et nos enthousiasmes. La Bonne Nouvelle, c’est la vie, la vie avec Dieu, aujourd’hui, et pour l’éternité.

La Bonne Nouvelle n’en est plus une quand elle est un message archaïque, exprimé dans un langage dépassé, compréhensible par des initiés seulement, appuyée sur des valeurs d’un autre âge. Parce que Dieu chemine avec l’humanité, son Royaume est contemporain et moderne. La Bonne Nouvelle est pertinente aujourd’hui, et elle doit pouvoir se formuler dans un langage clair et moderne, dans des modes d’expression et des supports médiatiques d’aujourd’hui.

La Bonne Nouvelle n’en est plus une quand nos belles paroles sont contredites par nos actes, notre vie de tous les jours. Quand ce n’est plus qu’un message abstrait, désincarné, qui n’est pas vécu. La Bonne Nouvelle s’incarne dans des vies transformées par Dieu.

La Bonne Nouvelle n’en est plus une quand elle réduit Jésus à un homme exemplaire, un révolutionnaire pacifiste ou un théoricien de l’amour. Même devenu homme, le Christ n’en demeure pas moins le Fils de Dieu. Sa vie, sa mort, sa résurrection sont uniques. Ce n’est pas seulement une bonne nouvelle parmi d’autres. C’est LA Bonne Nouvelle, pour tous !

 

Conclusion

En fait, pour que la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ reste une bonne nouvelle, il faut que nous la laissions nous transformer, aujourd’hui, et que ça se voie…

Il faudrait que la présence d’une Église soit perçue comme une Bonne Nouvelle pour la ville, la population où elle est installée. Il faudrait que la présence d’un disciple de Jésus-Christ soit une bonne nouvelle pour ses amis et ses proches. Il faudrait que l’assurance et l’espérance qui s’y rattache soient une bonne nouvelle pour un monde dans l’incertitude et la crainte.

Alors à nous de jouer ! Avec l’aide de Dieu et de son Esprit, évidemment. Sans lui, nous n’y arriverons pas… Ne craignons pas les étiquettes, les clichés et les idées fausses. Vivons simplement et partageons cette bonne nouvelle, LA Bonne Nouvelle de Jésus-Christ.

« Le moment favorable est venu, et le règne de Dieu est tout proche ! Changez de vie et croyez à la bonne nouvelle ! »

Un exemple d’humilité

https://www.youtube.com/watch?v=T-tD-rRh9HM

Chacun des quatre Évangiles a sa spécificité. Là où Matthieu et Luc commencent par les récits de la Nativité, avec des accents différents, là où Jean commence par un prologue majestueux remontant jusqu’au commencement de l’univers, Marc joue la carte de la sobriété. Son Évangile commence avec le début du ministère public de Jésus, annoncé par Jean-Baptiste. Rien sur sa naissance ou son enfance.

Marc est très sobre dans son évocation de la séquence inaugurale du ministère de Jésus baptême / tentation au désert, plus développée chez Matthieu et Luc. Il va à l’essentiel.

Marc 1.4-13
4 Jean parut alors dans le désert ; il baptisait et proclamait : « Changez de vie, faites-vous baptiser et Dieu pardonnera vos péchés. » 5 Tous les habitants de la région de la Judée et de Jérusalem venaient à sa rencontre ; ils reconnaissaient publiquement leurs péchés et Jean les baptisait dans le Jourdain.
6 Jean portait un vêtement en poils de chameau et une ceinture de cuir autour de la taille ; il mangeait des sauterelles et du miel sauvage. 7 Il proclamait : « Quelqu’un qui est plus fort que moi vient après moi ; je ne suis pas digne de me baisser pour délier la lanière de ses sandales. 8 Moi, je vous ai baptisés dans l’eau, mais lui, il vous baptisera dans l’Esprit saint. »
9 En ces jours-là, Jésus vint de Nazareth, une localité de Galilée, et Jean le baptisa dans le Jourdain. 10 Au moment où Jésus remontait de l’eau, il vit les cieux se déchirer et l’Esprit saint descendre sur lui comme une colombe. 11 Et une voix se fit entendre des cieux : « Tu es mon fils bien-aimé ; en toi je trouve toute ma joie. »
12 Aussitôt après, l’Esprit le pousse dans le désert. 13 Jésus y resta pendant quarante jours et il fut mis à l’épreuve par Satan. Il était avec les bêtes sauvages et les anges le servaient.

L’épisode du baptême de Jésus est un moment pas comme les autres puisqu’on assiste à une théophanie (une manifestation de Dieu). Au moment du baptême de Jésus apparaissent, simultanément, le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Un moment exceptionnel, vécu en toute simplicité.

Je suis frappé par la sobriété de l’Evangile de Marc. L’entrée de Jésus dans son ministère public n’est pas tonitruante mais humble et simple. On est vraiment dans le même esprit que les récits de la Nativité, en toute simplicité.

D’ailleurs, chez Marc, c’est Jésus qui voit le ciel s’ouvrir et qui voit le Saint-Esprit descendre sur lui comme une colombe. Rien ne dit que d’autres l’ont vu. On ne sait même pas qui a entendu la voix venant du ciel. De même, lorsqu’il est conduit au désert par le Saint-Esprit pour y être mis à l’épreuve par Satan pendant 40 jours, on ne nous en dit presque rien (contrairement à Matthieu et Luc qui donnent plus de détails).

Finalement, le plus étonnant ici, c’est la sobriété. Ce n’est pas la théophanie elle-même, c’est le fait que Jésus se fasse baptiser. Au premier abord, ça semble presque en contradiction avec le message de Jean.
Jean appelait à un baptême de repentance…. Mais Jésus en avait-il vraiment besoin ?
Jean annonçait la venue du Messie, qui est plus grand que lui, et qui baptisera dans le Saint-Esprit… et Jésus, qui est le Messie promis, se fait baptiser par Jean !

Jésus marque son entrée dans son ministère public par un acte d’une profonde humilité. Marc le souligne peut-être plus que les autres évangélistes. Demandons-nous comment l’exemple d’humilité de Jésus peut nous inspirer.

 

L’humilité n’exclut pas la grandeur

Une des merveilles de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, c’est l’annonce d’un Dieu humble. Dieu décide, par amour, de devenir un être humain, le Fils de Dieu choisit de se faire serviteur. Mais un Dieu humble, ça ne veut pas dire un Dieu faible ou petit ! En réalité, Dieu est d’autant plus grand qu’il sait, par amour, se faire petit. Le comble de l’amour de Dieu se manifestera d’ailleurs à la croix, lieu d’humiliation suprême.

L’humilité n’exclut pas la grandeur, au contraire. Mais ce n’est pas une grandeur tape-à-l’oeil. C’est la grandeur de l’amour, du service, du don de soi.

Est-ce qu’il n’y a pas là une leçon pour nous ? Disciples du Christ, nous sommes appelés à chercher notre grandeur dans l’humilité. Nous sommes appelés à vivre l’idéal du service, à l’exemple du Christ. C’est le renversement radical du Royaume de Dieu : celui qui veut être le plus grand, qu’il soit le dernier, le serviteur.

L’Eglise est appelée à être une communauté de serviteurs et non pas un prestataire de services pour des consommateurs de la foi. Et ça dépend de chacun de nous ! Car l’Eglise c’est nous, c’est vous, c’est moi…

 

L’humilité est le seul chemin vers la solidarité

Par son baptême et sa tentation au désert, Jésus nous rejoint dans notre humanité, simplement. Il nous rejoint dans ce qui fait notre quotidien : nos luttes et nos combats intimes face à l’épreuve et la tentation. C’est aussi une des merveilles de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ : Dieu s’est rendu solidaire de nous !

Sans humilité, il n’y a pas de vraie solidarité possible. On peut “faire la charité”, avec un certain paternalisme ou de la condescendance, mais on ne peut pas être véritablement solidaire. On ne peut pas regarder de haut celui avec qui on veut être solidaire. On ne peut que se mettre à sa hauteur, à ses côtés…

La solidarité, ça coûte. Et Jésus a payé le prix fort, jusqu’à la mort. Il ne s’agit pas, pour nous, d’aller jusque là. Mais sans doute pouvons-nous réfléchir à la façon dont nous sommes solidaires ou non de ceux que nous côtoyons, de ceux qui ont aujourd’hui besoin de nous.

Est-ce qu’on les regarde de haut, avec distance, voire une certaine condescendance ? Ou est-ce qu’on sait s’arrêter, s’asseoir, écouter, comprendre, prier… pour être vraiment solidaire ?

 

L’humilité rend sensible à la présence de Dieu

Une troisième leçon que l’on peut tirer du baptême de Jésus chez Marc, c’est que Dieu est pleinement présent dans notre simplicité et notre humilité.

Je repense ici à la théophanie discrète dont parle Marc. Jésus a vu le ciel s’ouvrir, il a vu l’Esprit saint descendre sur lui comme une colombe, il a entendu la voix de son Père dire « Tu es mon fils bien-aimé ; en toi je trouve toute ma joie. » Et peut-être était-il le seul à voir et entendre cela…

L’important, c’est que nous, nous voyons le ciel s’ouvrir et l’Esprit de Dieu descendre sur nous. L’important est que nous soyons conscients de la présence de Dieu à nos côtés et de son regard favorable et plein d’amour sur nous. Notre récompense, elle est là. Dans le “lieu secret” comme dit Jésus dans le Sermon sur la Montagne. Pas dans les synagogues et sur les places… Aujourd’hui, on dirait peut-être : pas sur Instagram ou sur YouTube…

Je pense qu’on peut même dire que l’humilité nous rend plus sensible à la présence de Dieu… Jésus ne dit-il pas qu’il faut être comme des petits enfants pour entrer dans le Royaume de Dieu ? Ne dit-il pas que Dieu a caché ses merveilles aux sages et aux intelligents mais qu’il les a révélées aux enfants ?

En se décentrant de soi-même, on s’ouvre à la présence de l’autre… et à la présence de Dieu. Oui, l’humilité nous rend plus sensible à la présence de Dieu.

 

Conclusion

L’humilité n’est pas une valeur qui est tellement mise en avant dans notre monde aujourd’hui. Ceux qu’on montre en exemple de réussite sont rarement des exemples d’humilité… C’est pourtant bien une des valeurs fondamentales du Royaume de Dieu, une de celles que Jésus a incarnées à la perfection.

C’est aussi, peut-être, l’une des plus difficiles à évoquer. Ce n’est pas évident de dire : “soyez humble comme moi” ! Ca ne fait, justement, pas très humble ! Alors disons plutôt, et disons-le en premier à nous-mêmes : “soyons humble, comme Jésus !”

Et peut-être alors, d’une manière ou d’une autre, verrons-nous le ciel s’ouvrir, peut-être entendrons-nous la voix de Dieu nous dire, dans notre lieu secret : “en toi je trouve toute ma joie.” Ce sera notre récompense…