Face à la souffrance

SouffranceLecture biblique : Romains 8.18-23

Dans ce chapitre de l’épître aux Romains, l’apôtre Paul parle de l’oeuvre du Saint-Esprit chez le croyant et des formidables promesses que nous recevons en Christ. Il fait de nous des enfants de Dieu ! Mais tout n’est pas forcément tout rose… et les promesses s’accompagnent aussi de souffrances, à l’image du Christ qui a souffert.

La réalité de la souffrance est incontournable. Pour tous, de différentes manières. Et quand on y est confronté se posent toujours les mêmes questions… Pourquoi ? Comment la comprendre ? L’accepter ? L’endurer ?

Voici quelques éléments de réponse proposés par l’apôtre Paul.

La souffrance n’aura pas le dernier mot

En premier lieu, Paul compare nos souffrances présentes à la gloire à venir. Pourquoi ?

Non pas pour faire un lien entre les deux. Comme si nos souffrances d’aujourd’hui nous feraient mériter la gloire à venir. Plus on souffrirait, plus on recevrait de gloire… Cette pensée doloriste n’est pas biblique. Il n’y a pas chez Paul de fascination pour la souffrance comme il a pu y en avoir dans certaines périodes de l’histoire de l’Église.

Mais il y a une assurance qu’il met en balance avec la souffrance : c’est la gloire à venir. Et là, quand on compare les deux, il n’y a pas photo ! Et l’apôtre Paul a eu son lot de souffrances, de tous ordres. Il a connu la prison à cause de sa foi. Il a souffert d’un mal incurable dont Dieu ne l’a pas guéri, malgré ses nombreuses prières. Ce ne sont donc pas les paroles d’un privilégié de la vie, préservé de toute souffrance, mais d’un homme de foi.

Remarquez qu’il ne s’agit pas tellement de trouver un sens à la souffrance mais de comprendre qu’elle n’aura pas le dernier mot. Il y aura un après la souffrance. Il y a une espérance glorieuse qui peut nous aider à endurer la souffrance aujourd’hui. Sans l’expliquer. Sans la justifier. Sans la minimiser.

Souvenons-nous que la réponse de Dieu au mal, et donc aussi à la souffrance et la mort, c’est la venue de son Fils. Pour répondre à notre souffrance, Jésus-Christ a souffert comme nous. Il a souffert pour nous. Il est mort… et il est ressuscité. Et parce que la mort elle-même a été vaincue, la souffrance n’aura pas le dernier mot. C’est l’espérance de la gloire.

La création entière souffre

Paul élargit ensuite la perspective : c’est la création toute entière qui souffre !

La création qui souffre, c’est l’humanité traversée par les guerres, les famines, les catastrophes, les injustices… mais c’est aussi aujourd’hui la terre qui souffre du traitement que l’homme lui fait subir (pollution, surexploitation, etc…). Déjà la Genèse laissait entendre que l’apparition du péché avait provoqué des dérèglements au sein même de la création, rendant la nature hostile à l’homme : « il produira pour toi épines et chardons. » (Gn 3.18)

Mais c’est indéniable, les propos de Paul ont pris un relief particulier depuis quelques années. Avec le phénomène de globalisation de l’information, on est au courant de tout tout de suite, ce qui ne peut qu’accentuer notre conscience de cette universalité de la souffrance. Depuis quelques années, nous avons pris conscience de l’impact néfaste des hommes sur l’environnement. Et avec cette récente conscience écologique, on n’a peut-être jamais mieux compris qu’aujourd’hui combien la création entière souffre.

Cette universalité de la souffrance soulignée par l’apôtre Paul peut, d’une certaine manière, nous permettre de relativiser notre souffrance (nous ne sommes pas les seuls à souffrir…). Mais elle montre aussi combien le problème de la souffrance est épineux et qu’il nous dépasse complètement.

La souffrance est une réalité anormale, scandaleuse, une marque du péché qui s’est installé dans la création belle et parfaite de Dieu. On ne peut pas s’en accommoder. La souffrance n’est pas qu’un problème personnel, c’est un problème universel. Et pour un mal universel, il faut un remède universel.

Une espérance universelle

Pour Paul, il n’y a pas que la souffrance qui est universelle. La gloire promise l’est aussi !

La façon dont Paul parle des souffrances de la création laisse entrevoir un espoir. Au verset 19 : “le monde créé par Dieu attend avec impatience le moment où Dieu montrera la gloire de ses enfants.”, au verset 22 : “tout le monde créé gémit et souffre encore maintenant, comme une femme qui accouche”. L’image de la souffrance d’une femme qui accouche contient la promesse d’une naissance…

Il y a bien une espérance pour l’ensemble de la Création ! Nous qui avons tendance à ne pas voir beaucoup plus loin que le bout de notre nez… ça fait bizarre ! L’oeuvre de salut du Christ ne concerne pas que l’humanité seule, elle a des répercussions sur la création toute entière, elle a une portée cosmique ! La création toute entière participera à la glorieuse liberté des enfants de Dieu…

Nous savons que la terre est création de Dieu. Et cela suffit à motiver notre respect de la nature. Il y a aussi le mandat de « cultiver et garder le jardin » (Gn 2.15) où trop souvent on n’a conservé que le premier verbe. Or cultiver sans garder, c’est surexploiter et détruire. Et garder sans cultiver, c’est idolâtrer.

Mais ce que dit l’apôtre Paul ici nous donne une raison supplémentaire pour prendre soin de la terre. Le fondement d’une nécessaire conscience écologique du chrétien ne vient pas seulement de la doctrine de la création mais aussi de celle de la rédemption.

Car Paul annonce aussi une espérance pour la création. Elle va participer à la liberté et la gloire des enfants de Dieu. La « naissance » promise est celle d’une nouvelle terre. Et ça, c’est de l’ordre de la rédemption. Une création rachetée, délivrée de ce qui la fait souffrir. A l’image de notre propre résurrection. C’est donc aussi dans la perspective de la nouvelle création que nous devons préserver la création actuelle. Pensons-y cet été, lors de nos ballades à la montagne ou sur la plage…

Conclusion

La force de ce texte est de nous ouvrir des horizons d’espérance inouïs, alors que parler de la souffrance devrait plutôt nous démoraliser. Sans nier la réalité pénible et scandaleuse de la souffrance, Paul affirme qu’elle n’aura pas le dernier mot, mais que nous avons une espérance de vie, de liberté et de gloire. Et en plus, cette espérance n’est pas pour nous seulement mais pour la création toute entière !

Une telle espérance change notre regard non seulement sur nos souffrances mais aussi sur le monde. Ne nous accommodons jamais de la souffrance, la nôtre ou celle qui traverse notre monde. Mais portons le regard de notre foi vers l’horizon de notre espérance. C’est le meilleur moyen d’endurer la souffrance.