Notre vocation éternelle : honorer Dieu de tout notre être

Une question que les chrétiens se posent souvent, c’est : qu’est-ce qu’on fera « après » ? au ciel ? avec Dieu ?

La Bible nous parle assez peu de ce qui nous attend, sûrement pour éviter qu’on se perde dans des rêveries qui de toute façon seront bien inférieures ce que Dieu a prévu. Mais, parfois elle nous donne des indices sur ce que Dieu nous réserve pour l’éternité avec lui – un peu comme une bande annonce où on voit les lieux, les personnages, quelques activités, mais il nous manque la clef pour tout saisir : pour cela il faut voir le film !

Celui qui a reçu le plus d’indices, c’est l’apôtre Jean, qui a intitulé son livre « Révélation » (apocalypse d’après le grec). Je vais lire quelques versets qui plantent le décor :



Lecture biblique : Apocalypse 21.1-4

1 Alors je vis un nouveau ciel et une nouvelle terre. Le premier ciel et la première terre ont disparu, et il n’y a plus de mer. 

2 Et je vis la ville sainte, la nouvelle Jérusalem, qui descendait des cieux, envoyée par Dieu, prête comme une épouse qui s’est faite belle pour son mari. 

3 J’entendis une voix forte qui venait du trône et disait : « Voici, la demeure de Dieu est parmi les êtres humains ! Il demeurera avec eux et ils seront ses peuples. Dieu lui-même sera avec eux, il sera leur Dieu. 

4 Il essuiera toute larme de leurs yeux. Il n’y aura plus de mort, il n’y aura plus ni deuil, ni lamentations, ni douleur. En effet, les choses anciennes ont disparu. »

Donc, le cadre : on repart à zéro ! Nouveau monde, nouveaux cieux, nouvelle terre ! rassurez-vous, la disparition de la mer est sûrement symbolique : a priori, c’est le côté chaotique, abyssal, dangereux, de la mer, qui serait mis de côté.

Dans ce monde nouveau, ce qu’on sait, c’est que Dieu effacera tout ce qui déforme, abîme, pèse ou écrase dans ce monde, et même toutes les traces de nos souffrances – c’est un endroit difficile à imaginer, où règne cependant la paix.

Et puis, les acteurs principaux : Dieu et la nouvelle Jérusalem. Cette ville, capitale des Juifs, représente le peuple que Dieu s’est façonné au fil de l’Histoire, ceux qui se sont tournés vers lui avec foi et qui sont devenus ses enfants pour toujours, grâce au Christ.

On sent une qualité de présence, une proximité, une relation inédite par rapport à ce qu’on ressent aujourd’hui : Dieu sera pleinement présent chez nous, et nous chez lui.

Donc, plus de mal, plus de mort, et Dieu source de vie et d’amour au centre, prêt à laisser déborder abondamment toute sa grâce !

Et alors ??… qu’est-ce qu’on fera ?…

Un peu plus loin dans le texte, d’autres indices nous sont donnés.

Lecture biblique : Apocalypse 22.3b-5

Le trône de Dieu et de l’Agneau sera dans la ville, et les serviteurs de Dieu lui rendront un culte. 

4 Ils verront sa face, et son nom sera inscrit sur leurs fronts. 

5 Il n’y aura plus de nuit, et ils n’auront besoin ni de la lumière d’une lampe, ni de celle du soleil, parce que le Seigneur Dieu répandra sur eux sa lumière. Et ils régneront pour toujours.

          Quelques confirmations de ce qui a déjà été dit : plus de ténèbres, mais tout en pleine lumière, en pleine clarté, en pleine sécurité et en pleine vérité.

Dieu est bien présent en plein milieu, proche, accompagné de l’Agneau, symbole du Christ mort en sacrifice et ressuscité – lui la source de notre salut et de notre vie !

          Que font donc les enfants de Dieu ?

Ils rendent un culte, ils louent, ils adorent ! Dieu et l’Agneau, les deux ensemble, de façon entremêlée, car Dieu le Père et le Dieu le Fils devenu homme en Jésus sont tellement unis qu’on ne peut pas se tourner vers l’un sans voir l’autre.

Les enfants de Dieu sont décrits comme des adorateurs, des gens qui louent Dieu, avec une référence au grand-prêtre de l’Ancien Testament qui portait pendant le culte une inscription sur son front : consacré au Seigneur. Propriété de Dieu ! cette référence suggère deux points :

  • Dans le culte juif, il y avait une tribu (Lévi) dont certains clans étaient serviteurs, d’autres prêtres (ils pouvaient faire les sacrifices) et un seul homme, grand-prêtre. Un seul ! Un seul qui pouvait rentrer dans le lieu caché au cœur du Temple, tout près des objets par lesquels Dieu avait fait des miracles.

Dans l’éternité, ce n’est pas un seul qui peut s’approcher de Dieu, être au cœur de sa présence, c’est tous ! Tous ses enfants ! Nous serons tous au premier rang ! (J’imagine que Dieu a prévu une gestion de l’espace adaptée 😊)

D’ailleurs l’apôtre Jean dit au début de son livre (Apocalypse 1.5-6), que nous sommes déjà tous prêtres dans la foi, c’est-à-dire, tous avec un accès personnel à Dieu, sans avoir besoin d’un autre intermédiaire que Jésus. Personne n’est au second rang : nous sommes déjà tous au premier rang. Le pasteur n’est pas prêtre, il a un rôle d’accompagnement de la conduite, ou plutôt il est prêtre comme les autres – tous au premier rang ! 

  • L’autre point, c’est que ce nom marqué sur le front souligne, surligne, encadre une vérité fondamentale qui commence dès que nous recevons l’amour de Dieu en Christ : nous sommes sa propriété ! Nous sommes à lui ! Nous portons son nom de famille ! Nous sommes adoptés, choisis, chéris – pour vivre avec lui toujours. C’est notre identité, dès aujourd’hui et pour toujours !

Jean insiste sur le fait que nous verrons Dieu face à face – jusque là, ce n’est jamais arrivé, Dieu est trop grand, il est trop pur, aujourd’hui, on ne peut pas recevoir l’intensité de sa présence (comme un produit trop pur qu’il faut diluer pour l’ingurgiter sans se faire mal). On n’en est pas capables, il y aurait des effets secondaires trop forts !

Mais dans l’éternité, débarrassés de ce qui nous affaiblit et nous abîme, Dieu nous promet que nous pourrons nous abreuver de sa pure présence, nous régaler d’être avec lui.

Lorsque nous louons Dieu aujourd’hui, lorsque nous lui rendons un culte – c’est quoi rendre un culte ? C’est dire notre admiration ! notre adoration ! concentrer toute notre énergie vers l’autre, chercher à lui faire plaisir ! Quand on parle d’un fan en disant « ah oui, cet artiste ou ce sportif, c’est vraiment son idole ! », c’est que le fan est tourné constamment vers son idole, pense à lui, cherche à l’honorer de toutes les façons possibles. C’est un peu un culte : être tourné vers Dieu, l’honorer de toutes les façons possibles !

Donc, lorsqu’aujourd’hui, même imparfaitement, nous nous tournons vers Dieu, lorsque nous cherchons à l’honorer et à lui faire plaisir, lorsque nous lui disons notre amour et notre admiration, nous vivons un avant-goût de cette exultation éternelle où nous aurons devant les yeux, sous les mains, et plein les oreilles, toutes les merveilles de Dieu déployées – je m’arrête là, parce que ça dépasse mes mots !

          Le contenu de l’éternité

          Quand j’étais plus jeune, je m’inquiétais quand même un peu de cette promesse : chanter Dieu c’est très bien, mais est-ce que ce n’est pas un peu long, quand même, de chanter toute l’éternité ? Parce que l’éternité, c’est long !… surtout vers la fin, comme dirait l’autre.

D’abord, après ce beau culte préparé par les jeunes, vous répondriez à la jeune Florence : « mais enfin, Florence, louer Dieu, c’est beaucoup plus que chanter ! C’est l’honorer de tout ton être, avec tes pensées, tes actes, tes paroles, tes relations. »

Et vous auriez raison !

Et le texte de Jean appuie sur cette notion, avec une pépite que j’ai redécouverte cette semaine et qui m’a franchement époustouflée !

          v.3b : le trône de Dieu sera en plein milieu de la ville. Autrement dit, nous serons en plein dans le royaume de Dieu, ce règne que nous attendons (Notre Père qui es aux cieux, que ton règne vienne…). Ce sera le triomphe de la paix, de la justice et de l’amour de Dieu. Dieu pleinement visible comme roi, un roi d’amour, qui n’a pas hésité à se sacrifier comme un agneau… un roi comme nous n’en connaissons pas sur terre, un roi inédit !

et à la fin du v.5, dernière parole qui décrit notre vie avec Dieu dans l’éternité : (les serviteurs de Dieu) règneront pour toujours.

ils règneront. En Jésus, Dieu le Roi s’est fait serviteur, pour que nous, ses serviteurs, nous devenions rois avec lui, pour toujours. C’est pas époustouflant ? On ne pourrait pas l’inventer, un Dieu pareil !

A quoi vous associez le fait de régner ? C’est impossible qu’il s’agisse d’une domination autoritaire ou de prendre la place de Dieu – nos dérives actuelles – ce ne sera pas possible, puisque Dieu sera là, en plein milieu, dans toute sa majesté.

Ca me fait plutôt penser à une certaine liberté de mouvement, un privilège, personne au-dessus de nous pour nous écraser, nous exploiter ou nous contraindre. Un espace de liberté, une aisance, une victoire – et un certain pouvoir.

Dieu est Dieu, et heureusement il sera toujours Dieu, toujours le Roi ! Et pourtant, même s’il est le seul à avoir la légitimité de décider et d’agir, depuis le début, depuis le récit de la création, Dieu n’a qu’un désir : être avec nous et que nous soyons ses partenaires dans ses projets.

La vocation de l’être humain, c’est quoi à la base ? Cultiver et garder la création (Genèse 2.15). Dieu pouvait le faire tout seul ! mais il se réjouissait d’avance de nous voir participer, avec tous nos neurones, notre créativité, notre énergie, nos mains nos pieds, nous voir participer à ses projets.

Aujourd’hui, encore, Dieu transmet la bonne nouvelle de son amour à travers nous – il pourrait le faire tout seul ! mais il se réjouit de nous voir grandir et nous développer en étant acteurs dans ses projets.

Et dans l’éternité, nous serons encore partenaires de ses projets, partenaires de son règne. Nous ne serons pas PDG, mais nous serons associés, les associés du Roi !

Parce que c’est le plaisir de Dieu de nous voir nous développer, nous déployer, nous épanouir avec lui et pour lui. Cette image du règne est très forte : quand Dieu est au centre, nous ne sommes pas sur le banc de touche : nous sommes au top ! Quand Dieu est au centre, nous sommes au top ! Dieu est comme un père, une mère, qui se régale d’entendre son enfant rire, qui s’émerveille de le voir fabriquer un objet, qui guette ce qu’il va devenir en se frottant à la vie. Dieu mérite d’être au centre, au centre du monde, au centre de notre vie dès aujourd’hui, c’est son dû – mais son cadeau, sa grâce, sa générosité incroyable, c’est de nous y vouloir avec lui.

          Rendre un culte à Dieu aujourd’hui, dans ce que nous sommes, ce que nous faisons, en communauté et en individuel, par nos chants, nos pensées, nos choix, nos actions, c’est goûter aujourd’hui à cette relation, à ce partenariat que Dieu désire depuis toujours et pour toujours.




La Croix : un sacrifice qui ôte notre culpabilité (La Croix 1/4)

Savez-vous ce qu’est cet objet ?

rubis brut

C’est plus reconnaissable quand c’est taillé, non ?

rubis taillé

et plus beau aussi… ! Taillé, il reflète la lumière, donne envie de l’exposer ou de le porter en bijou, petit trésor ambulant.

Comme ce rubis, nous avons nous aussi des trésors, en tant que chrétiens… mais des trésors parfois laissés à l’état brut, mat : ils sont beaux, mais s’ils étaient mieux taillés, si l’on voyait mieux leurs facettes, qu’est-ce qu’ils viendraient illuminer notre foi ! Et on aurait peut-être plus envie de les exposer ou de les porter partout avec nous…

Pour nous préparer à Pâques, je vous propose une série de prédications centrées sur la Croix où meurt Jésus. Cette croix est au centre de notre foi chrétienne, Martine l’a rappelé, au centre de notre spiritualité évangélique : nous chantons l’Agneau immolé, son sacrifice, celui qui nous libère par son sang, qui nous rachète à la croix, etc.

Jésus est mort pour nous à la croix : qu’y a-t-il vraiment derrière cet événement ? Je vous propose de tailler ensemble la pierre pour en faire ressortir quelques facettes, à l’aide des images qu’utilise la Bible pour nous aider à saisir davantage la richesse insondable de l’amour de Dieu démontré à la Croix.

Parce que dans la Bible, la Croix est vraiment un trésor aux mille facettes, avec certaines plus larges que d’autres, j’en ai retenu 4, les 4 sens les plus courants, qu’on verra sur 4 dimanches… Il se trouve que j’ai croisé en formation cette semaine un collègue, Matthieu Moury, pasteur à l’église évangélique baptiste d’Argenteuil, qui fait lui aussi une série sur les 4 sens principaux de la croix (les mêmes ), et il m’a offert ce moyen mnémotechnique des 4 R de la Croix :

Rituel (sacrifice)

Réconciliation

Rachat (ou rançon)

Reconquête (la dimension de victoire)

Autant d’images qui s’articulent pour enrichir notre compréhension de ce que Jésus a accompli pour nous. Attention, ce sont des images, forcément partielles…

Pour commencer la série, prenons le sens du Rituel, du sacrifice, avec un extrait de la lettre de Paul aux Romains – Martin Luther, un des pionniers de la Réforme protestante, disait que c’était le cœur de la lettre, et même de la Bible entière !

Lecture biblique : Lettre aux Romains 3.21-26

21 Mais maintenant, indépendamment de la loi, la justice de Dieu a été manifestée ; la loi et les prophètes lui rendent témoignage. 

22 C’est la justice de Dieu par la foi en Jésus Christ pour tous ceux qui croient, car il n’y a pas de différence : 23 tous ont péché, sont privés de la gloire de Dieu, 24 mais sont gratuitement justifiés par sa grâce, en vertu de la délivrance accomplie en Jésus Christ. 

25 C’est lui que Dieu a destiné à servir d’expiation par son sang, par le moyen de la foi, pour montrer ce qu’était la justice, du fait qu’il avait laissé impunis les péchés d’autrefois, 26 au temps de sa patience.

Il montre donc sa justice dans le temps présent, afin d’être juste tout en justifiant celui qui vit de la foi en Jésus.

Paul trace une ligne dans l’Histoire : il y a un avant et un après Jésus-Christ. Plus précisément, un avant et un après sa mort.

          La croix comme sacrifice

La Croix est ici présentée comme un sacrifice, une expiation. Dans l’Antiquité, la religion, juive ou païenne, est centrée sur le rituel de sacrifice, sur ce qu’on offre à la divinité. Le sacrifice est comme un cadeau : pour l’honorer, la remercier pour son aide ou encore pour se faire pardonner… Il est donc assez naturel de comprendre la mort de Jésus sur la croix comme un sacrifice en notre faveur pour nous pardonner. A chaque fois qu’on parle du sang de Jésus dans la Bible ou dans nos chants, on évoque le sacrifice : la crucifixion tue par asphyxie, il n’y a quasiment pas de sang versé.

Paul parle d’expiation, un type de sacrifice nécessaire au pardon dans les rituels juifs. Expier une faute, dans la loi juive, c’est encaisser la colère de Dieu face à notre injustice. Dans le rituel du sacrifice d’expiation, le croyant reconnaît qu’il mérite la colère de Dieu – et par convention entre Dieu et son peuple, on considère que l’animal qui meurt, meurt à la place du croyant, se substitue à lui pour encaisser la colère de Dieu et donner au croyant une nouvelle chance. Il y a un transfert symbolique de culpabilité. Et cela évite de tuer tous les coupables (il ne resterait plus grand monde !).

Remarque: Ne soyons pas choqués aujourd’hui de la place donnée à l’animal dans ce type de sacrifice : c’était relativement rare et une partie de l’animal était consommée. C’était aussi une occasion de manger de la viande dans une société bien plus frugale que la nôtre. Le traitement de l’animal est sûrement bien plus violent dans nos sociétés occidentales modernes qu’à l’époque. 

Dans la mort de Jésus sur la croix, les disciples reconnaissent l’équivalent de ces sacrifices. Mais à la différence d’un animal, il y a un lien, une solidarité charnelle entre Jésus et nous : Dieu s’est fait homme, humain, de notre chair, frère de chacun d’entre nous – lorsque Jésus meurt sur la croix, le transfert de notre culpabilité est bien plus naturel, et valide, que sur un animal. C’est un homme qui paie pour l’humanité. Un innocent (même ses adversaires en convenaient) qui encaisse à notre place la colère de Dieu pour nos injustices. Paul précise même que ce sacrifice en Christ est le seul à être valide : tous les sacrifices qui ont eu lieu auparavant n’étaient efficaces que parce qu’ils pointaient vers le sacrifice de Jésus – seul un humain peut encaisser pour l’humanité. Le système de sacrifices animaux, c’était le temps de la patience de Dieu, où il montrait aux croyants le besoin de payer pour le mal commis, un peu comme une simulation avant l’expérience réelle.

          L’image de la justification

Très logiquement, puisqu’on parle de colère, d’injustice et de justice, Paul glisse vers le vocabulaire juridique de la justification, c’est-à-dire le moment où le juge déclare que l’accusé est innocent, juste, en règle. Si on quitte le monde du rituel, la salle du temple, pour entrer dans une salle de tribunal, le monde du procès, on a Dieu, nous, Jésus et Satan. J’extrapole un peu par rapport au texte de Romains 3.

Dieu : fondateur de la justice, roi, maître, arbitre, juge.

Nous : créés par Dieu, désirés par Dieu, et pourtant rebelles, transgresseurs de la justice de Dieu, coupables – et condamnables.

Satan : accusateur vicieux qui fait tout pour nous séparer de Dieu – d’un côté en nous invitant au mal, de l’autre côté en nous accusant devant Dieu (“comment peux-tu les aimer, regarde-les, ils sont tous pourris, nuls… ce sont des cas désespérés, ces humains !”)

Or Dieu est justice tout autant qu’il nous aime. Même par amour, il ne peut pas aller à l’encontre de son essence : il est justice ! Il ne peut pas regarder ailleurs ! Mais il ne peut pas non plus se résoudre à nous condamner, à nous perdre, parce que son amour pour nous est tout autant enraciné dans son être.

Sa solution au dilemme : aller lui-même, en la personne de Jésus, prendre la place des accusés et subir la peine juridique qu’ils méritent – la condamnation à mort. C’est comme si le juge se dédoublait pour à la fois rester juge et prendre la place des condamnés, en encaissant tout le poids de la sentence. Il est ainsi juste tout en justifiant le coupable : c’est le résumé de l’Evangile – Dieu trouve une solution pour respecter à la fois son exigence de justice et son amour ardent envers nous : c’est lui, en devenant un être humain, qui va assumer le poids de nos fautes. C’est seulement ainsi qu’il peut être à la fois juste et miséricordieux.

Dans la salle du Temple dans le tribunal, il ne reste aux coupables qu’à croire – croire que Jésus, Dieu fait homme, est mort pour nous, c’est-à-dire en notre faveur, et même plus, à notre place – il s’est substitué à nous pour nous offrir une nouvelle chance.

Le poids du péché

Le point commun entre le sacrifice d’expiation et le procès, c’est l’idée que nous méritons la mort parce que nous avons péché : tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu, dit Paul au v.23. Être privé de la gloire de Dieu, c’est être privé de sa présence, de son amour, de sa vie – c’est être coupé de la source, condamné à une aridité morbide.

La notion de péché est assez mal perçue aujourd’hui, comprise comme “une notion archaïque inventée par les judéo-chrétiens pour maintenir les foules dans l’asservissement moral, un levier de contrôle religieux qui s’appuierait sur une vision du monde en noir et blanc : le Bien / le Mal, alors que nous modernes avons compris que nos vies – comme l’a si bien dit Jean-Jacques Goldman – sont souvent « entre gris clair et gris foncé ». Le développement de la psychologie, de l’accompagnement, nous invite plutôt à accepter nos défauts, nos limites, sans se charger d’une culpabilité qui nous entrave et nous rend malheureux. Par pragmatisme, puisque nous sommes tous imparfaits, nous sommes invités à abandonner l’idéal culpabilisant de la perfection ou de la sainteté, pour assumer nos imperfections et défricher à tâtons notre chemin dans un monde complexe. Pour beaucoup, le péché n’existe pas, ou plus. On fait ce qu’on peut, avec notre histoire, nos circonstances de vie…”

En théorie ! parce qu’en réalité, la culpabilité demeure centrale – c’est le fondement de notre système de justice, bien sollicité aujourd’hui avec des plaintes et des procès qui se multiplient. Le fondement de la lutte pour l’égalité, le respect, l’inclusion – c’est bien au nom de la justice, et contre l’injustice personnelle ou collective, que les slogans de colère sont scandés dans la rue et sur les réseaux, ou que l’on boycotte telle personnalité politique, tel artiste…

Pourquoi être pécheur nous condamne-t-il à mort ? Imaginez notre âme comme une belle nappe en lin blanc, immaculée – à chaque fois que nous commettons le mal, nous renversons de l’encre sur cette nappe. Franchement, peu importe la quantité d’encre ou sa couleur, peu importe le nombre de tâches : la nappe est fichue ! inutilisable ! laide ! Vous ne pouvez pas accueillir vos invités d’honneur avec cette nappe sur la table !

Spirituellement, nous ne pouvons pas accueillir Dieu avec une âme entachée : ça le dégoûte trop ! parce que Dieu, bien plus que nous, est attaché à la justice. A ce qui est beau et bon. Bien plus que nous, Dieu est sensible aux dégâts que nous causons – sur nous-mêmes et sur les autres. Quand on parle de colère de Dieu, c’est la colère du Père, qui ne supporte pas qu’on touche à un cheveu de ses enfants !

La notion biblique du péché nous invite à reconnaître que nous ne sommes pas que des victimes : statistiquement, 100% de victimes c’est improbable. En réalité, nous sommes tous d’une manière ou d’une autre, entachés par le péché, suscitant la colère de Dieu face aux dégâts commis. Même si dans l’épaisseur de la vie humaine, nos fautes n’ont pas le même impact ni le même ancrage, tous nous sommes entachés, indignes d’être en présence de Dieu.

 

          La Croix, filtre de justice  

A la Croix, le Christ porte le poids moral de nos fautes, il assume à notre place notre responsabilité devant Dieu, comme s’il payait le prix des nappes abîmées, des âmes tordues et blessées. Comment savons-nous que le prix payé a couvert nos dettes ? Jésus est ressuscité, il est sorti de prison – son passage dans la mort est suffisant pour couvrir nos manquements. Sa justice, son innocence, sa perfection, ont tout couvert.

Lorsque nous croyons en Christ, par la foi nous sommes « couverts » devant Dieu, recouverts de cette innocence gagnée par le Christ. Vous connaissez Snapchat ? Une application qui permet notamment de mettre des filtres sur nos photos et vidéos, et c’est très bluffant. Une forme qui se surimpose intelligemment sur le visage photographié. Lorsque nous croyons en Christ, par la foi nous choisissons ce « filtre » d’innocence et de justice – et Dieu ne voit plus nos taches, nos distorsions, nos médiocrités : tout est couvert par l’innocence du Christ. La démarche de foi implique donc de notre part une repentance (encore un vieux mot mal accepté), le fait de reconnaître que nous méritons d’être sur le banc des accusés, et la confiance – le fait de croire que Jésus a pris notre place sur ce banc, et en prison, et dans la mort, pour que nous soyons déclarés justes et dignes de vivre avec Dieu.

Qu’est-ce que ça change pour nous ? La Croix est l’assurance que Dieu a pardonné nos fautes – a pardonné. C’est fait ! Une fois pour toutes ! Le Christ est entré dans la mort et il en est sorti, il nous ouvre le chemin des retrouvailles avec Dieu. Toutes les fois où nous sommes indignes de Dieu (les moments horribles qui hantent notre conscience, les moments mesquins qui égratignent notre quotidien, les moments ignorés où nous nous empêtrons dans nos taches et étalons le mal) toutes ces fois où nous sommes indignes de Dieu, nous pouvons regarder à la Croix. Le seul filtre qui marche pour gommer vraiment la laideur du péché. A la Croix le Christ a tout encaissé – nous pouvons maintenant vivre debout, soulagés de ce poids de culpabilité, debout devant Dieu qui nous redresse la tête et nous invite dans la richesse glorieuse de sa présence.




Images de Dieu

Prédication de Guy Lacassagne. 

Nous allons aujourd’hui nous pencher sur le premier livre de la Bible, la Genèse, et plus particulièrement, dans le chapitre 1, nous allons nous intéresser à la création de l’homme et de la femme.

Quelques versets, pris dans leur sens littéral introduisent, à mon sens, des incompréhensions, voire des erreurs d’interprétation, et souvent, prêtent le flanc à la critique des non croyants.

Cela nous permettra de constater que lorsque nous étudions la Bible, il faut savoir parfois, s’extraire de son sens purement littéral, surtout que nous en lisons des traductions, pour se pencher sur ce que Dieu nous transmet et ce qu’il attend de nous.

Maintenant que j’ai bien planté le décor, et que j’espère vous avoir alléché avec un préambule un peu rebelle, nous allons voir de quoi il s’agit.

Genèse 1.24-27 : Je vais lire dans la version Parole de Vie

24/ Dieu dit : « que la terre produise toutes sortes d’animaux : animaux domestiques, petites bêtes et animaux sauvages de chaque espèce ! »

Et cela arrive.

25/ Ainsi, Dieu fait les différentes espèces d’animaux : les animaux sauvages, les animaux domestiques et les petites bêtes.

Dieu voit que c’est une bonne chose

26/ Dieu dit : « Faisons les êtres humains à notre image, et qu’ils nous ressemblent vraiment ! Qu’ils commandent aux poissons dans la mer, aux oiseaux dans le ciel, aux animaux domestiques et à toutes les petites bêtes qui se déplacent sur le sol ! »

27/ Alors Dieu crée les humains à son image, et ils sont vraiment à l’image de Dieu.

Il les crée homme et femme.

 

Toutes les versions françaises s’accordent sur cette traduction, notamment cette création « à son image », qui nous intéresse ce matin. Je suis même allé voir les versions anglaises et espagnoles, miracle de la technologie, qui traduisent respectivement par « image » et « imagen ».

On parle donc bien de création à l’image de Dieu.

Mais, le verset 27, traduit littéralement nous dit plutôt :

Il créa, Dieu, l’Adam comme son image

Comme l’image de Dieu il le créa

Mâle et femelle, il les créa

 C’est subtil, mais être crée à l’image et comme son image, ce n’est pas tout à fait la même chose.

C’est ce terme d’image qui me pose problème et je m’en explique.

A son image, c’est lui ressembler.

Comme son image, c’est être comme si l’être humain était Dieu. Nous allons revenir sur cette subtilité.

Tout d’abord, si nous sommes créés à l’image de Dieu, à la ressemblance de Dieu, de quelle image s’agit-il ?

Je veux dire, si on prend le sens image au sens premier, image, dessin, représentation, photo, quelle image est la bonne ?

Est-ce que c’est celle-ci, très traditionnelle de Dieu au plafond de la chapelle Sixtine, ou est-ce celle-ci, Morgan Freeman dans le film Bruce tout puissant. Au-delà du talent de cet acteur, choisir Morgan Freeman n’est évidemment pas neutre et on comprend bien le désir de surprendre, à minima, dans ce film.

Est-ce enfin l’image véhiculé par ce livre, écrit par un chrétien, où Dieu est représenté par une femme noire ? Là aussi, sortir des sentiers battus fait partie de l’alchimie du narratif.

On comprend aussi pour les écrivains ou les scénaristes ce besoin d’être dans l’air du temps.

Il parait raisonnable donc de se poser la question, stricto sensu, quelle est l’image de Dieu ?

Un Dieu, qui, je le rappelle, dès la Genèse, nous interdit de faire des statues, ou des reproductions de lui.

En réalité, on se trompe si on ne lit dans ce terme « image » que l’idée d’une copie.

Ce n’est pas le terme hébreu qui est en cause, ou sa traduction. La Bible emploie bien le terme d’image, repris dans d’autres langues comme nous l’avons vu.

Mais ce terme, dans l’antiquité, évoque plutôt l’idée d’une représentation, d’une statue.

Je m’explique : L’empereur, le roi, faisait installer des statues de lui à travers son empire pour rappeler sa présence, son autorité. C’était l’image de l’empereur régnant sur ses terres, ou qu’il soit et ses sujets se prosternaient devant cette statue comme s’ils se prosternaient devant l’empereur lui-même. Ce n’était pas la statue qui avait un sens, c’était ce qu’elle représentait.

Un peu comme si aujourd’hui, des soldats se mettait au garde à vous devant une photo du président Macron.

On comprend mieux dès lors la traduction littérale dont nous avons parlé tout à l’heure, être comme l’image de Dieu. C’est ce sens-là qu’il faut retenir pour image : Celui de représentation.

Et nous sommes donc les images représentants Dieu sur cette planète.

Nous ne sommes pas faits comme lui, nous sommes faits comme son représentant.

Par exemple, l’ambassadeur de France représente notre pays à l’étranger, ou bien, l’équipe de France, choisissez celle qui vous convient le mieux, est l’image de la France lors des compétitions.

Une autre piste qui va dans ce sens de représentation, plus que d’image, se trouve à la suite des versets 26 et 27 :

Dieu dit : Faisons les humains comme notre image, selon notre ressemblance, pour qu’ils dominent sur les poissons des mers…

En quoi être une image est importante pour dominer sur quelque chose ou quelqu’un? Par contre, être le représentant de Dieu est très utile pour ça.

Je vous livre une traduction très libre de ce verset, et personnelle : Etablissons les humains comme nos représentants pour qu’ils dominent sur les différents animaux.

Par ailleurs, il n’est pas difficile de constater, au grand dam d’un certain courant de pensée actuel, qui si nous sommes bien physiquement une espèce comme les autres, nous seuls avons la conscience de notre mort, nous seuls sommes capables de penser, de créer, de philosopher.

Nous sommes bien l’espèce dominante, non par notre force, mais par notre intelligence et notre adaptabilité.

Et maintenant, que faisons-nous de cette analyse, qu’est-ce qu’elle induit pour nous, au quotidien ?

Et bien, notre statut vient de changer.

Pour être une image, si on y réfléchit bien, il suffit d’être photogénique, notre époque Instagram nous le prouve tous les jours.

En revanche, pour être représentant de Dieu sur terre, ça nécessite un peu plus. Cela implique des responsabilités, cela exige de prendre conscience que nous sommes, au quotidien, des créatures de Dieu, mais pas n’importe quelle créature, nous sommes les ambassadeurs, les témoins de Dieu sur cette planète.

Dès le début, dès la création, Dieu décide de se servir de nous pour régenter sa création. Ce n’est pas sans rappeler cette parabole de Jésus ou le maitre envoi des vignerons s’occuper de la vigne.

Dieu crée, et Dieu envoi des contremaitres pour faire tourner la boutique. C’est nous.

Cela dit, comme souvent dès qu’il s’agit de l’être humain dans son rapport à la création, ça n’a pas fonctionné aussi bien que prévu, et comme dans la parabole du vigneron que j’ai cité, Dieu a été obligé d’envoyer son fils Jésus, l’ambassadeur suprême.

Mais Jésus ne nous a pas mis au placard pour autant, Jésus a au contraire décidé de parfaire ce rôle de représentant, il nous a envoyé comme témoin.

Nous pouvons lire dans Les actes des apôtres, au chap 1.6-8, ces paroles de Jésus :

6/ Alors, les apôtres réunis lui demandèrent : Seigneur, est-ce en ce temps que tu rétabliras le royaume d’Israël ?

7/ Jésus leur répond :

Vous n’avez pas besoin de connaître le temps et le moment ou ces choses doivent arriver. C’est mon père qui décide de cela, lui seul à le pouvoir de le faire.

8/ Mais vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit Saint qui descendra sur vous.

Alors, vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’au bout du monde.

 

Témoins, ambassadeurs, représentants, images, voici ce que le Seigneur nous demande.

Alors, être témoins, qu’est-ce que cela signifie ?

Le Larousse est notre ami pour avoir une définition claire :

« Personne qui a vu ou entendu quelque chose, et qui peut éventuellement le certifier, le rapporter. »

Il y a donc deux éléments importants pour être un bon témoin :

– Avoir vu, ou entendu quelque chose

– Pouvoir le rapporter ou le certifier.

Pour le premier point, Jésus lui-même nous donne le mode d’emploi, pendant qu’il témoignait personnellement :

Marc 1.14-15 :

Alors Jésus va en Galilée. Il annonce la Bonne nouvelle de Dieu

Et il dit : « Le moment décidé par Dieu est arrivé, et le Royaume de Dieu est tout près de vous. Changez votre vie et croyez à la Bonne Nouvelle ».

Croyez à la Bonne Nouvelle.

Si vous ne croyez pas à la Bonne Nouvelle, si vous n’êtes pas sûr, si vous doutez, vous ne pourrez pas rapporter ou certifier que Jésus est le fils de Dieu venu sur terre pour nous sauver.

Un petit aparté dont il faut tenir compte : Le témoin, il témoigne. Ce n’est pas lui qui mène l’enquête à la place du policier ou du juge.

Nous sommes des témoins, pas des convertisseurs. Ne nous usons pas à vouloir convaincre à tout prix. C’est Dieu qui nous appelle à lui.

Frères et sœurs, c’est important.

Il est écrit clairement que Dieu nous a établi gérant de sa création, représentant de son pouvoir, témoin du salut à travers son fils Jésus.

Gérant de sa création, c’est-à-dire que nous sommes les jardiniers de cette planète dont il faut préserver tant que faire ce peu le bel ordonnancement.

Représentant de Dieu, c’est-à-dire qu’en toute circonstance, nous devons avoir conscience que nous devons paraitre comme tel.

Témoin du christ, individuellement, ou collectivement, en tant qu’Eglise, nous avons le devoir d’annoncer la bonne nouvelle du salut auprès de nos proches.

Pour tous ces rôles, nous ne sommes que ce que nous sommes avec nos doutes, nos peurs et nos imperfections mais n’oublions pas que nous avons avec nous l’arme fatale en la personne de l’Esprit Saint que Jésus nous a envoyé comme promis dans le Livre des Actes que nous venons de lire.




La tentation

Regarder le culte ici.

Un des sujets délicats dans la vie chrétienne, et dans la vie en général, c’est  la tentation. La tentation. C’est quand nous faisons face à une proposition (de pensée, d’action…) qui fait écho en nous au point que nous nous retrouvons tiraillés entre ce que nous voudrions être ou faire dans l’idéal et ce que nous avons envie de faire sur le moment. Par exemple, on veut faire attention à sa santé, mais à l’instant T, on se dit que cette petite part de gâteau est quand même très appétissante. Ou bien, on veut réussir ses études, mais regarder un énième épisode de série sur Netflix paraît beaucoup plus attirant que se replonger dans ses fiches.

Cela dit, tout n’est pas tentation ! Quand on « se laisse tenter » par une deuxième tasse de thé, à moins d’être allergique, c’est un abus de langage ! La vraie tentation a un impact négatif si on y cède, à court ou long terme, sur nous et/ou sur notre entourage.

Mais malgré les conséquences négatives et notre volonté de bien faire, la plupart du temps, la tentation est extrêmement puissante, et nous déstabilise sans qu’on s’y attende. D’où le fait qu’on en parle difficilement, car elle révèle nos faiblesses et nos travers. Pour mieux en comprendre certains mécanismes afin de mieux les déjouer, je vous propose de nous tourner vers la première histoire de tentation dans la Bible.

Nous sommes dans le jardin d’Eden, au moment de la création : ne vous laissez pas perturber par la forme imagée du récit, Dieu a souvent aux images pour nous transmettre des vérités complexes.  Et puis, je laisse de côté tout ce qui ne concerne pas la tentation… frustrant avec un tel texte, mais on peut parler après si vous voulez !

Lecture biblique : Genèse 2.7-9, 15-17, 3.1-7

Il y a d’abord un cadre :

7 Le Seigneur Dieu prit de la poussière du sol et en façonna un être humain. Puis il lui insuffla dans les narines le souffle de vie, et cet être humain devint vivant. 

8 Ensuite le Seigneur Dieu planta un jardin au pays d’Éden, à l’orient, pour y mettre l’être humain qu’il avait façonné. 

9 Il fit pousser du sol toutes sortes d’arbres à l’aspect agréable et bons pour se nourrir. Il mit au centre du jardin l’arbre de la vie, et l’arbre qui donne la connaissance de ce qui est bon et de ce qui est mauvais.

Dieu est clairement le créateur, l’artiste – sa puissance n’a d’égale que sa bonté : il plante des arbres beaux aux bons fruits. Et, devant ce Dieu, l’être humain n’est que poussière, c’est uniquement grâce à Dieu qu’il vient à exister.

15 Le Seigneur Dieu prit l’être humain et le plaça dans le jardin d’Éden pour qu’il cultive la terre et la garde. 

16 Il lui ordonna : « Tu te nourriras des fruits de n’importe quel arbre du jardin, 17 sauf de l’arbre qui donne la connaissance de ce qui est bon et de ce qui est mauvais. Le jour où tu en mangeras, tu mourras. »

Dieu place l’être humain dans ce beau jardin avec une responsabilité importante : prendre soin de ce que Dieu a créé. Et dans la charte de fonctionnement, deux articles : l’être humain peut profiter des fruits du jardin (il y a une dimension d’abondance, de plaisir : il peut manger de n’importe quel arbre, créé beau et bon).  Deuxième article : une exception, une limite est posée – tout, sauf 1 arbre – avec la pire des conséquences. On ne sait pas si c’est le fruit qui fait mourir, ou si c’est la transgression de cette limite qui fera mourir. On ne sait pas si la mort est immédiate… ni si la mort existe déjà, mais l’article est très clair : pas touche !

Ensuite, le récit raconte la création de la femme, et nous avons le tableau de ce couple Adam et Eve, en communion avec Dieu, en communion l’un avec l’autre, paisibles dans un jardin luxuriant.

1 Le serpent était le plus rusé de tous les animaux sauvages que le Seigneur avait faits.

Notez que le serpent est un animal, c’est-à-dire une créature, pas l’égal de Dieu. A ce moment-là, on ne sait pas qui est ce serpent. Dans le Nouveau Testament, le serpent est associé au Diable, au tentateur, celui qui veut éloigner de Dieu – et de fait :

Il demanda à la femme : « Est-ce vrai que Dieu vous a dit : “Vous ne mangerez d’aucun fruit du jardin” ? » 

2 La femme répondit au serpent : « Nous pouvons manger les fruits du jardin. 3 Mais pour les fruits de l’arbre qui est au centre du jardin, Dieu nous a dit : “Vous n’en mangerez pas, vous n’y toucherez pas, de peur d’en mourir.” » 

4 Le serpent répliqua : « Pas du tout, vous ne mourrez pas ! 5 Mais Dieu le sait bien : dès que vous en aurez mangé, vous verrez les choses telles qu’elles sont, vous serez comme lui, capables de savoir ce qui est bon et ce qui est mauvais. »

Le serpent n’y va pas de manière frontale, mais il commence subtilement, en caricaturant les propos de Dieu, en mettant le focus sur ce qui est interdit, comme s’il n’y avait que ça, alors que Dieu au contraire a donné l’abondance à l’humanité. Le serpent pousse la femme à ne voir que ce qui manque, en oubliant tout ce qu’elle a déjà, en positif. Comme s’il voulait qu’on retienne de Dieu le fait qu’il interdit, qu’il prive, qu’il refuse – alors que Dieu s’est montré profondément généreux et bienfaisant.

La femme a d’abord un bon réflexe, elle revient à la parole d’origine : il ne faut pas manger de ce fameux arbre, et elle ajoute même qu’il ne faut pas le toucher. Dieu n’en avait pas parlé, mais ça paraît sage ! pour ne pas être tenté de le manger, mieux vaut ne pas toucher. Plus on s’éloigne de ce qui peut tenter, mieux c’est.

Mais le serpent continue avec ses calomnies insidieuses : Dieu vous a menti, il cherche simplement à se protéger des rivaux que vous pourriez devenir. Rappelons-nous l’écart entre Dieu créateur et l’être humain fait de poussière… la rivalité est quand même peu probable ! mais le serpent fait miroiter la plénitude, la totalité, l’épanouissement ! Sous la surface, le serpent dresse le portrait d’un Dieu insécure, égoïste, tyrannique et manipulateur – un Dieu dont on se passerait bien !

6 La femme vit que les fruits de l’arbre étaient agréables à regarder, qu’ils devaient être bons et qu’ils donnaient envie d’en manger pour devenir plus intelligent. Elle en prit un et en mangea. Puis elle en donna à son mari, qui était avec elle, et il en mangea, lui aussi. 

Dans les étapes de son regard, on sent qu’elle se laisse happer par la proposition du serpent. Donc elle consomme, et fait consommer. L’homme lui est resté silencieux, on ne sait pas pourquoi, mais il suit – l’engrenage est lancé.

7 Alors ils se virent tous deux tels qu’ils étaient, ils se rendirent compte qu’ils étaient nus. Ils attachèrent ensemble des feuilles de figuier, et ils s’en firent chacun une sorte de pagne.

C’est une grosse déception, non ? Tout ce qu’ils ont appris, c’est l’évidence : ils sont  nus. La belle affaire !

La réaction de Dieu est encore à venir : la transgression aura des conséquences que l’on subit encore aujourd’hui. L’être humain devient mortel, et surtout un fossé énorme a fendu la relation avec le Dieu vivifiant. Mais même avant la réaction de Dieu, ils ont déjà perdu : ils ne sont pas devenus des dieux. Et ce qu’ils ont appris, n’est même pas utile ou intéressant : ils sont nus. Et ? ils ont honte, ils cherchent à se couvrir. Non seulement ils n’ont pas gagné la plénitude, mais ils ont perdu la simplicité d’être ensemble.

Les ressorts de la tentation

Derrière cet acte unique, on voit différentes dynamiques qu’on retrouve souvent dans nos différentes tentations.

Le premier élément, c’est la transgression du cadre que Dieu a donné. Le serpent invite clairement à désobéir, à mépriser la parole de Dieu. Derrière cette désobéissance, c’est la confiance envers Dieu qui est en jeu : est-ce qu’on croit que Dieu dit la vérité (ou qu’il ment pour nous manipuler) ? Et, s’il dit la vérité, est-ce qu’on croit qu’il a nos intérêts à cœur ? Rien que les extraits du récit de création nous montrent la bonté de Dieu qui donne responsabilité et privilèges à l’être humain. Mais le serpent réussit à semer le doute sur les intentions de Dieu.

Derrière cette confiance mise à mal, il y a la tentation du raccourci. La tentation de vouloir savoir sans Dieu, et donc décider et vivre sans lui – au lieu d’être en image de lui et en vis-à-vis. Dieu n’a pas donné d’explications à son interdiction, mais j’ai l’impression à partir du reste de la Bible que Dieu avait comme projet que l’être humain goûte la création, et goûte à l’échange avec Dieu, à la sagesse de Dieu donnée pas seulement comme un conseil mais dans un dialogue, un partenariat, une amitié. Dans ce court-circuit, l’être humain évacue Dieu et… veut prendre sa place.

Et là nous arrivons à l’orgueil, un orgueil stérile et contre-productif… une idolâtrie de nous-mêmes dont nous n’arrivons pas à nous dépêtrer, mais qui n’a aucun sens. Regardez la planète Terre : elle s’épanouit grâce à la lumière et la chaleur du soleil, non ? quel sens cela aurait-il pour la Terre d’arrêter de graviter autour de lui, en proclamant son indépendance ? pourra-t-elle devenir son propre soleil ? c’est dans l’échange, la différence, le vis-à-vis, que s’épanouit la planète au sein d’un écosystème – dépendre du soleil n’est pas une honte ou une faiblesse, mais une richesse extraordinaire !

Il y a bien des formes de tentations, et la transgression de la limite en est une forme : voler, mentir, convoiter la femme d’un autre ou une autre femme que la sienne, tuer, etc. Mais parfois la tentation c’est de délaisser l’essentiel au profit du secondaire, se tromper de priorité ou ne pas être au rendez-vous. Parfois c’est céder à l’appel du toujours plus : ton bonheur sera dans… plus ! plus d’argent, plus de voyages, plus d’objets, plus de statut… mais on a beau croquer, le fruit se révèle vide et la déception entame ce que nous avons déjà de beau.

La Bonne Nouvelle en Christ

Ce qui est décourageant, c’est que comme cette première femme, nous avons beau savoir ce qu’il est bon de faire, nous tombons régulièrement dans le panneau.

Mais la Bonne Nouvelle qu’apporte l’Evangile, c’est la vie de Jésus-Christ. Jésus, tenté lui-même à de multiples reprises – et sérieusement tenté, tenté par les raccourcis, par la facilité, par le pouvoir – n’y cède jamais. Toujours il résiste, toujours il revient à sa confiance en Dieu.

Au bout de son chemin, il y a la mort sur la croix – dont plusieurs dont le fameux serpent ont essayé de le détourner – la mort sur la croix où Jésus assume les conséquences de cette rupture entre nous et Dieu, les conséquences de nos transgressions, cette mort spirituelle et physique qui jette son ombre sur toutes nos réalités. Il pose ainsi les bases de notre réconciliation avec Dieu.

Mais Jésus ne reste pas dans la mort : sa sainteté l’emporte sur nos transgressions, sa puissance sur nos faiblesses, sa vitalité sur notre morbidité. Ressuscité, il offre son Esprit de vie à tous ceux qui se tournent vers lui, il partage avec nous, de l’intérieur, son ADN de sainteté, sa force pour marcher sur le même chemin que lui.

Les tactiques pour résister

Alors comment mieux résister aux tentations ? C’est quand même ça l’enjeu !

  • En amont :
    • Apprendre à connaître ses points de faiblesse & se protéger – en évitant de jouer avec le feu. On est tous différents, avec des talons d’Achille : notre responsabilité c’est de protéger ces points-là. Exemple : si le coca vous fait du mal parce que vous êtes diabétique, évitez le rayon ! si vous êtes fragiles face à l’argent, ne devenez pas trésorier !
    • En positif, il est essentiel de cultiver notre relation avec Dieu, pas seulement sa volonté (Eve connaissait assez bien la règle) mais Dieu lui-même. C’est quand même fou (mais nous tombons tous dans ce genre de folie) qu’elle ait pu croire que Dieu était moins que bon, sage, vivifiant. Et c’est cherchant la proximité avec Dieu, au quotidien, qu’on cultive cette confiance en lui qui nous permet de prendre du recul.
  • Pendant (de manière très générale) :
    • Temporiser au moins, prendre de la distance (parfois physiquement, sortir de la pièce ou éteindre son téléphone) pour se donner le temps de reprendre nos esprits.
    • Se méfier du mirage : comme toute publicité mensongère, la tentation fait miroiter une plénitude facile – à nous de prendre du recul pour voir ce que ça cache, l’envers du décor, les effets à long terme – notamment ce qu’on a à perdre.
    • Chercher les pensées de Dieu au lieu de réfléchir seul dans son coin. On aime bien prendre nos décisions tout seul, en comptant sur notre sagesse, notre bon sens, notre force, mais c’est là qu’on tombe dans l’impasse. Dans la prière, on invite Dieu à intervenir – ce que n’ont pas fait Adam et Eve.
    • Et puis ça peut être utile de sortir du silence et de la gêne pour parler à un proche, solliciter son écoute, son appui, sa prière afin de ne pas faire face seul – encore une fois, on voit bien que Dieu a créé le monde pour fonctionner en écosystèmes, en réseaux, et non pas chacun tout seul dans son coin.

La force de l’Evangile c’est d’apporter une réponse aux tentations auxquelles nous avons succombé : Dieu nous pardonne en Christ, il nous offre sa grâce, il nous relève la tête. Mais en nous accordant le modèle de la vie de Jésus et la force de son Esprit, il va plus loin : Dieu nous équipe pour apprendre à résister aux tentations et demeurer dans ce qui est juste et bon. Alors c’est un apprentissage, avec les défaillances que l’on sait, mais nous avançons par la grâce : ne nous laissons pas décourager, mais face à la tentation, cherchons le Dieu vivant, généreux, puissant, qui est déterminé à nous faire goûter la joie et le bonheur dans l’abondance de son amour.




Un Dieu qui nous cherche

Remarque préliminaire : prédication à l’occasion d’un culte de baptême.

Leno nous a témoigné de la façon dont Jésus s’est manifesté à lui la première fois, et comment ça a changé sa vie. Et puis la façon dont Jésus continue de se rendre présent quand c’est compliqué, par le biais d’autres personnes par exemple, pour le ramener dans ce vécu de l’amour de Dieu.

A qui Jésus vient-il proposer l’amour de Dieu ? Quelles conditions faut-il remplir pour bénéficier de cette offre ? faut-il être né dans une famille chrétienne ? être jeune ? Faut-il avoir compris un certain nombre de choses, ou remplir certaines conditions morales ?

Je vous propose de regarder ensemble un exemple de la façon dont Jésus, lorsqu’il était sur terre il y a fort fort longtemps, a montré l’amour de Dieu.

Quelques précautions d’usage : j’ai choisi cet exemple parce qu’il est exemplaire, mais il n’est pas exhaustif – pour mieux comprendre Jésus, il vaut mieux lire l’ensemble de sa vie : un Evangile c’est court ! celui de Marc p. ex. fait 16 petits chapitres. L’autre précaution, c’est de se rappeler qu’on est à une époque particulière : Jésus est né dans l’Antiquité, au sein du peuple juif qui est à l’époque dominé par le pouvoir de l’Empire romain, avec une espèce d’allergie à l’envahisseur du coup.

Je vais donc lire avec vous un extrait de l’Evangile de Luc, ch.19, et je vais le commenter au fur et à mesure pour qu’on suive bien ce qui se passe.

Lecture biblique : Luc 19.1-10

1 Jésus entra dans Jéricho et traversait la ville. 

2 Il y avait là un homme appelé Zachée ; c’était le chef des collecteurs d’impôts et il était riche. 

3 Il cherchait à voir qui était Jésus, mais comme il était de petite taille, il n’y arrivait pas à cause de la foule. 

On a Jésus, d’un côté, un prophète juif qui dit et accomplit des choses extraordinaires. Il est précédé par sa réputation : une foule cherche à le voir. Et puis, de l’autre côté, Zachée, lui aussi précédé par sa réputation mais pas la même !… Il est collecteur d’impôts : métier rarement apprécié, encore empiré par le fait que les impôts en question sont remis à l’empire romain. Zachée accepte donc de coopérer, collaborer, avec l’envahisseur. En plus, comme dans la plupart des métiers où on voit passer des grosses sommes d’argent, les collecteurs d’impôts sont connus pour leur corruption financière.

Zachée a beaucoup de pouvoir, et en même temps, il est peu respecté. S’il avait été apprécié, la foule lui aurait créé un chemin – sa petite taille n’est qu’un détail : le vrai problème, c’est que la foule lui tourne le dos et ne le laisse pas passer. D’un côté il fait de la peine, de l’autre on se dit qu’il y a peut-être une raison pour sa mise à l’écart.

Que va faire Zachée devant cette impasse ?

4 Il courut alors en avant et grimpa sur un arbre, un sycomore, pour voir Jésus qui devait passer par là. 

Franchement ? Vous imaginez votre inspecteur des impôts, le proviseur ou l’adjoint au maire faire ça ? En plus à l’époque on ne porte pas de pantalon : Zachée est en tunique – c’est très pratique pour grimper !!!

Ce qui est fou, c’est qu’il n’hésite pas à se ridiculiser pour voir Jésus. Il court, on sent qu’il réfléchit vite, qu’il a évalué la situation, et que voir Jésus est plus important que tout. Il sort complètement des codes, pour voir Jésus.

Et il n’y a pas de mise en scène, c’est désintéressé – à part ceux qui sont vraiment à côté de lui, qui va penser qu’un homme est en haut d’un arbre ? Il n’a pas la caméra à la main : #enmodejedéfielesconventions. Il y a quelque chose de très pur, de sincère, dans sa démarche.

Pendant ce temps-là, Jésus continue d’avancer.

5 Quand Jésus arriva à cet endroit, il leva les yeux et dit à Zachée : « Dépêche-toi de descendre, Zachée, car il faut que je demeure chez toi aujourd’hui. » 

6 Zachée se dépêcha de descendre et le reçut avec joie. 

Retournement de situation ! Zachée a vu Jésus passer, oui, mais surtout Jésus /voit Zachée : ça, c’était inattendu. En plus, Jésus connaît son nom, et il s’invite chez lui. Zachée voulait voir Jésus, celui dont on parle tant – j’ai grandi à Cannes et ça me rappelle les foules amassées à côté du tapis rouge lors du Festival du film, pour voir ne serait-ce que la cheville de la star ! Imaginez l’acteur qui se retourne, vous fixe dans les yeux : toi, (votre prénom), n’oublie pas, j’ai réservé pour qu’on mange ensemble ce soir.

Evidemment, Zachée est tout content ! Rien ne s’est passé encore, et en même temps c’est tellement révélateur : Jésus connaît Zachée, par son nom, et Jésus recherche Zachée. A la différence de la foule qui lui tournait le dos, Jésus veut passer un temps d’amitié avec lui. Il fait plus que l’inclure dans le groupe, il lui offre une soirée VIP.

Mais…

7 En voyant cela, tous critiquaient Jésus ; ils disaient : « Cet homme est allé loger chez un pécheur ! » 

Il n’y a pas de réseau social à l’époque, mais c’est le même principe ! Vous les voyez, les pouces baissés ? la désapprobation, les commentaires ? la ville s’enflamme : tous critiquent. Alors c’est vrai, Jésus est connu pour casser les codes, pour inclure ceux qui sont exclus : les femmes, les enfants, les étrangers, les malades, les marginaux… Mais un riche un peu louche ? Un collabo ? Un homme potentiellement corrompu ? Jésus cautionne, c’est ça ? Ce type d’association le discrédite complètement.

8 Zachée, debout devant le Seigneur, lui dit : « Écoute, Seigneur, je donne la moitié de mes biens aux pauvres, et si j’ai pris trop d’argent à quelqu’un, je lui rends quatre fois autant. » 

Jésus n’a même pas le temps de réagir, que Zachée se défend. J’imagine qu’ils sont encore en chemin, puisqu’il a entendu les critiques. Il est debout devant Jésus : étonnant détail ! On sent qu’il s’affirme pour se défendre : il se redresse, il relève le menton…

Zachée, selon lui-même, ne mérite pas sa réputation : il est honnête, très généreux (s’il y a une erreur, il rembourse 4 fois plus). C’est peut-être vrai, et dans ce cas-là, on a un homme innocent maltraité par les rumeurs de la foule. Ou on a juste un homme qui essaie de se défendre : vous avez déjà vu un homme politique admettre sa corruption ? « oui c’est vrai, je suis coupable à 100%… »

On n’a pas de moyen de le savoir… mais ce qui est intéressant, c’est de voir comment Jésus réagit.

9 Jésus dit à son propos : « Aujourd’hui, le salut est entré dans cette maison, parce que lui aussi est un descendant d’Abraham. 10 Car le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ceux qui étaient perdus. »

En fait, Jésus ne réagit pas du tout à la réponse de Zachée, il ne valide pas sa défense. Si Jésus connaissait le nom de Zachée à l’avance, on peut imaginer qu’il savait aussi la réalité.

Par contre, il affirme clairement que Zachée fait partie intégrante du peuple de Dieu, un descendant d’Abraham, pas que sur le plan génétique, mais aussi sur le plan symbolique : il fait partie intégrante de ceux que Jésus veut atteindre et à qui il veut montrer l’amour de Dieu. Même si Jésus a commencé son offre dans le peuple juif, son peuple, il a été très clair sur le fait que Dieu voulait rejoindre et aimer tous !

Dieu connaît Zachée et il le recherche, peu importe son degré d’innocence – de toute façon, Zachée n’est pas complètement innocent ! Qui peut prétendre être pur ? Et Jésus montre ainsi ce qu’est l’amour véritable ! Aimer, ce n’est pas seulement quand l’autre fait des choses bien… c’est vouloir son bien même quand il fait des erreurs ou commet des fautes.

C’est l’idée derrière cette phrase « slogan » de Jésus, qu’il dit régulièrement : le Fils de l’homme (une expression du prophète Daniel pour parler du Messie) est venu chercher et sauver ceux qui étaient perdus. Peu importe à quel point vous êtes perdu, ou vous vous sentez perdu, que ce soit un tout petit peu ou que vous soyez submergé, que vous soyez incompris ou franchement coupable, il y a une place pour vous dans le cœur de Dieu.

Zachée voulait voir Jésus, mais en fait c’est Jésus qui le cherchait ! parce qu’il voulait lui offrir l’amour de Dieu.

Alors qu’est-ce que signifie « sauver ce qui était perdu » ? Quelques mois après cette rencontre, Jésus va mourir. Il n’avait rien fait de mal, à part bousculer les conventions, mais il est mis à mort. En témoin martyr de la justice, en révolutionnaire spirituel, mais sa mort est aussi volontaire : il accepte d’être arrêté et d’offrir sa vie. Ses disciples ont compris qu’il avait, sur la croix, porté le poids de notre honte, de nos culpabilités, devant Dieu, comme s’il s’était sacrifié pour prendre notre place et assumer nos injustices.

Ca c’est ce qu’on comprend plus tard. Mais pour l’instant, Jésus ne rentre pas dans le détail, et il donne une image très simple du salut : le salut, c’est des retrouvailles avec Dieu. C’est partager un repas, être en amitié. Le pardon est essentiel, mais ce n’est qu’une étape pour être avec : dans vos relations, quand il y a eu un accrochage, vous vous réconciliez pour être ensemble, pour vous retrouver, pas pour le plaisir de vous réconcilier. Le salut c’est Dieu qui vient nous chercher à travers Jésus, pour être avec nous.

Dans cette rencontre, ce qui frappe c’est la façon dont Jésus discerne la recherche sincère, même non conventionnelle, de cet homme infréquentable. Et puis Jésus va au contact, il tient tête aux rumeurs, il assume – pour montrer que Dieu aime et recherche même celui que tous rejettent. Dieu aime et recherche même celui que tous rejettent. Zachée a cherché Jésus, mais il n’est pas seul dans la démarche : Jésus le cherchait aussi. Dans nos quêtes spirituelles, dans nos luttes, dans nos cheminements, on n’est pas seul à marcher – Jésus nous cherche aussi, Jésus nous cherche d’abord ! Et c’est tellement fort de se rappeler que Dieu n’attend pas qu’on le trouve, mais qu’il vient lui-même à notre rencontre, pour nous offrir son amour.

Zachée était en recherche active, Léno était en retrait actif, mais la même vérité demeure : Dieu vient à notre rencontre, à travers Jésus, pour nous offrir son amour, son amitié, la joie d’être avec lui, chaque jour et pour toujours.