Pentecôte à Samarie

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Même si nous ne fêterons l’Ascension, la montée du Christ au ciel et la Pentecôte, don du SE à l’Église, que les prochains dimanches, je vous propose de sauter quelques étapes et de lire un passage du livre des Actes. A Jérusalem, les apôtres ont déjà reçu le SE, d’une manière spectaculaire, qui a montré qu’une nouvelle ère s’ouvrait pour le peuple de Dieu. Les apôtres parlent de Jésus, et les Juifs présents dans la ville se convertissent en masse. Assez rapidement, l’église rencontre la persécution des responsables religieux juifs – les croyants se dispersent alors, et ce qui aurait dû être un coup d’arrêt pour les disciples de Jésus devient un formidable tremplin pour annoncer la bonne nouvelle du salut en JC à d’autres, toujours plus loin.

Lecture biblique: Actes 8.4-25
4 Les croyants qui sont partis de tous les côtés vont d’un endroit à l’autre, en annonçant la Bonne Nouvelle.
5 Philippe va dans une ville de Samarie, et là, il annonce le Messie.
6 D’un commun accord, les habitants viennent en foule, et ils écoutent avec attention ce qu’il dit. En effet, ils entendent parler des choses extraordinaires qu’il fait et ils les voient. 7 Des esprits mauvais sortent de nombreux malades, en poussant de grands cris, beaucoup de paralysés et d’infirmes sont guéris.
8 Alors la joie est grande dans cette ville.
9 Un homme appelé Simon habite dans cette ville depuis un certain temps. Il pratique la magie et il étonne beaucoup les gens de Samarie. Il dit qu’il est quelqu’un d’important, 10 et tous, les plus jeunes comme les plus vieux, l’écoutent avec attention. On dit : « Cet homme, c’est la puissance de Dieu, celle qu’on appelle la “Grande Puissance” ! » 11 Depuis longtemps, Simon étonne beaucoup les gens avec sa magie, c’est pourquoi ils l’écoutent avec attention. 12 Mais maintenant, Philippe leur annonce la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ et du Royaume de Dieu. Tous ceux qui le croient, des hommes et des femmes, se font baptiser. 13 Même Simon devient croyant, il se fait baptiser et il ne quitte plus Philippe. En voyant les miracles et les choses extraordinaires qui arrivent, c’est lui qui est très étonné !
14 À Jérusalem, les apôtres apprennent que les gens de Samarie ont reçu la parole de Dieu, ils leur envoient donc Pierre et Jean. 15 Quand les deux apôtres arrivent en Samarie, ils prient pour que les croyants reçoivent l’Esprit Saint. 16 En effet, l’Esprit Saint n’est encore descendu sur personne parmi eux. Ils ont seulement été baptisés au nom du Seigneur Jésus 17 Alors Pierre et Jean posent les mains sur leur tête, et ils reçoivent l’Esprit Saint.
18 Simon voit que les croyants reçoivent l’Esprit Saint quand les apôtres posent les mains sur leur tête. C’est pourquoi il offre de l’argent à Pierre et à Jean 19 en leur disant : « Donnez-moi ce pouvoir, à moi aussi. De cette façon, quand je poserai les mains sur la tête de quelqu’un, cette personne recevra l’Esprit Saint. » 20 Mais Pierre lui répond : « Que ton argent soit détruit, et toi aussi ! Tu as cru que tu pouvais acheter avec de l’argent ce que Dieu donne gratuitement. 21 Ce qui se passe ici n’est pas pour toi, tu n’as pas le droit d’y participer ! En effet, pour Dieu, ton intention est mauvaise. 22 Ce que tu as fait est mal, reconnais cela et prie le Seigneur. Il va peut-être pardonner ces mauvaises pensées. 23 Oui, je le vois, tu es rempli d’envie et prisonnier du péché ! » 24 Simon répond à Pierre et à Jean : « Priez vous-mêmes le Seigneur pour moi, alors rien de ce que vous avez dit ne pourra m’arriver. »
25 Les deux apôtres rendent témoignage en annonçant la parole du Seigneur, puis ils retournent à Jérusalem. En chemin, ils font connaître la Bonne Nouvelle dans beaucoup de villages de Samarie.

Ce récit du début de l’Eglise entremêle deux fils, deux histoires. D’un côté, nous avons le plan large, avec Philippe qui prêche aux foules, qui guérit, délivre, et fait des choses extraordinaires, les foules qui se convertissent, les apôtres qui viennent rencontrer les habitants, et repartent en traversant les villages de Samarie. Et d’un autre côté, en parallèle, Luc focalise notre attention sur un personnage en particulier, Simon, le magicien, en relief par rapport aux autres. Je suivrai ces deux fils, pour voir comment ce texte nous enseigne et nous encourage aujourd’hui.

1) La foi des Samaritains : l’Évangile ouvre les frontières
Il était une fois un breton qui croyait que Jésus donnait le salut, et le disait à qui voulait l’entendre. Persécuté par ses proches, il prit son baluchon et partit prêcher… en Normandie ! Selon votre lieu d’origine, vous pouvez remplacer par : un Aveyronnais qui va dans le Tarn, ou un Alsacien qui part en Lorraine. Plus sérieusement, par un citoyen actuel d’Israël qui irait dans la bande de Gaza. On le sait, les pires ennemis sont souvent les plus proches, les faux frères. Les Juifs et les Samaritains étaient de ces faux frères-là : issus du même peuple, les aléas de l’Histoire ont conduit une branche des Juifs à se mélanger aux peuples païens locaux, lorsqu’Israël a été déporté aux 8e et 6e s. avant JC. Non contents de s’unir à ces peuples, ceux qui sont devenus les Samaritains ont adopté certains éléments de leur religion païenne, se faisant une foi à leur sauce, avec des éléments bibliques et des éléments qui n’avaient rien à voir. Ainsi débute la longue hostilité entre Juifs « purs » et Samaritains « bâtards ».
Et voilà que Philippe prend sur lui d’aller dans une ville de Samarie prêcher le salut, comme Jésus l’avait fait quelques années plus tôt. Sa prédication impressionne, Dieu authentifie ses paroles par des miracles, et les gens croient en Jésus, et ils reçoivent le baptême. Philippe a compris que Jésus veut offrir le salut à tous, et pas seulement aux descendants d’Abraham, de Moïse et de David. En s’adressant à des « demi-Juifs », il amorce un mouvement qui s’élargira ensuite aux non-Juifs, lorsque Corneille le païen sera à son tour considéré comme un frère, en Christ. Cet épisode, c’est le début d’une Eglise sans frontières.
C’est bien pour cela que les apôtres Pierre et Jean se déplacent de Jérusalem, ravis d’entendre que d’autres ont reconnu le Christ comme leur sauveur. C’est pour cela aussi qu’ils prient pour eux de manière spécifique, demandant le Saint Esprit. Alors c’est vrai que normalement, selon les enseignements des apôtres, lorsque quelqu’un croit en Jésus, il reçoit automatiquement l’Esprit de Jésus qui le relie à Dieu et lui permet de recevoir le pardon, l’amour et la vie de Dieu, avant de demander le baptême. Mais là nous sommes dans une situation particulière, avec des questions de préjugés que vous pouvez bien imaginer… Une des façons de comprendre ce qui se passe là, c’est que Pierre et Jean ont voulu marquer le coup, en étendant leurs mains en signe de solidarité et de communion, et en priant pour le don du SE qui authentifie le fait que, oui, les Samaritains, même eux, lorsqu’ils croient en Jésus, font partie du même peuple que les autres, et ont le même statut qu’eux – la preuve : ils reçoivent l’Esprit dans les mêmes conditions spectaculaires que les Juifs à la Pentecôte. On retrouvera la même situation plus tard, avec une mini Pentecôte des païens : Juifs, non-Juifs, demi-Juifs, peu importe, car tous sont sauvés par le même Christ. Luc prend soin de noter la joie qui se répand dans la ville – quelle joie en effet pour cette communauté qui trouve en Jésus le salut mais aussi l’unité et la réconciliation.

2) Simon, ou la tentation du pouvoir
En contrepoint, Luc évoque Simon. Magicien, manifestement compétent, il a un impact extraordinaire sur les gens, à cause de ses actes impressionnants. Mais à l’arrivée de Philippe, la foule le quitte pour aller vers ce rival plus puissant, ce plus grand « magicien ». Simon, impressionné, suit le mouvement de foule, confesse sa foi, reçoit le baptême et commence à suivre Philippe partout. Lorsque Pierre et Jean arrivent et prient pour le don du Saint-Esprit aux Samaritains, Simon n’en croit pas ses yeux – il faut imaginer une manifestation visible de l’Esprit, comme les langues de feu à la Pentecôte – et demande à Pierre d’avoir lui aussi ce pouvoir de donner le SE : il reçoit en retour une volée de bois vert.
La description de Simon souligne l’importance du pouvoir chez lui : en effet, il dit de lui-même qu’il est un grand, et il accepte qu’on le considère comme une « puissance » divine. Sa demande est du même cru : le désir de posséder un pouvoir inédit, peut-être pour retrouver son ancienne influence sur les foules. Est-ce que Simon a feint de croire en Jésus pour découvrir les « secrets » des miracles chrétiens ? Ou est-ce seulement la force de l’habitude ? On ne le sait pas, mais Simon annonce tous ces chrétiens, à divers niveaux d’autorité, qui garderont dans l’Histoire cette tentation du pouvoir, et chercheront, jusqu’à aujourd’hui, à instrumentaliser la puissance de Dieu dans leur intérêt propre. Beaucoup, aujourd’hui, dans les églises ou sur internet, promettent la guérison, la délivrance, la réussite, si on se met sous leur coupe… C’est d’ailleurs là la grande différence entre Simon et Philippe : Philippe prêche Jésus, tandis que Simon se prêche lui-même, lui, la « Grande Puissance ». Pendant les vacances, nous sommes passés devant une église protestante, et sur le panneau d’informations en façade, il n’y avait que des photos du pasteur, en train de prêcher, dans des bains de foule etc. Une autre église protestante, toute proche, montrait elle une vidéo sur le sens du salut (geste deux poids deux mesures). Tous ceux qui font des miracles ou qui prêchent avec conviction ne doivent pas forcément être suivis ! C’est Jésus qui sauve ! Donc, chacun d’entre nous doit exercer son sens critique : est-ce que ce que je vois ou j’entends me rapproche de Jésus, ou du prédicateur ? La tentation du pouvoir, de l’argent, est peut-être le problème que la Bible dénonce le plus, et qui garde malheureusement toute son actualité, hors de l’église mais dedans.
Que Simon soit syncrétiste ou simplement immoral, Pierre l’avertit que sa cupidité et sa mégalomanie le détruiront. C’est un esclavage, qui retient Simon dans l’amertume. Mais à ses paroles dures, Pierre ajoute une offre : repens-toi (litt. Change de mentalité), détourne-toi de ce mal, et prie pour le pardon. C’est le message de l’Evangile : ce qui nous détruit est mauvais, mais en Dieu, nous avons une chance de salut, si nous nous tournons sincèrement vers lui.
Simon demande à Pierre de prier pour lui : est-ce par une humilité toute nouvelle, ou par désintérêt (geste mise à distance) ? Difficile à dire ! Et Luc ne nous en dira pas davantage. Tout du long, Simon sera resté ambigu, ambivalent – peut-être un exemple des dérives qui ponctuent la croissance de l’église.

Conclusion
Ce récit nous montre la joie de l’Evangile qui se répand, les frontières, personnelles et communautaires, qui tombent, l’annonce généreuse de l’Evangile à tous, l’ouverture généreuse de l’Eglise à tous. Mais il nous montre aussi les franges, les risques, et nous invite, non à la fermeture et à la méfiance mais à la sagesse et à la prudence. Etre chrétien, aimant, accueillant, ne veut pas dire être naïf ! Nous sommes donc appelés, nous aussi, à ouvrir nos portes, à annoncer largement l’Evangile, à accueillir tout aussi largement, mais en gardant comme boussole le Christ, et le Christ seul.

Une réflexion sur « Pentecôte à Samarie »

  1. Nous sommes tous disciples de Christ, témoins de Sa création, Sa Vie sur la terre(Dieu fait homme), Sa souffrance à notre place, Sa crucifixion, Sa résurrection.
    Il nous a envoyé son Esprit Saint afin de nous guider dans l’étude de Sa Parole, la méditation, nos prières(qui n’ont pas besoin d’être justifiées(sauf la demande de pardon)) et nos actions(témoigner, L’annoncer avec Son Salut pour quiconque croit(Jean 3:16).
    Il est le Centre de notre vie ici-bas.
    Nos regards sont tournés vers Lui(chant : tournez les yeux vers le Seigneur et rayonnez de joie…)
    Soyez bénis.
    Merci Florence.
    Amen.
    André LANG

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