La foi seule

 

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Le texte de l’Évangile de ce dimanche est parfait pour un culte de baptême ! En effet, un baptême de croyant, c’est LE moment où on professe sa foi personnelle, c’est LE moment où on dit qui est Jésus-Christ, où on proclame publiquement le reconnaître comme le Messie.

Matthieu 16.13-20
13 Jésus arrive dans la région de Césarée de Philippe. Il demande à ses disciples : « Pour les gens, qui est le Fils de l’homme ? » 14 Ils lui répondent : « Les uns disent que tu es Jean-Baptiste. D’autres disent que tu es Élie. D’autres encore disent que tu es Jérémie ou l’un des autres prophètes. » 15 Jésus leur dit : « Mais vous, qu’est-ce que vous dites ? Qui suis-je ? » 16 Simon-Pierre lui répond : « Tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant. » 17 Alors Jésus lui dit : « Simon, fils de Jean, tu es heureux. En effet, ce n’est pas une personne humaine qui t’a fait connaître cela, mais c’est mon Père qui est dans les cieux. 18 Et moi, je te dis ceci : Tu es Pierre, et sur cette pierre, je construirai mon Église, et la puissance de la mort ne pourra rien contre elle. 19 Je te donnerai les clés du Royaume des cieux. Ce que tu refuseras sur la terre, on le refusera dans les cieux. Ce que tu accueilleras sur la terre, on l’accueillera dans les cieux. » 20 Alors Jésus donne cet ordre à ses disciples : « Ne dites à personne que je suis le Messie. »

Au cœur de notre passage, il y a la confession de foi de Pierre. Mais elle ne vient pas comme ça, spontanément. Elle est amenée par Jésus, dans son dialogue avec ses disciples.

Tout commence avec une question : « Pour les gens, qui est le Fils de l’homme ? ». Un sondage, en quelque sorte. Une enquête d’opinion. Il n’y avait pas d’instituts de sondage à l’époque, encore moins Internet ! Mais les gens parlaient. Jésus intriguait les foules et, forcément, les disciples entendaient ce qui se disait. On venait même probablement leur parler, leur poser des questions sur Jésus !

Et les réponses sont variées : Jean-Baptiste, Élie, Jérémie, ou l’un des autres prophètes. Ils rattachent Jésus à des gens qu’ils connaissent, et pas des moindres. Ce sont des grands noms qui sont cités. Les plus grands prophètes de l’histoire biblique. Les foules prenaient Jésus pour un grand homme, un homme de Dieu.

Mais Jésus savait tout cela… il n’avait pas besoin de cette enquête d’opinion. Il ne l’a fait auprès de ses disciples que pour pouvoir leur poser LA question qu’il voulait leur poser : « Mais vous, qu’est-ce que vous dites ? » Ce n’est pas l’opinion des gens à son sujet qui intéressait Jésus mais le positionnement de ses disciples.

La foi n’est pas une question d’opinion,
elle est une conviction intime et personnelle.

Il ne s’agit pas seulement de cocher la bonne case du sondage : « Croyez-vous en Dieu ? Oui. Non. Ne se prononce pas. » Il ne s’agit pas non plus de réciter son catéchisme ou de se cacher derrière l’éducation reçue. Alors bien-sûr, notre éducation compte dans notre cheminement spirituel mais la foi reste une affaire personnelle et intime. On ne peut pas vivre sur la foi de ses parents… Un cheminement spirituel demande forcément, un jour ou l’autre, l’affirmation d’une conviction personnelle.

Le baptême est l’occasion d’exprimer cette conviction. Mais là aussi il ne s’agit pas simplement de cocher la bonne case le jour de son baptême. Il s’agit de nourrir et d’affermir notre conviction.

Comment nourrissez-vous votre foi ? Comment affermissez-vous vos convictions ? Je vous propose un test : qu’est-ce qui a changé dans vos convictions profondes ces derniers mois, ces dernières années ? Comment votre foi a-t-elle évolué ? Si vous me répondez que rien n’a changé, que vous êtes le même chrétien aujourd’hui qu’il y a 10 ans, je m’inquiéterais un peu pour vous… Il ne s’agit pas, bien-sûr, de tout balancer ou de croire tout et son contraire. Mais une foi vivante est une foi qui évolue, y compris au niveau des convictions. Parce que nous n’avons jamais fini de découvrir de nouvelles facettes de Dieu, de sa Parole, de ses projets…

Dans notre texte, la foi de Pierre s’exprime en tout cas avec conviction : « Tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant. »

Il faut mesurer l’ampleur de la déclaration de Pierre. Il va beaucoup plus loin que tous les autres avis exprimés. La référence à tous les grands prophètes de l’histoire d’Israël pour désigner Jésus, ce n’est rien à côté de ce que dit Pierre… Et d’ailleurs Jésus le souligne par sa réaction : « ce n’est pas toi tout seul, avec ta sagesse et ton intelligence qui a pu dire cela. C’est Dieu lui-même qui te l’a révélé ! »

« Tu es le Messie. » C’est le sens du mot Christ, qui en est l’équivalent grec. Le Messie (littéralement « celui qui est oint ») c’est celui qui est choisi par Dieu, celui que les prophètes ont annoncé et qui devait venir pour accomplir le projet de Dieu pour l’humanité. Ainsi, pour Pierre, Jésus n’est pas seulement un prophète, aussi grand soit-il. Il est celui que les prophètes ont annoncé.

« Tu es le Fils du Dieu vivant. » Autrement dit, pour Pierre Jésus n’est pas seulement « le Fils de l’homme », titre messianique repris par Jésus lui-même. Il est le Fils de Dieu. Il est Dieu lui-même, venu parmi les hommes. Et c’est sans doute cela en particulier que Pierre n’a pas pu deviner tout seul…

Par sa déclaration de foi, Pierre témoigne du fait qu’il a compris qui est Jésus. Il l’a vraiment rencontré…

La foi chrétienne, c’est la rencontre avec le Christ vivant.

La déclaration de Pierre nous recentre sur l’essentiel. Avoir la foi, c’est connaître Jésus-Christ. C’est ça l’Évangile. Pas des dogmes. Pas un système de valeurs. Pas un ensemble de rites et de contraintes.

La voilà, la pierre sur laquelle Jésus bâtit son Église. Même si l’apôtre Pierre a joué un rôle spécial dans les premières années de l’histoire de l’Église (il suffit de lire les Actes des apôtres), ce n’est pas sur la personne de Pierre que Jésus bâtit son Église mais sur sa confession de foi, ou sur Pierre en tant que croyant qui confesse sa foi. L’Église de Jésus-Christ, c’est une communauté de croyants. Et toutes les dénominations et étiquettes qui ont été inventées par la suite sont secondaires par rapport à cela…

Nous avons donc dans ce récit l’essentiel de l’Évangile dans la révélation de la personne de Jésus-Christ, Fils de Dieu. Nous avons l’essentiel de la foi dans la confession de Pierre qui reconnaît en Jésus le Messie. Nous avons l’essentiel de l’Église que le Christ bâtit, avec les pierres des croyants qui confessent leur foi.

Nous l’avons dit, notre foi doit sans cesse évoluer, nos convictions toujours s’affermir. Mais nous ne devons jamais perdre de vue que fondamentalement, la foi est la rencontre avec le Christ. Et qu’elle vit de sa relation avec le Christ vivant.

Une foi qui ne serait que théorique, avec des convictions abstraites, aussi fortes soient-elles, ne serait pas vraiment la foi. C’est ce que dira l’apôtre Jacques dans son épître, avec sa formule choc : « la foi sans les œuvres est morte ». Sans une relation avec le Christ, qui se manifeste notamment dans la prière, sous toutes ses formes, la foi est morte…

La foi est la clé du Royaume de Dieu.

Il faut ici dire quelque chose des dernières paroles de Jésus dans notre texte. Sans doute plus difficiles à comprendre. Quelles sont ces clés du Royaume des cieux dont il parle ? Pierre a-t-il reçu un pouvoir particulier ? Est-il celui qui décide qui entrera ou n’entrera pas dans le Paradis, comme on le voit dans la piété populaire ?

En fait, on ne peut pas dissocier cette parole de celle qui suit :

« Je te donnerai les clés du Royaume des cieux. Ce que tu refuseras sur la terre, on le refusera dans les cieux. Ce que tu accueilleras sur la terre, on l’accueillera dans les cieux. »

Et cette phrase, deux chapitres plus loin (Mt 18.18), on la retrouvera dans la bouche de Jésus mais cette fois clairement adressée à tous ses disciples :

« Je vous le dis, c’est la vérité : tout ce que vous refuserez sur la terre, on le refusera dans le ciel. Tout ce que vous accueillerez sur la terre, on l’accueillera dans le ciel. »

Cette parole souligne la responsabilité des disciples. De tous les disciples. Ils ont d’une certaine manière le pouvoir d’ouvrir ou de fermer la porte du Royaume de Dieu. Ou plutôt, les clés du Royaume de Dieu sont entre leurs mains… car le Royaume de Dieu se décide sur la terre. Ici et maintenant.

Il faut se défaire d’une vision du Royaume de Dieu, ou du Paradis, comme de la récompense réservée aux bons croyants. Ou comme une espérance ou une consolation promise seulement après la mort.

Le Royaume des cieux commence maintenant, sur terre. Dans la rencontre avec le Christ vivant. Et nous avons les clés entre nos mains. Car ces clés, ce sont celles de l’Évangile. C’est ici et maintenant que se décide l’entrée dans le Royaume de Dieu, quand l’Évangile est partagé (c’est notre responsabilité de disciples !). Quand il est reçu par la foi.

Et on voit que les premiers chrétiens l’ont compris, Pierre en tête, quand on lit le livre des Actes des apôtres. Animés par le Saint-Esprit, les disciples ont parcouru l’empire romain pour proclamer la bonne nouvelle du salut en Jésus-Christ. Et en faisant cela, ils ont ouvert grand les portes du Royaume de Dieu.

Conclusion

Un jour de baptême, c’est un jour où la bonne nouvelle du salut en Jésus-Christ est proclamée. C’est un jour où les portes du Royaume sont grandes ouvertes. Un jour où chacun, et pas seulement le ou la baptisé(e), peut s’interroger sur sa foi, quel que soit son propre cheminement.

Quelle est ma conviction intime et personnelle ? Ma foi se nourrit-elle d’une rencontre avec le Christ vivant ? Le Royaume des Dieu fait-il partie de ma vie, ici et maintenant ?

Toutes ces questions peuvent d’une certaine manière se résumer à celle que Jésus a posé à ses disciples, et qu’il nous pose à travers l’évangile de ce matin : « Et vous, qui dites-vous que je suis ? »




Réhabiliter Zachée !

 

Lecture biblique : Luc 19.1-10

Le regard traditionnel sur Zachée voit en lui un méchant collecteur de taxes, malhonnête, qui a besoin de se repentir, de changer de vie, pour être sauvé. On voit alors dans sa rencontre avec Jésus l’occasion pour lui de se convertir : c’est à ce moment-là qu’il décide de réparer ses torts et de rembourser généreusement ceux qu’il a extorqué. Alors Jésus affirme qu’il est sauvé !

Sauf que ce n’est pas forcément ce que dit le texte… Malgré la traduction de certaines versions françaises, au verset 8, Zachée ne parle pas au futur. Il ne dit pas : « Désormais je vais donner la moitié de mes richesses aux pauvres et je vais rembourser au quadruple celui à qui j’ai pris trop d’argent. ». Il dit : « Ecoute, Seigneur ! Je donne la moitié de mes richesses aux pauvres et si j’ai pris trop d’argent à quelqu’un, je lui rend quatre fois plus ! ». Il ne dit pas ce qu’il va désormais faire mais ce qu’il fait déjà.

En fait, c’est comme s’il disait à Jésus : « Tu sais, je ne suis pas comme ce que les gens disent de moi. Je ne mérite pas ma réputation… » Car d’où vient la réputation de Zachée ? De ce que disent les foules de lui : « Voilà que Jésus s’arrête chez un pécheur ! » Tout est dit : Zachée est un collecteur de taxes, donc c’est un pécheur !

Il faut dire que les collecteurs d’impôts n’avaient pas bonne réputation. Ils étaient la figure même du collaborateur à la solde de l’occupant romain : ils collectaient les taxes pour l’envahisseur. Et ils avaient souvent tendance à s’en mettre un peu dans les poches au passage… Qu’est-ce qu’on disait alors des collecteurs de taxes ? Ils sont tous pourris !

Jésus, lui, a une toute autre attitude puisqu’il dit à Zachée qu’il veut manger chez lui. Qu’est-ce qui l’a décidé à le faire ? Peut-être le fait de le voir, ainsi, monter sur un arbre à son passage. Une attitude qui n’est pas très digne d’un homme de son statut social… et qui traduit surtout son ardent désir de rencontrer Jésus. Peut-être Jésus a-t-il vu que Zachée n’était pas un collecteur de taxes comme les autres.

Car, il faut le dire, Jésus ne se laissait pas enfermer dans les a priori sur les gens. Ce n’est pas la première fois qu’il approchait un collecteur de taxes. Il a même appelé l’un d’eux à devenir son disciple et il l’a ensuite choisi pour faire partie des 12 apôtres. Il s’agit de Matthieu (appelé Lévi). Jésus mangeait aussi avec les collecteurs de taxes, comme avec tous ceux qu’on rejetait ou qu’on considérait comme pécheur. Les évangiles nous disent même que plusieurs suivaient Jésus.

Jean le baptiste, lui aussi, a vu des collecteurs de taxes venir à lui. Et lui non plus ne les a pas chassés. Il leur disait seulement d’être intègre dans leur tâche :

« Des collecteurs des taxes aussi vinrent pour recevoir le baptême ; ils lui demandèrent : Maître, que devons-nous faire ? Il leur dit : N’exigez rien au-delà de ce qui vous a été ordonné. » (Luc 3.12-13)

Et si Zachée avait reçu le baptême de Jean ? On n’en sait rien, évidemment, mais pourquoi pas ? Ca expliquerait son attitude intègre, peut-être même suite à son baptême. Ca expliquerait aussi son désir de rencontrer Jésus : Jean-Baptiste n’avait-il pas annoncé que le Messie allait venir à sa suite ?

Ce sont, bien-sûr, des conjectures. Mais ce qui est sûr, c’est que le texte de l’évangile laisse bien entendre que Zachée avait déjà une attitude intègre avant de rencontrer Jésus. Tous les collecteurs de taxes n’étaient donc pas des pourris ! Mais les foules n’étaient pas capables de le voir, semble-t-il…

Jésus, lui, non seulement décide d’aller manger chez Zachée mais il ne lui fait aucun reproche, il ne lui demande même pas de changer d’attitude. Il accueille au contraire ce que Zachée dit de son intégrité avec joie : « Aujourd’hui le salut est venu dans cette maison ! » De plus, il le réhabilite aux yeux de tous : « Zachée aussi est de la famille d’Abraham ! »

La conclusion du récit : « le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu » s’adresse donc peut-être moins à Zachée qu’à ceux qui le jugeaient… « Ne jugez pas afin de ne pas être jugés ! »

Les leçons de cet épisode

Je vous propose de tirer des leçons de ce récit non pas en se demandant s’il faut ou pas agir comme Zachée mais en considérant l’attitude de ceux qui entourent Zachée. Et dans ce cas, je crois qu’on peut dire que nous devons prendre exemple sur Jésus et considérer la foule comme un contre-exemple à ne pas suivre :
La foule juge et enferme Zachée dans ses a priori : c’est un collecteur de taxe donc c’est un pécheur !
Jésus accueille Zachée tel qu’il est et sait le reconnaître à sa juste valeur : c’est un fils d’Abraham !

Toute l’histoire de Zachée est résumée par ces deux affirmations : c’est un pécheur ou c’est un fils d’Abraham.

Pour la foule, Zachée est un pécheur !

Pour la foule, dire de Zachée « c’est un pécheur », c’est l’enfermer dans une catégorie. Les pécheurs, ce sont les gens à ne pas fréquenter. Ce sont les infidèles, les impurs, les gens de mauvaise vie. Pour la foule, Zachée est de ceux-là. Il est déjà jugé ! Victime des a priori.

Nous avons tous des a priori sur les gens. Mais il faut prendre conscience qu’ils sont autant de prisons qui enferment les autres… et nous-mêmes.

Ne souffrons-nous pas lorsque nous sommes victime d’a priori ? Je suis sûr qu’en tant que chrétien, peut-être plus encore en tant que protestant évangélique, vous avez déjà été confronté à des a priori des gens à votre égard. Convaincus que les chrétiens c’est comme ça, ils pensent ceci et ne font pas cela. Et ce n’est pas agréable…

Mais nous avons aussi nos a priori sur les autres. Regardez autour de vous. Que pensez-vous des gens que vous voyez ? Que savez-vous vraiment d’eux ? Quelle est la part d’a priori dans votre jugement sur eux ? Avez-vous déjà collé une étiquette sur leur front ?

Pour sortir de nos a priori, il y a deux règles d’or :
– Il faut se méfier des apparences.
– Il faut rejeter les étiquettes.

Les apparences sont trompeuses. La première impression que vous avez de quelqu’un est très rarement conforme à la réalité. Et pourtant, on en reste si souvent à cette première impression… Passez du temps avec quelqu’un, apprenez à le connaître vraiment et vous découvrirez quelqu’un d’autre. En bien ou en mal d’ailleurs…

Il faut rejeter les étiquettes. C’est pourtant tellement facile. On classe les gens en catégories et on les y enferme. Les politiciens. Les artistes. Les patrons. Les pasteurs (!) Ou alors les non-chrétiens. Les « gens du monde ». Ou même les catholiques. Les pentecôtistes… Et derrière ces étiquettes, on met en gros tout le monde dans le même panier.

Mais enfermer l’autre dans ses a priori, c’est refuser de le rencontrer tel qu’il est ! Et c’est, d’une certaine manière, le juger…

Pour Jésus, Zachée est un fils d’Abraham !

Pour Jésus, dire « c’est un fils d’Abraham », c’est reconnaître en Zachée un frère, un homme de foi. Et le dire publiquement, c’est inviter les autres à faire de même et changer de regard sur lui.

Jésus, lui, savait reconnaître la vraie valeur des gens et ne pas se laisser piéger par les apparences ou la réputation. Alors bien-sûr, on n’arrivera jamais à être comme Jésus. Il n’empêche, Jésus n’allait pas tout seul voir Zachée et les gens de mauvaise réputation qu’il n’hésitait pas à rencontrer. Il emmenait ses disciples avec lui ! N’est-ce pas aussi pour leur montrer l’exemple et les inviter à faire de même ?

N’y a-t-il pas pour nous un défi à accueillir comme Jésus accueille, à regarder comme Jésus regarde ? N’est-ce pas ainsi que nous pourrons glorifier Dieu dans nos relations ?

« Accueillez-vous les uns les autres, comme le Christ vous a accueillis, pour la gloire de Dieu. » (Romains 15.7)

Sommes-nous prêts à changer notre regard ?
Sommes-nous prêts à aller au-delà des apparences et des réputations ? A aller vraiment à la rencontre des autres, à nous laisser surprendre par eux ?
Sommes-nous prêts à croire que les gens peuvent changer ou les enfermons-nous à tout jamais dans des a priori, incapable de retirer l’étiquette que nous avons collé sur leur front ?

Conclusion

L’histoire de Zachée est donc peut-être moins l’histoire d’un pécheur qui se repent que d’un homme victime de sa réputation. Nous sommes comme la foule, victimes de nos a priori. Et l’accueil du Christ nous invite à changer notre regard. Non seulement sur Zachée, mais aussi sur notre prochain !




L’offrande de la pauvre veuve

 

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La semaine dernière, je vous ai proposé un autre regard sur l’histoire de David et Goliath. Et comme ça a visiblement plu à plusieurs, je vous propose ce matin de lire un autre récit assez connu, dans le Nouveau Testament cette fois, et de le voir aussi d’un regard différent. Il s’agit de l’épisode de l’offrande de la pauvre veuve.

Ici, je suis redevable à un collègue pasteur qui, lors d’une pastorale il y a quelques années, m’a ouvert les yeux sur ce texte, si bien que je ne peux plus le lire aujourd’hui comme avant.

Marc 12.41-44
41 Dans le temple, il y a un endroit où les gens donnent de l’argent en offrande. Jésus s’assoit en face et il regarde ce qu’ils font. De nombreux riches mettent beaucoup d’argent. 42 Une veuve pauvre arrive, et elle met deux pièces qui ont très peu de valeur. 43 Alors Jésus appelle ses disciples et leur dit : « Je vous le dis, c’est la vérité : cette veuve pauvre a donné plus que tous les autres. 44 En effet, tous les autres ont mis de l’argent qu’ils avaient en trop. Mais elle, qui manque de tout, elle a donné tout ce qu’elle possédait, tout ce qu’elle avait pour vivre. »

Traditionnellement, on loue la générosité remarquable de cette pauvre femme qui, proportionnellement, donne beaucoup plus que les riches qui, eux, donnent de leur superflu. Elle, elle donne de son nécessaire, tout ce qu’elle a pour vivre.

Je ne veux pas complètement nier cette interprétation. Mais est-ce vraiment la leçon que nous devons retirer de cet épisode ? Nous faut-il prendre en exemple cette femme et faire de même ? Pour répondre à cette question, le contexte de ce récit est particulièrement intéressant.

Qu’avons-nous juste avant ? Un discours sévère de Jésus à l’égard des maîtres de la loi :

Marc 12
38 Jésus dit dans son enseignement : « Attention ! Ne faites pas comme les maîtres de la loi ! Ils aiment se promener avec de grands vêtements, ils aiment qu’on les salue sur les places de la ville. 39 Ils choisissent les premiers sièges dans les maisons de prière et les premières places dans les grands repas. 40 Ils prennent aux veuves tout ce qu’elles ont, et en même temps, ils font de longues prières, pour faire semblant d’être bons. À cause de cela, Dieu les punira encore plus que les autres. »

Avez-vous remarqué cette expression au verset 40 : « Ils prennent aux veuves tout ce qu’elles ont » ? Littéralement : « ils dévorent les maisons des veuves ». Ils privent les veuves, une population particulièrement pauvre et fragile à l’époque, de leurs biens, de leurs moyens de subsistance. Et comment le font-ils ? En leur imposant un fardeau légaliste qu’elles ne devraient pas porter !

Et juste après ce discours, nous avons l’épisode de l’offrande de la pauvre veuve, qui met dans le tronc tout ce qu’elle avait pour vivre… Ce n’est pas une coïncidence !

Et cela se confirme si on considère ce qui se trouve juste après notre épisode : l’annonce, par Jésus, de la destruction du temple :

Marc 13
« 1 Ensuite, Jésus sort du temple, et un de ses disciples lui dit : « Maître, regarde ! Quelles belles pierres ! Quels grands bâtiments ! » 2 Jésus lui dit : « Tu vois ces grands bâtiments. Eh bien, il ne restera pas ici une seule pierre sur une autre, tout sera détruit. »

Autrement dit, nous voyons une pauvre veuve qui donne de son nécessaire, tout ce qu’elle a pour vivre, pour un temple qui va bientôt être détruit…

Est-ce que tout cela ne doit pas nous mettre la puce à l’oreille ? Quand l’apôtre Paul organise la collecte en faveur des chrétiens de Jérusalem, il invite bien-sûr à la générosité mais il précise aussi qu’il ne s’agit pas pour ses lecteurs de se mettre sur la paille mais de donner en fonction de leurs moyens ! « Car il ne s’agit pas de vous exposer à la détresse pour le soulagement des autres, mais de suivre une règle d’égalité » (2 Corinthiens 8.13).

Est-il juste que cette veuve, déjà en situation de précarité, se mette sur la paille en apportant son offrande au temple ? Je ne pense pas !

D’ailleurs, pourquoi Jésus se met-il à regarder comment les gens déposait de l’argent dans la Trésor du Temple ? Vous pensez qu’il ne savait pas ce qui se passait ? C’est plutôt qu’il s’attendait à voir quelque chose de précis. Et quand la veuve y dépose ses deux petites pièces, Jésus le fait aussitôt remarquer à ses disciples, comme si c’était exactement ce qu’il attendait de voir. Comme s’il leur disait : « vous voyez, c’est bien ce que je vous disais à propos des maîtres de la loi qui mettent les veuves sur la paille ! »

Le récit de l’offrande de la pauvre veuve ne serait pas alors un exemple de générosité à suivre mais un dramatique exemple d’un système injuste entretenu pour les autorités religieuses. La preuve que ce que Jésus dit des maîtres de la loi est vrai : « ils dévorent les maisons des veuves » !

Jésus ne dit d’ailleurs pas à ses disciples : « Regardez cette veuve et faites comme elle ! » Evidemment, il ne reproche rien non plus à cette femme. Elle est, certes, très généreuse. Mais Jésus la désigne avant tout comme une victime des chefs religieux qui exigent d’elle ce qu’elle ne devrait pas devoir donner.

Quelles leçons tirer de ce récit ?

Leçon 1 : L’institution religieuse peut être source d’injustice et d’oppression.

Dans cette séquence qui inclut l’épisode de l’offrande de la veuve mais aussi les paroles qui précèdent et qui suivent, il y a de la part de Jésus une critique de l’institution religieuse. Jésus dénonce une forme d’injustice et d’oppression des plus fragiles. Le tout justifié par l’enseignement des chefs religieux. Leur légalisme obtus pousse des pauvres veuves à se mettre sur la paille !

Et dans les évangiles, la destruction du temple que Jésus annonce est perçue aussi comme une forme de jugement de Dieu.
En réalité, le christianisme devrait être une religion sans temple, sans lieu sacré. Voyez les paroles de Jésus à la femme Samaritaine :

Jean 4
21 Jésus lui dit : « Crois-moi, femme, l’heure vient où ce n’est ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père. (…) 23 Mais l’heure vient, elle est là, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ; tels sont, en effet, les adorateurs que cherche le Père.

Ca ne veut pas dire qu’il ne faut pas de temple ou d’église, qu’il ne faut pas prêter attention aux lieux de culte. Mais bien que les personnes comptent plus que les bâtiments, ce sont les pierres vivantes des croyants qui sont l’Eglise.

Le christianisme devrait être aussi une religion méfiante de l’institution religieuse, surtout quand celle-ci prend la place qui revient à Dieu. Relisez l’épître aux Hébreux, où Jésus apparaît comme l’unique grand prêtre, le seul intermédiaire entre Dieu et les hommes ! Tous les croyants sont prêtres, c’est ce qu’on appelle le sacerdoce universel.

Ca ne veut pas dire qu’il ne doit pas y avoir de structure d’Eglise, avec des responsables et des ministères particuliers. Mais il faut rester vigilant quant à l’institution. Le problème de l’institution religieuse, c’est quand elle devient une fin en soi : les clercs assoient leur autorité, les structures sont plus importantes que les personnes, le dogme prend le pas sur la vie.

Dans ce cas, l’institution religieuse peut devenir source d’injustice, d’oppression… et d’une certaine façon prendre la place de Dieu !

Leçon 2 : On peut être généreux de bien des façons… et nul besoin de se mettre sur la paille pour cela.

C’est peut-être ici plus un prolongement qu’une application directe de notre texte mais on peut sans doute dire quelque chose de la générosité à partir de ce récit. Certes, la pauvre veuve fait preuve d’une grande générosité… mais elle semble bien manipulée par les exigences folles des chefs religieux. Sous leur pression, elle se met en danger.

Il faut donc commencer par dire qu’on peut être généreux de bien des façons, sans forcément se mettre sur la paille. D’abord parce que la générosité n’est pas qu’une affaire d’argent. Elle est aussi affaire d’attention, d’écoute, de temps consacré à l’autre… On ne peut être généreux que de ce que l’on a. Du temps, on en a tous ! Et on n’est pas toujours prêt à le donner…

La générosité est une affaire personnelle, un appel que chacun doit entendre. A chacun de voir comment il peut y répondre, en fonction de ses moyens. La générosité est finalement relative. Dans notre récit, les riches qui donnent beaucoup ne sont pas forcément généreux… Il n’y a pas grand mérite à donner ce dont on est riche !

Nous sommes tous appelés à entendre l’appel à la générosité mais pour soi-même, pas pour les autres. Nous n’avons pas à dire comment les autres doivent être généreux. C’est trop facile d’exiger la générosité des autres… surtout quand on est soi-même riche ! Et c’est encore pire quand on le fait avec des motifs religieux comme dans notre récit !

La question de la générosité est personnelle, individuelle. Comment, moi, je pourrais être plus généreux ? Plus généreux avec mon argent, avec mon temps, avec mes dons et capacités, avec mes prières…

Conclusion

L’épisode de l’offrande de la pauvre veuve s’avère donc être d’abord une flagrante injustice, qui met en danger une femme en situation précaire. Et cela par la faute des chefs religieux ! C’est un scandale !

Je vous le dis (avec humour) : méfiez-vous des prêtres ! Et méfiez-vous des pasteurs ! Mais examinez toutes choses et retenez ce qui est bon… Et voyez comment, vous-mêmes, vous pouvez vous montrer demain plus généreux qu’aujourd’hui, avec les moyens qui sont les vôtres !




David n’avait que sa fronde…

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Lecture biblique : 1 Samuel 17

L’histoire de David et Goliath est une des histoires bibliques les plus connues. Elle est utilisée comme une métaphore dans le langage courant quand on évoque un combat ou un affrontement qui semble perdu d’avance.

On pense souvent qu’on assiste dans cet épisode à un véritable miracle, avec la victoire du jeune berger qui n’avait que sa seule fronde face au géant Goliath armé jusqu’aux dents. En réalité, cet épisode n’a rien d’un miracle. Certes, David a terrassé Goliath mais, à y regarder de plus près, ça n’a rien d’étonnant.

Je suis ici redevable à une vidéo vue sur Internet, de Malcolm Gladwell, un « Ted Talk » (des discours courts et percutants) intitulé « L’autre histoire de David et Goliath) (ici)

Je ne vais pas reprendre tous les éléments de cette vidéo mais m’en inspirer et prolonger les leçons que nous pouvons tirer de ce récit biblique pour nous.

1. David était bien mieux armé qu’on ne le pense pour battre Goliath !

D’abord, David est intelligent, vif et courageux. Il n’était certainement pas naïf (on sait quel roi il a été par la suite). S’il a voulu relever le défi, c’est qu’il pensait bien avoir une chance de l’emporter. De plus, il a de l’expérience au combat. Il le dit lui-même : il a souvent défendu son troupeau face au lion et au loup. Et ce n’était pas une mince affaire !

Saül veut l’aider en lui proposant de revêtir son armure. Mais il n’arrivait même pas à marcher avec… Il renonce donc et préfère ne prendre que son bâton, quelques pierres et sa fronde.

Mais la fronde était une arme redoutable ! Rien à voir avec les jouets pour enfant… C’était l’arme des bergers dans l’Antiquité, pour défendre les troupeaux face aux prédateurs. Comme David. C’était aussi une arme de guerre. Les armées antiques avaient des bataillons de frondeurs.

Une fronde, c’est une poche, généralement en cuir, dans laquelle on plaçait le projectile, prolongé par deux lanières, de longueur inégale. Une fois le projectile placé dans la poche, le lanceur tenait la lanière longue dans la paume et la courte entre le pouce et l’index. Il faisait alors tournoyer sa fronde, puis lâche la lanière la plus courte en direction de la cible. Le projectile atteignait alors une vitesse très importante. Une balle de fronde avait une puissance d’impact similaire à certains revolvers, capable de percer une voûte crânienne. Et les frondeurs entraînés pouvaient tirer avec une grande précision. Les frondeurs des Baléares était réputés les meilleurs. Ils étaient recrutés par l’armée romaine et étaient capables de viser juste à près de 200 mètres avec leur fronde !

Bref, avec sa fronde, David pouvait bien espérer tuer le géant Goliath… Il est allé au combat avec l’arme qu’il maîtrisait. Le texte biblique dit bien qu’il choisit minutieusement cinq pierres dans le torrent. Des pierres polies, bien aérodynamiques, avec lesquelles il pourra tirer avec une grande précision.

David ne va pas au combat les mains dans les poches, mais avec une arme qu’il maîtrise parfaitement, une arme par ailleurs redoutable. Et il y va, c’est là aussi sa force, avec une pleine confiance en Dieu !

2. Goliath était bien plus vulnérable qu’on ne le pense !

Goliath était, certes, impressionnant. Géant de près de 3 mètres, armé jusqu’aux dents, il terrifiait tout Israël. En réalité, la force de Goliath était toute entière dans la peur qu’il inspirait. D’où la description détaillée que la Bible nous fait de son harnachement militaire, casque, armure et armes en bronze ! Et ça semble fonctionner ! Personne n’ose relever son défi.

Pourtant, le texte biblique lui-même laisse entendre que Goliath avait ses faiblesses.

Il est certes grand et fort, mais il est lent. Il s’approche petit à petit de David, il lui demande de venir et lorsqu’il finit par s’avancer vers David, ce dernier, par contraste, court avant de lui lancer son projectile.

Peut-être avait-il même des problèmes de vue. Pourquoi dit-il à David qu’il s’avance vers lui avec « des bâtons » (c’est bien le pluriel qui est utilisé en hébreu), alors que David n’en avait qu’un évidemment ? Et il ne semble pas même remarquer la fronde que portait David. Alors même que c’est une arme redoutable contre un soldat d’infanterie comme lui. Et puis cette homme qui le devance, certes pour porter son bouclier, peut-être était-ce aussi pour le guider ?

En réalité, la taille immense de Goliath devait être due à une maladie, qui pouvait entraîner des déficiences visuelles, des difficultés de locomotions, etc.

Le géant Goliath était peut-être impressionnant dans son armure éclatante mais il était aussi vulnérable, surtout face à un jeune homme vif et armé d’une arme de jet.

Et la seule force de Goliath, la peur, semble ne pas avoir d’impact sur David. Il essaye bien encore de l’impressionner quand il est face à lui, tentant de l’humilier et lui lançant des malédictions. Mais ça n’a pas d’effet sur David qui, au contraire, répond avec aplomb : « je vais te tuer et te couper la tête ! »

Dès lors, il n’y a rien d’étonnant à ce que David prenne le dessus sur Goliath… Il n’y a même pas de combat. En quelques secondes tout est réglé. Une pierre bien lancée avec la fronde de David, en plein front, là où l’armure ne protégeait pas le géant, est c’est fini !

3. Les leçons de l’histoire

Leçon 1 : Le premier ennemi à vaincre, c’est la peur.

La peur est une arme redoutable. On la voit utilisée dans les relations humaines, pour intimider, impressionner, désarmer l’autre. C’est une arme de manipulation, utilisée à des fins de pouvoir, ou a des fins électoralistes.

La peur est présente, d’une manière ou d’une autre, en chacun de nous. Elle peut avoir de nombreuses sources, elle peut susciter frustrations et souffrances, elle peut nous paralyser et nous empêcher d’avancer.

Or, une des dernières paroles de Jésus à ses disciples, juste avant de les quitter, c’était justement : « n’ayez pas peur » ! Comme David, assuré d’être dans la main du Seigneur quand il répond au défi du géant Goliath, nous pouvons être assurés d’être dans la main du Christ face à tous nos adversaires, nos défis et nos épreuves. Face à tous les géants qui nous font face. Nous n’avons pas à avoir peur.

Leçon 2 : Les géants ne sont pas aussi forts et puissants qu’ils en ont l’air

Les apparence sont trompeuses, surtout quand on a peur. Car les géants auxquels nous pouvons faire face dans notre vie ne sont pas aussi puissants et indestructibles qu’ils en ont l’air. En tout cas, c’est la peur qui les rend plus dangereux et plus forts à nos yeux.

David n’a pas vu en Goliath un géant invulnérable mais un soldat ennemi qu’il pouvait tuer avec sa fronde. Sa façon de voir Goliath n’a pas été conditionnée par la peur mais par sa foi.

Si la foi est bien la confiance placée en Dieu, alors assurément elle est l’arme la plus efficace face à la peur, et face à tous les géants dans notre vie.

Leçon 3 : C’est en étant nous-mêmes que nous remportons la victoire

Si David avait accepté d’aller au combat avec l’armure de Saül, il aurait été défait. C’est avec son arme de simple berger qu’il est allé affronter Goliath. L’arme qu’il maîtrisait et qu’il savait être efficace. Malgré les apparences, c’est lui devait gagner.

C’est en étant lui-même que David est allé au combat et a vaincu. C’est sa foi, sa confiance en Dieu qui a fait le reste. C’est elle qui a triomphé de la peur. Et Dieu a utilisé les capacités et les forces de David pour le faire vaincre.

Cette belle promesse que l’apôtre Paul écrit aux Corinthiens est vraie :

« Dieu est fidèle, et il ne permettra pas que vous soyez tentés au-dessus de vos forces. Quand vous serez tentés, Dieu vous donnera la force de le supporter et le moyen d’en sortir. » (1 Co 10.13)

Conclusion

Le récit de David contre Goliath est une vivante exhortation à placer notre confiance en Dieu pour vaincre la peur… et les géants qui nous font face !




Au grand jour et sur les toits !

Lecture biblique : Matthieu 10.26-33

Précisons d’abord le contexte de ces paroles. Elles font partie du discours de Jésus à ses disciples, au moment où il les choisit. Il les envoie et les avertit : « Je vous envoie comme des brebis au milieu des loups. » Il leur dit qu’ils vont subir des persécutions, qu’ils seront traduits devant les tribunaux et qu’ils seront haïs à cause de leur foi. Bref, ce n’est pas vraiment encourageant comme tableau… Et c’est après tout cela que Jésus leur dit ces paroles : « Ne les craignez donc pas !»

Jésus se veut donc rassurant pour ses disciples… Même si son discours est fait de contrastes, où les affirmations semblent parfois presque se contredire. Ainsi Jésus dit que les gens vont les persécuter… mais qu’il ne faut pas avoir peur d’eux. Il dit qu’il faut craindre Dieu qui peut nous faire périr dans la géhenne… mais qu’en même temps Dieu est prévenant jusqu’à connaître le nombre de nos cheveux. Jésus ne nous reniera pas si on ne le renie pas… mais il nous reniera si on le renie !

En fait, on pourrait se demander si ces paroles sont vraiment rassurantes ! Ceci dit, c’est quand même bien l’intention de Jésus si on en croit sa première exhortation : « Ne les craignez pas ! », qu’il répète au verset 31 : « Soyez donc sans crainte. »

On pourrait reformuler les paroles de Jésus ainsi : Nous ne devons pas craindre les hommes. Ils peuvent peut-être atteindre notre corps mais notre âme leur est inaccessible. Le seul que nous devrions craindre, c’est Dieu car lui peut nous tuer corps et âme. Mais Dieu est prévenant, il nous aime et connaît jusqu’au nombre de nos cheveux… Nous pouvons être sans crainte devant lui ! Confessons donc le Christ publiquement !

Ou encore plus court : N’ayons pas peur de proclamer publiquement le Christ !

N’ayons pas peur

Il faut le dire : vu ce que Jésus venait de dire à ses disciples, ces derniers avaient de quoi avoir peur ! N’est-il pas légitime de craindre ceux qui vous persécutent, qui cherchent à vous nuire et vous haïssent ? Jésus ne nie pas qu’ils puissent représenter un danger pour ses disciples. Ils peuvent « tuer le corps », ce qui n’est quand même pas rien ! Mais Jésus relativise même cela, avec deux arguments :
Ils ne peuvent pas « tuer notre âme », c’est-à-dire notre vie véritable qui est en Dieu. Si le corps est atteint, c’est dans cette vie-ci. Notre vie éternelle, elle, est en Dieu et aucun homme ne peut y porter atteinte.
Dieu prend soin de nous, il est prévenant jusqu’à connaître le nombre de nos cheveux. Cela signifie qu’il ne souhaite pas que nous souffrions, qu’il prendra soin de nous mais que si nous devons souffrir, il sera à nos côtés.

Et pourtant, nous avons peur… Nous avons peur de répéter en plein jour ce que le Seigneur nous dit tout bas. Nous avons peur de crier sur les places. Nous avons parfois peur de nous afficher comme chrétien, aujourd’hui encore. Nous vivons au quotidien comme des croyants incognito.

Vous me direz : oui mais ce n’est pas facile en France, avec la laïcité, la méfiance envers la religion, le terrorisme, etc… OK, c’est vrai. Mais vous pensez que c’était plus facile au temps de Jésus ? Et Jésus n’a jamais dit que ce serait facile ! Il a même dit le contraire… Je suis frappé de voir combien Dieu donne courage et force à ceux de nos frères et sœurs chrétiens qui vivent dans des contextes de persécutions à cause de leur foi. Ils sont des exemples pour nous.

Pour eux comme pour nous, Jésus nous redit ces paroles adressées à ses disciples : « Ne les craignez pas ! »

Mais le verset 33 est difficile à entendre… Vraiment, Jésus pourrait nous renier ? Il me semble que la parole de Jésus ici doit être entendue comme celle qui précède où il dit à ses disciples que s’il y a quelqu’un à craindre, ce ne sont pas les hommes mais Dieu seul ! S’il y a quelqu’un à qui rester fidèle jusqu’au bout, quelle que soit l’adversité, c’est bien Jésus-Christ. Lui qui a été jusqu’au bout de sa mission pour nous ! Jésus nous invite au courage de la foi.

Et puis on a aussi un exemple de triple reniement dans les évangiles, avec l’apôtre Pierre. Et Jésus ne l’a pas renié pour autant. Ca ne veut pas dire que c’est une parole en l’air de la part de Jésus ici. Mais elle nous pose la question : comment restons-nous fidèle au Christ dans l’adversité ?

Je ne sais pas si vous avez vu « Silence », le film de Martin Scorsese sorti en début d’année au cinéma. C’est exactement un des sujets du film qui raconte l’histoire de deux prêtres jésuites, au XVIIe siècle, qui se rendent au Japon pour retrouver leur mentor dont on dit qu’il aurait renié sa foi. Ils découvrent un pays où le christianisme est devenu illégal et ses fidèles persécutés, obligés de vivre leur foi caché. Le film pose notamment la question de la foi face à l’inquisition : faut-il y céder tout en gardant une foi intérieure cachée ou faut-il rester fidèle quoi qu’il en coûte ? Vraiment, je suis sorti ébranlé de ce film, interpellé quant à ma foi et la façon de la vivre ou non publiquement.

Proclamons le Christ

« Ce que je vous dis dans l’ombre, dites-le au grand jour ; ce que vous entendez dans le creux de l’oreille, proclamez-le sur les terrasses » (v.27)

Au lieu des « terrasses », on pourrait dire : « sur les toits » puisqu’il s’agit des toits en terrasse des maisons de l’époque. Il s’agit donc de dire l’Evangile au grand jour et le proclamer sur les toits !

Ca me rappelle un peu l’exhortation de Jésus, dans le Sermon sur la Montagne, à être lumière du monde. On ne met pas une lampe sous un seau… on la met bien en évidence pour qu’elle brille aux yeux de tous. Ici, briller, c’est proclamer bien haut le Christ.

Et Jésus enfonce le clou aux versets 32-33 en invitant ses disciples à se déclarer publiquement pour le Christ. Il le fait avec solennité, en mettant en garde contre le fait non seulement de se taire mais de le renier.

Dire l’Evangile au grand jour. Le proclamer sur les toits. Se déclarer publiquement pour le Christ. Vous y arrivez facilement, vous ? Moi pas… Pour certains, c’est peut-être facile, mais pour beaucoup, il faut se faire violence !

Il ne s’agit pas forcément d’aller sur la place du Capitole, de monter sur une chaise et proclamer des versets bibliques dans un micro. Mais avouons qu’il n’est pas toujours facile de mettre en pratique ces exhortations de Jésus.

Et puis il y a, c’est vrai, des contraintes aujourd’hui qui rendent impossible le fait de dire ouvertement sa foi dans certains contexte. C’est le cas, en France, dans les hôpitaux, à l’école, dans les services publics en général… Vous serez simplement virés si vous le faites ! Les actes doivent alors prendre le relais des paroles. Et les paroles peuvent s’exprimer en dehors du travail…

Dire l’Evangile au grand jour. Le proclamer sur les toits. Se déclarer publiquement pour le Christ…

Lorsque Jésus dit à ses disciples qu’il les envoie comme des brebis au milieu des loups, il leur dit aussi d’être rusés comme les serpents et innocents comme les colombes ! Et il y a des chrétiens qui sont tellement rusés que personne ne sait jamais qu’ils sont croyants et d’autres qui sont tellement innocents, ou naïfs, qu’ils tendent toujours le bâton pour se faire battre ! Il ne s’agit pas d’être suicidaires spirituellement et de venir toujours avec ses grands sabots évangéliques !

Il s’agit de faire preuve de sagesse, de bon sens, d’opportunisme. Mais il s’agit aussi de mettre comme priorité la cause du Christ. C’est notre mission de disciples de Jésus-Christ, à laquelle il nous faut répondre… même s’il faut se faire un peu violence !

Conclusion

L’appel de Jésus à ses disciples résonne d’une façon particulière pour nous aujourd’hui. L’impératif de se déclarer publiquement pour le Christ demeure. Celui de dire au grand jour et de proclamer sur les toits l’Evangile, aussi. Même s’il nous faut être, pour parler comme Jésus, « rusés comme les serpents » pour le faire d’une manière respectueuse de la laïcité.

Nous pouvons bien-sûr nous retrouver face à des laïcards obtus, des antireligieux ou des anticléricaux. Il faut faire avec… Et il y a des contextes spécifiques où l’extrême prudence doit être de mise. Il n’empêche que le défi demeure : nous sommes, en tant que disciples du Christ, appelés à être ses témoins, chacun personnellement, et en tant que communauté. Et ce n’est pas qu’une affaire intime et privée.

Nous avons le droit de le dire dans notre France laïque. Y compris dans l’espace public. Pour autant que nous le fassions de manière respectueuse, sans causer de trouble. Certains devront se retenir, pour rester dans les limites du respect. D’autres devront se faire violence.

Inventons de nouvelles manières de dire au grand jour et de proclamer sur les toits que Jésus-Christ, le Fils de Dieu, est Sauveur !